dimanche 2 juin 2013

M’Bera, un témoignage pour une prise de conscience

Hamadi Ag Mohamed Abba
La prise de conscience de tous et la reconnaissance des vérités peuvent aider à voir claire dans la crise malienne pour réfléchir sur des solutions justes et équitables
En février 2012 dans les grandes villes du Mali ; Kati, Bamako, Ségou, Sevaré, les villes les plus sécurisées, des gangs issus de la population ont eu la possibilité de s’en prendre aux civiles à cause de la couleur de leur peau pour perpétrer des pillages, contre les domiciles des Touaregs et arabes.
Les exactions de l’armée,  les années 90 étant encore dans les esprits, les uns et les autres on estimé qu’il ne faut plus attendre, qu’il faut se sauver. L’exode de la population a commencé alors vers les pays frontaliers et vers les régions du sud du Mali ; à pieds, en voiture, avec les moyens traditionnels de transport, ânes, chameau, charrettes, dans des conditions difficiles.
Les organisations humanitaires, fin avril 2013, parlent de milliers de personnes déracinées dont une partie repartie entre les pays voisins (Burkina Faso, Niger, Mauritanie, Algérie…) et l’autre partie déplacée à l’intérieur des régions de Tombouctou, de Gao et de Kidal puis dans le sud du Mali. Beaucoup de personnes affectées par cette crise ne sont pas enregistrées nulle part et on estime le nombre de la population en situation de déracinement, à plus de 600000 personnes.
Dès le début de l’opération militaire SERVAL, beaucoup de témoignages relayés par les organisations internationales de droits de l’Homme accusent l’armée malienne d’être responsable d’arrestations arbitraires et des exactions contre des civils d’origines diverses. Ces violences ont aussi contraints les populations à fuir vers les camps de réfugiés. Dans ces camps de réfugiés comme parmi les déplacés internes, beaucoup de personnes âgées surtout malades sont décédées suite au stress consécutif.
Le système scolaire de façon générale a été perturbée depuis 2012. Les élèves et les étudiants dans les camps de réfugiés sont en rupture scolaire hormis quelques actions du HCR, des organisations humanitaires et des pays d’accueils.
Le stress et les changements d’habitudes alimentaires, combinés à d’autres facteurs ont dégradé l’état nutritionnel des enfants de bas âges. En avril 2013 l’ONG Médecins Sans Frontières (MSF) signalait 24 décès d’enfants par jour dans le camp de réfugiés en Mauritanie. Une situation qui traduit une catastrophique humanitaire.
Nous subissons depuis 1960, l’instabilité, l’exil liés aux rébellions et aux sécheresses. Nous espérons toujours une prise de conscience de la communauté internationale par rapport à cette situation. Ce n’est un secret pour personne que depuis l’indépendance du Mali, les composantes ethniques des régions de Tombouctou, Gao et Kidal ont toujours été instrumentalisées par des hommes politiques pour les opposer les unes contre les autres.
Aujourd’hui, la société civile dans les camps de réfugiés et déplacés internes, doit lutter contre cette politique destructive de la cohésion sociale. Dans le cadre du dialogue, de la réconciliation indispensable pour que la paix s’installe dans nos régions, il est urgent que les représentants des communautés (Sonraï, arabes, Touaregs, Peulhs, Bozos…) se retrouvent pour évoquer de vive voix, sans passion, leurs problèmes et décider des solutions sans interférence aucune, ni des pouvoirs politiques et administratifs de Bamako, ni de personne d’autre.
Seules la prise de conscience de tous et la reconnaissance des vérités peuvent aider à voir claire dans la crise malienne pour réfléchir sur des solutions justes et équitables pour tous.

EN MEMOIRE DE FEU EHYA AG EHAMMAYE,u

ne interview d’avril 2012. L’auteur est décédé fin 2012 dans les camps de m’Bera en Mauritanie. A travers cette publication on lui rend hommage.
Hamadi Ag Mohamed Abba

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