jeudi 5 mai 2011

La guerre clandestine de Sarko en Libye

Le Canard enchaîné
mercredi 4 mai 2010


Sa volonté de jouer ,les petits chefs de guerre,en prise directe avec les opérations menées sur le sol libyen,provoque des réactions amusés, ironiques et,parfois,une insolente hilarité dans les états majors,au Quai d'Orsay ou dans les services de renseignement."c'est sa guerre",admet en souriant ,un collaborateur d'Alain Juppé.Au Centre de planification et de conduite des opérations(CPCO),directement concerné,des officiers ont trouvés la bonne formule:"Pour le président,la Libye est un Afghanistan de proximité."
Au Quai,certains diplomates,plus sarcastiques que les dirigeants du PS,appuient là ou ça fait mal:"Sarko s'est planté en Tunisie et en Egypte alors il croit avoir l'occasion de reprendre la main."Oui,mais à condition de violer un peu la résolution de l'ONU."On est plus dans le cadre fixé par le conseil de sécurité,la protection des civils,remarque un haut diplomate,on participe désormais à une guerre civile."Plus sévère,et plus politique est le jugement porté par un vieux routier de la DGSE,qui déplore les inévitables suites de cette guerre:"On aura beau dire et se glorifier,de l'appui de l’émirat du Qatar;c'est encore l'Occident et les gens du Nord qui viennent taper des bougnoules."

Officiers à tout faire

Un tournant a été pris avec la décision d'envoyer des officiers de liaison-en compagnie des Britanniques et des Italiens-à Benghazi.Et, là encore,l'Elysée ne joue pas franc jeu.Ces militaires français,colonels ou Lieutenants-colonels parlent l'Anglais et l'Arabe,et sont sur place depuis le 30 mars.Mais il a fallu attendre vingt un jourspour que Sarko autorise Baroin, son porte parole,à admettre leur presence."Un tout petit nombre d'officiers",a sussurré Baroin,car il ne faut surtout pas reconnaître qu'on est en guerre.
En fait,une cinquantaine de militaires français sont sur le terrain,et cette appellationd'"officiers de liaison"sent l'hypocrisie à plein nez.On evite ainsi de parler de conseillers militaires,d'instructeurs en armementou de barbouzes en tout genre.Et il n'est pas question d'évoquer leur rôle,des plus ambigus,au parlement,voire dans le cadre plus discret des commissions de Renseignement de l'Assemblée nationale ou du Sénat,devant des élus habilités pourtant au "secret défense". Réaction cynique mais en privé,d'un conseiller de l'Elysée qu'un député avait osé importuner sur cette question:"La guerre,clandestine ou pas,ce n'est pas le rayon des parlementaires."
Des livraisons,discrètes d'armement ont déjà èté effectuées via le Qatar,semble t il.Mais,comme elles n'ont pas suffi,une opération a èté montée aux frontières du Niger avec la Libye.
Baptisées le "Pont des sables"par des officiers du ministère de la Défense,trois pistes du désert ont vu passer des camions prêtés par le gouvernement nigérien et chargés d'armes françaises,en route vers Benghazi.Cette opération èté préparée par des ex barbouzes libyennes qui ont changé de camp(comme leur ancien chef Moussa Koussa,réfugié à Londres),en collaboration avec les service action de la DGSE.Le nouveau président du Niger,Mahamadou Issoufou,avait donné son aval.
Amusant:Kadhafi et Sarko étaient associés,si l'on peut dire,lors de la campagne présidentielle d'Issoufou.
Le colonel libyen avait en effet financé cette campagne sous le regard bienveillant de l'Elysée et d'Areva,qui extrait des tonnes d’Uranium au Niger et a accordé une obole symbolique à cet excellent ami de la France.La générosité de Kadhafi n'a vraiment pas été payé de retour.

JC

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