mercredi 29 janvier 2014

Libye: Les dessous des affrontements armés

Sécurité - Les affrontements meurtriers qui ont éclaté à Sebha, dans le sud de la Liibye, apparaissent comme une tentative des partisans de l'ancien régime de Mouammar Kadhafi de s'emparer de la capitale de la région du Fezzan plus de deux ans après la chute du régime de Kadhafi. Mais les véritables motivations des partisans de Kadhafi, tué le 20 octobre 2011 à l'issue d'un conflit armés de 8 mois, visent moins une tentative de restauration de l'ancien régime que dans la création d'un climat de confusion pour donner davantage du fil à retordre aux nouvelles autorités.

Profitant de la faiblesse du nouvel Etat qui a hérité d'une administration bureaucratique en déliquescence, notamment l'effondrement des organes de sécurité, les pro-Kadhafi mettent à profit l'insécurité pour s'emparer du sud du pays.

En décembre 2012, les autorités de transition ont décidé de fermer les frontières du sud avec quatre pays, l'Algérie, le Niger, le Tchad et le Soudan et décrété cette région zone militaire fermée en raison de la détérioration de la sécurité.

Vaste étendue désertique, le sud libyen constitue l'une des sources d'insécurité pour le gouvernement confronté à des milices puissamment armées qui n'en font qu'à leur tête.

Les nouvelles autorités qui ont échoué, plus de deux ans après la chute du régime de Kadhafi, à former une armée et une police capabales de maintenir l'ordre, font face à une crise politique sans précédent.

Le Congrès général national (CGN) la plus haute autorité législative et politique est confrontée à une grogne de la population contestant la décision de prolongation de son mandat jusqu'en décembre 2014 au lieu de février initialement.

L'échec de ma motion de censure contre le gouvernement d'Ali Zeidan accusé d'avoir échoué notamment à établir la sécurité, a exacerbé les tiraillements entre les membres du CGN au point que les islamistes ont décidé de retirer leur cinq ministres de ce cabinet.

A cette crise politique s'ajoute les problèmes de l'industrie pétrolière qui ont commencé à gangrener l'économie minée par la fermeture depuis plusieurs mois par des partisans du fédéralisme dans l'est du pays, des principaux terminaux pétroliers.

Cette situation, conjuguée avec l'insécurité et le désordre dans le pays, ont donné des signaux négatifs aux partisans de Kadhafi qui ont saisi cette opportunité pour mener des actions spectaculaires destinées à se faire une place sur l'échiquier politique du pays.

Conscients de la structure tribale sur laquelle repose la société libyenne, les partisans de l'ancien régime tentent de jouer sur les antagonismes sociaux entre tribus pour créer un climat de tension.

Historiquement, des heurts ont toujours opposés les différentes tribus libyennes pour des raisons aussi diverses que de simples bagarres, le contrôle de trafics de tout genre ou pour asseoir leurs influences.

Ces affrontements se sont accrues depuis le renversement du régime de Mouammar Kadhafi devenant de plus en plus meurtriers, attisés par l'absence des mécanisme traditionnels qui régulent les rapports entre ces tribus.

'Malgré la mise en place par les nouvelles autorités d'un conseil des Sages de la Libye (sorte de comité composé de dignitaires des tribus), les conflits inter-tribaux se sont multipliés', a indiqué l'analyste politique Abdelmonem al-Saddick.

Ainsi, les affrontements durant ces deux dernières semaines dans le sud et l'ouest de la Libye, dans lesquels sont impliqués des partisans de l'ancien régime, ont fait 154 morts et 463 blessés, selon un bilan du ministère de la Santé. 

Au sud ce sont des heurts entre les tribus des Ouled Soleiman (arabe) et Toubous libyens début janvier qui sont à l'origine de la crise, une situation dont ont profité les sympathisants de l'ancien régime pour jeter de l'huile sur le feu.

Les Toubous, qui sont des négro-africains vivant à cheval entre la Libye, le Tchad et le Niger, furent longtemps marginalisés sous le régime du dictateur Kadhafi à l'instar des minorités  Amazighs (berbères) et Touaregs.

Dans leurs villages de Ramlat Ezzilaf, Bahr Arrimal et Rebyana, en plein désert, les Toubous vivent dans le plus grand dénuement en l'absence d’infrastructures de base tels que les routes, structures sanitaires et écoles malgré les fabuleuses richesses dont regorge le pays.

Intervenant sur la Radio locale à Sebha, en réponse à la question pourquoi il ne maîtrise l'arabe, Mohamed Marzouk, un Toubou de 31 ans a répondu que l'ancien régime ne leur a appris 'que la manipulation des armes'.

'Il n'a pas construit une seule école dans nos villages en plein Sahara', a-t-il ajouté, précisant que ceux qui ont pu suivre des cours étaient obligés de se rendre a Sebha ou dans les autres grandes villes de la région.

'Nous autres qui sommes restés chez nous, nous n'avons fait que garder les troupeaux ou manipuler un fusil', a-t-il affirmé.

Depuis la nuit des temps, des rivalités ont régulièrement opposés les Toubous et Ouled Souleiman qui ont dégénéré en affrontements meurtriers faisant des centaines de morts en 2012.

Toutefois, il est reproché aux Toubous libyens d'accueillir leurs frères du Tchad et du Niger, leur accordant des facilités pour obtenir des documents d'identité libyenne profitant ainsi des richesses du pays sans en avoir le droit.

Pour Issa Tabouia, un dirigent Toubou, la solution à ces problèmes réside dans le dialogue et la réconciliation nationale, seuls instruments pacifiques capables de panser les plaies et d'assurer aux différentes composantes libyennes de vivre en parfaite harmonie.

Pana 28/01/2014

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