TESHUMAR.BE est dedié à la CULTURE du peuple touareg? de ses voisins, et du monde. Ce blog, donne un aperçu de l actualité Sahelo-Saharienne. Photo : Avec Jeremie Reichenbach lors du Tournage du film documentaire : « Les guitares de la résistance Touaregue », à la mythique montée de SALUT-HAW-HAW, dans le Tassili n’Ajjer-Djanet- Algérie. 2004. Photo de Céline Pagny-Ghemari. – à Welcome To Tassili N'ajjer.
lundi 6 avril 2009
Les dessous de la Françafrique : Patrick Pesnot décortique le Sarkotour dans les deux Congo et au Niger
Maliweb / Farafinamag 06-05-2009
Les dessous de la Françafrique : Patrick Pesnot décortique le Sarkotour dans les deux Congo et au Niger
lundi 6 avril 2009
Depuis plus de 10 ans le journaliste Patrick Pesnot anime sur France Inter l’émission qui révèle les secrets d’espionnage, des coups tordus de la diplomatie intrusive dans les affaires intérieures. Il obtient ses informations de première main d’un certain Monsieur X qu’il est peut-être seul à connaître et avec qui il vient de publier « Les dessous de la Françafrique », un livre qui décrypte les relations ambiguës de la France avec les pays africains, ses anciennes colonies. Au lendemain du voyage de Nicolas Sarkozy en Afrique, l’auteur a accordé à Farafina, le magazine de la diaspora africaine en France, un entretien exclusif sur les vrais objectifs de ce Sarkotour, les enjeux nouveaux de la coopération entre la France et les pays africains.
Farafina : Vous venez de publier « Les dessous de la Françafrique » avec un certain Monsieur X, détenteur de bien de secrets sur les affaires africaines de l’Elysée. Entre autres dossiers secrets, vous dévoilez quelques uns et pas des moindres sur les trois pays que le président français vient de visiter en quelques heures (la République démocratique du Congo, le Congo Brazzaville et le Niger). Dans votre livre, vous parlez d’une concurrence entre la Chine et la France pour profiter à qui mieux mieux des ressources minières de ces pays.
Patrick Pesnot : Bien sûr. C’est une concurrence qui est déjà vieille de quelques années et qui existe non seulement dans les pays francophones africains, le pré carré français, mais aussi par exemple au Soudan où les Chinois sont de plus en plus présents. C’est particulièrement évident en République démocratique du Congo, c’est aussi valable pour le Tchad. Pour le Congo-Brazzaville et le Gabon, je ne sais pas exactement, mais les Chinois viendront tôt ou tard.
Et parlant spécialement des pays africains que Sarkozy vient de visiter, le Congo-Brazzaville avec le pétrole et le Niger avec l’uranium ?
Au Niger les Chinois ont essayé de rafler la mise mais il faut croire que Areva a donné plus que les Chinois (ndlr le groupe nucléaire français paye aujourd’hui l’uranium nigérien deux fois plus depuis que les Chinois se sont intéressés au pays). En argent, du moins en protection militaire, c’est ce que je redoute, je veux parler de la protection contre les touaregs, effectivement les Français sont mieux placés pour défendre les institutions minières que les Chinois qui viendraient dans ce pays qu’ils ignorent. Sur ce plan, on peut dire que les Français ont gagné le premier round. Mais il y en aura d’autres parce que cette profusion d’uranium au Niger attise beaucoup de convoitises.
Farafina : Il y a dix ou 15 ans environ, on disait que l’Amérique occupe en Afrique la place laissée par la France, est ce qu’on peut dire la même chose aujourd’hui avec la Chine ?
Il faut dire qu’apparemment les Américains ont plus ou moins renoncé mais il faut souligner qu’il s’agit de certains pays seulement. En tout cas pour l’Afrique francophone ils sont plutôt en retrait même si au Congo-Brazzaville ils ont conclu des contrats avec Sassou N’guesso. Mais la vraie concurrence internationale en ce moment c’est avec la Chine qui a les yeux plus gros que le ventre et qui voudrait bien que la France s’efface.
Farafina : Dans votre livre, vous écrivez dans la préface que Paris n’a jamais cessé d’imposer sa tutelle en Afrique, or le président Sarkozy parle de « renouveler » les rapports avec le continent. A votre avis y a t-il aussi rupture dans les relations entre la France et l’Afrique ?
Je ne crois pas à cela pour la simple et bonne raison avec le fameux incident de la démission obtenue du ministre de la coopération Jean-Marie Bockel. On se rappelle qu’il avait été appelé par Sarkozy quand il a trahi ses amis socialistes et qu’il a déclaré aussitôt : « je vais en finir avec la Françafrique ». Et puis, le président Bongo s’est fâché et a appelé son homologue français. Résultat Bockel a été débarqué assez rapidement et remplacé par un autre ministre qui est beaucoup plus docile et qui continue sur la lancée de la Françafrique. Vous voyez bien que dans ce domaine il n’y a pas de rupture. Ce mot rupture dont est si friand Sarkozy, moi je n’y crois pas. Non, il n’y a pas de rupture pour l’instant.
Farafina : La Françafrique survivra-t-elle à Nicolas Sarkozy ?
La Françafrique a survécu à De Gaulle, elle a survécu à Pompidou et Giscard, elle a survécu à François Mitterrand qui voulait lui aussi une autre politique de l’Afrique avec des états plus libres et moins assujettis à la France…
Vous voulez parler de l’affaire Cot ?
Jean Pierre Cot comme Bockel a lui aussi été débarqué et remplacé par quelqu’un de plus docile. Il a duré un an, un an et demi je crois. Malheureusement c’est une donnée permanente de la politique française. Je ne vois pas pour l’instant en tout cas la France adopter une rupture dans ce domaine.
L’Afrique francophone reste donc un pré carré pour la France ?
Cela me semble évident. Il y a la défense des intérêts économiques français, on l’a vu encore en Côte d’Ivoire par exemple ; il y a des groupes économiques importants un peu partout dans le pétrole, dans les infrastructures qui veulent rester en Afrique parce qu’ils y font un maximum de profits et ils ne sont pas du tout décidés à partir, au contraire. Je crois que la Françafrique a toujours été comme cela. La Françafrique - c’est Houphouët Boigny qui l’a trouvée - restera toujours une donnée permanente.
Qu’en est-il de l’enjeu politique et militaire ?
Si la France continue à entretenir des troupes en Afrique c’est grâce à des accords secrets pour défendre ses intérêts lorsqu’il le faut ou lorsqu’un chef de l’état appelle Paris au secours comme cela s’est passé récemment au Tchad. Les garnisons sur place ou installées non loin de là se mettent aussitôt en devoir de sauver le président en difficulté. Mais tout cela coûte cher et Sarkozy quoiqu’il en est aimerait bien faire des économies à ce propos. Le pourra t-il ou les chefs d’état africains l’accepteront-ils ? Je vois mal un Bongo demander à la France de rapatrier les soldats qui se trouvent sur son territoire parce qu’il sait en même temps que c’est une protection pour lui ou celui qui le succédera.
Quel est le dernier secret que Monsieur X, votre informateur sur les secrets de la Françafrique, vous a confié ?
On parle en ce moment de Madagascar. La dernière fois que je l’ai vu, je lui demandé est-ce que la France a joué un rôle dans ce qui vient de s’y passer. On sait que Madagascar a été très étroitement surveillé par la France. Même au temps de Ratsiraka, l’amiral rouge, la France a gardé à Madagascar des intérêts puissants. Ratsiraka a toujours beau dire « je suis le nouveau grand timonier à l’égal de Kim Il Sung, de Mao », il n’a jamais vraiment rompu avec la France même s’il y a eu plein de querelles. Avec ce qui vient de se passer, même s’il n’y a pas encore vraiment de preuves, il est évident que c’est un président très antifrançais qui vient d’être chassé du pouvoir et que c’est un président très gentil avec Paris qui vient d’arriver. Donc, de là à soupçonner que Paris y a joué un rôle, il n’y a pas loin.
Source : Farafinamag (France)
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire