Le potentiel pétrolier et minier du nord du Mali n’est pas étranger à l’instabilité chronique régnant dans cette zone.
La guerre en Libye y a aggravé les facteurs de la crise.
La guerre qui embrase depuis le 17 janvier le nord du pays a eu raison, la semaine dernière, de l’imparfaite et fragile démocratie malienne. La crise n’a pourtant pas commencé avec l’entrée en scène d’une nouvelle rébellion touareg emmenée par les indépendantistes du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Depuis de longues années, la périphérie désertique du pays fait figure de « zone grise » échappant au contrôle de l’État, que sillonnent les groupes islamiques armés se réclamant d’al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi). Ces vastes contrées, traditionnellement propices à la contrebande, ont aussi fait figure, ces dernières années, d’eldorado pour les narcotraficants latino-américains à la recherche de nouvelles routes de la cocaïne.
Une zone échappant au contrôle de l’État
Accusé de ne pas s’engager assez fermement dans la lutte contre Aqmi et son juteux commerce d’otages, le président Amadou Toumani Touré se justifiait en ces termes, le 8 octobre 2010, dans un entretien à l’Humanité : « Demander à notre armée de contrôler toute cette zone, avec ses modestes moyens, c’est lui demander l’impossible. Le Mali n’est pas opposé à l’option militaire. […] Mais cela ne suffira pas, si nous ne gagnons pas la bataille au sein de populations exposées aux contraintes et à la peur. […] Ces populations du Nord vivent dans une grande précarité. Les jeunes n’ont pas accès à l’éducation, ils n’ont pas de travail, pas d’avenir. […] Sans développement, les méthodes militaires, même généralisées, seront vouées à l’échec. »
Montée en puissance de l’exploration pétrolière
Depuis, les répliques de la guerre en Libye n’en finissent plus de déstabiliser une région sahélo-saharienne déjà fragile. Dès le 14 octobre 2011, Saïd Djinnit, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, s’alarmait des conséquences possibles du « retour de Maliens de Libye, parmi lesquels figurent des centaines de militaires ayant servi l’ancien régime du colonel Kadhafi ». Des hommes équipés « d’armes lourdes, de missiles, de centaines de véhicules », prévenait-il. Mais l’instabilité chronique régnant dans cette zone doit aussi sans doute beaucoup aux convoitises que suscite son potentiel pétrolier et minier. Le 6 janvier dernier, le géant pétrolier français Total signait deux nouveaux permis d’exploration pétrolière avec les autorités mauritaniennes. L’un d’entre eux concerne le bassin de Taoudéni, qui chevauche la Mauritanie, le Mali et l’Algérie. Côté malien, la prospection pétrolière, dans ce même bassin, a été confiée en novembre dernier à l’angolais Petroplus.
L’algérien Sonatrach n’est pas en reste, via sa filiale Sipex, alliée à l’italien ENI. « Il ne faut pas oublier que notre pays est sur la même structure géologique que les pays voisins qui exploitent déjà le pétrole », exposait récemment Baba Diawara, directeur général de l’Autorité pour la promotion de la recherche pétrolière au Mali (Aurep). Autre ressource potentielle du nord du Mali, l’uranium. Dès 2009, des conventions d’exploration concernant le massif montagneux de l’Adrar des Ifoghas, au nord de Kidal, étaient conclues entre Bamako et la société australienne Oklo Uranium Limited.
Reprise du travail à bamako
Fonctionnaires et salariés du secteur privé ont repris le travail hier à Bamako, après la paralysie née du coup d’État militaire du 22 mars. Politiquement isolée, confrontée à de nouvelles offensives des rebelles touareg, la junte militaire a appelé à l’arrêt des hostilités au nord et à l’ouverture de « négociations ». Son chef, Amadou Sanogo, a également exhorté les partis politiques réunis au sein d’un « front pour la sauvegarde de la démocratie » à « rejoindre »
les putschistes pour « tracer le chemin le plus court de retour
à un ordre constitutionnel ». Toujours hier, la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) se réunissait à Abidjian en sommet extraordinaire, avec à l’ordre du jour la crise malienne.
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