La situation en Libye jeudi 28avril, plus d'un mois après le début de l'intervention de la coalition internationale.
Sur le terrain. Les forces fidèles au régime ont pilonné dans la nuit de mercredi à jeudi Misrata, après que le port de la ville rebelle a été sécurisé. Les forces pro-Kadhafi avaient été repoussée mardi à 40 km à l'est après des frappes de l'Otan et des combats au sol. La ville qui apparaît comme "clé" dans leur avancée vers Tripoli, reste encerclée par l'armée à l'est, au sud et à l'ouest, la seule voie de ravitaillement étant la mer.
La chaîne de télévision qatarie Al Djazira a également fait état d'accrochages jeudi entre partisans du Guide et insurgés dans la région de Tobrouk, dans l'Est proche de la frontière égyptienne.
La localité de Zentane, qui est située dans l'Ouest et se trouve aux mains de la rébellion, a également été pilonnée par des tirs de lance-roquettes à tubes multiples.
Les forces du dirigeant libyen ont également pilonné des positions rebelles dans l'ouest du pays, non loin du poste-frontière tunisien de Dehiba dont elles ont pris le contrôle, rapporte un caméraman de Reuters TV.
A Benghazi, "capitale" des insurgés, le porte-parole du Conseil national de transition (CNT, rebelle), Abdel Hafiz Ghoga, s'est ému de l'utilisation de missiles à moyenne portée Grad de fabrication russe tirés en salves le plus souvent de l'arrière de camions.
Une violente explosion a retenti à Tripoli après le survol de la capitale par des avions de l'Otan, selon une journaliste de l'AFP.
Les combats entre rebelles et pro-Kadhafi se cristallisent depuis plusieurs semaines autour de Misrata et de la région d'Al-Jabal Al-Gharbi, une zone montagneuse dans l'ouest du pays où la majorité de la population est d'origine berbère.

Sur le plan politique. Les chefs ou représentants de tribus libyennes ont affirmé leur volonté de construire une Libye "libre, démocratique et unie", sans Mouammar Kadhafi, dans une déclaration publiée mercredi par l'écrivain français Bernard-Henri Lévy, soutien actif de la rébellion. Les pays membres de l'Otan se sont mis d'accord pour installer un représentant de l'alliance à Benghazi pour nouer des contacts politiques avec l'opposition au régime, selon un responsable de l'alliance.

Sur le plan économique. Le Trésor américain a renforcé mercredi la main du CNT en autorisant la signature de contrats pétroliers avec les insurgés, qui contrôlent l'est du pays où sont situés l'essentiel des gisements.
La première cargaison de pétrole extrait des puits de l'Est libyen, soit 80.000 tonnes de brut, devait arriver ce jeudi à Singapour à bord du pétrolier "Equator".
Sur le plan humanitaire. Un bateau transportant un millier de personnes évacuées de Misrata, dont des centaines de réfugiés nigériens et un blogueur français grièvement blessé, est arrivé jeudi à Benghazi. Environ 5.000 Libyens ont passé la frontière tuniso-libyenne à Dehiba en deux jours pour fuir les combats. Selon le Croissant rouge à Misrata, le conflit a fait environ 1.500 morts, habitants et rebelles, depuis le soulèvement de la ville le 19 février. Mais il n'était pas possible de confirmer ce bilan de source indépendante. Plus de 57.000 ressortissants d'Afrique de l'ouest, en majorité des Nigériens, ont fui depuis le 13 février les violences en Libye pour le Niger voisin, a annoncé mardi l'Organisation internationale des migrations (OIM) à Niamey. Parmi ces migrants, tous arrivés par la route à bord de camions, 54.000 Nigériens ont été dénombrés et 3.200 ressortissants ouest-africains d'autres nationalités, a indiqué à la presse Mme Abibatou Wane, chef de mission de l'OIM au Niger. Seuls 3.163 Nigériens ont été rapatriés par avion depuis la Tunisie ou l'Egypte, a-t-elle précisé. Les Berbères des montagnes de l'Ouest du pays, dont le régime s'est toujours méfié, se réfugient en Tunisie. Le nombre de réfugiés libyens du côté tunisien de la frontière serait estimé à 30.000.
Sur le plan diplomatique. Une vingtaine de rois et chefs traditionnels de treize pays africains réunis jeudi à Cotonou ont réclamé l'arrêt des frappes occidentales et proposé une transition, avec Mouammar Kadhafi comme "roi" et le chef des insurgés libyen comme chef de l'exécutif.L'envoyé spécial de l'ONU pour la Libye, le Jordanien Abdel Ilah Khatib, et le chef de la diplomatie turque, Ahmet Davutoglu, ont évoqué jeudi à Ankara "la gravité de la situation". Le président américain Barack Obama a ordonné formellement le déblocage d'une aide non militaire urgente de 25 millions de dollars destinée aux rebelles. Elle pourrait comprendre des véhicules, camions-citernes, ambulances, ainsi que des équipements médicaux, des gilets pare-balles, des jumelles et des radios. Une réunion technique du groupe de contact sur la Libye, consacrée à l'aide financière au Conseil national de transition (CNT), s'est tenue mercredi à Doha, a annoncé le ministère français des Affaires étrangères. Plusieurs pays de l'Otan intervenant en Libye discutent par ailleurs avec les Etats-Unis de l'éventuelle fourniture de munitions, dont les stocks s'amenuisent après un mois d'opérations militaires, selon le Pentagone. Le président français Nicolas Sarkozy a affirmé être "optimiste" sur l'issue du conflit, mardi à Rome lors d'une conférence de presse conjointe avec le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, à l'issue d'un sommet italo-français. La Russie ne soutiendra aucune nouvelle résolution de l'ONU sur la Libye, prévoyant un recours à la force, a déclaré mardi le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. Si une nouvelle résolution mène à "une escalade de la guerre civile et prévoit un recours à la force, nous ne pourrons pas la soutenir", a-t-il déclaré. L'Italie a annoncé lundi qu'elle allait autoriser son armée de l'air à mener des frappes contre des objectifs militaires en Libye. Le ministre libyen des Affaires étrangères, Abdelati Obeïdi, s'est rendu à Addis-Abeba pour évoquer la "feuille de route" établie par l'Union africaine (UA) en vue de sortir de la crise. Obeïdi et deux représentants des insurgés libyens ont entamé des rencontres séparées avec le Conseil de sécurité et de paix de l'UA ainsi qu'avec des représentants d'organisations internationales comme l'Onu et l'Union européenne. A l'issue d'une rencontre avec les médiateurs africains mi-avril, Tripoli avait accepté cette "feuille de route" de l'UA prévoyant un cessez-le-feu immédiat. Mais les insurgés de Benghazi avaient aussitôt rejeté le plan en faisant valoir qu'il ne répondait pas à leur revendication première de voir Mouammar Kadhafi quitter le pouvoir. "C'est la première fois qu'ils (les insurgés) prennent part à une rencontre ici. Nous allons rencontrer les deux parties, l'une après l'autre", a déclaré à Reuters Ramtane Lamamra, commissaire de l'UA pour la sécurité et la paix.
(Challenges.fr