Au Mali, « l’implosion est en cours »
La situation sécuritaire se dégrade de plus en plus au Mali et dans le Sahel.
Patrouille de l’armée malienne et de forces pro-gouvernementales dans le nord du Mali, le 19 avril. / SOULEIMAN AG ANARA/AF
Cette fois, l’attaque, conduite au mortier, a visé le « Super Camp » des soldats des Nations unies (Minusma) à Tombouctou, mercredi 3 mai. Bilan : un mort et neuf Casques bleus blessés. Revendiquée par le « Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans », l’alliance des principaux groupes djihadistes qui sévissent dans le nord du Mali, cette opération a frappé la base qui avait été celle des Français de Serval jusqu’à leur départ, en avril 2013.
Mardi, l’armée malienne était tombée dans une embuscade tendue par le Front de libération du Macina (FLM), dans la région de Ségou (centre), tuant neuf soldats et en blessant cinq.
Les attaques ont triplé entre 2015 et 2016
Si les soldats français engagés dans la force Barkhane obtiennent des résultats, ils ne peuvent empêcher la propagation des foyers de violences au Mali et, plus largement, dans la bande sahélo-saharienne. Mines, embuscades, attaques kamikazes, tirs de mortiers, l’amplitude de ces attaques ne faiblit pas. De Kidal à Tombouctou en passant par Tessalit et Gao, toutes les bases des forces armées sont sous le feu des mortiers djihadistes. « Au total, le nombre des attaques revendiquées par des groupes extrémistes violents a pratiquement triplé, passant de 28 en 2015 à 85 en 2016 », selon l’ONU.
La contagion insécuritaire se propage du nord au sud du Mali dans un mouvement qui semble irrésistible. « Ce phénomène a commencé, il y a deux ans, par un effondrement de la sécurité au quotidien au sud de la boucle du Niger. La loi, l’ordre et ce qui restait de l’appareil régalien de l’État malien dans cette région fortement peuplé se sont retirés. C’est dans ce contexte qu’est apparu le Front de libération du Macina, un mouvement caractérisé par le mécontentement des Peuls de la région », note Serge Michailof, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).
« Un tableau extrêmement sombre de l’avenir »
Et de poursuivre, inquiet : « L’implosion du Mali est en cours. Dans les années à venir, les étrangers et les représentants de l’État ne pourront plus circuler dans une grande partie du pays. » Une tendance de fond que ni Barkhane (dont le budget est évalué à 650 millions d’euros par an), ni la Minusma (un milliard d’euros par an), ne réussissent à inverser.
« Nous assistons à une dégradation générale des États et de la sécurité dans le Sahel, poursuit Serge Michailof. Une démographie excessive, une agriculture en panne, l’absence de travail pour les jeunes, l’essor du salafisme dans les zones rurales et le développement des mafias liées au trafic de drogue, dressent un tableau extrêmement sombre de l’avenir de la région. »
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