samedi 25 septembre 2010

Niger - Ekané un touareg de l’Aïr parle de Al-Quaïda et de la France

Niger - Ekané un touareg de l’Aïr parle de Al-Quaïda et de la France

samedi 25 septembre 2010 (15h47)
Bella Ciao
photo/rebels Touaregs


Ekané (un pseudo en Tamasheq), prend sa plume sur le site occitan-touareg pour nous donner son analyse de la situation au Niger et au Mali suite à l’assassinat de Michel Germaneau et du rapt par Aqmi des sept otages qui travaillaient chez Areva à Arlit. La démocratie et la liberté de parole n’étant pas encore à la mode à Agadez, nos amis Touareg peinent à communiquer exception faite pour ceux qui sont du côté de la soupière, anciens "rebelles" compris.
Al-Qaïda, la France et le Sahara : je t’aime, moi non plus ! La situation sécuritaire dans le grand Sahara et au sahel devient de plus en plus préoccupante non pas pour les pays qui partagent ces grands espaces, mais aussi pour l’occident et le monde en général.
La France, puissance colonisatrice, est ces derniers temps, le pays qui en paie le prix, notamment avec des enlèvements dramatiques comme celui ayant causé la mort de Michel Germaneau. L’enlèvement de ces derniers jours à Arlit dans le nord Niger de 7 cadres d’Areva est spectaculaire et montre toute la gravité de la situation.

La France se trouve confrontée à un dilemme, voire à un triple dilemme :



La souveraineté des États Sahelo-Sahariens terreau d’Al-Qaïda

Le paiement d’une rançon qui ne fera que renforcer le cycle fermé de la prise d’otages

La corruption qui fait des ces États des partenaires et d’Al-Qaïda et de la France.

Mener des opérations militaires dans ces pays supposent aux yeux de beaucoup et surtout des opinions publiques nationales que la souveraineté claironnée çà et là surtout en cette année symbolique du cinquantenaire de l’indépendance de ces ex-colonies n’est qu’un leurre.
Comment comprendraient-elles ces opinions que des États dits indépendants ne puissent pas lutter contre des groupuscules armés, alors même que certains d’entre eux avaient dit avoir à deux reprises maté des rebellions armées, notamment au Mali et au Niger. Considérer que Al-Qaïda soit plus armée et plus structurée que ces rebellions est discutable, mais il faut savoir que ces mêmes états avaient investis des fonds énormes dans l’armée pourquoi alors ne pas faire les mêmes efforts pour sauvegarder la souveraineté nationale, parce qu’après tout c’est l’économie même de ces États qui risque d’être menacée.
Et elle l’est d’ailleurs, car le Sahara dans ces États est la seule destination touristique. La France ne devait donc qu’apporter une aide en logistique et en renseignement militaire.
Que les armées de ces États prouvent pour une fois qu’elles ne sont pas capables seulement que de mater des touaregs, qu’elles maîtrisent leur terrain et qu’elles sont vraiment capables de sauvegarder leur souveraineté territoriale et qu’elles sont véritablement aguerries.
Ces pays sont capables de réussir s’ils sont capables d’accepter que dans leurs peuples respectifs, il y une communauté saharienne, un peuple qui habite ce grand Sahara et seul capable de le parcourir et de retrouver le moindre puits enseveli et ce peuple ce sont les Touaregs.
Qu’on le veuille ou non aucune opération militaire ne peut réussir sans les associer dans cet espace, aucune armée ne peut le protéger sans les associer dans les frontières entre ces pays notamment le Mali, le Niger, l’Algérie.

Une armée qui intégrerait les touaregs et qui leur donnerait comme mission de surveiller ce territoire aurait des résultats assurément meilleurs. Mais le problème est qu’au sortir de la première rébellion dans ces deux pays le Niger et le Mali, il y avait eu des intégrations qui n’avaient pas empêchée une deuxième rébellion de ces mêmes touaregs, ce qui pourrait pousser ces deux États à ne pas avoir de confiance à ceux-ci. C’est juste mais entre deux mots, il est préférable de choisir le moindre.

Le règlement de la deuxième rébellion dans ces deux pays n’a pas été bien fait, encore qu’il y a une nette différence entre la solution malienne et celle nigérienne.

Le Mali a bien accepté d’intégrer des éléments rebelles, alors que le Niger a opté pour une solution moins intéressante sous l’égide du guide libyen et à coup de dollars. Cette solution nigérienne est à notre avis catastrophique car régler un problème de cette façon n’a pas de long terme.
La preuve est que cet argent a été détourné par les dirigeants rebelles et leurs complices, laissant la majorité des jeunes combattants au chômage et capables de mener des actes de banditisme et voire susceptibles de devenir de potentiels alliés de cette même nébuleuse Al-Qaïda.
Et la France a une grande responsabilité dans l’échec du règlement de ces rebellions au Niger et au Mali car elle avait laissé le problème à la Libye qui n’a jamais trouvé de solution à une rébellion en Afrique, que par l’argent.
Le second dilemme pour la France, c’est le paiement de rançon. Payer une rançon pour la France c’est financer Al-Qaïda et le terrorisme, car ce même argent servira à alimenter les caisses d’Al-Qaïda et enlever d’autres otages. Il faudrait aussi comprendre que cet argent ne va pas seulement à Al-Qaïda mais aussi aux nombreux intermédiaires qui interviennent dans le processus de médiation pour la libération des otages : c’est un business comme tout autre où des commission sont versées au différents intervenants, notamment les notables et personnes ressources. C’est dire que ceux qui vivent de cette activité sont nombreux et tant qu’il y aura rançon, il y aura Al-Qaïda et ses prestataires dans ces États.

Donc la France est appelée à une grande prudence à ce niveau.

Le troisième et dernier dilemme enfin est la corruption généralisée dans ces États et à tous les niveaux. Ces pays sont le terrain de prédilection de malfrats de tout genre allant de trafiquants d’être humains, notamment les clandestins, aux trafiquants de drogue, d’armes et en ce moment d’occidentaux. Et ces derniers partagent justement le fauteuil en général avec des responsables politiques haut placés qui sécurisent leurs affaires.

Et dans ces conditions comment arrêter ce désordre dans des espaces aussi poreux que ceux du Sahara et du Sahel ?

Mettre donc fin à cette situation pour la France et les occidentaux passe plus par une mise au point à ces États que par des opérations militaires ou des financements de logistique. Et nous croyons savoir que seule l’Algérie a compris que ce sont ces trafics dans les États voisins qui alimentent et font durer la menace terroriste, c’est aussi l’une des raisons qui font que les organes mis en placent par ces différents États ont toujours échoué.
De récentes déclarations de l’ex-rébellion nigérienne profitant de ce rapt d’Arlit sur les ondes d’une radio étrangère et faisant un reproche tardif aux autorités françaises et nigériennes de ne pas prendre en compte leurs préoccupations ressemblent plus à du chantage qu’à une menace, car comment comprendre que c’est seulement maintenant que celle-ci parle d’un quelconque accord avec le Niger.

Les gens ne sont pourtant pas dupe, Albadé, Tandja et leurs acolytes n’ont jamais signé d’accord avec qui que ce soit, que la paix retrouvée est une paix monnayée par les dollars, les sales dollars libyens.
Ceux qui pensent que ces ex-rebelles peuvent devenir alliés d’Aqmi se trompent à notre avis car c’est méconnaître le professionnalisme et la prudence de ces derniers vis-à-vis des touaregs capables de les tromper à la moindre vue de dollars, en atteste le démantèlement du MNJ et la fin tragique de leur lutte.



Ekané, un Touareg de l’Aïr.

De : lofornier
samedi 25 septembre 2010

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