mardi 27 mars 2012


Les petits secrets du Coup d’Etat : Comment ATT a fui Koulouba

Tous les coups d’Etat au monde ont leurs petits secrets qu’ils ne livrent généralement que des décennies plus tard. Mais celui intervenu au Mali le 22 mars dernier n’a pas tardé à lever certains coins de voile que nous vous révélons par indiscrétion. Morceaux choisis.
 Sadio Gassama, le catalyseur
Nommé ministre de la Défense à la faveur de la trouble situation au nord, Sadio Gassama, précédemment ministre de la Sécurité et de la protection civile, a commis l’erreur de ne jamais mesurer son degré d’impopularité auprès des militaires. Or, la majorité des hommes en uniforme n’a jamais admis que ce soit lui qui soit nommé ministre de la Défense, alors que le général Gabriel Poudiougou était, de l’avis de ceux-ci, l’homme le plus compétent à ce poste. Suite donc à la grogne qui s’est amplifiée dans les casernes par rapport à la gestion chaotique des hommes et des moyens déployés sur le front au nord, Sadio s’est entêté à vouloir faire plier la troupe à ses quatre volontés. Mal lui en pris lorsque, le mardi déjà, il avait échappé à des jets de pierre dans le camp de Kati.
Au lieu d’en tirer les leçons, le généralissime Gassama monte gaillardement à Kati le mercredi. Loin de réussir à calmer la tension qui culminait déjà au paroxysme, Sadio a plutôt jeté de l’huile sur le feu. Excédés, les militaires l’ont brièvement séquestré avant de le relâcher suite à l’intervention du commandant de zone. Dans les minutes qui ont suivi, la tension est vite montée et les éléments ont décidé de demander directement des explications au chef de l’Etat lui-même et à son palais de Koulouba.
Le magasin d’armes et de munitions a été violé et les soldats se sont emparés de tous les types d’armes et de munitions pour faire cap sur Bamako. Sadio aura été donc le vrai catalyseur de ce coup d’Etat qui, en principe, devrait intervenir le jeudi.
 Comment ATT a fui Koulouba
Lourdement armés, plusieurs dizaines de militaires ont quitté le camp de Kati avec des Brdm et des lance-roquettes pour faire cap sur Bamako. La nouvelle est parvenue au bataillon de la garde présidentielle.
Une unité a été vite dépêchée sur la route principale de Kati pour freiner l’avancée des éléments. Légèrement armée, cette unité a dû se replier face à la puissance de feu des frères d’arme d’en face. Mais en attendant, au lieu de protéger en priorité le Palais et son locataire ATT, les soldats appartenant à la compagnie para, ont préféré mettre en priorité leurs familles à l’abri. Le temps de se regrouper, les Katois étaient déjà aux portes du Palais de Koulouba. C’est alors que le commandant de la compagnie Para, Abedine Guido, a envoyé quelques éléments pour une opération d’exfiltration du président ATT. Au moment où les premiers coups de feu annonçant l’assaut ont retenti, ATT était toujours dans les locaux. Les éléments de Abedine ont réussi, sous les feux nourris, à faire dégager ATT par une sortie dérobée à partir du versant de la colline de Koulouba. Ils ont dû braquer une Mercédès blanche et dégager son occupant pour acheminer ATT précipitamment au Camp Para où des dispositions avaient déjà été prises pour le mettre en totale sécurité. Mais visiblement, les hommes du capitaine Sanogo avaient reçu consigne de ne pas toucher à l’intégrité physique du président et des membres de sa famille. C’est pourquoi, ils ont soigneusement évité un affrontement armé contre le bataillon para dont plusieurs éléments ont rallié la junte.
 Après le contrôle du Palais, Sadio a été cueilli
Après avoir pris le contrôle du palais présidentiel de Koulouba, les éléments de la junte se sont aussitôt mis aux trousses du général Sadio Gassama qui a été capturé sans aucune résistance. Seulement, il aurait reçu quelques coups de certains éléments en colère.  Mais à la fin, pour éviter le pire, il a été mis à la disposition de la hiérarchie de la junte qui l’a conduit manu militari au camp de Kati. Devinez la joie de l’ex-directeur de la police, Niamé Kéita !
 Visite nocturne chez Modibo Sidibé
L’ancien Premier ministre et candidat déclaré à l’élection présidentielle du 29 avril préparait un meeting géant le 25 Mars au Stade du 26 Mars dans le cadre de sa campagne. Dans la nuit du 22 mars 2012, certains éléments de la junte lui rendent visite à sa résidence, à Faladiè, un quartier de Bamako.
Ils font des tirs de sommations pour annoncer leur présence sur les lieux. De sa chambre à coucher, Modibo entend les crépitements des armes automatiques. Il sort pour s’enquérir de la réalité. Les éléments lui font croire qu’ils étaient venus pour sa propre sécurité. Quoi de plus normal ? Modibo, même s’il n’a rien compris, se met à leur disposition. Il est poliment embarqué à bord d’une 4×4 V8 blanche. Arrivé au niveau de la Mairie de Kalaban, sur la route de l’aéroport, une crevaison survient. Les éléments s’en réfèrent au Commissariat du 11 éme arrondissement et trouvent un autre véhicule de rechange qui leur a permis de rallier Kati avec leur «otage». Mais en partant, les soldats ont abattu, à coups de feu, le gros bélier domestique de l’ancien Premier ministre.
 Le PM, Mariam Kaïdama sidibé, sauvé par son garde du corps
Contrairement à ce qui se raconte, le Premier ministre, Mariam Kaïdama Cissé et son époux n’ont pas été arrêtés par la junte militaire. En réalité, sentant la menace venir, le garde du corps a instruit à sa protégée et son époux d’embarquer dans un véhicule banalisé pour une destination plus sûre. Depuis, malgré l’insistance de la junte, le garde du corps n’a pas encore accepté de livrer ses «otages». Les gardera t-il encore longtemps ? Patience !
 Séméga redoutait le GMS
Le super ministre de l’Equipement des transports, Ahmed Diane Séméga, redoutait une seule chose lorsqu’il a été cueilli par les éléments de la junte. Grelottant de peur, Séméga a supplié ses «ravisseurs» de ne pas le conduire au Gms. Pourquoi ?
En effet, il a un antécédent avec les policiers de l’aéroport à qui il avait jeté une chaise à la figure. Ses éléments qui menaçaient même d’aller en grève pour protester contre cette agression, ont la rancune très tenace. Et Séméga n’a pas oublié. Pour protéger son intégrité physique, la junte a accédé à sa demande sans condition.
Révélés par Abdoulaye Niangaly
    du   27 mars 2012. 

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