samedi 25 mai 2013

La France et les djihadistes cohabiteront-ils longtemps dans le Sahel ?


Agoravox
C’est une question que se posent le commun des Sahéliens mais également les visiteurs ou simplement les téléspectateurs lointains qui s’intéressent à l’actualité touchant à cette région du monde. C’est aussi la question qui taraude les esprits des décideurs de la CEDEAO et des bandits qui sévissent au Sahel, depuis que l’opération SERVAL les contraint à clarifier leurs liens.
C’est une question que se posent le commun des Sahéliens mais également les visiteurs ou simplement les téléspectateurs lointains qui s’intéressent à l’actualité touchant à cette région du monde. C’est aussi la question qui taraude les esprits des décideurs de la CEDEAO et des bandits qui sévissent au Sahel, depuis que par l’opération SERVAL les contraint à clarifier leurs liens.
Par la voie de leurs seigneurs de guerre, arborant comme raison une Fatwa contre ce qu’ils appellent par défaut les intérêts français, les hordes de bandits sous des idéologies de djihadistes ont lancé la guerre de guérilla dont les objectifs finaux bien qu’ambigus visent comme cible essentiels les intérêts de la France. La déclaration du Président de la République française en réplique à celle de ces djihadistes, annonce que la guerre est déclarée et une distinction claire et subtile doit être faite entre l’intervention qui a lieu au Mali et la réalité d’une nouvelle guerre, qui se fera désormais au-delà des frontières maliennes. La guerre de guérilla en cours est aussi un produit de marketing, le fameux « 2 en 1 » pour une éradication du « djihadisme- business ». Ce qui reste à déterminer est le temps car c’est lui qui expliquera les coûts croisés de cette guerre.
DU COLONEL TRINQUIER EN VUE ?
La prolongation de cette guerre malienne sous forme de la guerre de guérilla entre la France et Acqmi est circonscrite par une appellation « la guerre du sahel » dont les limites flottent comme un mirage. En effet, elles semblent tantôt englober le Tchad, tantôt les susceptibles mouvements des djihadistes donne l’impression qu’elles couvrent tous les espaces ayant un climat sahélien (Burkina, Nord Togo, Nord Bénin, Nord Nigeria) ou encore se limiter uniquement à l’ensemble de l’espace CEDEAO. Ce flottement du terrain présage les difficultés à venir mais donne également à comprendre les nouveaux enjeux politiques qui se dessinent en Afrique de l’Ouest. Les alliances tactiques ou stratégiques qui sous-entendent cette guerre traduisent clairement, combien cette guerre de guérilla en terme relative peut être longue. Mais avant d’expliquer cela rappelons :
LE SYNDROME DES OTAGES DE L’AMBASSADE AMERICAINE A TEHERAN
Ce que nous entendons par ce syndrome ce sont les comportements qui sont lier aux actes terroristes, qui sont, comme nous le savons très rarement les fruits du hasard et leur mise en œuvre ne sont jamais un secret, pour peu qu’on sait écouter et interpréter les paroles et faits des terroristes en se mettant à leur place.
Au début du mois de novembre 1980, lorsque les étudiants islamistes ont pris en otage les fonctionnaires de l’ambassade américaine à Téhéran, ce n’était pas par surprise car pendant des semaines auparavant ces étudiants s’amassaient devant l’ambassade et disaient déjà ce qu’ils projetaient de faire, parfois de manière claire à travers les gestes, parfois dans les dialectes, pourtant connues par les fonctionnaires. Ce qui avait été la faiblesse de l’ambassade était la sous-estimation du milieu qui leur était devenu hostile. Il en est de même des attentats depuis l’époque « des fous de Dieu » Bref ! Ce mode opératoire n’a pas changé fondamentalement chez les terroristes car, avant d’agir, Ils annoncent toujours leurs intentions et même de façon précise dans le but d’intimider et de semer la psychose. Aujourd’hui, ils parlent des intérêts français comme ils parlaient des intérêts américains à une certaine époque. Il s’agit de ces intérêts et non des intérêts occidentaux. Il y a certes des effets collatéraux, mais la population cible est bien définie. Mais la psychose est telle que la menace est pressentie comme générale et peut entrainer des réponses disproportionnées voire peu efficaces. Ce sont probablement ces choses qui feront que la guérilla terroristes du Sahel risque de ressembler en terme très relatif à celle d’Afghanistan.
Ainsi, si nous nous tenons à la ire des djihadistes, on peut dire qu’ils vont s’attaquer sans répit aux supposés intérêts de la France. Mais où se trouvent ces dits intérêts français dans le Sahel ? La réponse la plus évidente est le Niger, ce sombre voisin du Mali, qui par la production de son uranium pèse sur l’énergie française dans la mesure où cette production représente près de 40% de l’approvisionnement d’AREVA et fourni le 1/3 des centrales nucléaires en France. C’est une donnée essentielle qui fait du Niger un point sensible dans l’œil terroriste d’Aqmi & Co.
LES ALLIANCES TACTIQUES ET LES ALLIANCES STRATEGIQUES.
Souvent les alliances tactiques sont des moyens sur le court terme sinon des moyens qui servent à consolider les alliances stratégiques qui visent la finalité, la réalisation d’un objectif, le long terme.
La France a bien évidemment dans cette guerre de guérilla au Sahel, la capacité de réaction pour protéger ses intérêts car elle a des troupes au Mali et dispose des forces au Tchad ainsi que d’un bon relais au Cameroun. Mais, ces 2 voisins souverains du Niger, situés en Afrique centrale, ont leurs propres agendas et ne sauraient apporter un soutien continu sans exciter les velléités de leurs oppositions intérieures. Ils ne constituent donc dans cette guerre que des forces d’appoint dont l’action principale est de servir à l’intimidation locale et aux renseignements. Le rôle de ces pays est de produire un effet tentaculaire de la France en Afrique comme Aqmi aussi sait être tentaculaire en se déployant à travers les réseaux des confréries musulmanes. Aqmi le fait en ravivant les anciennes méthodes de persuasion et de suggestion qui ont fait école dans les conquêtes islamiques en Afrique noire. Le choix et l’entrée des terroristes à Tombouctou et à Gao s’est fait dans cette vue même si son interprétation politique est réduite à la visée revendicative de MNLA axée sur l’AZWAD.
Réalisme
A propos des intérêts dits français au Niger, il faut savoir qu’objectivement AREVA pèsent autant pour la France que pour le Niger et qu’il n’y a plus de limite entre les intérêts français à travers AREVA et les intérêts proprement nigériens, dans la mesure où AREVA est l’épine dorsale de la vie sociale et économique du Niger. Les arguments syndicaux et commerciaux du genre : AREVA achète l’uranium du Niger 40% moins cher que le prix du marché, n’épargneront pas une attaque des islamistes et donc des vies nigériennes. Le Niger est tenu de soutenir DISTINCTEMENT la France et AREVA et cette position n’est pas simplement une question de nuance mais de raison. Pour le Niger la France est un Etat allié mais AREVA est aussi un « Etat dans l’Etat ». La France ne peut pas intervenir directement, à la fois au Niger et au Mali sans affronter nombre de tracas au plan international, mais AREVA, face à l’état d’urgence, peut assurer le soutien logistique au Niger en faisant bonne économie des tracasseries juridico-administratives de la communauté internationale.
La France en intervenant directement et en même temps au Mali et au Niger prêtait le flanc à une opinion qui conforterait les islamistes en suscitant involontairement des sentiments anti français dans les couches populaires et pousser à la déstabilisation des régimes actuelle ce qui repousserait les projets de stabilisation des institutions et ferait perdurer le désordre. Le Niger doit, au nom de ces propres intérêts nationaux, concentrer toutes ces forces rapidement et sans ambiguïté dans la défense des sites d’AREVA et de laisser la CEDEAO dans s’occuper avec la France des pourparlers pour la mise en place des forces.
Dans la perspective actuelle où les traités bilatéraux de défense ne suffisent plus pour justifier l’intervention française, contourner les difficultés liées aux exigences internationales pour agir très vite, suppose de recourir à une force comme le MNLA, qui est, pour le moment, incontournable. Pourquoi ?
  1. Le rôle joué par le MNLA dans la défaite et la débâcle des djihadistes au Nord du Mali, n’a pas été qu’un rôle de catalyseur comme on peut le croire. Leur connaissance parfaite du terrain, des réseaux djihadistes et des leaders a servi à disloquer les stratégies d’implantation des terroristes et permis aux diverses forces d’intervention (tchadiennes et françaises de faire un boulot appréciable).
  2. Pris ensemble, les groupuscules qui composent le mouvement djihadistes dans le Sahel ont un rapport de forces militaire et humain supérieur ou égal face aux armées de certains Etats de l’ex AOF dont le Niger et le Mali, pour ne citer que ceux-là. Par ailleurs, ces deux Etats sont malheureusement endigués par les processus de mutations politiques et économiques qui donnent des arguments aux terroristes et font craindre régulièrement des soulèvements populaires.
  3. Le MNLA, sans avoir la prérogative d’un Etat, contrôle un territoire. Sa nature de mouvement rebelle est, à tout point de vue, une flexibilité dans les dispositifs d’intervention de toute nature. Un Etat peut solliciter leur concours pour agir. Le MNLA est devenue pour la circonstance un allié tactique et stratégique, car un maillon à la fois pour le Niger, la France et les djihadistes.
  4. Il est donc clair que le Niger doit avaler la couleuvre qui consiste à considérer le MNLA comme un allié et s’appuyer sur lui pour combattre les terroriste djihadistes en leur coupant la retraite. Ce real politik, va déménager dans les coulisses les relations politiques entre Bamako et Niamey mais aussi le Burkina dont l’affinité du régime avec le MNLA n’est pas méconnue. Le MNLA est devenu une pièce importante des enjeux politiques dans la guerre du Sahel.
Cette complexité situationnelle est de la politique en ce sens qu’elle place la raison au-dessus de l’infantilisme, c’est-à-dire de l’affectif. La raison est une vision, donc contrairement au sens commun, elle est en politique la chose la moins partagée que parfois, il faut comme Prométhée, savoir jouer avec les dieux pour avoir sa part de raison.
Questions réponses.
  1. La France a-t-elle peur ? Non ! même pas un peu. Elle a même l’air amusé.
  2. AREVA a-t-elle peur ? Non.
  3. Le pouvoir malien a-t-il peur ? Oui ! il tremble. Il est perturbé et c’est le bon moment de lui demander tout y compris l’AZAWAD mais les Touaregs ne sont pas Prométhée.
  4. Le Niger a-t-il peur ? Oui. Il est tétanisé par l’idée que ne se réveille des anciennes rébellions et du banditisme des Dawsak, alliés permanents du MNLA.
  5. Le MNLA a-t-il peur ? Non. Bien que serein en apparence, il est excité. En réalité, le MNLA n’est pas suffisamment étoffé. Il est détesté par les arabes et les Touaregs noirs de Gao et de Meneka qui en milieu rural lui préfère majoritairement le MUJAO.
  6. Les terroristes ont-ils peur ? Oui, car ils sont dans une nasse et leurs alliances sont volatiles. De plus en plus ils sont fragilisés par les défaites (ils n’ont plus de territoire).
Ces questions/réponses indiquent le schéma des alliances et leur caractère tactique ou stratégique. Enfin, la guerre du sahel est partie pour durer car elle est la version de la guerre afghane avec cette nuance que la guerre Afghane met en première ligne les intérêts américains et la guerre du Sahel porte au front les intérêts français. Quant à l’issue de la guerre, elle est certaine : la défaite des djihadiste mais combien de temps faut-il et pour quelle mutation ? Voilà les questions qui en valent la peine.
Khobet,http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-france-et-les-djihadistes-136356

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