jeudi 14 mai 2009

Niger : Rébellion - La realpolitik de Tandja


Allafrica / L’observateur 12-05-09
Niger : Rébellion - La realpolitik de Tandja
jeudi 14 mai 2009


A l’instar du Mali, le Niger est-il en voie de règlement de son conflit touareg au nord du pays ? Depuis quelques mois, en effet, sous l’égide de la Libye, des négociations sont en cours pour que les rebelles déposent les armes et fument le calumet de la paix avec le gouvernement nigérien. Cette médiation libyenne semble avoir produit les effets escomptés, puisque plusieurs prisonniers, essentiellement des militaires, ont été libérés par la rébellion.

Ce dégel du climat, naguère électrique, a permis au président Tandja de recevoir, pour la première fois, les rebelles touaregs, à qui il a demandé de déposer les armes en échange d’une amnistie. Les discussions se poursuivent entre les deux parties en vue d’un désarmement total des combattants du Nord, qui réclament une plus grande part pour les populations locales des bénéfices tirés de l’uranium.

Signe des temps, l’homme fort de Niamey, qui a toujours considéré les rebelles comme des bandits et des trafiquants de drogue et donc avec lesquels il ne faut nullement composer, revient à de meilleurs sentiments, en tendant la main à ses « bandits armés » après les appels itératifs de quelques médiateurs qui avaient proposé leurs bons offices pour le règlement pacifique de cette situation de ni guerre ni paix dans laquelle végétait depuis le Niger. Mais qu’est-ce qui a pu peser en faveur du fléchissement et du changement de ton du président Tandja ? A y voir de près, le contexte économique et socio-politique actuel du pays impose au chef suprême des armées une nouvelle tactique pour rester seul maître à bord du bâteau battant pavillon Niger.

En effet, en janvier dernier, le gouvernement de ce pays a signé avec le groupe nucléaire français, Areva, un contrat d’exploitation des mines d’uranium d’Imouraren, qui va générer d’importantes recettes pour l’Etat. Rarement, en effet, le Niger verra ses caisses s’alimenter d’une si consistante manne financière. Hormis l’uranium, il y a le pétrole, découvert à profusion et dont l’exploitation ne semble plus être qu’une question de mois.

Un véritable trésor qui, bien géré, permettra d’investir dans de nombreux secteurs sociaux de base et de créer des milliers d’emplois. Ainsi, le quotidien des Nigériens pourrait s’améliorer, et le rang peu honorable (174e/177) dans le classement du PNUD selon l’IDH qu’occupe ce vaste Etat connaîtrait un bond en avant.

Mais, pour profiter véritablement des retombées de cette ressource du sous-sol, il est d’une nécessité impérieuse de faire taire les armes et de nouer des relations pacifiques et durables avec les ennemis d’hier, car aucun développement n’est possible dans un contexte de troubles permanents et de guerre larvée. S’il réussit ce coup, Mamadou Tandja réduira du même coup le nombre de foyers incandescents qu’il devrait gérer.

En effet, en affichant une volonté farouche de rester skoctché à son fauteuil présidentiel au moyen de son projet référendaire, le président nigérien sait mieux que quiconque que le front social risque de s’embraser dans la capitale et à l’intérieur du pays avec ces partis politiques de l’opposition et la société civile qui se mobilisent pour lui barrer la route. Pour pouvoir régner rondement durant les trois prochaines années sur ce futur émirat qu’est le pays de Seyni Kountché, Tandja, en fin stratège, sait qu’il faut résoudre cette équation touarègue.

Et un accord de paix suivi d’un processus de désarmement arrangerait bien ses affaires, et il n’aurait désormais en face que seulement les marcheurs aux mains nues, qu’on peut disperser à coups de gaz lacrymogène et de matraques.

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