vendredi 1 mai 2009

Tentative de prolongation du mandat présidentiel du Niger : Le forcing


Oumarou Keïta-le Républicain Niger-30-04-09
Tentative de prolongation du mandat présidentiel du Niger : Le forcing
vendredi 1er mai 2009


Le leitmotiv des tazartchistes est invariablement le même : trouver un mécanisme par lequel le président Tandja peut continuer à pré-sider à nos destinées pour trois autres années. Jamais vous ne les entendrez décliner la nature de ce fameux mécanisme. Ils ne peuvent le faire parce qu’il n’existe pas. S’agit-il de la révision de la Constitution ?

Peut-on modifier une loi fondamentale pour introduire une disposition sur la prolongation du mandat ? Non. Mieux, quand on prolonge une fois, c’est qu’on peut le faire deux, trois fois ou à l’infini.

Ce qui va créer une jurisprudence, et dé-boucher sur la monarchisation du pouvoir d’Etat. Cela n’est pas jouable en démocratie et en République, qui sont des choix souverains du peuple.
Les partisans du Tazartché ne peuvent que passer outre la Constitution, en la gelant purement et simplement pour contourner les obstacles qu’elle dresse sur leur chemin.

« Si le peuple me demande de poursuivre, je le ferais en courant », a laissé entendre le président de la République sur des chaînes internationales, en marge de la visite au Niger du président fran-çais. Le président Tandja parlait ainsi de sa disponibilité à donner un peu plus de son temps, pour faire le bonheur du peuple, pour trois années supplémentaires. La prolongation de mandat n’a nullement été prévue par la Constitution. Elle ne pourrait être possible non pas en violant la Constitution mais en la gelant. Exactement comme le font les putschistes quand ils s’emparent du pouvoir par coup d’Etat. Une telle démarche est plus insidieuse que la réforme de la Constitution elle-même.

Gouverneurs des régions, conseillers à la Présidence, éditorialistes maisons, partisans en mal d’assises populaire comme Dan Dubaï sont lâchés pour vendre les grandes oeuvres des deux mandats du bâtisseur Tandja. Ils entendent chacun convaincre le peuple du gâchis que peut représenter le départ de Tandja des affaires publiques. Il n’appartient même pas au chef de l’Etat de tirer le bilan de ses actions, mais à la postérité de juger de la qualité des avancées enregistrées à son époque.

Le leitmotiv des tazartchistes est invariablement le même : trouver un mé-canisme par lequel le président Tandja peut continuer à présider à nos destinées pour trois autres années. Jamais vous ne les entendrez décliner la nature de ce fameux mécanisme. Ils ne peuvent le faire parce qu’il n’existe pas. S’agit-il de la ré-vision de la Constitution ? Peut-on modifier une loi fondamentale pour introduire une disposition sur la prolongation du mandat ? Non. Mieux, quand on prolonge une fois, c’est qu’on peut le faire deux, trois fois ou à l’infini. Ce qui va créer une jurisprudence, et déboucher sur la monarchisation du pouvoir d’Etat. Cela n’est pas jouable en démocratie et en République, qui sont des choix souverains du peuple. Les partisans du Tazartché ne peuvent que passer outre la Constitution, en la gelant purement et simplement pour contourner les obstacles qu’elle dresse sur leur chemin.

Vont-ils passer par le référendum ? Selon l’article 49 de la Constitution, « le président de la République peut, après avis de l’Assemblée nationale et du pré-sident de la Cour constitutionnelle, soumettre au référendum tout texte qui lui parait devoir exiger la consultation directe du peuple à l’exception de toute révision

de la présente Constitution qui reste ré-gie par la procédure prévue au titre XII… ». La révision de la Constitution ne peut passer en référendum. Cette disposition a été reprise par la loi N°2004-46 du 16 juin 2004, déterminant les conditions du recours au référendum.

Les promoteurs du Tazartché n’ont que le recours à des moyens d’exception pour rendre possible leur entreprise de toutes façons antinationale. Il faut s’en tenir strictement à la Constitution et à un principe qui a fait ses preuves dans la consolidation de la démocratie : la limitation du mandat présidentiel. Pour certains observateurs, le mois de mai est capital. Il reste que si le président Tandja s’embarque définitivement dans le Tazartché, il peut risquer la poursuite devant la Haute Cour de Justice pour haute trahison. Selon l’article 118 de la Constitution, « il y a haute trahison lorsque le président de la Répu-blique a violé son serment, est reconnu auteur, coauteur ou complice de violations graves et caractérisées des droits de l’Homme, de cession frauduleuse d’une partie du territoire national, d’introduction de déchets toxiques sur le territoire national ». Le fait de ne pas respecter la Constitution est constitutif de violation de serment. Selon l’article 119 de la Constitution, « la mise en accusation du prési-dent de la République est votée par scrutin public à la majorité des deux tiers (2/ 3) des députés composant l’Assemblée nationale ». Avec 76 députés, le chef d’Etat peut être mis en accusation.
Les réactions de désapprobation fusent

Le Mouvement citoyen a appelé au respect scrupuleux de la Constitution. Par conséquent, il ne peut être question de Tazartché. Même lecture du Front uni pour la sauvegarde des acquis démocratiques (Fusad) et de l’Association nigérienne de lutte contre la corruption (ANLC) qui rappellent que la prolongation du mandat est synonyme de violation du serment du président de la République.

Quant au parti nigérien pour la démo-cratie et le socialisme (PNDS Tarayya), reveillé d’un long sommeil, envisage des Journées anti Tazartché (JAT), le 9 mai prochain sur l’ensemble du pays. Elles seraient marquées par des manifestations de rue pour montrer l’hostilité des militants à toute prolongation du mandat. Dans les rangs du CDS, le respect de la Constitution est affirmé clairement.

Avant même que son projet de prolongation se concrétise, Tandja doit gérer la réprobation d’une importante frange de nigériens. Et c’est cela le plus dur. Le plus important, c’est ce que la postérité va retenir de lui : le résident qui a démocratiquement quitté le pouvoir ou celui qui a basculé son pays dans
l’instabilité ?

Oumarou Keïta
Republicain/Niger

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