mardi 7 octobre 2014

Editorial de Bernard Lugan


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samedi 4 octobre 2014

L'Afrique Réelle n°58 - Octobre 2014

http://bernardlugan.blogspot.be/
Sommaire
  
Actualité :
 - Algérie : la crise s'aggrave
- Menaces sur le Cameroun
- Afrique du Sud : l'Apartheid à rebours

Economie
L'Afrique ne décolle pas

Défense
L'Afrique, un continent qui s'arme



Le bilan africain de Nicolas Sarkozy

George Bush désintégra l'Irak et Nicolas Sarkozy la Libye, deux pays qui étaient des remparts contre l'islamisme. La Libye du colonel Kadhafi était, de plus, devenue un partenaire essentiel dans la lutte contre la déferlante migratoire venue de la mer, phénomène si bien annoncé par Jean Raspail dans son prophétique Camp des Saints.
Si George Bush n'a plus d'avenir politique, Nicolas Sarkozy ambitionne quant à lui de revenir aux Affaires. Le bilan africain de son premier mandat doit donc être fait. Il est catastrophique et tient en sept points :

1) Le plus grave par ses conséquences régionales fut la guerre incompréhensible qu'il déclara au colonel Kadhafi après qu'il l'eut pourtant reçu avec tous les honneurs. Nicolas Sarkozy devra répondre à trois questions :
- Pourquoi outrepassa-t-il le mandat international prévoyant une zone d'exclusion aérienne dans le seul secteur de Benghazi pour le transformer en une guerre totale ?
- Pourquoi refusa-t-il toutes les options de sortie de crise proposées par les chefs d'Etat africains, exigeant au contraire d'une manière obstinée la destruction pure et simple du régime libyen ?
- Pourquoi, alors que le colonel Kadhafi venait de réussir à se sortir du piège de Syrte, fit-il tronçonner son convoi par l'aviation, le livrant ainsi aux islamo-gangsters de Misrata qui le mirent ignominieusement à mort ?

2) Le plus irresponsable pour l'avenir de la France est d'avoir, par petit calcul électoral, et sans consultation préalable du peuple français, transformé Mayotte en département. Dans ce Lampedusa d’outre-mer qui vit des prestations versées par les impôts des métropolitains, la maternité de Mamoudzou met au monde chaque année 7000 jeunes compatriotes, dont 80% nés de mères IMMIGRÉES originaires de toute l’Afrique orientale et jusqu’à la cuvette du Congo. Juridiquement, il n’existe plus aucun moyen de revenir au statut antérieur qui permettait de maintenir cette île de l’océan indien dans l’ensemble français sans avoir à subir les conséquences dramatiques de la départementalisation.

3) Le plus indécent fut la façon dont, en Côte d'Ivoire, il intervint directement dans la guerre civile en hissant au pouvoir son ami et celui de la Banque mondiale, le très mal élu Alassane Ouattara, prolongeant ainsi toutes les conditions des FUTURES crises.

4) Le plus insolite fut son « discours de Dakar », dans lequel il osa déclarer que si l'Afrique n'est, selon lui, pas entrée dans l'histoire, c'est parce qu'elle ne s'est pas soumise au dogme démocratique...

5) Le plus scandaleux fut sa gestion du dossier rwandais quand, influencé par son ministre Bernard Kouchner, il ne CONDITIONNA pas le rapprochement diplomatique entre Paris et Kigali au préalable de l'abandon des accusations fabriquées par Paul Kagamé contre l'armée française.

6) Le plus symptomatique fut son alignement sur les Etats-Unis, politique illustrée par un vaste désengagement, de Djibouti à Dakar, avec pour résultat de laisser le Sahel à Washington. Il aura fallu un président socialiste pour que la France fasse son grand retour dans la région...

7) Le plus incompréhensible, conséquence du point précédent, fut son refus d'intervention au Mali. Pourquoi laissa t-il les islamistes se renforcer puis coiffer les Touareg du MNLA alors que nos intérêts nationaux, notamment en ce qui concerne l'uranium du NIGER, étaient directement engagés dans la région ?

mardi 30 septembre 2014

Nouveau livre de Bernard Lugan : Afrique, la guerre en cartes


























Afrique, la guerre en cartes
- 300 pages
- 100 cartes couleur quadrichromie
- Format A4
- Uniquement disponible via l'Afrique Réelle

Présentation :
En étudiant les guerres africaines d'aujourd'hui et celles de demain, c'est un outil d'analyse et de prospective sans équivalent que publie Bernard Lugan.
Ce très bel atlas de 300 pages et de 100 cartes, le tout en quadrichromie, est divisé en deux grandes parties. La première traite des guerres qui ravagent actuellement le continent africain et elle les explique. Dans la seconde sont annoncés et cartographiés les conflits de demain, ceux des décennies à venir, avec la mise en évidence des causes de leur déclenchement.
Le format A4 de cet ouvrage permet une parfaite lisibilité des cartes qui ont en vis-à-vis leurs notices d'explication.

Cet outil exceptionnel de documentation et de référence a été construit à partir des cours que Bernard Lugan donne à l'Ecole de Guerre et aux Ecoles de Saint-Cyr-Coëtquidan. Voilà qui explique à la fois son parti-pris résolument concret, loin des idéologies ou des propos convenus, et sa vocation d'être directement utilisable par tous ceux qui, civils ou militaires, sont concernés par l'Afrique.

Cet ouvrage est publié par les éditions de l'Afrique Réelle. Il est exclusivement disponible sur commande (voir le bon de commande au verso). Il sera disponible au début du mois de novembre 2014 mais il est possible de le commander dès maintenant.

Prix :
- 45€ (livraison colissimo et TVA compris)
- 47€ pour livraison Suisse/UE
- 50€ pour livraison monde

Parution courant novembre
Pour le commander dès maintenant, deux possibilités :

1) Par CARTE BLEUE ou Paypal

Accueil | Régions | Crise du Nord | Kidal : le camp de l'ONU attaqué à la roquette, un Casque bleu tué

Kidal : le camp de l'ONU attaqué à la roquette, un Casque bleu tué

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(image utilisée juste a titre d`illustration).(image utilisée juste a titre d`illustration).
Des tirs de roquette ont touché mardi soir le camp de la Mission de l'ONU au Mali. Le bilan provisoire un d'un mort, un Casque bleu.
Un Casque bleu a été tué mardi soir par des tirs de roquette contre le camp de la Mission de l'ONU au Mali(Minusma) à Kidal, dans l'extrême nord-est de ce pays, a indiqué une source au sein de la Minusma. "Il y a eu au moins quatre roquettes tirées sur le camp de la Minusma de Kidal. Pour le moment, le bilan provisoire est d'un mort, un Casque bleu", a dit cette source. Six à sept explosions, ont été entendues, mais cinq roquettes tirées sur le camp, a-t-on ajouté
Ces tirs interviennent quatre jours après une attaque meurtrière contre la Minusma, qui a coûté la vie à neuf soldats nigériens dans la région de Gao (au sud de Kidal), auxquels les honneurs ont été rendus lors d'une cérémonie à Bamako mardi. Les auteurs de cette attaque "seront châtiés, ils seront poursuivis, ils payeront l'ignominie des actes qu'ils ont commis", a affirmé le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Hervé Ladsous, qui participait à cet hommage funèbre.
Menaces d'un chef jihadistes 
Selon des sources militaires et diplomatiques, ces dernières violences avaient été précédées de menaces d'un chef jihadiste malien, Iyad Ag Ghali. Iyad Ag Ghali a créé Ansar Dine, un des groupes jihadistes qui ont contrôlé pendant près d'un an, entre 2012 et 2013, le nord du Mali, avant d'en être en grande partie chassés par une intervention militaire internationale en cours depuis janvier 2013. Iyad Ag Ghali était demeuré silencieux pendant plus d'un an et demi puis est apparu dans une vidéo diffusée en août sur internet, dans laquelle il appelait à combattre la France et ses alliés.
L'opération anti-jihadiste au Mali a été déclenchée à l'initiative de la France, avec sa force Serval, remplacée en juillet dernier par Barkhane, à vocation plus vaste et durable, sur l'ensemble de la zone sahélo-saharienne. Dans le cadre de l'intervention, plusieurs pays ont aussi envoyé des troupes au Mali, aujourd'hui sous mandat de l'ONU. Ces derniers jours, plusieurs sources avaient évoqué à l'AFP à Bamako des menaces récentes d'Iyad Ag Ghali contre l'ONU. Selon une source diplomatique malienne, il a menacé "les éléments de la Minusma à Kidal, leur demandant de quitter les lieux".
"Une possible évacuation"
Interrogée sur le sujet mardi matin, une source sécuritaire de la mission onusienne avait répondu: "Effectivement, à la suite de menaces précises de la part de Iyad Ag Ghali, notre équipe à Kidal a redoublé de vigilance". "Nous avons plusieurs plans, dont une possible évacuation, mais nous n'en sommes pas là", a-t-elle dit, sans plus de détails. "L'islamiste malien Iyad Ag Ghali a mis sa menace à exécution en faisant attaquer le camp de la mission de l'ONU à Kidal" mardi soir, a dit une deuxième source sécuritaire au sein de la Minusma.
EDITÉ par B.L. avec AFP
SourceTf1

Mali: « Un accord avec les rebelles ne suffira pas à régler la question du terrorisme »

L’Express- 
Lundi à Paris, le Premier ministre malien Moussa Mara a livré son analyse des enjeux sécuritaires de l’aire saharo-sahélienne ainsi que des négociations en cours à Alger entre Bamako et la nébuleuse rebelle. Ni fioritures, ni langue de bois…
Le décor est solennel, voire un rien désuet, l’ambiance feutrée, mais le discours, lui, n’a rien de compassé. Lundi, en fin d’après-midi, le Premier ministre malien Moussa Mara, 39 ans, a planché deux heures durant à la tribune de l’amphithéâtre Colbert du Palais-Bourbon, siège de l’Assemblée nationale. A ses côtés, le député socialiste du Morbihan Gwendal Rouillard, un fidèle du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, et son collègue UDI du Tarn Philippe Folliot, l’un et l’autre secrétaires de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées. Rencontre animée par Emmanuel Dupuy (Institut Prospective et Sécurité en Europe) et David Gakunzi (Institut de recherches et d’études africaines), avec le concours du journaliste de L’Opinion Pascal Airault.
Moussa Mara, Premier ministre du Mali: « L’incompréhension a commencé quand les forces françaises ont procédé à la libération de Kidal sans l’armée malienne. »
AFP/Fabien Offner
Tant dans son exposé introductif que lors des échanges qui ont suivi, Moussa Mara, promu chef du gouvernement de Bamako le 5 avril 2014 par le président Ibrahim Boubacar Keïta, alias IBK, a dépeint les enjeux sécuritaires de l’aire saharo-sahélienne avec une franchise parfois teintée d’ironie. Ci-après, le verbatim des propos les plus saillants de celui qui s’assigne comme priorité « l’unité de la Nation dans sa diversité ». Actif, passif: l’intéressé n’est pas expert-comptable de formation pour rien…
Sur l’état du Mali à l’heure du coup d’Etat de 2012:
« Nos institutions reposaient sur des sables plus que mouvants, et rendus tels par la corruption, le recul de toutes les citoyennetés, et les carences d’un leadership qui n’était pas à la hauteur. »
Sur les tensions entre Paris et Bamako quant au traitement de la rébellion touareg, notamment à Kidal (extrême-nord):
« L’incompréhension a commencé quand les forces françaises [de l'Opération Serval] ont procédé à la libération de Kidal sans l’armée malienne. En janvier 2013, la France a sauvé le Mali, et nous ne l’oublierons jamais. Mais ensuite, et jusqu’au début de l’exercice 2014, il y a eu des ambiguïtés et de nombreuses zones d’ombre. »
Sur les limites du dispositif en vigueur, dispositif désormais placé sous l’étendard de la force onusienne Minusma, avec le concours de la Mission de formation de l’Union européenne, ou EUTM:
« L’EUTM forme en ce moment le cinquième bataillon de notre armée. C’est très bien. Mais si les soldats sont dépourvus de matériel, s’ils n’ont pas même une kalachnikov, à quoi bon? Au premier accrochage, ils détalent… »
Sur le processus de paix engagé à Alger entre Bamako et les mouvances rebelles du Nord, le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA):
« Ce laborieux processus, nous allons tous nous employer à le faire aboutir. Et nous espérons signer un accord au Mali avant la fin de l’année. Mais il ne suffira pas à régler la question du terrorisme. Au moins permet-il de clarifier le paysage, de distinguer ceux qui sont prêts à s’engager dans la logique politique du DDR -désarmement, démobilisation, réinsertion-, des groupes résolus à imposer le djihad, le califat ou la loi du narcotrafic. Or, ces derniers sont autrement plus redoutables et beaucoup plus forts que les rebelles. Comment à ce stade distinguer le terroriste du rebelle ? S’il se balade avec une bannière du MNLA ou un ordre de mission signé du même MNLA, du HCUA ou du MAA, le premier franchit aisément barrages et check-points. Au risque d’aller poser, 100 mètres plus loin, des mines qui vont tuer des soldats tchadiens ou nigériens de la Minusma. En clair, on ne sait plus qui est qui. Les terroristes ont compris: ils se rasent la barbe, enfilent des pantalons longs, et circulent à moto avec les drapeaux de tous les groupes tolérés, signataires de l’accord de cessation des hostilités. Tous, nous, vous, et la Minusma, inch’allah, devons travailler de concert, et sur le long terme. Il faudra plusieurs années pour vaincre ce fléau. Sécurité d’abord, certes. Mais il faut aussi oeuvrer à l’éducation, notamment religieuse, de la jeunesse, et au développement. Une certitude: il ne sert à rien de chasser les djihadistes du Nord-Mali s’ils reconstituent aussitôt leurs cellules dans le Sud libyen. La menace globale exige une riposte internationale coordonnée. Le nouveau dispositif français Barkhane répond d’ailleurs à cet impératif. »
Sur le calendrier:
« Tous les protagonistes ont formulé leur offre politique de règlement. Les médiateurs doivent présenter leur synthèse le 17 octobre. L’essentiel se joue donc maintenant. Mais il s’agit d’un processus où les médiateurs sont plus nombreux que les protagonistes. De plus, chaque groupe armé a sa dissidence. Laquelle tend à rompre avec la maison-mère le matin devant les caméras, quitte à la rejoindre le soir. Nous avons fait le pari de la paix. Si les groupes rebelles ont vraiment pour motivation le développement du Nord, ils accepteront l’accord proposé, accord inclusif, global et détaillé. »
Sur le degré d’autonomie envisagé pour les régions septentrionales du Mali:
« On ne peut évidemment pas gouverner le Mali comme on le faisait voilà 50 ans. Il faut donner beaucoup plus de ressources et de marges de manoeuvres aux communautés locales. Faut-il parler d’autonomie, de fédéralisme, de décentralisation poussée ? Les termes importent moins que le contenu. Voyez les accords conclus jusqu’alors entre Bamako et les rébellions successives. Ils conduisaient à démanteler l’ossature militaire du pays et à constituer des unités ethniquement homogènes prêtes, le cas échéant, à passer de l’autre côté avec armes et bagages. Cette fois, il s’agit bien de bâtir une armée nationale et républicaine, aux antipodes de la logique de partition. Un malinké doit pouvoir commander à Kidal, tout comme un tamasheq à Sikasso. »
Sur la centralité du rôle d’Alger:
« L’Algérie joue un rôle prédominant dans la crise au Nord, ne serait-ce qu’au regard de l’histoire et de la géographie. C’est le seul pays capable de réunir tous les acteurs au même endroit et au même moment. De plus, la plupart des leaders rebelles maliens détiennent aussi la nationalité algérienne. Enfin, l’essentiel de l’approvisionnement de Kidal, qu’il s’agisse des armes, du carburant ou des vivres, vient d’Algérie. Ce n’est pas forcément rassurant mais c’est un fait. Reste cette évidence: la balle est dans le camp des Maliens. »
En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/actualite/monde/afrique/mali-un-accord-avec-les-rebelles-ne-suffira-pas-a-regler-la-question-du-terrorisme_1608449.html#YyphxEXeLPAksIEa.99

Les mauvais choix occidentaux en Libye

LUTTE CONTRE LE TERRORISME PLUTÔT QUE DIALOGUE NATIONAL

Alors que le ministre de la défense français Jean-Yves Le Drian déclare que « face à la dégradation sécuritaire dans ce pays, nous devons agir en Libye » et que l’Égypte et les Émirats arabes UNIS interviennent directement dans la guerre civile, la « communauté internationale » fait-elle encore un mauvais choix ? Au lieu de favoriser l’entente nationale, elle souffle sur les braises au nom de « la guerre contre le terrorisme ».
C’est finalement dans la ville de Ghadamès, oasis libyenne située à la jonction des trois frontières de la Libye, de l’Algérie et de la Tunisie, que s’est tenue le 29 septembre la première réunion du dialogue politique libyen engagé sous l’égide du nouveau représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, le diplomate espagnol Bernardino Leon. Deux camps sont en conflit ouvert depuis le lancement de l’opération «  Dignité  » par le général Khalifa Haftar le 16 mai dernier. Chacun ayant refusé de rencontrer l’autre, la réunion s’est limitée de fait à un dialogue entre élus de la chambre des représentants, plus précisément entre ceux siégeant à Tobrouk et ceux qui la boycottent en raison de son implantation dans une zone sous contrôle d’Haftar. Alors que la première délégation en provenance de Tobrouk COMPTAIT 22 parlementaires sur environ 120 qui y siègent régulièrement, la seconde en comptait deux sur une trentaine de «  boycotteurs  » au total. À l’ordre du jour proposé par Bernadino Leon pour ces entretiens, l’éventualité d’un transfert de la chambre des représentants vers une autre ville pour inciter les «  boycotteurs  » à revenir sur leur décision. De cette réunion, qualifiée en langage diplomatique d’«  encourageante  » par Leon, il n’est rien ressorti d’autre bien évidemment que la volonté des deux parties de poursuivre leur dialogue.

LA SITUATION SUR LE TERRAIN

Avant d’analyser les limites et les perspectives du processus engagé par les Nations unies en Libye, revenons d’abord sur la situation qui prévaut dans le pays un peu plus de quatre mois après le début de l’opération «  Dignité  ». Loin d’atteindre ses objectifs initiaux d’«  éradiquer les islamistes   » — qualifiés sans distinction de «  terroristes  » —, le général Haftar n’aura réussi qu’à faire basculer le pays dans la guerre civile, rapprocher les milices d’obédience islamiste ayant accepté le processus politique de celles d’Ansar Al-Charia auparavant ISOLÉES, et contribué à internationaliser le conflit par l’intervention militaire directe des Émirats arabes unis et de l’Égypte à ses côtés.
Sur le terrain, en Tripolitaine, ses ennemis réunis sous la bannière de l’opération «  Aube de la Libye  » ont remporté la bataille de Tripoli contre les milices de Zintan le 23 août et poursuivent leur offensive dans la zone d’implantation de la tribu Warshafana favorable aux Zintan avec l’objectif à terme de démilitariser la ville de Zintan. Toutes les grandes villes de Tripolitaine : Tripoli, Misrata, Al-Zawiya, Zwara, Tarhouna, Zliten, Gharian, Sabrata ainsi que les villes berbères du djebel Nafoussa leurs sont acquises. En Cyrénaïque, les milices anti-Haftar contrôlent Benghazi, à l’exception de la base aérienne d’Al-Benina où elles ont remporté ces derniers jours des succès qui augurent mal de la capacité des troupes du général à s’y maintenir. Les milices d’Haftar contrôlent quant à elles une partie des régions montagneuses du djebel Akhdar et de Tobrouk où elles recrutent des combattants parmi les tribus locales (Awagouir, Baraissa et Abeydat). Dans le sud, des combats limités ont éclaté à Oubari entre Toubous (dont une majorité a pris le parti d’Haftar) et Touaregs qui bien qu’officiellement neutres, sont proches des milices d’«  Aube de la Libye  ». Avec en toile de fond le contrôle des champs de pétrole de la région toujours gardés par des milices de Zintan.

LE PARLEMENT DE TOBROUK EN ACCUSATION

Au plan politique, la chambre des représentants issue des élections du 25 juin qui s’est réunie pour la première fois à Tobrouk le 4 août a reconduit Abdallah Al-Thani à son poste de premier ministre et validé la composition de son gouvernement début septembre. De son côté, à Tripoli, le Conseil général national sortant, bien qu’en fin de mandat, a élu le 25 août Omar Al-Hassi, professeur d’université originaire de Benghazi, premier ministre d’un «  gouvernement de salut national  ». Ses ministres ont annoncé la reprise du fonctionnement de leurs ministères. La Banque centrale située à Tripoli tombe aussi de facto sous son contrôle. Pour ce gouvernement de salut public et les milices d’«  Aube de la Libye  », le Parlement de Tobrouk n’est pas légitime, car il n’a pas respecté la feuille de route constitutionnelle prévoyant qu’il devrait siéger à Benghazi. Au lieu de cela, il s’est installé en zone pro-Haftar, affichant par là-même son soutien au coup de force de celui-ci.
Le vote du Parlement, le 13 août, en faveur d’une intervention internationale — à laquelle la population libyenne est très largement hostile — a fourni un autre prétexte à son rejet par nombre de conseils locaux qui, contrairement aux parlementaires de Tobrouk disposent d’une réelle base sociale. Le Parlement est de fait accusé d’avoir donné son aval aux bombardements émiriens des 18 et 20 août sur Tripoli. Enfin, le discours de son président Aguila Saleh Issa le 27 septembre devant l’Assemblée générale des Nations unies a achevé de creuser le fossé entre les deux camps. Il a en effet réaffirmé qu’il n’engagerait pas de dialogue avec «  ceux qui ne respectent pas la légitimité  » et demandé à la communauté internationale de «  considérer les structures parallèles — politiques et militaires — comme des entités terroristes  » .
Alors que ni la France, ni l’Union européenne ni les États-Unisn’avaient condamné clairement le coup de force du général Haftar en mai, ces pays ont dès le 5 août reconnu le Parlement libyen comme seul représentant légitime. Si, au plan légal, la reconnaissance d’un parlement élu au suffrage universel va de soi, sa reconnaissance immédiate et inconditionnelle dans un contexte de guerre civile où il est élu par moins de 18 % de participation (environ 600 000 votants pour 1,5 millions d’inscrits sur 3,5 millions d’électeurs) selon les chiffres communiqués par la haute commission électorale libyenne, quand des régions entières ne se sont pas exprimées, ne pouvait que contribuer à radicaliser encore davantage les positions des deux camps. De fait, oubliant l’enchaînement des événements et les responsabilités des acteurs qui avaient entraîné le pays dans la guerre, la situation s’est rapidement résumée pour les pays précités en un affrontement entre légalistes — souvent qualifiés par les médias, à tort, de «  libéraux  » (voire «  nationalistes  ») — et «  islamistes  ».

LA «  COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE  » SOUFFLE SUR LES BRAISES

Et, comme pour confirmer aux belligérants que la France a pris position pour un camp dans la guerre, renforçant ainsi le poids des plus radicaux des deux côtés, le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian déclarait le 8 septembre dans une interview auFigaro que «  face à la dégradation sécuritaire dans ce pays, nous devons agir en Libye  ».
La déclaration finale adoptée à l’issue de la réunion ministérielle sur la Libye tenue à New-York en marge de l’Assemblée générale des Nations unies le 25 septembre, à la demande notamment de l’Algérie, a eu beau rappeler l’importance de «  la non-intervention dans les affaires intérieures libyennes  », ce texte n’en met pas moins l’accent sur «  la présence croissante et l’influence de groupes radicaux et terroristes VISANT à exploiter le vide politique et sécuritaire qui constitue une menace majeure pour la stabilité de la Libye et de la région mais aussi pour la paix et la sécurité internationales  ». Le texte poursuit en reconnaissant «  le rôle primordial du gouvernement libyen pour prendre en COMPTE la menace croissante des groupes terroristes et sa volonté de soutenir le gouvernement dans ce domaine  ».
De son côté le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius, après avoir rappelé lors de cette réunion que «   le retour à l’unité, à la stabilité et à l’intégrité de la Libye passe par la mise en œuvre rapide d’une solution politique  » a ajouté : «  Nous savons qu’il existe des groupes terroristes, au sud et à l’est de la Libye, et ceux-ci, soyons concrets et réalistes, ne vont pas être automatiquement neutralisés parce que, comme nous le souhaitons tous, il y aura eu une réconciliation nationale en Libye. Bien sûr cette réconciliation nationale est nécessaire, car si l’on veut que les forces libyennes puissent faire ce qu’il est nécessaire de faire à l’égard des groupes terroristes, elles doivent être unies pour éviter les jeux troubles. Mais nous savons tous qu’il y aura d’autres mesures à prendre. Il faut d’abord veiller à ce que ces groupes soient sanctionnés comme tels. De ce point de vue, la France demande l’inscription d’Ansar Al-Charia sur la liste terroriste du Conseil de sécurité, et pour être clair la liste que l’on appelle Al-Qaida  ». Deux jours plus tard, le président du Parlement de Tobrouk lors de son discours devant l’Assemblée générale des Nations unies se sentira ainsi d’autant plus légitime à instrumentaliser ce concept nouvellement réactivé de «  guerre contre le terrorisme  » pour demander le soutien de la communauté internationale dans sa lutte contre ses adversaires politiques.
Que cela plaise ou non, les milices d’«  Aube de la Libye  » contrôlent aujourd’hui les trois plus grandes villes du pays et la quasi-totalité de la Tripolitaine et il n’y aura de solution qu’en élargissant progressivement la base du dialogue à ses acteurs politiques que sont devenus les chefs issus de la guerre civile de 2011. C’est la position soutenue par l’Algérie que l’on ne peut accuser de sympathie à l’encontre des islamistes et qui a l’expérience de la guerre civile et de la réconciliation. C’est également le cas de la Tunisie. Les deux pays ne cessent d’appeler au dialogue inclusif entre toutes les parties.
Si les États membres du Conseil de sécurité n’octroient pas la marge de manœuvre nécessaire au représentant spécial des Nations unies et continuent à considérer l’avenir de la Libye exclusivement à travers le prisme de la guerre contre le terrorisme, voire de l’intervention militaire, la politique des petits pas engagée par Bernardino Leon a toutes les chances d’échouer.
Comme en 2011 où Nicolas Sarkozy avait rejeté toute possibilité d’option négociée et choisi la guerre en déclarant dès le 20 février 2011 — soit un peu plus d’un an après l’avoir reçu avec les honneurs à Paris — que le colonel Mouammar Kadhafi n’était plus «  un interlocuteur  », il semble donc que la France ait préféré rejeter le dialogue avec l’une des deux parties en conflit. Comme en 2011, cette décision ne pourra que renforcer les plus radicaux des deux camps, prolonger une guerre qu’aucune des parties n’a les moyens de gagner et risquer ainsi de précipiter la Libye vers un scénario à la somalienne.

lundi 6 octobre 2014

Sahel: l'armée française veut surveiller les autoroutes du désert

mediaL'opération Barkhane a pour but de sécuriser la bande sahélo-saharienne.RFI / Olivier Fourt
    L'armée française est en train d'établir une base temporaire, dans le nord du Niger, dans le cadre d'une opération visant les activistes liés à al-Qaïda qui évoluent dans la zone sahélo-saharienne, du sud de la Libye à la Mauritanie. On estime à 300 le nombre de combattants liés à al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ou au groupe dissident dirigé par Mokhtar Belmokhtar dans le sud de la Libye, point de départ des routes de la contrebande dans la région. A Paris, l'état-major admet que l'armée française va désormais viser les grands points de transit susceptibles d'être empruntés par les terroristes.
    Entraver les flux « terroristes ». Telle est désormais la mission de l'opération française Barkhane. Les sources de ravitaillement en armes sont connues depuis longtemps. Ainsi, les mines belges PRB-M qui ont tué des soldats français ou de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma) ces derniers mois dans le nord du Mali, proviennent du dépôt d'armes de Brak, près de Sebah, dans le sud de la Libye.
    Elles se sont notamment retrouvées entre les mains des combattants de l'une des katiba sahéliennes d'Aqmi - la katiba in Tachfine - qui opérait encore récemment dans une vallée du sud du massif du Tigharghar, à 2 000 kilomètres de là.
    L'armée française va donc surveiller ces autoroutes du désert ainsi que les points de passages obligés, à savoir : la passe de Salvador - théâtre d'une opération des forces spéciales française, mi-septembre ; la passe de Tummo, à la frontière libyenne ; la passe de Korizo, entre le Tibesti et la Libye et la région du Djado, dans le nord du Niger, jusqu'à Tazerzait, entre le Niger et le nord du Mali.
    Surpendre l'ennemi aux points de ravitaillement
    Ces régions ont déjà été survolées régulièrement par les avions de reconnaissance français.
    « Quand on survole le Niger ou le Mali, on voit des pistes et on peut voir des véhicules qui sont au milieu du désert, à plusieurs centaines de kilomètres de la première ville du premier village. Ensuite, une fois qu’on vole la nuit et qu’on vole avec des jumelles à vision nocturne, on distingue des points chauds qui sont, en fait, des feux de camps. Il y a énormément de feux de camps. Donc en fait, le désert n’est pas si désert que ça », a déclaré le commandant Norbert, commandant du détachement Rafale, à N(jamena (Tchad).
    « Ici, c'est la géographie qui commande ! Les endroits où nous irons sont également connus de nos adversaires. Comme nous, ils ont besoin d'eau et de points ravitaillement. Il revient aux hommes de Barkhane d'être suffisamment mobiles et imaginatifs pour parvenir à les surprendre », a conclu, de son côté, un militaire français
    Publié le • Modifié le 

    Mali: un proche du Mujao revendique l’attaque contre la Minusma

    Un combattant du Mujao monte la garde près de l'aéroport de Gao, en août 2012. AFP PHOTO / ROMARIC OLLO HIEN
           
    L'attaque perpétrée, vendredi 3 octobre, dans le nord du Mali contre les troupes nigériennes de la Minusma, la force onusienne, vient d'être revendiquée par un islamiste malien.

    Sultan Ould Bady, islamiste malien connu pour être proche du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest, le Mujao, revendique « au nom de tous les moudjahidines » la dernière attaque survenue dans le nord du Mali. Au cours de cette embuscade, neuf soldats nigériens de la mission de l’ONU ont été tués.
    Pour l’islamiste malien, il fallait attaquer les troupes nigériennes parce que le gouvernement de Niamey « travaille avec les ennemis de l’islam ». Dans le jargon jihadiste, c’est une référence à la France. Avant de raccrocher son téléphone, Sultan Ould Bady a par ailleurs clairement laissé entendre que d’autres attaques contre les troupes onusiennes étaient prévues.
    Selon plusieurs sources sécuritaires dans le nord du Mali, on voit de plus en plus venir du sud et des pays limitrophes du Mali des engins à deux roues. Une crainte largement partagée que les jihadistes utilisent de plus en plus souvent ce moyen de locomotion pour commettre leurs forfaits. C’est à moto, par exemple, que les tueurs des neuf soldats nigériens de la Mission des Nations unies pour la stabilisation au Mali, la Minusma, ont opéré.