Alain Juppé contre Nicolas Sarkozy : le match africain
Paris Match ||Mis à jour le
Interviewés vendredi par le journaliste Christophe Boisbouvier sur Rfi, les deux principaux challengers de la primaire à droite livrent leur vision de l’Afrique
Les deux hommes s’accordent sur un point: l’Afrique n’est pas un dossier comme un autre, mais une priorité pour le prochain président français. Tous deux aspirent à renforcer les liens économiques et assainir les relations politiques avec la France. Mais aucun ne livre d'éléments concrets sur la manière de le faire.
Alain Juppé reste assez théorique. Il rappelle sa position passée sur le Sénégal en 2012, quand le président Wade voulait prolonger le nombre de mandat ainsi que ses avertissements exprimés au Burkinabé Blaise Compaoré qui entendait lui aussi modifier sa constitution. Le message de la France sera le même, dit-il, pour tous les présidents ayant recours au même procédé. L'ancien ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy ne donne en revanche aucun élément sur les actions éventuelles à mener pour faire entendre ces messages. En cela, il ne se différencie pas de François Hollande, dont les appels à la transparence et au respect des constitutions que ce soit au Congo-Brazzaville, au Gabon ou enRépublique démocratique du Congo résonnent dans le vide.
En quoi Juppé se sent-il différent de Nicolas Sarkozy? «J’aime l’Afrique, j’ai beaucoup d’amis africains», dit-il. L’ancien Premier ministre de Jaques Chirac entend se présenter comme son successeur dans le cœur des Africains. Pour cela, il a d’ailleurs une arme de choc: un conseiller africain, le très actif adjoint à la mairie de Bordeaux Pierre De Gaétan Njikam Mouliom.
Sur le Gabon, Alain Juppé se montre évasif. «Il y a eu des observateurs européens dans cette élection, la Cour constitutionnelle s’est prononcée, c’est aux Gabonais de régler cette question», dit-il. Une manière de renvoyer la «patate chaude» du maintien au pouvoir de la dynastie la plus emblématique de la Françafrique à une population impuissante. D'autant plus impuissante que la Cour constitutionnelle du Gabon cautionne des résultats contestés par les observateurs de l'Union européenne.
Nicolas Sarkozy reprend l'idée de Jean-Louis Borloo d'un "gigantesque plan Marshall"
De son côté, Nicolas Sarkozy ne se montre pas plus clair sur les moyens à déployer pour assainir les relations politiques avec l'Afrique. Sur le Gabon, il explique par exemple qu’il aurait fallu «renforcer l’importance des contrôles internationaux avant l’élection et pas après». Il ne précise pas comment. L’ancien président reconnaît partager les «doutes» relatifs à cette élection contestée du 31 août 2016. Doutes qu’il n’a pas jugé utile d’exprimer publiquement au moment de la crise. Pour conclure, il dit espérer que les prochaines élections de décembre se passent mieux.
Quelles différences avec son challenger ? Nicolas Sarkozy revendique l’idée, empruntée à Jean-Louis Borloo -qu'il ne cite pas- d’un «gigantesque plan Marshall pour l’Afrique». Sur le Mali, il plaide pour un gouvernement fort et insiste sur la nécessité d'une capacité de dialogue avec les Touaregs. Plus généralement, il affirme «son attachement pour l’Afrique» et son amitié pour Alassane Ouattara, qu’il décrit comme «un grand démocrate».
Questionné sur le fameux discours de Dakar, Nicolas Sarkozy explique le sens de sa phrase: «Les Africains ne sont pas assez entrés dans l’histoire». Cela signifiait qu’ils n’ont pas la place qu’ils méritent dans l’organisation internationale du monde, a-t-il dit. «Je n’accepte pas qu’il n’y ait pas un seul pays africain membre (permanent) du Conseil de sécurité», dit-il, reprenant cette fois une idée chère à feu Mouammar Kadhafi.
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