lundi 4 mai 2009

Depuis le Niger, Areva réfléchit à son avenir


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Energie
Depuis le Niger, Areva réfléchit à son avenir
04/05/2009


Le géant français du nucléaire a lancé la construction du complexe minier d'Imouraren, au Niger, qui deviendra son plus grand site d'extraction d'uranium.
Depuis le Niger, Areva réfléchit à son avenir Le président de la République du Niger, Mamadou Tandja, a posé ce lundi la première pierre du complexe minier uranifère d'Imouraren. La cérémonie s'est déroulée en présence d'Alain Joyandet, secrétaire d'Etat français chargé de la Coopération et de la Francophonie, et d'Anne Lauvergeon, présidente du directoire d'Areva. Le géant atomique français met ainsi la main sur une ressource stratégique dans le cadre du renouveau de l'énergie nucléaire, l'uranium servant à fabriquer le combustible des centrales.


Le site d'Imouraren va recevoir un investissement initial de 1,2 milliard d'euros. Son exploitation devrait entraîner la création de près de 1 400 emplois directs, selon ses promoteurs. A terme, la production du site devrait atteindre 5 000 tonnes d'oxyde d'uranium par an, ce qui ferait d'Imouraren la deuxième mine à ciel ouvert du monde et la plus importante d'Afrique. Le Niger pourrait ainsi, en doublant sa production, devenir le numéro 2 mondial, affirme le communiqué d'Areva. En réalité, la réalisation des projets Cigar Lake au Canada, Olympic Dam en Australie et les ambitions du Kazakhstan devraient plutôt lui permettre d'accéder au 4e rang. Ses réserves laissent espérer une durée de vie de 35 ans.

« Avec le lancement de la construction des infrastructures minières d'Imouraren, Areva renforce un partenariat historique et solidaire qui lie le groupe au Niger depuis plus de quarante ans », s'est félicitée Anne Lauvergeon. Le groupe va consacrer 6 millions d'euros par an pendant les cinq prochaines années pour participer au développement socio-économique du pays « dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la formation, des transports et de l'accès à l'eau et à l'énergie des populations locales ». Si Areva insiste sur ce point, c'est parce que son activité sur place est mise en cause par des ONG. Ainsi, des mesures de la Criirad réalisées en 2004 et 2005 montrent que les eaux distribuées dans la ville minière d'Arlit où opère Areva ne sont pas aux normes de potabilité. Selon la Criirad encore, d'énormes masses de déchets radioactifs, dits improprement « stériles », et des boues radioactives générant des poussières et des gaz comme le radon sont laissées à l'air libre. La population a même accès à des ferrailles contaminées, l'exposant ainsi directement à la radioactivité.

Cette inauguration survient alors qu'Areva est en pleine réflexion sur sa restructuration capitalistique. A peine Jean-Cyril Spinetta était-il confirmé à la tête du conseil de surveillance que le groupe nucléaire lançait une procédure d'arbitrage auprès de la Chambre de commerce internationale contre Siemens, son associé dans Areva NP (la branche réacteurs du groupe) en partance pour la concurrence russe. Début mars, l'Allemand avait annoncé rejoindre Rosatom, se mettant « en rupture de ses obligations contractuelles », selon Areva. Réfutant d'avoir porté atteinte au contrat, Siemens entend déposer une demande de rejet de la procédure d'arbitrage. Et maintient son rapprochement avec Rosatom, dans l'esprit du protocole d'accord qui jette les bases d'une société commune où le russe aura 50 % plus une action.

A travers cette saisine, qui constitue un préliminaire à une démarche juridique, Anne Lauvergeon, PDG d'Areva, entend faire valoir son droit à obtenir une décote sur les 34 % de parts de Siemens dans Areva NP si jamais elle devait les racheter. Leur accord de coentreprise de 2001, qui scellait une alliance jusqu'en 2012 avec clause de non-concurrence jusqu'en 2020, spécifie que cette décote s'élève à 40 %. Sans cette décote, le prix à payer atteint 2 milliards d'euros.

En parallèle, Areva étudie - à contrecœur - la cession d'une autre de ses divisions, T&D (transmission et distribution), vente qui lui rapporterait entre 3 et 5 milliards d'euros, selon les analystes. Cette activité retournera-t-elle chez son propriétaire d'origine, Alstom, qui en a été dépossédé en 2004, à la demande de Bruxelles, lorsque le gouvernement l'avait sauvé de la banqueroute ? Sollicité pour recapitaliser le groupe nucléaire, l'Etat actionnaire a demandé d'étudier cette alternative d'ici trois semaines. Mais même pour 4 milliards, Anne Lauvergeon s'oppose à une telle cession, qui la priverait de 40 % de son chiffre d'affaires. La patronne d'Areva a toujours préféré des cessions d'actifs non stratégiques. T&D a rapporté 5,065 milliards d'euros en 2008, 17 % de plus qu'en 2007. D'autres repreneurs potentiels se montrent intéressés par T&D, comme Schneider Electric ou GE Energy.

Tous ces mouvements de capitaux, probables ou avérés, surviennent dans un contexte où Areva, très endetté, doit financer de lourds investissements. Le rachat des parts de Siemens dans Areva NP pèsera beaucoup, mais il faut aussi prendre en compte les provisions liées au retard du chantier du premier réacteur EPR, celui d'Olkiluoto en Finlande. Au total, les besoins d'argent sont évalués à 3 milliards d'euros au moins. Un montant que la vente d'actifs non stratégiques ne suffirait pas à couvrir. La piste de l'augmentation de capital est toujours à l'étude, qu'elle prenne la forme d'un renflouement d'Etat, de l'émission d'obligations ou de l'injection de fonds étrangers, en l'occurrence du Moyen-Orient.

Areva a actuellement sur le feu plusieurs contrats avec des électriciens clients de l'EPR. En Finlande, donc, mais aussi aux Etats-Unis, en Chine et, à un stade moins avancé, aux Emirats arabes unis, en Inde, en Italie et en Grande-Bretagne. Sans oublier la France, avec un premier chantier commandé par EdF à Flamanville (livraison 2012) et un second en projet à Penly (livraison 2017). L'EPR de Penly sera porté par EdF (50 % plus une action), escorté par GdF-Suez (33,3 % plus une action) qui pourra en rétrocéder une partie à Total. Les 16,66 % restant devraient aller dans des mains italiennes (Enel) et allemandes (RWE, E.ON).

Daniel Krajka et Guillaume Maincent

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