mardi 14 février 2012


Libye : reportage à Tawarga, ville fantôme

En janvier 2012, six mois après la libération de Tawarga, des maisons étaient encore incendiées.
En janvier 2012, six mois après la libération de Tawarga, des maisons étaient encore incendiées.
RFI / Philippe Nadel

Par RFI
Que s’est-il passé à Tawarga ? A quarante kilomètres à l’est de Misrata, la ville comptait trente mille habitants il y a encore six mois. Depuis sa libération au terme de rudes combats par les forces rebelles, c’est une ville fantôme. Tous les Tawargas l’ont désertée et vivent désormais dans des camps de réfugiés à Tripoli et Benghazi. Ils ont abrité et pour beaucoup combattu aux côtés des forces loyales à Mouammar Kadhafi durant le siège de Misrata qui a fait des centaines de morts dont de nombreux civils. Mais les révolutionnaires ont tout fait pour rayer définitivement la ville de la carte, toutes les maisons ont été pillées, il ne reste plus rien.

Avec nos envoyés spéciaux en Libye, Philippe Nadel et Nicolas Champeaux
Dès la sortie de Misrata sur la route bordée de tamaris, les sept lettres de Tawarga ont été recouvertes de peinture blanche. Pas un bruit ici, à part le vent qui fait claquer des bâches déchirées. Des baignoires renversées gisent au milieu de la chaussée. Sur un muret encore debout un graffiti dit « clab abid », ce qui veut dire  « chiens de noirs ». Les Tawargas, des descendants d’esclaves, ont la peau foncée.

Il ne reste plus rien. La tourelle du château d’eau a été méthodiquement détruite. Les câbles électriques de l’éclairage public ont disparu. « La ville va sans doute être rasée à cause des crimes et des actes de torture que les Tawargas ont commis, jamais les Misratis ne tolèreront leur retour », raconte Abdel, venu récupérer de la ferraille.
A Misrata, la tourelle du château d’eau a été méthodiquement détruite.
RFI / Philippe Nadel
En janvier, soit six mois après la libération de Tawarga, des maisons étaient encore incendiées. Un acte de revanche que de nombreux Misratis affirment condamner, mais Mohammed, un Marocain installé depuis trente ans à Misrata, n’est pas prêt de pardonner : « Avant la révolution, j’avais des amis à Tawarga, mais ils ont fait tellement de mal à Misrata, ils ont violé des filles, ils ont fait beaucoup de mal, je ne suis pas content. »

Le chef du conseil militaire de Misrata affirme que les bâtiments de Tawarga ont simplement souffert durant la phase des combats. Le chef de la katiba, « Halbous », responsable du front-est de Misrata, nie aussi toute responsabilité pour cette destruction dont tout laisse à croire qu’elle a été planifiée, et qui va à rebours de l’esprit de réconciliation que prône le CNT

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