30 janvier 2013, 11:21
Mali : la communauté touareg prise pour cible, la France réclame des observateurs internationaux
ARNAUD ROINE/ECPAD/SIPA
Alors que l'armée française est arrivée ce mercredi 30 janvier aux abords de Kidal, bastion du mouvement islamiste Ansar Dine, les opérations militaires laissent dans leur sillage une situation de grande instabilité. A Tombouctou, l'armée malienne tente de reprendre le contrôle de la ville, après le pillage de dizaines de boutiques appartenant à la communauté touareg.
«Aucune explosion ni coup de feu»
La répartition stratégique des postes de contrôle (centre-ville aux militaires maliens, faubourgs aux soldats français) a néanmoins permis de maintenir le calme la nuit dernière dans la ville située sur le fleuve Niger. «Aucune explosion ni coup de feu n’a retenti dans la nuit», constate un journaliste de l'AFP cité par Libération.
Pourtant l'apparente tranquillité semble cacher des problèmes plus profonds, comme s'en font l'écho de nombreuses ONG et reporters sur place. Mardi 29 janvier, plusieurs dizaines de commerces appartenant à des habitants d'origine touareg ont été mis à sac par une partie de la population réclamant «réparation contre l'injustice». En effet, la communauté touareg est accusée de connivence avec les islamistes. «La foule, constituée de personnes visiblement très pauvres, s'en prenait à des magasins tenus selon elle par 'des Arabes', 'des Algériens', 'des Mauritaniens', accusés d'avoir soutenu les islamistes armés liés à Al-Qaida lorsqu'ils contrôlaient la ville», rapporte le Monde.
Risque de représailles
Des soldats maliens, appuyés par des militaires français, auraient ainsi découvert des caches d'armes et d'explosifs dans certains des magasins. L’armée régulière, qui a donné une semaine aux habitants pour récupérer toutes les armes, poursuit actuellement ses opérations de sécurisation et «invite la population à l'informer à tout moment de la présence de tout suspect», précise à l'AFP le colonel malien Keyba Sangalé.
L'honneur de la France en jeu ?
Ces représailles contre la commuauté touareg font d'ores et déjà polémique à l'étranger. De nombreuses voix remettent en cause le comportement de l'armée malienne depuis le début de l'opération Serval. «A Seribala, non loin de Niono, un témoin oculaire nous a décrit l'exécution par des soldats maliens de deux civils Touareg, avant que des gens ne pillent leurs maisons», témoingne ainsi dans les colonnes du Monde Philippe Bolopion, directeur des relations avec l'ONU de Human Rights Watch. Ce dernier analyse ces évènements comme un risque pour l'honneur de la France : «Le danger ? Que l'armée française ouvre la route du Nord à des troupes maliennes assoiffées de vengeance qui commettent ou tolèrent des exactions contre des ennemis capturés ou des civils perçus comme ayant soutenu l'ennemi», explique cet ancien correspondant à l'ONU.
Réaction épidermique ou antagonisme durable au sein de la société malienne ? Beaucoup d'observateurs ne cachent leurs inquiétudes. En attendant, Paris a déjà appelé à un «déploiement rapide d'observateurs internationaux» afin de veiller «au respect des droits de l'Homme» sur place.
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