mardi 23 décembre 2008

Marche de soutien au président nigérien:le grand folklore


Cheick Beldh’or SIGUE-LE PAYS-Ouagadougou-22-12-08
mardi 23 décembre 2008

Une grande tragi-comédie se joue au Niger, pleine de bruits et mettant en scène des acteurs mal inspirés, qui donnent franchement plus à pleurer qu’à rire. Les nouvelles en provenance de Niamey sont inquiétantes. Inquiétantes pour la démocratie au Niger, et très peu rassurantes pour la stabilité du pays.

Récemment encore, une foule bruyante de manifestants a donné de la voix dans les rues de la capitale nigérienne pour demander au président nigérien, Mamadou Tandja, de se porter candidat pour la troisième fois consécutive, à la présidence de la République. Toute une agitation portée par la conviction de gesticulateurs selon laquelle deux mandats, ce n’est pas suffisant pour leur champion. Ce président aurait déjà fait des preuves telles qu’il faudrait l’inciter à ne pas s’arrêter en… si bon chemin. Les chantiers à achever sont encore nombreux mais on peut toujours compter sur "l’homme de la situation" qu’est Tandja. En somme, on ne doit pas changer une équipe qui gagne !

Pur folklore que tout cela ; du déjà-vu sur le continent ! Quant aux raisons invoquées par les manifestants pour demander à Tandja de prolonger le contrat passé avec le peuple nigérien, rien de nouveau non plus : argument spécieux dont ne peut que douter de la sincérité de ses auteurs. De fait, qui dit qu’au-delà de ce mandat supplémentaire et d’un autre peut-être encore, il aura achevé tous les chantiers du Niger et réussi à combler les immenses attentes du peuple nigérien ? Et au cas où il viendrait à remplir cette mission au terme d’un troisième mandat, qui dit que Tandja ne sollicitera pas un quatrième mandat et peut-être un cinquième, au motif que de nouveaux défis se présentent au Niger ?

Dans ce pays rongé jusqu’à la moelle par la pauvreté, où tout reste prioritaire, autant dire que les chantiers du développement s’annoncent innombrables. Mamadou Tandja se ferait alors le devoir de rester le plus longtemps possible aux affaires pour les réaliser tous. Pourtant, le dirigeant nigérien, comme tous ses homologues africains prétendument irremplaçables, devraient se convaincre de cette vérité pour le moins immuable : le cimetière est plein de gens indispensables. Aussi y a-t-il toujours quelqu’un de bien meilleur que soi, qui n’attend seulement qu’on lui ouvre la voie pour pouvoir exercer ses talents.

Dans tous les cas, ce qui est bon pour soi, l’est très probablement aussi pour les autres. L’exercice du pouvoir devrait donc s’apparenter à une course de relais où le coureur, après avoir fait son tour de piste, passe le témoin à un autre. Mais, sur le terrain politique africain, même deux tours de piste ne suffisent apparemment pas pour essouffler le candidat, qui en redemande toujours plus. C’est une honte pour l’Afrique dont les fils se voient généralement privés d’alternance politique. Ils auraient été libres qu’ils préféreraient l’arrivée de nouvelles têtes en politique, à l’installation de la routine et aux longs règnes qui débouchent généralement sur le chaos. Quittez les affaires avant qu’elles ne vous quittent !

L’Afrique regorge de suffisamment d’exemples de chefs d’Etat qui, en tenant coûte que coûte à s’accrocher au pouvoir, ont fini, pour les plus chanceux d’entre eux, par récolter les fruits amers de leur aveuglement. Qu’est devenu le président général nigérien Ibrahim Baré Maïnassara, celui-là même à qui on reprochait de vouloir torpiller la démocratie au Niger à des fins de confiscation du pouvoir ? Pour tout cela, Mamadou Tandja devrait savoir que le malheur n’arrive pas qu’aux autres. S’il tient à achever les chantiers entamés, qu’est-ce qui l’empêche de se trouver un successeur au sein de son parti, qui poursuivra son oeuvre ?

En tout état de cause, l’Etat doit rester une continuité. Il n’y a qu’en Afrique qu’on peut voir le triste spectacle de peuples instrumentalisés, dont la misère et l’obscurantisme sont exploités à fond par des pouvoirs. Des pouvoirs qui savent toujours compter sur les comportements non éclairés des mêmes peuples quand sonne l’heure des grands enjeux.

Et c’est ainsi que l’Afrique continuera, pour longtemps encore, à faire du surplace. Quel séisme cela créerait-il si le président américain George Bush demandait, au terme de ses deux mandats, une rallonge pour résoudre définitivement la crise financière dont il a été le principal artisan, et dont les répercussions continuent d’être ressenties à travers toute la planète ?

En tous les cas, ce grand folklore visant à amener Mamadou Tandja à rester encore et encore au pouvoir est une menace réelle pour la démocratie au Niger. Une menace face à laquelle la communauté internationale et l’Union africaine restent sourdes. Comme si elles attendaient que le pire se produise avant de ressortir une de leurs chansons favorites : non aux coups d’Etat ; oui à un rapide rétablissement de l’ordre constitutionnel !

Par Cheick Beldh’or SIGUE

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