mercredi 17 mars 2010

Le Sahel dans le collimateur occidental


International -monde.
L'Humanité
Le Sahel dans le collimateur occidental

Le risque d’intervention de Bruxelles et (ou) Washington, sous couvert de lutte contre le terrorisme, suscite un sommet des ministres des Affaires étrangères des pays du Sahel à Alger.
La rencontre des chefs de la diplomatie des sept pays du Sahel – Algérie, Mali, Mauritanie, Tchad, Libye, Niger, Burkina Faso – hier à Alger devrait déboucher sur des « mesures, au plan bilatéral et régional, pour éradiquer » le terrorisme. « Les voies et moyens de la relance du développement économique au profit des populations de cette région » sont également au menu de cette réunion. La recrudescence des actes terroristes perpétrés par al- Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) – enlèvement de ressortissants européens dont trois espagnols, attaque contre un poste militaire dans l’ouest du Niger le 8 mars (25 morts) – fait courir le risque de voir le Sahel devenir une zone d’instabilité et un sanctuaire djihadiste pouvant conduire à une intervention occidentale.

L’ODEUR DE L’URANIUM
Or cette région renferme un immense potentiel pétrolier, gazier et minier (or, uranium) suffisant pour susciter l’intérêt croissant de Bruxelles quant à sa stabilité. Elle avait donné lieu à un débat lors d’une rencontre informelle des ministres de l’Intérieur de l’UE le 17 janvier à Tolède.

Antonio Camacho, secrétaire d’État espagnol à la Sécurité, a plaidé pour « la nécessité d’une politique européenne de sécurité au Sahel », indiquant que « l’Espagne ne prône pas uniquement une stratégie de lutte contre le terrorisme, mais aussi la mise en place d’une politique d’investissement qui permet de contrôler des régions qui ne sont parfois même pas contrôlées par leur propre gouvernement ». L’Espagne, qui préside l’UE, invite ainsi ses alliés à aller faire le ménage dans une zone que l’Aqmi chercherait à transformer en un nouvel Afghanistan. Qui plus est, la France, la Grande-Bretagne, mais aussi l’Espagne et l’Italie auraient mis au point un plan d’intervention à partir du Mali et du Tchad, où Paris est déjà présent militairement. En outre, selon le journal algérien Liberté de mardi, les services de renseignements de six pays de l’UE se seraient réunis à Niamey (Niger) pour coordonner leur stratégie sécuritaire. Les États- Unis (voir article ci-contre) ne sont pas en reste : ils n’ont pas renoncé à impliquer l’Algérie dans leur stratégie de « guerre contre le terrorisme ». D’où les craintes d’Alger – le pays a une frontière de 3 700 km avec quatre pays sahéliens – qui, par l’intermédiaire de son ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, avertissait que « le Sahel ne doit pas être surmédiatisé comme on tente de le faire un peu trop. Nous devons faire en sorte que les pays de la région gèrent eux-mêmes ce problème ». Ces craintes apparaissent d’autant plus justifiées que Washington, vite suivi par Paris, a inscrit l’Algérie sur la liste noire des 14 pays dont les ressortissants présenteraient un risque pour la sécurité des pays occidentaux. Plus inquiétant est le double discours des Européens. D’un côté, ils menacent d’intervenir dans cette zone mais, de l’autre, ils font pression sur des pays comme le Mali, le Niger, le Burkina Faso, fragilisés par leur extrême pauvreté, afin qu’ils libèrent des prisonniers islamistes en contrepartie de la libération des otages européens détenus par l’Aqmi. C’est ce qui s’est passé pour le Français Pierre Camatte, libéré le 23 février après la remise en liberté par Bamako de quatre terroristes présumés dont deux algériens.

HASSANE ZERROUKY

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