mercredi 6 mars 2013

Pauvreté, sous-développement: pourquoi les Maliens doivent se réconcilier


Pauvreté, sous-développement: pourquoi les Maliens doivent se réconcilier

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La guerre s’intensifie et la situation se complexifie au Mali avec des combats de plus en plus « violents » (dixit Jean-Yves Le Drian) dans le massif de L’Adrar des Ifoghas et la recrudescence des attentats suicides, notamment à Gao et dans la région de Kidal.
La vraie guerre aurait commencé pour paraphraser le ministre français de la défense Jean Yves Le Drian.
Pourtant, L’Etat malien et le Mouvement National de Libération de L’Azawad (MNLA) n’ont jamais été aussi loin de mener des discussions, voire d’entamer ‘une collaboration, alors que tous deux semblent avoir le même objectif: bouter les islamistes hors de la région septentrionale du Mali avec le soutien logistique et opérationnel de la France et du Tchad.
Le ministre français de la Défense déclarait il y a quelques jours que la France était « dans une situation particulière à Kidal et faisait en sorte d’avoir des relations de bonne intelligence avec les Touaregs (du MNLA ndlr) », tout en continuant à devancer l’armée malienne dans les opérations de reconquête de son intégrité territoriale.
Dans un article bien informé, Loic de La Mornais, envoyé spécial de France 2 au Mali, explique que  les  » « rebelles touaregs » ( du MNLA, ndlr) feraient bien de donner des gages » de leur sincérité à soutenir l’opération Serval.  tout comme l’Etat malien doit faire face à ses responsabilités et tenter de solutionner au plus vite les problèmes politiques au nord.
Sur ce point et selon un officier français, « la France n’a pas de position claire. La fiabilité du MNLA est très moyenne, et c’est exact qu’il y a parmi eux de vrais bandits, et même des gens d’Aqmi qui l’ont rejoint. Nous sommes coincés entre deux instrumentalisations : celle du MNLA qui veut faire croire à son rôle de chevalier blanc de la cause touareg, et celle du gouvernement de Bamako, qui ne veut pas ouvrir les yeux sur un réel problème politique au Nord-Mali.« 
Le 9 février dernier, la France se trouvait d’ailleurs au cœur des tensions entre le MNLA et Bamako après l’arrestation de quatre membres du groupe indépendantiste à Ménaka.
Mossa Ag Attaher, porte parole du groupe déclarait le lendemain dans un communiqué que « le MNLA engagera ses troupes dans une lutte sans merci contre l’armée malienne sur l’ensemble du territoire de l’Azawad sans exclure les villes déjà occupées tel Gao et Tombouctou où l’armée malienne continue de perpétuer des crimes contre les populations Azawadiennes au vu et au su de l’armée française. Le MNLA tient responsable les forces armées Françaises de toutes les exactions perpétrées par l’armée malienne qu’elles ont confortablement installée sur le territoire de l’Azawad. »
Ce communiqué a très vite été retiré du site internet du MNLA après les efforts de la France pour résoudre cette imbroglio.

Le dialogue de sourds entre le MNLA et l’Etat malien

Efforts salutaires qui n’ont pas été suivis d’initiatives concrètes de réconciliation entre Bamako et le MNLA. Les autorités du pays et le mouvement indépendantiste sont, à cause des exactions commises de part et d’autre, redevenus des ennemis « héréditaires ». Chacun se posant en victime (les uns craignant un génocideles autres les considérant comme responsables de la guerre) en développant une communication  raciste, haineuse et guerrière.
A la suite de l’émission de mandats d’arrêts internationaux par les autorités maliennes à l’encontre de plusieurs responsables  islamistes, mais aussi contre des membres du MNLA dont Bilal Ag Achérif (secrétaire général du mouvement) , le MNLA a engagé auprès de la Cour Pénale Internationale (selon un communiqué) des poursuites pour « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité » à l’encontre de  « Dioncounda Traoré, Président intérimaire du Mali, en tant que premier responsable de la République du Mali, ainsi que contre l’ensemble de son gouvernement intérimaire installé à la tête du Mali à la suite du putsch militaire de mars 2012  » .
Cette situation plus que confuse frôle le ridicule lorsque l’on sait que la priorité revendiqué par tous est le développement du pays même si les méthodes divergent.

Bamako, à proximité de la place de l'indépendance ©Kaourou Magassa
Pour l’heure, le Mouvement National de Libération de l’Azawad propose une force de paix qui consisterait à:
« mettre fin aux exactions, de l’armée malienne, à l’ombre de l’intervention française, contre les populations civiles, notamment, touarègues et arabes et de sécuriser l’ensemble des populations de la zone, consolider durablement la lutte contre les forces obscurantistes dans la zone dont l’Etat malien est le seul responsable de l’implantation depuis plus d’une dizaine d’année, garantir et sécuriser les interventions humanitaires aux populations déplacées à l’intérieur de l’Azawad, garantir et sécuriser la circulation des personnes et des biens sur toute l’étendue de l’Azawad. »
Tandis que pour Bamako, au travers de Tieman Coulibaly, ministre des Affaires étrangères,
« la Misma est une mission d’assistance au Mali. Si elle doit être transformée en force de maintien de la paix, il faut définir entre qui et qui. Maintenir la paix entre le Mali et des terroristes ? Non. Et des négociations avec des terroristes sont hors de question ». Tiébilé Dramé, ancien chef de la diplomatie du pays va également dans ce sens: ‘ Il faut s’assurer que ce ne sera pas une force d’interposition, mais que ce sera une force internationale sous drapeau onusien, pour permettre au Mali, non seulement de recouvrer l’intégrité du territoire national, mais de sécuriser le territoire national. Donc, la discussion autour du mandat est une étape importante »

La priorité pour le Mali n’est-elle pas que chacun mange à sa faim?

Rappelons qu’au delà des débats de forme, la situation est plus que critique pour les populations. Les déplacés se comptent en centaine de milliers, l’occupation du nord a fortement perturbé le commerce et la production agricole selon le Fond Monétaire International et l’indice de développement humain du pays reste cantonné dans les bas fonds des classements internationaux.
De Kayes à Kidal, de Sikasso à Gao, la grande majorité des maliens ne mangent pas à leur faim. Les populations du Mali (dans toutes leurs composantes) sont dans le même bateau, leurs donner la parole serait donc salutaire. Dans ce sens, une initiative du « collectif des élus de Mopti, Tombouctou, Gao et Kidal » déclarant essentielle de poursuivre le processus de décentralisation semble intéressante.
Quelque soit la forme (auto-détermination, décentralisation, fédéralisme), un débat entre le MNLA et l’Etat malien est plus que nécessaire. Certes, le MNLA n’est pas représentatif du peuple touareg, tout comme l’Etat ne l’est des populations vu la non implication dans le jeu politique de la majorité des Maliens, mais ces deux entités contrôlent tous deux une partie du territoire, le bon sens voudrait qu’ils composent ensemble.
Kaourou Magassa
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