vendredi 8 mai 2009

MOUVEMENT DU TAZARTCHÉ: Tandja rejoint Dan Dubaï



Ecrit par Laoual Sallaou Ismaël (Roue de l’Histoire n° 455 du 06 Mai 2009),

President TandjaLa pose de la première pierre du complexe industriel du gisement d’Imouraren à quelques 160 km au Nord d’Agadez a servi de cadre au Président de la République Mamadou Tandja pour sortir de sa réserve et se mêler au débat sur le Tazartché. Sans ambages, dans un entretien qu’il a accordé à France24 et au journal Libération à cette occasion (lire en encadré), le chef de l’Etat a annoncé l’organisation d’un référendum pour appeler à l’arbitrage du peuple sur son maintien au pouvoir ou non. Une annonce qui a eu l’effet d’une douche froide au niveau d’une certaine frange de la classe politique et de la société civile qui ont toujours mis le président Tandja au dessus de tout soupçon par rapport à toutes les agitations des tazartchistes. Depuis le 4 mai 2009, date de la pose de la première pierre du complexe industriel d’Imouraren, le Tazartché ou la prolongation de trois ans du mandat du président de la République actuel, n’est plus ce projet mystérieux, sans tuteur et sans visage, dont on ignore les cerveaux et les commanditaires. Ce n’est plus non plus cette nébuleuse qu’on attribue à des cercles informels qui n’ont aucune responsabilité dans la haute sphère du pouvoir. Le Président de la République qui était jusque là épargné et mis au dessus de tout soupçon par rapport à ce mouvement qui ne cesse d’appeler à la violation de la Constitution, vient de prendre le devant de la scène en annonçant clairement son intention d’organiser un référendum.

Une position qui est aux antipodes de ces déclarations récentes lorsque le 27 mars dernier, à l’occasion de la visite du Président de la République française Nicolas Sarkozy, il rassurait les nigériens en réaffirmant ce qu’il a toujours répété à certains de ses proches : ‘’je suis un soldat, je ne connais que le règlement. Je ne modifierais pas la Constitution’’. A la même occasion, il a déclaré que le 22 décembre, son mandat fini, il s’en allait, qu’il n’allait rien demander à personne. Un peu plus d’un mois après cette déclaration, Tandja vient de faire un revirement inattendu en se jetant dans la mêlée. Ce faisant, il a finalement ‘’cédé aux chants des sirènes’’, une option que redoutait le chef de file de l’opposition nigérienne Mahamadou Issoufou, à l’occasion de la rentrée politique de son parti, le PNDS à Maradi, il y a quelques mois.

Le référendum, c’est finalement l’alternative retenue par le président de la République face à ce qu’il appelle ‘’les sollicitations du peuple’’. ‘’La Constitution autorise un référendum. Le peuple demande que je reste, je ne peux pas rester insensible à son appel’’, a-t-il martelé devant nos confrères français de France24 et de Libération. L’option du président de la République apparaît à ces yeux comme constitutionnelle. Seulement, peut-on organiser un référendum sur la prolongation du mandat du président de la République dans l’esprit de notre Constitution ? Non, répondent les juristes. S’agit-il d’un référendum sur une nouvelle constitution ? Rien de précis, dans les propos du Chef de l’Etat.

Ce qui est sûr, s’il s’agit d’une nouvelle Constitution, les étapes sont encore longues et parsemées d’embûches, à moins d’une suspension de la Constitution du 9 août 1999 et d’une dissolution de l’Assemblée nationale fortement recommandée par les tazartchistes informels. Ce qui sera un’’ coup de force’’ aux yeux de l’opposition et des acteurs de la société civile. Il faut dire que cette annonce surprise du président de la République intervient au moment où le Chef de file de l’opposition semble avoir rompu les ponts avec celui qu’il a toujours ménagé, épargné de toute critique, de tout soupçon par rapport aux intentions qu’on prêtait à Tandja de vouloir modifier la Constitution pour se maintenir au pouvoir, du moins depuis le début de son second mandat.

L’annonce du référendum de Tandja qui a manifestement cédé à la tentation de se maintenir au pouvoir et aux louanges mielleux et démesurés de certains de nos concitoyens qui ne cessent de magnifier son passage au pouvoir, de le prophétiser et l’appeler à la violation manifeste de la Constitution, intervient surtout après la mise en place de la Commission Nationale Electorale Indépendante qui a déjà établi son chronogramme, sans un quelconque référendum, qu’elle a transmis au gouvernement. La déclaration du Président de la république intervient aussi après l’annonce par le PNDS-Tarayya, principal parti de l’opposition nigérienne d’engager une lutte ouverte par rapport au Tazartché.

Une radicalisation survenue après la dernière rencontre entre le Président de la République et le chef de file de l’opposition et qui cache bien des mystères qu’on ne tardera pas à apprendre le 9 mai prochain. Les Journées Anti-Tazartchés, dont la première est attendue le 9 mai prochain, voilà l’invitation lancée par Mahamadou Issoufou à tous ses militants et à tous les démocrates pour barrer la route à ce qu’il a appelé ‘’une immense tentative d’escroquerie politique, une massive entreprise de haute trahison que certains tentent de mettre en oeuvre et dans laquelle ils tentent d’entraîner le président de la République’’. Tandja est donc entraîné dans l’aventure référendaire. Reste à déterminer les modalités de sa concrétisation dans le dispositif constitutionnel verrouillé du Niger, une loi fondamentale fortement critiqué ces derniers temps mais qui apparaît aujourd’hui comme le meilleur paravent que les nigériens se sont offerts pour contrecarrer toutes velléités de restauration autocratique.

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