Dans un entretien accordé au Nouvel Observateur, le 12 juillet 2012, le ministre français des affaires étrangères, Laurent Fabius, a évoqué le Mali. Occultant l’affirmation identitaire touarègue, son discours par ailleurs truffé de contre-vérités, prépare la guerre contre l’Azawad.
Ceux qui pensent que la gauche au pouvoir pourrait être différente de la droite se trompent. Certes, avec la gauche au pouvoir il est fort possible de voir plus de mosquées construites en France, plus de gestes envers l’arabe et l’islam. En d’autres termes la politique arabo-musulmane de la France risque de se renforcer. En même temps il faudra s’attendre à ce que les positions anti-berbères de ce gouvernement s’amplifièrent au risque de voir naître un conflit ouvert entre Berbères et le gouvernement français. Jusque-là trop gentils, les Berbères, aussi bien en France qu’en Afrique du Nord, sont victimes de leur de leur pacifisme. Comme si elle n’est pas satisfaite d’avoir créé les frontières qui ont vu le pays berbère fragmenté et émietté en Afrique du Nord, la France, cette ancienne puissance coloniale, continue à œuvrer de toutes ses forces pour empêcher les Berbères d’accéder à leur souveraineté. Sinon comment expliquer cette position de la France face à la situation dans l’Azawad ?
Monsieur Fabius réduit l’Azawad à des "des terroristes, dont certains venus de Libye", ou encore "des intégristes prêts à mourir, qui veulent appliquer la charia, qui n’hésitent pas à violer, à assassiner et qui désignent la France comme leur principal ennemi. Ils disposent d’armes et d’argent liés à la drogue et aux prises d’otages". Aucune allusion au MNLA ni aux Touaregs. Quel mépris ?! Pourtant le monde entier sait que l’Azawad (ou ce que monsieur Fabius appelle le nord du Mali) est libéré par la volonté du MNLA qui avait déclenché les hostilités militaires contre l’armée du Mali le 17 janvier 2012. Monsieur Fabius ne peut ignorer que que le MNLA s’est battu et se bat pour la libération de l’Azawad, un territoire que la France a artificiellement rattaché au Mali. Monsieur Fabius ne peut ignorer que le MNLA, dès le début, a fait savoir sa volonté de mettre en place un État démocratique et laïc. Il le sait, mais il l’ignore délibérément dans son discours. Monsieur Fabius nous fera croire aussi qu’il ignore le rôle du Qatar ou de l’Etat-vermine d’Alger dans la gestion et la manipulation de l’islamisme dans l’Azawad.
Pour monsieur Fabius, les gouvernement, "légitimes" pour lui, "bénéficient de peu de moyens sur les plans financier, militaire et humain". Oui, car il va falloir justifier l’implication de la France dans cette guerre qui se prépare. La France aura à soutenir logistiquement les pauvres républiques bananières et autres États voyous de la région dirigés par des dictateurs, corrompus et autres putschistes. Quelle honte pour un État de droit, une démocratie que d’avoir tout ce beau monde comme amis. A propos des groupes présents dans l’Azawad, monsieur Fabius dit qu’ils sont « de véritables "incubateurs" du terrorisme ». Oui, si monsieur Fabius a raison, il oublie juste de préciser que ces groupes eux-mêmes sont une couvaison d’Alger, du Qatar, du Mali, avec la bénédiction de la France et des USA.
Le cynisme du discours de monsieur Fabius atteint son paroxysme lorsqu’il évoque l’Algérie qu’il considère comme "un grand pays qui ne souhaite pas s’ingérer dans les affaires des autres mais qui comprend que l’implantation durable d’un foyer de terrorisme au cœur de l’Afrique constituerait une menace pour tous".
De jour en jour, la France précise ses positions et nous savons maintenant à quoi nous attendre de la part de cette république de Hollande. Elle ne veut surtout pas d’un État amazigh ; ni la remise en cause des frontières qu’elle a créées. La France continuera à être anti-berbère et le comportement pacifique des Berbères envers la France ne lui fera changer sa position. Un demi-siècle après son départ d’Afrique du Nord, et malgré la loyauté des Berbères avec elle, la France continue à nous mépriser et aimer ceux qui la méprisent. Faudrait-il la mépriser pour qu’elle revoie sa position envers nous ?
Ci-après un extrait de l’entretien de Luarent Fabius avec le Nouvel Observateur où il est question de l’Azawad
Masin Ferkal
EXtrait de l’entretien de Laurent Fabius, Ministre français des affaires étrangères, avec l’hebdomadaire "Le Nouvel Observateur".
Le Nouvel Observateur : Au Mali, des djihadistes occupent le nord du pays. Que faut-il faire ? Intervenir militairement ?Laurent Fabius : Au Mali, l’enjeu est d’éviter la constitution d’une sorte de "Sahelistan", lourdement menaçant pour les Africains et pour nous. Des terroristes, dont certains venus de Libye, ont pris possession du nord du pays. Ce sont des intégristes prêts à mourir, qui veulent appliquer la charia, qui n’hésitent pas à violer, à assassiner et qui désignent la France comme leur principal ennemi. Ils disposent d’armes et d’argent liés à la drogue et aux prises d’otages. En face, les gouvernements légitimes bénéficient de peu de moyens sur les plans financier, militaire et humain. C’est donc une menace grave à la fois pour le Mali lui-même, aujourd’hui coupé en deux, et pour l’ensemble de la région. Car ces groupes, très mobiles, ont des connexions nombreuses. Ce sont de véritables "incubateurs" du terrorisme. Face à cela, qu’avons-nous fait jusqu’ici ? À la demande de nos amis africains, nous avons joué notre rôle de facilitateur. J’ai nommé à cette fin un représentant spécial, l’ambassadeur Jean Félix-Paganon, et nous avons rencontré avec le président plusieurs dirigeants de la région. Je m’y rendrai d’ailleurs prochainement. Nous avons appuyé les Africains au Conseil de sécurité de l’ONU et sensibilisé les membres permanents, ce qui a permis le vote, la semaine dernière, d’une résolution sous chapitre VII. Elle pose les bases d’un rétablissement de la légalité constitutionnelle, du retour à l’intégrité du Mali et de la lutte contre Aqmi. L’Union européenne apporte, elle aussi, son aide concernant la formation des forces de sécurité, l’action contre la famine et pour le développement.
Est-il envisageable qu’à terme nous intervenions ?
L’intervention relève des États de la région. Nous pourrons, si nécessaire, fournir un appui.
Mais les pays de la région, rassemblés dans la CEDEAO, n’ont clairement pas les moyens d’agir.
Certains de ces pays possèdent des forces significatives. Ils manquent parfois d’équipement.
Et l’Algérie voisine ?
Dans quelques jours, je rencontrerai à Alger ses dirigeants pour un tour d’horizon général. Nous aborderons sans doute aussi ce sujet. Pour son malheur et dans sa chair, l’Algérie a éprouvé dans le passé les ravages du terrorisme. C’est un grand pays qui ne souhaite pas s’ingérer dans les affaires des autres mais qui comprend que l’implantation durable d’un foyer de terrorisme au cœur de l’Afrique constituerait une menace pour tous.
Ali Bongo vient d’être reçu à l’Élysée. Vous étiez allé le voir durant la campagne. Pourquoi cette visite qui a fait craindre un retour des liens incestueux entre la France et son pré carré africain ?
Je me suis rendu au Gabon, comme dans d’autres pays, afin de prononcer une conférence pour HEC ; par courtoisie, j’ai rendu visite au président : voilà tout. D’autre part, Ali Bongo, comme de nombreux chefs d’État africains, a rendu visite récemment au président français. J’ai participé à ces rencontres et je puis vous le confirmer : la Françafrique, c’est fini ! Nous aurons des relations fortes, sur une base d’égalité et de transparence, avec toute l’Afrique. C’est un continent du futur. À terme, 700 millions d’Africains parleront le français. Ce sont nos voisins, nos amis, nos partenaires. Autant de raisons de cultiver des relations étroites avec ce continent magnifique. Nous sommes loin, très loin du discours de Dakar de M. Sarkozy, arrogant, indécent et, en fin de compte, attristant.
Diriez-vous de M. Bongo qu’il a été élu démocratiquement ?
Si votre question est de savoir si nous serons attentifs aux droits de l’Homme et au respect de la démocratie, la réponse est clairement oui.
Sur la Françafrique, comment marquer la rupture ? Tous les gouvernements précédents, socialistes compris, ont annoncé sa mort et les vieilles habitudes sont revenues.
En chassant définitivement ces vieilles habitudes. Vous aurez noté qu’il n’y a plus de ministre de la Coopération, plus d’officine gouvernementale ou paragouvernementale spécialisée. Les relations avec les pays d’Afrique sont traitées de manière normale. J’aurai des relations de proximité avec les gouvernements, mais aussi avec les sociétés civiles et les oppositions. Pascal Canfin, le ministre délégué chargé du Développement, m’assistera dans l’approche de ces questions, en Afrique comme dans les autres continents.
Lire l’entretien sur le site du Nouvel Observateur