mardi 1 septembre 2009

Targuinca : Bulletin d’information n°11 - Août 2009 - Nouvelles des populations du Nord Niger


Targuinca, vendredi 28 août 2009
Targuinca : Bulletin d’information n°11 - Août 2009 - Nouvelles des populations du Nord Niger
mardi 1er septembre 2009

Affirmant que le peuple lui demandait de rester au pouvoir après deux quinquennats successifs, Mamadou Tandja a décidé d’organiser un referendum en août 2009. Après avoir dissous le Parlement, puis la Cour constitutionnelle qui s’opposaient à toute modification de la Constitution, après s’être octroyé, le 26 juin, des « pouvoirs exceptionnels » en activant l’article 58 de la Constitution qui, lorsque « l’indépendance de la République est menacée », permet au président de gouverner par ordonnances et décrets, malgré la démission de huit ministres du principal parti qui le soutenait, malgré toutes les oppositions intérieures et extérieures au pays, Tandja a mené à bien son projet. Le referendum a eu lieu le 4 août et a plébiscité le président de 92,5% des voix.

Pour la première fois depuis l’avènement de la démocratie en 1993, les sept centrales syndicales du Niger, qui regroupent à la fois les fonctionnaires et les employés du privé, avaient appelé à une grève générale le 18 juin. Cet appel a été déclaré illégal par le gouvernement et la grève interdite.

Tandja est resté sourd aux avertissements de l’Union Interafricaine des Droits de l’Homme (UIDH), de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), du secrétaire général de l’ONU et de la Commission européenne qui a bloqué le versement d’une aide au budget de l’Etat nigérien pour protester contre la dérive autoritaire du président.

Après la proclamation des résultats du referendum, la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) a demandé à la CEDEAO et à l’Union africaine de sanctionner le président Tandja. « Le problème du Niger, c’est la malédiction des ressources minières qui est aussi le mal de l’Afrique », a déclaré le président du RADDHO, Alioune Tine. « Tous les pays qui détiennent des ressources minières, pétrole, uranium, etc, sont confrontés à des conflits armés, qui naissent d’un intérêt économique grandissant », a-t-il ajouté.

Le 9 août, le Front Uni pour la Sauvegarde des Acquis Démocratiques (FUSAD) a publié un communiqué appelant à la mobilisation générale contre le régime du président Tandja. Le 10 août, Marou Amadou, président du FUSAD et porte-parole du Front de Défense de la Démocratie (FDD)- regroupement de partis politiques, d’ONG et de syndicats opposés à la modification de la Constitution voulue par le président du Niger- a été arrêté. Il était accusé de « propagande régionaliste » et de « provocation à la désobéissance aux forces armées et de sécurité ». Le tribunal correctionnel de Niamey l’a aussitôt relaxé et il a été libéré le 11 août mais immédiatement enlevé par des forces de sécurité et, en dehors de tout cadre légal, à nouveau placé en garde à vue. Il est maintenant officiellement poursuivi pour « administration d’une association non autorisée » et risque un mois à un an d’emprisonnement et de 10 000 à 200 000 FCFA d’amende. Marou Amadou est incarcéré à la prison de haute sécurité de Koutoukalé, à l’ouest de Niamey. Amnesty International appelle à sa libération inconditionnelle et immédiate, car, à aucun moment, il n’a préconisé l’usage de la violence.

Samedi 22 août, à Niamey, malgré l’interdiction des autorités, une manifestation de l’opposition nigérienne s’est rassemblée devant le Parlement pour dénoncer le referendum qui autorise le président Tandja à se maintenir au pouvoir pour trois années supplémentaires. Parmi les militants interpellés par la police figure Bazoum Mohamed, vice-président du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme.

Le 22 août également, Wada Maman, secrétaire général de l’Association Nigérienne de Lutte contre la Corruption (ANLC), membre très actif du ROTAB (« Publiez ce que vous payez au Niger ») et secrétaire général du FUSAD, a été arrêté en pleine rue. Il n’avait pas participé à la manifestation devant le Parlement. Depuis, M. Maman est détenu, sans inculpation, dans un camp de police à Niamey ; il n’a toujours pas eu accès aux services d’un avocat.

Dans le nord du Niger, en dépit des conditions posées par les rebelles en préalable à l’ouverture de négociations pour la paix, le président Tandja a reconduit pour trois mois, à partir du 27 août, l’état de « mise en garde » qui donne pleins pouvoirs à l’armée et à la police. Nous n’avons pas d’informations officielles sur les négociations entre gouvernement nigérien et rebelles. Mais le coup d’Etat constitutionnel de Mamadou Tandja ne laisse rien présager de bon pour les Touaregs… Le dernier numéro d’Aïr Info (N°101) en fait son gros titre : « Désarmement des ex-combattant. La grande désillusion ». Ces derniers mois « Les missions s’étaient succédées aux missions ; les contacts aux contacts entre la Libye et Niamey ; entre Niamey et Agadez mais au finish rien de concret, rien n’a été signé ! Un observateur qui a requis l’anonymat jette la faute aux autorités nigériennes qui n’ont rien fait et ne font rien pour tourner cette page. Pour lui, « rien n’a été concrétisé avec le Niger, il n y a aucune trace aujourd’hui que l’Etat du Niger veut finir avec cet épineux problème ! » (cf article complet en page 3 du journal).

Pour les civils, rendus exsangues par le conflit, la vie quotidienne est toujours aussi difficile. Bon nombre des habitants d’Iférouane sont rentrés chez eux, mais ils souffrent de pénurie alimentaire : la route d’Arlit à Iférouane est dangereuse et les commerçants en tirent prétexte pour vendre les denrées alimentaires encore plus cher que dans le reste du Nord Niger. L’infirmier se retrouve dans un dispensaire sans matériel ni médicaments. L’école est à nouveau ouverte, mais les élèves n’ont pas de fournitures ( cahiers, stylos,etc…). Les habitants de Gougaram n’ont pas encore tenté le retour dans leur village.

A Arlit, la coordination de la Société civile a écrit à Anne Lauvergeon, présidente du directoire d’AREVA, qui devait rencontrer ses représentants le 4 mai, en marge de la cérémonie de pose de la première pierre du gisement uranifère d’Imouraren. Mme Lauvergeon n’ayant pu se libérer pour cette entrevue, les membres de la coordination de la Société civile d’Arlit ont tenu à lui faire part de leurs préoccupations dans un courrier. Ils ont notamment demandé à AREVA de favoriser le recrutement d’une main d’œuvre locale en implantant son centre de recrutement à Arlit, et non à Niamey comme c’est le cas actuellement. La coordination de la Société civile voudrait aussi que les fonds, alloués par les filières d’AREVA au Niger pour le développement durable des communes du département où elles sont implantées, soient indexés sur le chiffre d’affaires, soient réellement débloqués et versés sur un compte spécial, en accord avec l’administration nigérienne locale. Par ailleurs, la coordination de la Société civile a aussi sollicité AREVA pour un soutien aux projets d’énergie solaire dans les zones où sont implantées les industries et pour la création d’un centre d’apprentissage et d’infrastructures sportives à Arlit. Enfin, elle a rappelé à Mme Lauvergeon les problèmes d’eau potable et de gestion des résidus de traitement de l’uranium extrait à Arlit ; ces problèmes non résolus grèvent lourdement la vie quotidienne et la santé des habitants.

En France, les élèves de CAP Employé de vente spécialisé et de Bac pro ( 3 ans) commerce du lycée E. Lemonnier, à Rouen, ont remis à Targuinca un don de 200 euros, provenant de la vente de vêtements d’occasion. Merci à eux et à leurs professeurs.

Targuinca a fait parvenir aux secouristes de Gougaram du chlorure de magnesium, de l’acerola, des huiles essentielles et une somme de 150 euros pour acheter des médicaments et régler leurs petits salaires.

Merci à ceux et celles qui ont aidé cet été les forgerons venus vendre leurs bijoux et ceux de beaucoup d’autres artisans touaregs. Leur commerce en France aide de nombreuses familles en difficulté au Niger et, dans le contexte de crise économique qui prend de l’ampleur dans notre pays, il est de plus en plus difficile de trouver des points de vente.

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