dimanche 4 octobre 2009

Bulletin d'information n°12 de septembre 2009/Par Targuinca


Bulletin d'information n°12 de septembre 2009
Par Targuinca, samedi 3 octobre 2009 :: Bulletins d'information :: #243 :: rss
Le président Tandja consolide son pouvoir et semble déterminé à faire taire toute forme d’opposition, à l’approche des législatives du 20 octobre.

Le 22 août, une manifestation contre son régime a eu lieu devant le Parlement de Niamey ; 55 manifestants ont été incarcérés.

La Coordination des Forces pour la Démocratie et la République (CFDR), rassem- blant des partis politiques, des syndicats et des ONG opposés à l’action du président, affirme qu’une cinquantaine de ses militants sont en détention depuis plusieurs semaines.

Le militant des droits de l’homme Marou Amadou, président du FUSAD (Front Uni pour la Sauvegarde des Acquis Démocratiques) et porte-parole du FDD (Front de Défense de la Démocratie) aurait été mis en liberté provisoire, après un mois d’incarcération à la prison de haute sécurité de Koutoukalé ; mais il serait tenu de passer quotidiennement plusieurs heures par jour au poste de police ; ce qui limite considérablement ses possibilités d’action…

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’homme, programme conjoint de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) et de la Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH), appelle à intervenir de toute urgence au sujet de Marou Amadou et de Wada Maman, arrêté le 22 août (voir bulletin N°11). Wada Maman a bénéficié d’une libération provisoire, le 26 août en fin de journée, mais il reste poursuivi pour « participation à une manifestation non autorisée ». L’Observatoire demande qu’un terme soit mis à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de Wada Maman, de Marou Amadou et de tous les défenseurs nigériens des droits de l’homme.

D’après Mahamadou Issoufou, président du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (PNDS), principale force politique d’opposition au régime en place, « Mamadou Tandja veut liquider les partis et tracer un boulevard pour ses enfants (…), tous ceux qui contrarient cet objectif sont arrêtés. » M. Issoufou s’est vu interdire de quitter le Niger, la police lui a confisqué son passeport.

Une trentaine de députés du Parlement, dissous en mai par Tandja pour s’être opposé à son projet de référendum, ont été arrêtés ce mois ci, accusés de malversations financières. La plupart ont été remis en liberté provisoire. Au Niger, la liberté provisoire peut, dans les faits, se prolonger sur des années, voire des décennies. M. Tandja « veut ôter toute crédibilité à ses opposants », estime Mamane Abou, directeur du principal hebdomadaire nigérien, « Le Républicain ».

Les journalistes non plus ne sont pas épargnés. Le directeur du « Canard Déchaîné », Abdoulaye Tiémago, purge une peine de trois mois de prison pour avoir « discrédité une décision de justice » lors d’une intervention médiatique.

Le 20 septembre 2009, Ibrahim Soumana Gaoh, directeur de l’hebdomadaire indépendant « Le Témoin », a été arrêté à Niamey, suite à une plainte pour diffamation déposée par le ministre de la communication et porte-parole du gouvernement nigérien, Mohamed Ben Omar. Un article du journal « Le Témoin » avait impliqué le ministre dans une importante malversation financière à la Société Nigérienne des Télécommunications (SONITEL), entreprise d’état sous la tutelle du ministère de la communication. Deux anciens responsables de la SONITEL sont en prison depuis plusieurs mois.

Dans le Nord, l’état de « mise en garde » perdure malgré la cessation des hostilités, mais le processus de paix serait relancé et l’on pourrait espérer une reprise des activités économiques.

Le 23 février 2009 , le Rapporteur Spécial de L’ONU sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones avait envoyé au Gouvernement nigérien une lettre d’allégations concernant des informations reçues sur la situation entre le MNJ et les FAN. Ces rapports dénonçaient de nombreux abus infligés par les FAN à la population civile touarègue : exécutions extrajudiciaires, tortures… Ils évoquaient aussi la dépossession des nomades de leurs terres ancestrales, un code d’aménagement du territoire favorisant clairement une population sédentaire au détriment des peuples nomades, une absence de prise en compte des revendications des populations touarègues qui voudraient une participation accrue à l’administration de leur région et un meilleur développement qui respecterait leurs modes de vie traditionnels et leurs structures institutionnelles et administratives. Le Rapporteur de l’ONU a attiré l’attention du Gouvernement nigérien sur la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones qui stipule que les peuples autochtones ne peuvent pas être enlevés de force à leurs territoires et ont droit aux terres qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu’ils utilisent.

Le Gouvernement nigérien a répondu, en avril, que « le Niger a signé et ratifié tous les textes relatifs aux droits humains et que l’environnement institutionnel du Niger favorise le strict respect du caractère sacré de la personne humaine et la mise en œuvre des droits humains d’une manière générale. » Le gouvernement considère que les accusations de tortures et d’exécutions extrajudiciaires ne sont, pour la plupart, que « rumeurs et spéculations véhiculées par des individus cupides qui veulent transformer les questions de droits de l’homme en fonds de commerce. » Après les « prétendues exécutions », la gendarmerie n’aurait enregistré qu’une seule plainte et une déclaration de disparition.

Le Gouvernement nigérien rejette les allégations concernant la dépossession des populations touarègues de leurs terres. Selon l’article 21 de sa Constitution, « nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, sous réserve d’une juste et préalable indemnisation ». En outre, les tribunaux sont ouverts à tout citoyen s’estimant lésé.

En conclusion, le Niger est un pays dont « la stabilité et l’attachement au respect des droits humains sont universellement reconnus ».

Cette stabilité semblant remise en cause depuis quelque temps, la CEDEAO (Communauté Economique Des Etats d’Afrique de l’Ouest) a tenu, le 5 septembre, un sommet extraordinaire des dirigeants d’Afrique de l’ Ouest « afin d’examiner la situation au Niger ». Elle a également décidé la création d’un comité, composé des ministres des affaires étrangères du Nigeria, du Bénin, du Burkina Faso et de La Sierra Leone, qui devrait se rendre prochainement au Niger pour y favoriser le retour du dialogue politique.

Les populations du Nord du Niger continuent de souffrir. Après la destruction du tissu économique de la région, lors du conflit armé, elles ont subi les ravages de l’eau.

Les pluies torrentielles qui se sont abattues sur la région d’Agadez, dans la nuit du 1er au 2 septembre, ont détruit des quartiers entiers de la ville, près de 3500 maisons, laissant des milliers d’habitants sans abri. On déplore une dizaine de morts, en majorité des enfants. De nombreux animaux ont aussi été emportés par les eaux.

Pour venir en aide aux centaines de familles qui ont tout perdu, des ONG se sont mobilisées et la municipalité d’Agadez a ouvert les écoles pour héberger le plus grand nombre possible de sinistrés. Dès le 9 septembre, Targuinca a fait parvenir 6180 euros, ainsi que 2500 euros donnés par Tchinaghen et 5000 euros par Croqu’Nature. Depuis cette date, de nouveau dons nous ont été envoyés en faveur des sinistrés. Ils sont régulièrement transférés à notre association partenaire locale par le biais de Croq'Nature.

Cet argent est géré à Agadez par un comité de femmes. Pour éviter le saupoudrage, elles ont ciblé des familles ayant tout perdu et remettent à chacune d’elles 80 euros qui leur permettent de racheter un minimum d’objets pour la vie quotidienne : nattes, couvertures, vaisselle.

Le PAM distribue des vivres. La Libye, l’Algérie, le Maroc et les Etats-Unis ont envoyé des avions chargés de tentes, de couvertures et de médicaments.

L’armée nigérienne s’est cotisée pour verser de l’argent. La gendarmerie, la police, la garde républicaine et les différents ministères ont annoncé qu’ils allaient aussi faire des dons.

En brousse, les pluies ont également fait des ravages. Nous n’avons pas de bilan précis, mais, d’après nos correspondants locaux, des jardins entiers ont été détruits et certains ne sont plus qu’un lit d’oued sablonneux où l’on ne peut plus rien produire. Les eaux ont emporté du bétail ; dans certains campements, les éleveurs ont perdu tout leur cheptel. L'Ocha publie à ce sujet des rapports de situatio détaillés consultables sur le site Reliefweb .

En revanche, les pâturages abondent après la pluie ; mais la prolifération des moustiques va provoquer une forte épidémie de paludisme. Une partie des fonds envoyés par Targuinca, Tchinaghen et Croqu’Nature a donc été utilisée pour acheter un stock de nivaquine, remis à un groupe d’éleveurs en prévision de cette épidémie.

Malgré toutes ces aides, les besoins restent immenses : il reste encore beaucoup de gens à secourir, aussi bien à Agadez qu’en brousse. Les dons, si modestes soient-ils, sont toujours bienvenus : 5 euros, c’est 3250 francs CFA pour une famille démunie.

Merci à vous tous qui vous mobilisez pour soulager les souffrances des sinistrés.
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