dimanche 3 février 2013

Hollande au Mali : le plus dur reste à faire



LE MONDE |
François Hollande a été accueilli par le président malien par interim, Dioncounda Traore, à son arrivée à Sévaré, samedi 2 février.
En s’envolant pour le Mali, pour une visite rendue possible par l’éviction des rebelles djihadistes des villes du nord du pays, François Hollande a sans doute songé à un cruel précédent. Le 1er mai 2003, sur le pont du porte-avions nucléaire Abraham-Lincoln, le président George Bush avait annoncé la fin des « opérations majeures » en Irak, six semaines après son invasion par les troupes américaines. Derrière le président, une banderole célébrait une « mission accomplie ». Vingt-trois jours plus tard, un décret de l’administrateur provisoire Paul Bremer entraînait la dissolution des forces armées et des services de sécurité irakiens. Une faute stratégique qui allait contribuer à plonger le pays dans un cauchemar dont il peine toujours à sortir, une décennie plus tard, et à épuiser les Etats-Unis.
Le 15 septembre 2011, après la chute de Tripoli, le président français, Nicolas Sarkozy, et le premier ministre britannique, David Cameron, s’étaient rendus à Benghazi, berceau de la rébellion contre Mouammar Kadhafi, que l’intervention franco-britannique avait sauvée du bain de sang quelques mois plus tôt. A l’époque, la Libye n’était pas sortie d’affaire. Elle ne l’est toujours pas.
Il faut s’en persuader : la mission française au Mali vient tout juste de commencer, et sur des bases rigoureusement contraires à ce qui était prévu. L’offensive des rebelles, début janvier, a contraint Paris à déployer ses soldats au sol, alors qu’il souhaitait initialement se limiter à aider une force africaine. Les opérations ont précédé un très théorique retour à l’ordre constitutionnel, dix mois après le coup d’Etat militaire du capitaine Amadou Sanogo, le 22 mars 2012. Normalisation politique qui aurait dû se conclure, au plus tard en avril, par une élection présidentielle.
La précipitation des événements est un terrible révélateur de l’état du Mali. A commencer par son armée, « groupement de fonctionnaires » vivant de trafics plus que de leur solde, selon le responsable malien Soumeylou Boubeye Maïga. Il faudra du temps avant que les troupes maliennes soient en état de défendre leur pays et de tenir tête à des rebelles qui se sont repliés sans combattre de Gao et de Tombouctou. Quant au retour à l’ordre constitutionnel, la reprise de contrôle des principales villes du Nord le rend possible sur la totalité du pays, mais les représailles imputées aux soldats maliens visant les collaborateurs présumés des djihadistes risquent de le compliquer politiquement.
D’autant que la résolution des Nations unies adoptée en décembre 2012 et qui prévoyait le déploiement de troupes africaines est catégorique sur le point à l’origine de la crise : les revendications autonomistes, sinon indépendantistes, des Touareg. Bamako est invité à mettre en place rapidement « un cadre de référence crédible »pour répondre « aux préoccupations de longue date des populations du Nord ». Les futures autorités maliennes y seront-elles prêtes ? Auront-elles un mandat en la matière ?
Par sa présence au Mali, le président français donne le coup d’envoi d’un processus incertain : la reconstruction d’un Etat. Les précédents comme l’Irak et la Libye en disent long sur l’ampleur de la tâche.
http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2013/02/02/hollande-au-mali-le-plus-dur-reste-a-faire_1826247_3232.html

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