vendredi 1 mars 2013

Touaregs entre désespoir et résistance Silence, on tue : Les voix solitaires sous l’horizon confisqué[1].

Touaregs entre désespoir et résistance
Silence, on tue  Les voix solitaires sous l’horizon confisqué[1].
On tue de l’Amazigh-Touareg dans l’indifférence générale. Sans vergogne, les journalistes français s’adonnent à la même récurrence sur des sujets banaux et sur des pseudo-mondes où la géopolitique des salons occidentaux se mêlent et s’entremêlent avec les intérêts nucléaires, pétroliers et gaziers des multinationales.
Et le peuple touareg, alors ? Connaît pas !
Tels des prophètes de la géopolitique, les chroniqueurs et les journalistes spécialistes occidentaux en tout genre nous abreuvent matin et soir de balivernes dites « analyses scientifiques, objectives et rationnelles » de « tous les mondes », de « tous les peuples », de « toutes les causes », alors que nous attendons en vain un mot, une parole, une voix ou un doigt qui s’élève pour dire dans quelle situation ignoble et inhumaine on cantonne le peuple berbère touareg.
Si certains en parlent (fort timidement), ils n’osent jamais dire que ce peuple est berbère ! Berbère est un mot tabou dans certains mondes. Vous pouvez nommer tous les peuples, sauf le peuple berbère !
Nommer le peuple berbère remet aussitôt en cause toutes les analyses de nos grands visionnaires d’Occident et d’Orient. Et tous les problèmes changent aussitôt de dimension… Le peuple palestinien, oui ! Pourquoi pas le peuple touareg, alors ?
Un peu partout à travers le monde, des journalistes et des reporters nous informent sur des populations aux quatre coins du monde. Juste à côté de nous, à côté de la France, un peuple souffre depuis plus d’un siècle… et une omerta mondiale lui pèse dessus, l’ignore et attend qu’il disparaisse dans les méandres d’une géopolitique assassine où tous les crimes se font en toute quiétude sans que personne (pas même Stéphane Hessel qui vient de nous quitter et que nous ne pouvons plus réveiller !), n’élève le moindre petit doigt, mot, parole, article, livre pour dire non à cet ethnocide qui se prépare et dont les portes doivent être absolument refermées !
Cachons ce Berbère qui remet toutes les analyses des grands spécialistes européens en cause ! Cachons cet empêcheur d’analyser en rond et en travers un monde dont les soubresauts, les pseudo-révolutions et la pensée rétrograde font l’objet de rejet aux quatre coins du monde !
Fiers d’être Berbères ? Ô que oui ! Mais à quel prix et pour combien de sacrifices encore pour pouvoir un jour voir briller le soleil d’Allah sur ce peuple qui ne demande rien d’autre que le droit de vivre libre SUR SA TERRE.
Tout ceci avec la complicité des autres Etats occidentaux et des Etats africains.
A l’heure où tous les mondes sont à l’heure (et à la mode !) et notamment « le monde dit arabe » ; à l’heure où les éditoriaux des médias français nous ressassent les mêmes sujets, les mêmes rengaines matins et soirs, soirs et matins, on parle de tout sauf…
Du peuple berbère-amazigh Touareg. Peuple que l’on continue de tuer, de massacrer dans le silence et la complicité des Occidentaux comme des Etats africains. Le docteur Hollande avait décidé de mener la guerre aux islamistes au Mali. Mais se faisant, il a laissé l’armée malienne  s’adonner aux exactions que les Maliens et les autres Africains ont l’habitude de mener contre le peuple berbère Touareg (Lire : Touaregs, exil et résistance, du même auteur – Edisud, 1990).
Il fut une époque où l’on découpait leurs enfants à la machette ! Mais on parle de tout, de tous les peuples : Les indiens d’Amérique, les Palestiniens, les Tunisiens, les Syriens, etc. On ne parle jamais des souffrances et du génocide qui continue de se perpétrer contre le peuple amazigh Touareg.
Les complicités des Etats qui s’étaient approprié leur terre continuent et elles ne datent pas d’aujourd’hui.
Des soldats maliens auraient été rappelés car des vidéos circulant sur le Net montraient aux yeux du monde qu’ils commettaient des exactions innommables sur les populations touaregs. Ont-ils été réellement rappelés ? On nous dit aussi qu’ils seront jugés ! Qui peut nous faire croire une telle chose ?
S’ils s’étaient permis de tels exactions contre le peuple touareg, c’est que rien n’avait été fait auparavant pour les en empêcher !
L’armée d’un pays démocratique comme la France – sous le gouvernement, qui plus est, de la gauche –  doivent veiller scrupuleusement à ce que d telles outrances ne se produisent pas.
Où sont passés les reporters français et occidentaux pour montrer les exactions et les brimades que continuent de subir les enfants et les femmes touaregs de la part des Maliens ?
On a vu paraître un Paris Match dédié à la prise d’otages en Algérie quelques jours après le dénouement de celle-ci… Qu’attends donc Paris-Match (ou un autre magazine français ou occidental) pour consacrer un numéro au peuple touareg ? Montrer dans une vérité nue… que l’on continue de tuer sans plus se cacher, un peuple.
Réflexion faite, il est préférable que les Berbères ne fassent l’objet d’aucun magazine quelconque ! Pourquoi ? Il y a déjà eu quelques uns qui nous ont été consacrés. Que trouve-t-on dans ces journaux à sensation et à dominante  idéologique fort semblable à celles qui avaient court pendant les « années glorieuses de l’ethnologie coloniale ».
Nous y sommes saucissonnés sous forme de pourcentages : Ici, le journal a trouvé 10 % ; là, il en a trouvé 15 % ; là-bas, il nous fait grâce d’en étaler quelques pourcentages de plus, etc. Quel est l’objectif réel de ce charcutage ? Il ne s’agit ni plus ni plus que dire que le peuple Berbère n’existe pas en tant que tel, mais sous forme de nébuleuses éparpillées à travers un monde qui arrange tout le monde – « Le monde arabe », dans ce que le sociologue de la réification (Joseph Gabel) avait appelé « Le syndrome du globalisme ». Et oui, pour exister, le peuple berbère ne saurait l’être en toute liberté – comme tout autre peuple digne de respect et de considération – en dehors d’un monde qui lui nie toute existence. 
Un aveugle y verrait alors très claire dans le but et l’objectif visés de ces magazines qui arborent en couverture une jolie femme berbère ! Ah oui ! Nos femmes sont belles, mais notre peuple est affreux, car il connaît de clamer son droit à l’existence sans charcutage ni mensonges colportés à travers des pourcentages inventés au gré d’idéologies dominantes castratrices des libertés ! On nous cantonne encore dans les montagnes et les zones désertiques. On n’oublie que rien qu’à Paris, il y a près de 1 million de Berbères ! 
En définitive, l’objectif poursuivi par ces charognards qui utilisent les pourcentages comme s’ils NOUS  AVAIENT COMPTES ET DESCOMPTES EST EVIDENT ! Il y va de cette démarche d’une pensée unique qui  se complaît dans la facilité des idéologies dominantes ! Ces journalistes et ces écrivains ne font que conforter un monde aliénant et réifiant dans lequel, eux-mêmes ont (consciemment ou inconsciemment) du mal à trouver leur place.  Cela tient d’une démarche de dilution des Berbères. Ces soi-disant spécialistes adhèrent à cette pensée unique où   »Tout le monde – tous les mondes – s’entendent pour nier l’existence d’un autre monde   » Le Monde berbère » ! 
Revenons plus précisément sur les évènements qui ont court sur le territoire touareg, dans ce qui est appelé « Le Nord du Mali ».
Humaniste et humain, le président Hollande (que la majorité des Berbères de France avaient soutenu lors de la présidentielle) doit aider à une solution juste et équitable pour résoudre la tragédie dans laquelle est enfermé’e le peuple Touaregs.
Seule l’armée française peut empêcher ces massacres et ces exactions inhumaines que subissent les enfants, les femmes et les vieillards touaregs.
Et quand un chanteur malien fort connu, pour ne pas le nommer, s’exprime sur les ondes d’une radio française, c’est pour déclarer que ces gens-là (les Touaregs) ne sont pas sur leur terre au Mali ! C’est pourtant le même chanteur  qui dénonçait la ségrégation, voire les tueries dont sont victimes tous les nègres-blancs (ou albinos) en Afrique ! Dès que le fascisme change de camp, on n’oublie aussitôt que c’est du fascisme et on l’affabule de ce mot tant galvaudé : démocratie.
Démocratie, en Afrique ? Laissez-moi rire ! Dans le continent le plus riche de la planète qui en est le plus miséreux et le plus misérable de tous les continents, vous me parlez de démocratie ?
De cette déclaration, voici un bref préambule historique, et j’invite ce chanteur et tous les Africains et notamment les Imazighen à sa lecture :
« Dans l’Ahaggar, on a installé des groupes tels que les Chaanba, et maintenant on installe les Kounta du Mali et du Niger en leur donnant la nationalité algérienne, pour que plus tard les Touaregs n’aient plus de revendication territoriale. Par contre, on refuse la nationalité aux Touaregs Kel Adagh qui sont du côté algérien et que l’on chasse actuellement parce qu’ils risquent d’augmenter le nombre des Touaregs qui sont en Algérie. Du côté de la Libye, c’est la même stratégie : dans le sud libyen on installe un million d’Egyptiens sur le territoire touareg ; on crée des déséquilibres démographiques. Au Mali, c’est pareil. Déjà au temps colonial les Français cédaient les terres touarègues aux Songhay. Après il y a eu la redistribution des terres agraires, on a enlevé aux Touaregs des terres. Avant Gandakoy, en 1993, les Kel Séréré ont eu des problèmes. Actuellement, on passe à un stade supérieur : il faut vider de force les Touaregs de leur territoire et l’investir[2] ».
« Pour cela référence est faite notamment à un sociologue libyen, Mohamed Saïd El-Qachat – auteur d’une thèse publiée (en arabe) en 1989, sous le titre : Les Touarègs, Arabes du grand Sahara, qui développe plusieurs principes justifiant l’intégration des Touaregs à la fois dans le monde arabe et dans une structure étatique moderne : ils seraient en effet primitivement arabes et fractionnés en une multitude d’ensembles tribaux hiérarchisés. Dans cette optique, ils ne forment évidemment ni peuple, ni nation, ni même une minorité culturelle ou linguistique (leur langue, le berbère, est considérée comme un « dialecte arabe »), ils ne sauraient revendiquer ni pays, ni Etat, ni statut autonome, et ne pourraient s’affranchir de leur féodalisme primitif que dans le giron d’une formation politique jugée progressiste telle que l’incarne l’Etat libyen[3] ».
« Les forces armées « rebelles » touarègues ont toujours fait l’objet d’une entente entre les pays voisins (Libye, Niger, Mali) pour saper et briser toute velléité de résistance en s’en prenant aux populations non armées, notamment les femmes et les enfants touaregs. C’est sous la médiation pressante de l’Algérie que les « rebelles » ont du abandonner le principe de fédéralisme qu’ils revendiquent ainsi que celui du retrait de l’armée malienne hors de leur territoire[4] ».
« Le mal est venu depuis que les Français ont déchiré le tissu de notre nation » Mohammed Ali Ag Ataher Insar[5] ».
Un ami français me posait cette question : « Que peut faire l’Algérie ? »  Je lui répondis avec beaucoup de conviction : « Beaucoup, pour ne pas dire tout ! »
Car seule l’Algérie peut faire quelque chose…  à la seule condition qu’elle fasse preuve de ce courage qu’on lui a connu dans beaucoup de circonstances et de positions politiques car elle demeure gardienne de cette référence absolue : Bâtisseuse des libertés à travers  une guerre de libération où les combattants revendiquaient – à travers leurs chants patriotiques et leurs hymnes débordant de sens – leurs racines berbères ! « Debout fils d’Amazigh ! » ( Ekker a mmi-s Umazigh !)
Je parle de l’Algérie qui s’était sentie et qui s’était revendiquée, l’espace d’un match de football en Egypte où les joueurs de l’équipe nationale furent sauvagement agressés. Il fallut cet évènement greffé sur une rencontre sportive pour qu’aussitôt toute l’Algérie se découvre amazighe et berbère ! Les Algériens se découvrent tout à coup Berbères ! Quel ne fut notre bonheur, l’espace d’une coupe d’Afrique de football, d’entendre nos compatriotes arabophones s’exclamer enfin : « Nous les Kabyles ! » Comme si les Kabyles représentaient – l’espace de cet instant magique et lumineux – le peuple berbère-amazigh dans sa globalité (Touaregs compris !)
Et Sheshonq 1er – bâtisseur de la 22ème dynastie de l’ancienne Egypte – se réveille et jette un coup d’œil encourageant et sourit à cette Algérie qui, tout-à-coup, le brandit comme le plus absolu des symboles. Oui, c’est un roi amazigh qui a bâti bon nombre de pyramides !
Aujourd’hui, il ne s’agit plus pour l’Algérie de bâtir des pyramides, il y a mieux à faire : bâtir des instants de sécurité et de liberté pour une composante de son peuple berbère appelée « les Touaregs ». C’est une construction qui vaut tous les monuments de la planète ! Aux yeux de Dieu, comme aux yeux de ses créatures les plus sensées et les plus humaines, rien ne vaut la défense et la protection des enfants et des femmes d’un peuple opprimé car sans territoire sécurisé, sans Etat et sans défense.
L’Algérie s’honorerait en défendant le peuple touareg qu’elle a longtemps négligé, voire brimé. Si l’Algérie a permis la création d’une République arabe sahraouie ; elle peut également permettre la création d’une République berbère laïque touarègue !
Je rêve ! Le mot amazigh fait encore si peur ! Son peuple fait peur encore davantage ! Mais je reste persuadé qu’il viendra le jour où les pays d’Afrique du Nord, l’Algérie en tête, se revendiquera berbère, avec fierté et emphase ! Je reste persuadé que les Imazighen, comme tous les peuples autochtones, auront un jour le droit de vivre libres comme tous les autres peuples de la terre. Et nul ne pourra dire que les Algériens (et les Marocains) ne seront pas les premiers à œuvrer pour cette libération. Car il est des combats que nulle idéologie dominante et dominatrice, aliénante et réifiante ne peut indéfiniment ignorer.
Si l’idéologie prend aujourd’hui le pas sur la vérité et le droit d’être, je demeure optimiste de voir un jour les Imazighen sortir de ce tunnel pour regarder enfin le soleil que leur cache avec le tamis des idéologies dominantes.
Et oui, il est permis de rêver et de rester optimiste. Je crois en l’Algérie des lumières. Je crois mon pays capable de bousculer les rouages de la machine que gouvernent les puissances occidentales et orientales. Je crois mon pays capable encore d’étonner le monde par ses prouesses et son combat pour la liberté. En permettant au peuple touareg de vivre libre sur sa terre, des générations présentes et futures d’enfants berbères lui seront à jamais reconnaissantes !
Un grand pays ne se reconnaît que dans les défis qu’on lui croit incapable de tenir. Et je reste persuadé que l’Algérie, pays berbère de mes ancêtres, pays de Massinissa et de Jugurtha (qui sont considérés par le grand historien Charles-André Julien, comme des « rebelles partisans » contre la puissance romaine qu’ils avaient combattue) est capable de tous les défis ! De ceux-là mêmes qui vont à contre-courant de toutes les visions idéologiques saumâtres et sans originalités !
Qu’elle accorde son soutien au peuple touareg… Et le monde entier la regardera de nouveau d’un regard étonné et admiratif. « Les Berbères sont une grande nation dont Dieu prendra à jamais soins », écrivait en ce temps le grand historien Ibn Khaldoun. Je reste persuadé qu’il dit vrai que le jour des Imazighen – de cette grande nation – reviendra.
Que les Touaregs revendiquent leur autonomie sur l’Azawad – voire leur indépendance – dans la terre qui leur appartient depuis la nuit des temps, n’est que chose naturelle. Comment pouvait-il en être autrement ? Depuis de nombreuses décennies, ils sont massacrés au gré du sirocco qui souffle sur les machettes des Maliens et des Nigériens ! Je ne parle pas des geôles de Khadafi !
La terreur n’a pas arrêté avec l’assassinat de Mano Dayak. La terreur n’a pas cessé avec les déplacements et les massacres en tout genre que le peuple touareg subit depuis plus d’un demi-siècle ! Les pays africains avec la complicité du monde dit « arabe » et celle des puissances occidentales n’ont cessé d’œuvrer à la destruction – voire le génocide – pur et simple de ce peuple qui ne demande qu’une chose : vivre libre sur la terre de ses ancêtres.
Faisons un peu d’histoire, un histoire déchirante qui rappelle en touts points ce que beaucoup de journalistes, d’observateurs et de médias en tout genre aurait appelé « massacres », « tortures », « déplacements des populations » et disons-le « ethnocides », si ces adjectifs ne s’appliquaient pas au peuple amazigh Touareg !
De quelques témoignages qui n’osent pas tout dire !
(Rédaction de l’Association Tamazgha).
« Selon des sources qui se sont confiées à l’ARVRA (Association des réfugiés et victimes de la répression de l’Azawad), pour la seule journée du 18 février 2013 il a été enregistré les crimes et exactions suivants :
« Pillages et destructions de biens
Pillages de 5 maisons de Touaregs à Diré dont deux habitations de Noh Ag Attia, une habitation de Warinokh, une de Khama et une autre de Mohamed Ag Inzingui.
« Pillages et arrestations.
Par ailleurs, et toujours à Diré, dans la foulée de pillages et de casses, deux personnes à savoir Hama et Marouchet Ag Imalahit ont été arrêtées. Ils se trouvaient dans l’une des concessions pillées.


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[1] Hélène Claudot-Hawad et Hawad, Les voix solitaires sous l’horizon confisqué, Ethnies 20-21, Documents.
[2] Hélène Claudot-Hawad et Hawad, op. cit. p. 119.
[3] Op. cit. p. 41
[4] Op. cit. p. 43.
[5] Ibidem, p. 56.
http://youcefallioui.com/2013/02/28/touaregs-silence-on-tue/

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