mardi 8 décembre 2009

Projet de marche suivie de meeting du 15 décembre : Le défi lancé le 22 décembre par la CFDR est loin d’être relevé


Ibrahim YERO (Le Canard déchaîné N° 405 du 7 Décembre 2009)
mardi 8 décembre 2009

Le 15 décembre prochain fera probablement tâche d’huile dans l’histoire de la Crise politique en cours dans notre pays. Et pour cause, ce jour verra (si Dieu le veut) la première marche suivie de meeting des partisans de la refondation de la République depuis l’entrée en vigueur de la Constitution du 18 août 2009. Mobilisera, ne mobilisera pas ? Il faudra attendre le Jour « j » pour le savoir. Mais déjà, tous sont convaincus des enjeux hautement politiques qui sont tributaires de cette manifestation progouvernementale, aussi bien pour ses initiateurs du Mouvement Patriotique pour la Défense de la Nation et du Peuple que pour l’opposition réunie au sein de la CFDR. Pour les premiers, il s’agira avant tout de répondre au défi à eux lancé par le Vice président du PNDS-Tarayya, Bazoum Mohamed qui, il y a quelques jours sur une chaîne de télévision privée, défiait les défenseurs de la 6ème République de sortir montrer ce qu’ils ont dans le ventre en termes de mobilisation des Nigériens. Une bravade qui sera reprise quelques temps plus tard lors du meeting de la CFDR, le dimanche, 22 novembre 2009, en ces termes : « si Tandja veut voir le peuple, voici le peuple ! Aujourd’hui, le peuple est sorti dans la rue pour dire non à la sixième République ». Un autre enjeu pour le même groupe, il faudra mobiliser le maximum de gens, peu importe qui, et comment les réunir, pour dissuader la CEDEAO et les autres pays et institutions qui s’apprêtent à mettre le Niger en quarantaine pour déficit de démocratie après le 22 décembre, échéance du dernier mandat constitutionnel du Président Tandja de par la défunte Loi fondamentale du 09 août 1999.

Sur ce point, d’ores et déjà, le ton est donné par le Mouvement Patriotique pour la Défense de la Nation et du Peuple à l’occasion de sa déclaration de presse en date du jeudi 03 décembre dernier où les pays et institutions sus indiqués se sont retrouvés dans son collimateur : « Exprimons notre étonnement devant la légèreté avec laquelle des institutions aussi respectables que la CEDEAO, l’Union Européenne et l’OIF ainsi que des pays et des grandes nations démocratiques comme les USA, la France et le Canada apprécient la situation politique nationale et feignent d’ignorer la réalité concrète du cas Niger qui constitue, à n’en point douter, une avancée démocratique due au niveau élevé de prise de conscience des citoyens nigériens de leurs droits et devoirs en démocratie citoyenne »

Ce qui, de l’avis de certains analystes, trahit la déception des tenants du pouvoir de Niamey qui seraient au parfum de ce que leurs efforts y compris ceux du Premier ministre apolitique sont restés vains face aux exigences de ceux qui ne veulent point reconnaître la République refondée et cela à quelques jours seulement de l’ultimatum donné par l’Union Européenne. Alors, il faut revenir à la « source », mobiliser ce qu’on peut mobiliser et chanter dans un choeur extraordinaire le même refrain : « c’est le peuple qui a demandé au Président Tandja de rester au pouvoir, le peuple est souverain, tout patriote a le devoir sacré de défendre la souveraineté nationale et enfin, la Communauté internationale ne comprend rien à rien de la situation du Niger et s’est laissée tromper par certains de nos compatriotes, etc. »

La question est alors de savoir si ces réprimandes feront renoncer à la CEDEAO, l’exigence du respect du Protocole additionnel sur la démocratie et la Bonne gouvernance ? Et àl’Union Européenne, l’application de l’article 96 de l’Accord de Cotonou ? Aux Etats-Unis d’Amérique et au Canada, l‘assujettissement de toute coopération à une bonne démocratie ? Nous ne saurions répondre à ses questions. Cependant, nul besoin d’être un expert en science occulte pour savoir que lorsque quelqu’un qui vous appelle quelques temps plutôt affectueusement « partenaire au développement » vous assimile aujourd’hui à un idiot qui ne comprend rien à ce qu’il entreprend, il y a gros à parier que vous ne seriez pas du tout content. Et c’est justement la principale difficulté à laquelle se heurte le Premier ministre Ali Badio Gamatié : pendant qu’il tente d’adoucir les positions et user du langage diplomatique, d’autre part on tire à boulet rouge sur la Communauté internationale.

Il est bien vrai que le Primo actuel pour avoir passé le plus clair de son temps à l’étranger sait qui est la Communauté internationale et de quoi elle est capable. Ce qui n’est pas forcément le cas pour tout le monde. Pourtant, tout le monde sait que George W. Bush, alors Président de la puissante Etats-Unis d’Amérique, n’a pu contraindre la Communauté internationale à se rallier à sa cause dans la guerre en Irak même si personne n’a pu l’empêcher de commettre sa sale besogne. Mais, chez nous, Télé Sahel nous inculque que « le patriotisme triomphe de tout… », le reste du monde y compris. D’où les multiples agressions contre les partenaires et amis du Niger par les inconditionnels de la sixième République.

Seulement, pour soutenir de telles opinions il faut être véritablement tombé d’une autre planète ou être alors extraordinairement myope en diplomatie. En attendant, le jour de ladite marche, qui ne sera probablement pas interdite, la crise politique Nigérienne stagne et ne promet vraisemblablement pas de se solutionner bientôt.

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