BEKAY AG HAMED AHMED. Chargé de la communication du Mouvement pour la libération de l’Azawad
«Beaucoup de soldats maliens ont fui vers l’Algérie»
le 13.03.12 | 10h00 Réagissez
- Pouvons-nous connaître les circonstances dans lesquelles a eu lieu la prise de Tessalit ?
Nous avons positionné à Tessalit, une ville très proche de la frontière algérienne, en début de la journée du 11 mars. Vers 17h, nous avons donné l’assaut au camp militaire d’Amachach qui comptait plusieurs centaines de soldats, officiers ainsi que des civils, notamment des familles de militaires. Ces derniers ont préféré prendre la fuite au lieu de riposter. Ils ont abandonné le camp. Nous nous sommes accrochés avec eux, lors de la course-poursuite. Nous avons capturé douze militaires, parmi lesquels trois officiers. Beaucoup de soldats se sont égarés dans le désert parce qu’ils ne connaissent pas la région. D’autres ont pris la fuite en direction de la frontière algérienne. En tout, nous avons trente militaires en otages dont trois officiers.
- Les autorités maliennes ont affirmé hier que la prise de Tessalit par le MNLA était le fait d’un retrait tactique des militaires. Qu’en est-il au juste ?
De quelle tactique parlent-ils ? Dès qu’ils ont vu nos troupes arriver, ils ont fui dans le désert et vers la frontière algérienne. Pour nous, il s’agit d’une désertion. L’armée malienne était incapable de prendre une initiative.
- Bamako accuse le mouvement d’avoir bénéficié de l’aide d’Al Qaîda dans les attaques de ses forces armées au nord. Qu’en est-il au juste ?
Le gouvernement tente de masquer ses échecs en nous accusant d’être aidés par Al Qaîda. Il veut justifier son incapacité à faire face à nos combattants.
- Pourtant votre mouvement agit sur un terrain où évolue également Al Qaîda…
Pour l’instant, nous n’avons pas encore rencontré de terroristes. Dans nos différents communiqués, nous avons beaucoup insisté sur ce point précis. Nous ne voulons ni militaires ni terroristes sur notre territoire.
- Deux mois après le déclenchement de la rébellion, où en êtes-vous sur le terrain ?
Nous sommes sur le point de récupérer tout le territoire de l’Azawad. Il nous reste la partie frontalière avec le Burkina Faso que nous espérons prendre très prochainement. L’autodétermination de notre région est très proche. Le bilan est à ce titre significatif. Nous avons récupéré une grande quantité d’armements et capturé une trentaine de militaires.
- Mais vous avez enregistré des pertes…
Malheureusement oui. Nous comptons vingt martyrs en deux mois et des blessés légers. L’armée malienne est en train de fuir ses positions. Elle a subi de lourdes pertes dans ses rangs.
-Pensez-vous que cette revendication est acceptée par les pays limitrophes dont la majorité a refusé la partition du Mali ?
Nous ne pouvons pas revenir sur notre revendication qui émane de toute la base du mouvement et de la population de l’Azawad, constituée non pas de Touareg uniquement, mais de deux autres communautés dont les Arabes. Pour l’instant, les avis sont partagés, mais nous espérons que les pays de la région comprennent nos aspirations. Nous comptons beaucoup sur le soutien de l’Algérie, d’autant que la région de l’Azawad l’a beaucoup aidée durant sa guerre de Libération. Nous ne voulons rien d’autre que de disposer de notre territoire et de notre destinée. Il suffit de faire la route du nord à Bamako pour comprendre que nous ne partageons rien avec Bamako, ni la géographie ni le climat et encore moins les communautés ethniques. Nous voulons récupérer nos terres, rien de plus.
- Ne craignez-vous pas que cette autodétermination fasse tache d’huile et ouvre la voie à la partition de certains pays, comme c’est le cas pour la Libye, où des tribus de l’Est ont annoncé leur autonomie par rapport à Tripoli ?
Nous, nous parlons de l’Azawad et nous refusons la comparaison de notre mouvement avec ce qui se passe en Libye. Nous respectons les positions politiques des uns et des autres. Notre but est l’autodétermination de l’Azawad, qui s’étend sur 850 000 km2.
- Pourtant, c’est de ce pays que vous avez renforcé vos moyens militaires, notamment avec le retour d’anciens loyalistes d’El Gueddafi ?
Ce n’est pas vrai. Ceux qui sont revenus de Libye n’ont pas ramené des armes. Ce que nous possédons, nous l’avons pris à l’armée malienne à l’issue de nombreuses attaques. Le MNLA a été créé par les membres de la communauté de l’Azawad, et ses moyens militaires ont été acquis grâce à nos combattants qui étaient sur le terrain.
- Est-il vrai que l’organisation de Ayad d’Ag Aghaly agit sur le même terrain d’Al Qaîda ?
Ayad est en train de récupérer les jeunes Maliens enrôlés dans les rangs d’Al Qaîda. Il n’a rien à avoir avec l’extrémisme religieux. C’est un homme qui veut redonner à l’islam sunnite sa place dans la région. Les idées qu’il défend sont celles que partage une bonne partie de la population locale.
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