mardi 17 mars 2009

LA RÉBELLION ARMÉE S’ÉMIETTE: CHRONIQUE D’UNE IMPLOSION


Qu’est-ce qui se passe au sein du MNJ ? Quelle crise secoue ces derniers temps le mouvement des nigériens pour la justice ? C’est la question que tout le monde se pose à Agadez et même ailleurs. D’après des sources dignes de foi, des éléments et pas des moindres du MNJ ont quitté avec armes et bagages pour rejoindre le FFR dirigé par le tandem Rhissa Boula-Mohamed Aoutchiki. Et comme pour confirmer l’effritement de ce mouvement, voilà qu’un front voit le jour accouché par Aklou Sidi, Mohamed Ajidar, Issouf Ag Maha, Adamou Djibo et Goumour Bidika. Ce dernier a rejoint pour de vrai le MNJ après les honneurs de l’Etat du Niger. En effet, Il y a quelques mois, il a été reçu en fanfare par le président Tandja et le primo Seini Omar pour avoir quitté le MNJ alors que tout Agadez savait qu’il sortait de prison. Comme l’atteste son bureau provisoire le FPN : « est une organisation de la lutte armée qui vise le retour de la paix au Niger, et lequel favorise le dialogue comme moyen de régler le conflit entre autres. Et comme motif de création, le communiqué dénonce : « l’incompétence du président du MNJ Aghali Alambo à gérer le mouvement depuis déjà plusieurs mois ».

Ainsi après cette défection, il ne resterait plus dans les rangs du MNJ que Tankari, Amoumane Kalakouwa, et Gouraïdi qui jurent encore allégeance au président Aghali Alambo. L’autopsie du MNJ en déconfiture révèle à l’opinion qu’il était longtemps malade, victime d’une crise qui couvait entre Alambo et certains de ses lieutenants qui lui reprochait dès la première heure son manque d’autorité d’abord et de stratégies de combat ensuite. En effet, plusieurs cadres du MNJ attribuaient à leur chef des intentions beaucoup plus mercantilistes qu’idéologiques.

Ils lui auraient reproché par exemple de s’être enrichi sur le dos des combattants et d’entretenir des relations douteuses avec certains milieux impliqués dans les trafics en tous genres. Ces graves accusations si jamais elles se confirmaient viendraient corroborer les allégations du pouvoir de Niamey qui a toujours traité ce mouvement de mafieux. De sources proches de la capitale certifient que des enregistrements de conversations téléphoniques dans lesquelles certains membres du mouvement parlaient de tout sauf de la justice qu’ils prétendaient servir seraient dans les mains des autorités. En effet, c’est sur la base de ces enregistrements que le président Tandja conforterait sa thèse:

« que le Niger n’a affaire qu’à des trafiquants de drogue et bandits de grands chemins ». Est-ce pour se départir de cette image négative que lui a affublée le pouvoir de Niamey et que le MNJ traîne comme un boulet que le FPN a vu le jour ? Est-ce le constat amer de voir que deux ans après le déclenchement de ces hostilités, rien n’a changé pour les pauvres populations du nord. La situation n’a fait que se détériorer ! L’idéal défendu par le gros de la troupe et qui a motivé la majorité de jeunes à rejoindre le maquis à savoir la quête d’un mieux-être et d’un mieux-vivre pour les marges de ce pays n’aurait été qu’une profession de foi sacrifiée sur l’autel d’intérêts mesquins et personnels.

Juste après l’annonce de cette division, le sujet était sur toutes les lèvres à Agadez ! « C’est fini ! Il ne reste plus qu’à signer le certificat de décès du MNJ. Ils ont enfin compris qui est Aghali Alambo ! », rapportait Aboubacar, un habitant d’Agadez qui aurait côtoyé l’actuel président du MNJ quand il était encore chef d’une agence de voyages. « Même si on dit que les touaregs ne se sont jamais unis derrière un idéal, c’est étonnant que ces gens lâchent aujourd’hui Aghali Alambo qui a pourtant tout sacrifié pour eux et la communauté », regrette avec amertume un ex-rebelle du nom de Ahmad. « Avec cette hémorragie arrivée au MNJ, je pense que le seul garrot est le dépôt des armes sans aucune condition !

Ils peuvent alors rentrer à la douce dans leurs campements ! », renchérit Alimane, jardinier dans l’Aïr avant la guerre et devenu sans-emploi à Agadez! « C’est la fin de la rébellion mais disons le clairement pas du banditisme armé, il faut prendre des mesures adéquates pour protéger les populations », préconise Ama, chauffeur dans une entreprise de la place. Qu’est-ce qui va se passer avec ce coup dur infligé à Aghali Alambo ? Car nul n’ignore que Ajidar, Aklou, Houché, Akanawa, Djibo, constituent l’épine dorsale du MNJ c’est-à-dire son bras armé et Issouf Ag MAHA, l’un des plus entreprenants intellectuels de ce mouvement qui s’est fait le porte-voix de la détresse des populations du nord Niger en Europe et même au delà.

Qu’est-ce qui a pu bien se passer pour que le MNJ connaisse une telle implosion ? Est-il victime d’une infiltration mortelle ou du démon du gain facile ? On se pencherait volontiers vers la seconde hypothèse car à en croire une source autorisée, c’est la libération des derniers prisonniers, officiers militaires des forces armées nigériennes détenus par le MNJ qui serait à la base de cette brouille. De sources sûres, le président du MNJ Aghali Alambo a pratiquement « volé » les otages à l’insu des combattants et de la plupart des dirigeants du mouvement.

Il a monté l’opération avec son compère de toujours Ibrahim Bahanga qu’il représentait il y a quelques mois à Oubari en Libye lors d’une grande rencontre de tribus touarègues. Ces mêmes sources confirment qu’: « en soustrayant en toute clandestinité ces otages de leur lieu de détention pour les remettre aux Libyens, Aghali veut encaisser seul le «cadeau » de la fondation Kadhafi ! Il aurait approché dit- on, l’ex-ministre Rhissa Ag Boula pour donner une crédibilité à son « troc » et lui faciliter le contact avec la partie libyenne. Mais le commandant de guerre du FFR lui aurait opposé un niet cinglant.

Le FPN à en croire son chef Aklou Sidi est prêt à déposer les armes pour répondre à l’appel du président Tandja et du forum de paix tenu à Niamey les 25 et 26 février dernier. Questions. Le pouvoir de Niamey est-il prêt à tendre la main à ces repentis ? Le président Tandja acceptera t-il de faire la paix avec eux comme il l’a fait avec les autres combattants qui ont accepté de revenir à l’ordre républicain? Quelle sera la position du FFR dans ce schéma car nous savons de sources proches du FFR que Rhissa Boula a été aussi invité en Libye pour expliquer son refus catégorique à un dépôt d’armes sans reconnaissance officielle du gouvernement de Niamey.

Peut-il alors y avoir une paix durable au nord Niger quand on exclurait des combattants tels que Rhissa Ag Boula, Kalakouwa et Tankari ? Beaucoup de gens pensent que non ! Tant qu’il restera un seul mécontent dans les maquis, il sera vite rejoint par de nouveaux mécontents et l’on connaîtra les mêmes problèmes auxquels on s’évertuerait à proposer toujours les mêmes solutions ! Résultat ! La quiétude au nord ne connaitra jamais de REPIT. Attendons de voir les prochains jours car c’est en principe l’ambassadeur du Niger en Libye et son homologue lybien au Niger qui viendront à Niamey avec les six otages parmi lesquels le capitaine Daouda Nouhou.

Le cas du dernier otage, le jeune lieutenant Lawali est quant à lui en suspens. Les avis étant très divisés à son propos. Son tort est d’avoir mené personnellement l’assassinat de trois vieillards à Tizirzet en mai 2007. Il nous souviendra que parmi ces trois personnes se trouvait le père du chef-d’état major actuel du MNJ Amoumane Kalakouwa ! L’officier ayant reconnu cette forfaiture et des effets personnels de l’un des vieillards tués auraient même été trouvés sur lui. Même avec l’imminente libération des otages, il serait difficile de chanter pour la Paix.

Et pour cause !Sur le terrain, des accrochages ont lieu comme celui qui a opposé le 6 mars dernier une équipe d’hommes armés conduite par Goutou dont le véhicule, tombé en panne, a été surpris par une colonne de forces de défense aux environs de Mamanet. Le véhicule fut littéralement cramé par les tirs d’obus des FAN tuant du coup deux combattants?

Ecrit par Dim & David YACOUBA (AIR-INFO N°93 du 1er au 15 Mars 2009),

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