mercredi 28 avril 2010

Le sort de Bruxelles, enjeu de tous les scénarios catastrophes en Belgique

Le sort de Bruxelles, enjeu de tous les scénarios catastrophes en Belgique 
15h30 • Mis à jour le 28.04.10
Le Monde
Bruxelles Correspondant           


Le chaos politique né de la démission du gouvernement belge peut-il mettre la situation de Bruxelles en péril ? Pour beaucoup, la région-capitale sera, en tout cas, le dernier verrou à la partition du pays : la Flandre n'abandonnera pas aux francophones la vitrine internationale et le moteur économique du royaume.
Si une majorité de responsables néerlandophones évoquent désormais l'hypothèse d'une "confédération belge", c'est d'ailleurs parce qu'ils n'imaginent pas laisser cette ville - où ils sont pourtant très minoritaires - aux francophones : la capitale de ce nouvel ensemble resterait, préconisent-ils, Bruxelles, gérée paritairement par la Flandre et la Wallonie.
Pour les Bruxellois, l'enjeu est donc, aujourd'hui, de "bétonner" leur statut de troisième région, afin d'éviter le risque d'absorption par la Flandre, nous a confié le ministre-président Charles Picqué, lui même bilingue. La région centrale peut encore remédier à ce que ce socialiste francophone appelle "une dangereuse situation bipolaire qui conduirait une fracture alors irrémédiable".
Bruxelles sauveuse, in extremis, du pays ? "Il faut, en fait, savoir jusqu'où iront les Flamands et je ne sais si Bruxelles sera toujours assez forte pour éviter toutes les dérives, ajoute M. Picqué. Mais, elle sera un obstacle de taille pour ceux qui voudraient proclamer rapidement l'indépendance : une majorité de Flamands ne veut pas perdre cette ville."
Rester un "maillon fédérateur" et accepter, en quelque sorte, une évolution de la structure fédérale : voilà le programme que le leader socialiste assigne à "sa" région. Pour tenter de sauver ce pays qui, ajoute-t-il encore "n'est pas insignifiant". Parce qu'il incarne "une cohabitation de plusieurs identités et un modèle de solidarité parmi les plus performants au monde".
Pourtant il reste, admet le ministre-président, que la majorité flamande attaque désormais "les trois socles de l'unité du pays" : le respect de la minorité francophone de Flandre, les mécanismes liés à la sécurité sociale - et les transferts d'argent qu'elle engendre - et, enfin, Bruxelles, en entretenant l'ambiguïté sur son statut de région à part entière. La ville-région est, en outre, confrontée à de très graves difficultés financières, linguistiques et de fonctionnement en raison du peu d'intérêt que lui porte l'Etat fédéral, dominé par les Flamands.
Que dire alors d'une association, voire d'une fusion, avec la Wallonie si le scénario du pire finissait par s'imposer ? "Rien n'est exclu si la Flandre était prise d'une envie irrésistible de quitter l'édifice belge, déclare Charles Picqué. Mais on n'en est pas là. Pas encore... Dans l'immédiat, nous devons garantir que les concessions que nous ferions ne préfigureraient pas l'existence de frontières intangibles. Et assurer le respect des droits accordés aux francophones de Flandre."

Un dernier souci pour le ministre-président : l'image de Bruxelles auprès de la nombreuse communauté internationale présente sur son territoire. Une communauté qui ne cache pas sa perplexité. "On va traverser la tourmente", assure-t-il, rassurant. A ce stade, ce n'est d'ailleurs pas l'improbable remise en cause du statut international de la ville de Bruxelles qui l'inquiète, jure-t-il. Mais bien plutôt l'absence de consensus sur les investissements et le refinancement de la capitale, ce qui pourrait sérieusement entraver le lancement de plusieurs grands projets, notamment dans le quartier européen.

Jean-Pierre Stroobants

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