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Nina Walet Intallou, rebelle du MNLA
MERCREDI 10 AVRIL 2013 / PAR
Libre. Indépendante. La Touareg Nina Walet Intallou est la première femme à avoir intégré le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) qui revendique l’autonomie de la région. Portrait.
Dans sa résidence à Nouakchott, où elle s’est exilée suite à l’éclatement du conflit malien, elle propose systématiquement à ses hôtes du thé, quelque chose à boire, à manger. « Elle a 50 ans mais en parait 30. Elle reste encore une très belle femme », dit en souriant l’un de ses amis Anara, un touareg originaire du Niger et du Mali.
Toujours vêtue d’un Malafa, généralement coloré, enroulé tout autour de son corps, Nina Walet Intallou est coquette, porte des bijoux, des chaussures à talons lorsqu’elle se déplace. Elle marche avec beaucoup d’allure. Ses pas sont lents. Ses gestes gracieux. Sa voix, posée, fluette, est souvent entrecoupée par des petits rires aigus, lors de ses conversations.
A première vue, contrairement à ce qu’on pourrait penser, elle n’est pas du genre à être cloîtrée chez elle pour peaufiner son foyer. Divorcée deux fois, il n’est pas rare de voir, celle qui se définit comme une femme libre et indépendante, en train de fumer une cigarette.
Liberté et indépendance
La Touareg, issue de la puissante tribu des Idnane, fille d’un infirmier-major de la gendarmerie, a toujours su s’imposer dans les milieux habituellement réservés aux hommes. Les postes de responsabilités, elle y a accédé très vite. Comme si c’était une seconde nature chez elle. Même en Côte d’Ivoire, pays où elle s’est mariée à un riche homme d’affaires avec qui elle a eu trois enfants, elle n’est pas passée inaperçue. Après son arrivée en 1984, elle y a créé, à 26 ans, une société de construction, qui employait 250 salariés. Son entreprise s’est rapidement fait un nom, à Abidjan, la capitale ivoirienne.
Ce n’est donc pas un hasard si elle est la première femme à avoir intégré en 2011, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui réclame l’autonomie de la région. « Je suis membre du directeur exécutif du MNLA pour défendre les droits de mon peuple qui souffre depuis trop longtemps ! », explique-t-elle. « Beaucoup de personnes pensent que parce que c’est un groupe armé, les femmes n’y ont pas leur place. C’est faux ! Nous avons autant d’importance que les hommes ! », clame-t-elle. D’autant que, elle, est très utile auprès des déplacés du Nord-Mali, auxquels elle rend régulièrement visite, pour répertorier ce dont ils ont besoin.
Ce Touareg du Niger reconnait bien Nina dans ses propos. « Elle ne se laisse pas marcher sur les pieds. Elle est admirable pour son courage, sa détermination et son franc-parler en toute circonstance. Elle n’a peur de rien et ose dire les vérités qui dérangent, contrairement à beaucoup d’autres femmes. » La révolte. Un sentiment qui la ronge depuis qu’elle a huit ans. Age où elle a vu de ses propres yeux les brimades que subissaient quotidiennement les siens dans toute son horreur : « J’ai vu des soldats maliens humilier des Touaregs. Ils les ont déshabillés et forcés à travailler ! C’est depuis ce jour-là, que j’ai su que je consacrerai ma vie à défendre nos droits ». Une expérience qui l’a marque profondément. La blessure est toujours saillante.
Révolte
Celle qui est née à Kidal, après avoir été élevée entre Gao et Mopti, assure pourtant qu’il n’y a jamais eu de problèmes entre les diverses populations du Mali qui vivent en harmonie depuis des siècles. Elle en sait quelque chose. Elle, qui a été élevée par le second mari de sa mère, un Peul, après le divorce de ses parents lorsqu’elle était encore enfant. « Les différentes ethnies se sont toujours bien entendues. J’ai des sœurs Peules, Bambaras, Soninkés. » Le problème du « Mali n’est pas ethnique mais politique, soutient-t-elle. Ce sont les autorités qui sont à l’origine de la crise que traverse le pays ».
« La preuve », lance-t-elle, « les soldats maliens continuent de perpétrer dans l’impunité totale des massacres contre les Touaregs et tous ceux qui ont la peau clair, y compris les Peuls. Ils ont aussi empoisonné des puits ! Après tout cela, le gouvernement malien ose dire que toutes les populations sont au même pied d’égalité au Mali ? On ne peut pas dire quelque chose et faire son contraire tout de même ! » Une chose est sûre, selon elle : « Il n’y pas d’autres voies : Bamako doit impérativement négocier avec le MNLA ! »
Seulement, Bamako refuse de s’asseoir à la table des négociations tant que la rébellion touareg ne dépose pas les armes : « Si on dépose les armes qui nous garantit qu’on aura gain de cause ? Si le gouvernement refuse de nous recevoir, nous continuerons à mener notre combat pour assurer l’avenir des populations du nord », rétorque- t-elle en colère.
« Le MNLA pas responsable »
Sa réponse est tout aussi cinglante contre ceux qui accusent le MNLA d’être responsable de la crise malienne et d’avoir ouvert la voie aux islamistes qui se sont emparés du nord du pays. « Nous ne sommes pas responsables de ce qui se passe au Mali. Nous n’avons commis aucune exaction. Le massacre d’Aghelhoc, ce n’était pas nous ! »
D’ailleurs, tient-elle à rappeler, nous sommes sur le champ de battaille aux côtés des soldats français pour chasser les islamistes de nos terres ! » Et ce sont ces « mêmes islamistes qui ont perpétré des amputations au sein de la société civile ! Ce sont eux les ennemis de Bamako pas nous ! Nous, nous avons mis en garde l’Etat malien depuis plusieurs années contre le danger que représente les groupes armés terroristes dans le pays. Il ne nous a jamais écouté ! »
Pour l’heure, Nina Walet Intallou ne dit pas qu’elle a perdu tout espoir de voir son pays d’origine sortir du gouffre dans lequel il se trouve. Mais il ne lui en reste plus beaucoup, admet-t-elle. « Le problème doit être réglé en profondeur. Sinon cela ne servira à rien. Pour que la situation change une bonne fois pour toute, il faut que les autorités du Mali prennent en considération les revendications des populations de l’Azawad ».
Toujours vêtue d’un Malafa, généralement coloré, enroulé tout autour de son corps, Nina Walet Intallou est coquette, porte des bijoux, des chaussures à talons lorsqu’elle se déplace. Elle marche avec beaucoup d’allure. Ses pas sont lents. Ses gestes gracieux. Sa voix, posée, fluette, est souvent entrecoupée par des petits rires aigus, lors de ses conversations.
A première vue, contrairement à ce qu’on pourrait penser, elle n’est pas du genre à être cloîtrée chez elle pour peaufiner son foyer. Divorcée deux fois, il n’est pas rare de voir, celle qui se définit comme une femme libre et indépendante, en train de fumer une cigarette.
Liberté et indépendance
La Touareg, issue de la puissante tribu des Idnane, fille d’un infirmier-major de la gendarmerie, a toujours su s’imposer dans les milieux habituellement réservés aux hommes. Les postes de responsabilités, elle y a accédé très vite. Comme si c’était une seconde nature chez elle. Même en Côte d’Ivoire, pays où elle s’est mariée à un riche homme d’affaires avec qui elle a eu trois enfants, elle n’est pas passée inaperçue. Après son arrivée en 1984, elle y a créé, à 26 ans, une société de construction, qui employait 250 salariés. Son entreprise s’est rapidement fait un nom, à Abidjan, la capitale ivoirienne.
Ce n’est donc pas un hasard si elle est la première femme à avoir intégré en 2011, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui réclame l’autonomie de la région. « Je suis membre du directeur exécutif du MNLA pour défendre les droits de mon peuple qui souffre depuis trop longtemps ! », explique-t-elle. « Beaucoup de personnes pensent que parce que c’est un groupe armé, les femmes n’y ont pas leur place. C’est faux ! Nous avons autant d’importance que les hommes ! », clame-t-elle. D’autant que, elle, est très utile auprès des déplacés du Nord-Mali, auxquels elle rend régulièrement visite, pour répertorier ce dont ils ont besoin.
Ce Touareg du Niger reconnait bien Nina dans ses propos. « Elle ne se laisse pas marcher sur les pieds. Elle est admirable pour son courage, sa détermination et son franc-parler en toute circonstance. Elle n’a peur de rien et ose dire les vérités qui dérangent, contrairement à beaucoup d’autres femmes. » La révolte. Un sentiment qui la ronge depuis qu’elle a huit ans. Age où elle a vu de ses propres yeux les brimades que subissaient quotidiennement les siens dans toute son horreur : « J’ai vu des soldats maliens humilier des Touaregs. Ils les ont déshabillés et forcés à travailler ! C’est depuis ce jour-là, que j’ai su que je consacrerai ma vie à défendre nos droits ». Une expérience qui l’a marque profondément. La blessure est toujours saillante.
Révolte
Celle qui est née à Kidal, après avoir été élevée entre Gao et Mopti, assure pourtant qu’il n’y a jamais eu de problèmes entre les diverses populations du Mali qui vivent en harmonie depuis des siècles. Elle en sait quelque chose. Elle, qui a été élevée par le second mari de sa mère, un Peul, après le divorce de ses parents lorsqu’elle était encore enfant. « Les différentes ethnies se sont toujours bien entendues. J’ai des sœurs Peules, Bambaras, Soninkés. » Le problème du « Mali n’est pas ethnique mais politique, soutient-t-elle. Ce sont les autorités qui sont à l’origine de la crise que traverse le pays ».
« La preuve », lance-t-elle, « les soldats maliens continuent de perpétrer dans l’impunité totale des massacres contre les Touaregs et tous ceux qui ont la peau clair, y compris les Peuls. Ils ont aussi empoisonné des puits ! Après tout cela, le gouvernement malien ose dire que toutes les populations sont au même pied d’égalité au Mali ? On ne peut pas dire quelque chose et faire son contraire tout de même ! » Une chose est sûre, selon elle : « Il n’y pas d’autres voies : Bamako doit impérativement négocier avec le MNLA ! »
Seulement, Bamako refuse de s’asseoir à la table des négociations tant que la rébellion touareg ne dépose pas les armes : « Si on dépose les armes qui nous garantit qu’on aura gain de cause ? Si le gouvernement refuse de nous recevoir, nous continuerons à mener notre combat pour assurer l’avenir des populations du nord », rétorque- t-elle en colère.
« Le MNLA pas responsable »
Sa réponse est tout aussi cinglante contre ceux qui accusent le MNLA d’être responsable de la crise malienne et d’avoir ouvert la voie aux islamistes qui se sont emparés du nord du pays. « Nous ne sommes pas responsables de ce qui se passe au Mali. Nous n’avons commis aucune exaction. Le massacre d’Aghelhoc, ce n’était pas nous ! »
D’ailleurs, tient-elle à rappeler, nous sommes sur le champ de battaille aux côtés des soldats français pour chasser les islamistes de nos terres ! » Et ce sont ces « mêmes islamistes qui ont perpétré des amputations au sein de la société civile ! Ce sont eux les ennemis de Bamako pas nous ! Nous, nous avons mis en garde l’Etat malien depuis plusieurs années contre le danger que représente les groupes armés terroristes dans le pays. Il ne nous a jamais écouté ! »
Pour l’heure, Nina Walet Intallou ne dit pas qu’elle a perdu tout espoir de voir son pays d’origine sortir du gouffre dans lequel il se trouve. Mais il ne lui en reste plus beaucoup, admet-t-elle. « Le problème doit être réglé en profondeur. Sinon cela ne servira à rien. Pour que la situation change une bonne fois pour toute, il faut que les autorités du Mali prennent en considération les revendications des populations de l’Azawad ».
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