jeudi 6 juin 2013

Dans le nord du Mali, des exactions se poursuivent


Des soldats de l’armée malienne sont accusés de crimes par des témoins et des responsables d’ONG de défense des droits de l’homme.
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5/6/13 - Mis à jour le 5/6/13 - 10 H 24
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Dans un hôpital de Gao, Mohamed Zaccaria soigne les plaies de son arrestation arbitraire.
Laurent Larcher

Dans un hôpital de Gao, Mohamed Zaccaria soigne les plaies de son arrestation arbitraire.

Des civils sont aussi accusés de semer la violence dans la ville du nord du Mali.
AVEC CET ARTICLE
Dans l’hôpital Hangadoumbo Moulaye Touré de Gao, Mohamed Zaccaria, 28 ans, est allongé sur son lit, ses poignets atrocement abîmés. Une infirmière lui change ses pansements avec délicatesse. « Les nerfs ont été touchés », affirme un cousin, assis sur le lit d’en face. Mohamed Zaccaria se laisse soigner, le regard perdu. Lorsqu’on l’interroge, il répond lentement, comme si un ressort s’était brisé en lui.
Il est wahhabite (1), professeur de Coran et cultivateur. Il y a quatre jours, après s’être rendu au marché de Gao, il est contrôlé au check-point de l’armée malienne. Son nom est sur la liste des sympathisants du Mouvement pour l’unicité du djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), le groupe d’islamistes proche des wahhabites qui contrôlait la ville depuis un an.
Mohamed Zaccaria proteste, explique qu’il n’est pas un djihadiste, qu’il est venu au marché pour un oncle, qu’il veut simplement rentrer chez lui. Peine perdue, les militaires l’empoignent, lui lient les mains et les pieds et le conduisent dans leur camp. Et là, ils le couchent à terre, en plein soleil.« Tu vas parler ? » lui ordonnent-ils. 

COUCHÉ SOUS LES 45°

Le jeune homme se tord de douleur, ses liens lui déchirent la peau. Au plus chaud de la journée, la température dépasse les 45 °C. Personne ne s’occupe de lui. Le soleil le brûle. Il souffre en silence, s’attendant à être exécuté à tout instant. Son supplice dure six heures sous le soleil malien.
« Les militaires ont fini par appeler les gendarmes. Ces derniers m’ont pris avec eux, ils m’ont interrogé : il n’y avait rien contre moi. Mon nom se trouvait sur une liste. Mais des Mohamed Zaccaria, il y en a plein la région. Les gendarmes ont vite compris que j’étais hors de cause et ils m’ont conduit à l’hôpital pour me soigner. Je pense que je leur dois la vie », témoigne-t-il.
Ses proches sont effondrés. Comme tous les wahhabites de la région, ils sont soupçonnés d’être liés au Mujao. Ils sont donc particulièrement surveillés par les militaires maliens revenus dans cette ville avec l’armée française, le 26 janvier 2013. Des militaires dont la réputation n’est plus à faire au Mali.

ZONES D’OMBRE

« L’armée à Gao se caractérise par son indiscipline, son manque de formation professionnelle, sa haine pour les Maliens restés dans le nord du Mali sous les djihadistes, par sa méconnaissance totale des droits de l’homme et de la convention de Genève », constate Ibrahim Mohamed Touré, président de l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH), section de Gao.
L’homme reçoit dans un bureau d’une école publique de la ville. Si la situation des habitants, note-t-il, s’est améliorée sur bon nombre de points depuis le départ du Mujao (santé, liberté d’expression, liberté de mouvement, écoles), il ajoute : « Il existe aussi des zones d’ombre sur les droits de l’homme : intimidations, arrestations arbitraires, tortures, exécutions sommaires… Les populations les plus menacées aujourd’hui sont les wahhabites et les membres de la secte Adawa : deux groupes religieux qui partagent avec le Mujao un islam intégriste. Ils sont considérés par l’armée comme des militants ou des collaborateurs Mujao. » 
Selon l’AMDH, 10 % de la population de la région seraient adawa et 25 % wahhabites, aux côtés de 60 % de sunnites et de 2 % de chrétiens et d’animistes.

UN CAPITAINE AVEC UN COLLIER DE DOIGTS HUMAINS

Le bilan des exactions attribuées à l’armée à Gao par le président de l’AMDH est terrible : « Selon nos enquêtes, nous pouvons établir que, de janvier à mai, les militaires ont tué au moins une dizaine de civils, torturé une vingtaine de personnes, violé au moins une femme. Et on leur attribue au moins deux disparitions. Nous avons les preuves, les images, les films. »
Est-ce exagéré ? « Non, ce bilan est conforme à nos enquêtes », constate Corinne Dufka, de Human Rights Watch. « Il y a dans l’armée malienne des éléments extrêmement dangereux, ajoute un observateur à Bamako. À Gao sévissait il y a quelque temps un capitaine qui se baladait avec un collier de doigts humains. Il a été rapatrié, mais pas puni pour autant. »
Les cas de maltraitance comme celle subie par Mohamed Zaccaria ne sont pas isolés. « Les soldats enferment des prisonniers dans des cavités construites dans un puits », affirme un cadre de Gao. « Nous connaissons plusieurs personnes qui ont séjourné dans ce puits », ajoute Ibrahim Mohamed Touré.

UN MODULE SUR LES DROITS DE L’HOMME DANS LA FORMATION

Du côté de l’armée française, on ne confirme pas ces dires : « Nous n’avons pas assisté à des exactions de la part de l’armée malienne à Gao et nous n’avons pas été informés de cela. Si cela se produit, nous interviendrons auprès de l’armée malienne comme nous l’avons déjà fait à d’autres occasions », répond le colonel Zemmer, de l’opération Serval.
Pour autant, l’Élysée n’est pas très rassuré par le comportement de l’armée malienne, même si rien n’est dit ouvertement. Mais on peut entendre ses réserves, discrètement. Ainsi, lors de sa dernière visite à Gao, le 26 avril, le ministre de la défense, Jean-Yves le Drian, s’adressant à un parterre de responsables maliens, lançait : « Je souhaite que cette intervention soit exemplaire… jusqu’à la fin ! Qu’elle soit une référence dans l’histoire ! »
Il en est de même pour l’Union européenne. Dans la formation assurée par elle (l’EUTM Mali, commandée par un général français) pour moderniser l’armée malienne, elle a imposé un module consacré aux respects des droits de l’homme : « Tous les samedis, un cours sur le sujet et sur le droit de la guerre est donné par des ONG aux soldats maliens que nous formons », précise le colonel de Cussac, de l’EUTM Mali.

LA FOULE S’EN PREND AUX DÉPOUILLES DE DJIHADISTES

À Gao, des civils sont aussi responsables de violences collectives. En premier lieu, contre les cadavres des djihadistes : « J’ai vu une foule déterrer ceux que nous avions enterrés devant notre camp. Nous avons dû intervenir pour les arrêter. C’était de la folie », témoigne un soldat français. 
« Effectivement, la foule s’en prend à ces dépouilles. On peut aussi déplorer de nombreux règlements de comptes entre Arabes et Touaregs. Il y a des gens qui s’en prennent avec fureur aux wahhabites et aux Adawa dans la ville », regrette Ibrahim Mohamed Touré.
Une folie qui a failli tuer, deux jours plus tôt, le jeune Seydou Touré, 23 ans, étudiant en géographie de l’université de Bamako de passage chez sa grand-mère à Gao pendant une dizaine de jours. Vendredi, alors qu’il sortait d’une mosquée de Gao avec un ami, il a failli être lynché dans la rue. 

LA FOULE CRIAIT « ÉGORGEZ-LES »

« Un homme a reconnu que nous étions adawa. Il nous a accusés d’avoir prêché le djihad, d’être du Mujao. Des jeunes se sont approchés pour en savoir plus. J’ai eu le réflexe de passer un coup de fil aux gendarmes. L’attroupement a grossi. On nous insultait, on nous menaçait. Le ton est vite monté. Un militaire s’est approché et a demandé aux jeunes de nous attacher les mains. Ce qu’ils ont fait. La foule criait ‘‘égorgez-les’’ Alors le militaire nous a frappés avec la crosse de son arme. Heureusement, les gendarmes sont arrivés. Ils nous ont conduits dans leurs locaux où nous avons été interrogés pendant 72 heures. Ils ont vérifié nos propos et nous ont libérés ce matin. Nous l’avons échappé belle. »
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À KIDAL, LA RÉBELLION TOUARÈGUE ACCUSÉE D’ÉPURATION

Des soldats maliens étaient en route mardi vers la ville de Kidal, dans l’extrême nord du Mali, occupée par des rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) qui s’opposent à la présence de l’armée malienne sur place. 
« Pour le moment, il s’agit d’aller à Anefis en vue de préparer l’entrée à Kidal » , a déclaré Souleymane Maïga, porte-parole de l’armée malienne. Les habitants de Kidal issus des communautés songhaï, peul et bella ont été victimes, ces derniers jours, d’arrestations et de violences de la part de la rébellion touarègue. Bamako a protesté en dénonçant une « épuration raciale » .
Face à ces arrestations, Bamako a dénoncé une « épuration raciale »tandis que Paris a demandé la libération des personnes concernées. De son côté, le MNLA assure avoir arrêté des « militaires infiltrés » . La maison d’un chef du MNLA était mardi la cible d’un attentat suicide.
(1) Ce terme désigne des musulmans affiliés à un courant réformateur et rigoriste de l’islam venant d’Arabie saoudite et implanté au Mali depuis plusieurs dizaines d’années.
LAURENT LARCHER, à GAO (Mali)http://www.la-croix.com/Actualite/Monde/Dans-le-nord-du-Mali-des-exactions-se-poursuivent-2013-06-05-969035

Mossa Ag Attaher/ " Il faut que la France, qui a tailladé notre nation et notre pays, sache que ni l'argent ni le feu ne nous feront jamais accepter d'être dirigés par ses nouveaux serviteurs. Moi aujourd'hui j'ai 95 ans et suis le voisin des cieux. Par les cieux je jure que moi et tous les Touaregs sommes décidés à naviguer dans les maux de notre nation, à naviguer jusqu'à parvenir à tenir de nos bras le gouvernail de nos destinées et de notre pays. Touaregs, nageons, nageons jusqu'à atteindre notre jour et si nous périssons dans l'océan de la libération de notre nation, alors notre résistance sera une leçon pour les mondes qui adviendront." Feu Mohamed Ali Ag Attaher resistant de premiere de la revolte Touareg des années 60 En 2013 encore rien n'a changé et nous sommes à présent face à notre devoir de génération!


" Il faut que la France, qui a tailladé notre nation et notre pays, sache que ni l'argent ni le feu ne nous feront jamais accepter d'être dirigés par ses nouveaux serviteurs.
Moi aujourd'hui j'ai 95 ans et suis le voisin des cieux. Par les cieux je jure que moi et tous les Touaregs sommes décidés à naviguer dans les maux de notre nation, à naviguer jusqu'à parvenir à tenir de nos bras le gouvernail de nos destinées et de notre pays.
Touaregs, nageons, nageons jusqu'à atteindre notre jour et si nous périssons dans l'océan de la libération de notre nation, alors notre résistance sera une leçon pour les mondes qui adviendront."
Feu Mohamed Ali Ag Attaher resistant de premiere de la revolte Touareg des années 60
En 2013 encore rien n'a changé et nous sommes à présent face à notre devoir de génération!

Mali: après les affrontements d'Anéfis, le MNLA et l'armée attendent les pourparlers de Ouagadougou

MALI - 
Article publié le : jeudi 06 juin 2013 à 16:59 - Dernière modification le : jeudi 06 juin 2013 à 19:36


Manifestation à Gao, le 30 mai 2013. Les participants exigeaient de la France et de la transition malienne qu'elles récupèrent la ville de Kidal, laissée aux mains du MNLA par l'armée française lors de la reconquête du début d'année.
Manifestation à Gao, le 30 mai 2013. Les participants exigeaient de la France et de la transition malienne qu'elles récupèrent la ville de Kidal, laissée aux mains du MNLA par l'armée française lors de la reconquête du début d'année.
REUTERS/Stringer

Par RFI
Au nord du Mali, vingt-quatre heures après des accrochages entre l'armée et le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) dans le village d'Anéfis, à environ 110 kilomètres au sud-ouest de Kidal, la situation est calme. Alors que s'ouvrent, vendredi 7 juin, les premières discussions entre Bamako et les groupes du nord, les deux camps ne devraient visiblement pas bouger.



Une sorte de statu quo précaire règne à Anéfis. Depuis mercredi midi, la bourgade est aux mains de l'armée malienne. Ce jeudi 6 juin, dans la matinée, l'état-major a une nouvelle fois indiqué que ses soldats consolidaient leurs positions.
Après un repli express, les combattants du MNLA sont désormais à 20 kilomètres à l'est du village, au niveau de la piste qui mène à Kidal. En principe, cette situation désormais stabilisée ne devrait pas évoluer, car la communauté internationale a multiplié les contacts pour que les deux camps calment le jeu, à moins de vingt-quatre heures de l'ouverture de négociations à Ouagadougou.
« Le MNLA, mais aussi Bamako, doivent s’abstenir de tout acte ou propos pouvant mettre à mal le processus de paix », affirme un diplomate proche de la médiation. Car l'avancée de l'armée malienne vers Anéfis, décidée par le président par intérim Dioncounda Traoré, a froissé les différents partenaires du Mali, et notamment Paris.

Au moment des combats, paradoxalement, François Hollande s'apprêtait à recevoir un prix pour la paix dans les locaux de l'Unesco à Paris. Le chef de l'Etat français a rappelé la position officielle de la France : « Il ne devait y avoir qu'une seule armée au Mali », estime-t-il.
Mais en coulisses, le président Hollande a visiblement demandé aux officiels maliens de retenir leurs troupes et d'arrêter les discours guerriers.
Ce mercredi, en début d'après-midi, un cadre de l'état-major malien affirmait à RFI que « la guerre est la seule solution pour tenir les élections à Kidal ». Deux heures plus tard, le même colonel indiquait : « Notre priorité, vous savez, c'est le dialogue. »

La diplomatie parallèle a également fonctionné à plein régime à Ouagadougou et Kidal, pour appeler le MNLA a quitter Anéfis, à ne pas répliquer aux attaques de l'armée, et à rester concentré sur les négociations.
Afin d'éviter l'étincelle de trop, et donc un embrassement entre l'armée et le MNLA, la France a envoyé, mercredi soir, un groupe de 15 soldats à Anéfis. Ce « détachement de liaison » est là pour appuyer les soldats maliens en cas de problème, et faire remonter les informations rapidement vers la France.
Officieusement, cela permet à Paris d'avoir un œil sur les deux camps et de s'assurer que la situation ne dégénère pas.
Faire monter les enchères avant les négociations
Bamako a sans aucun doute fait monter l'armée à Anéfis pour mettre la pression sur le MNLA, pour arriver en position de force à la table des négociations - ces dernières doivent commencer, vendredi, à Ouagadougou sous l’égide de la médiation burkinabè et aboutir à un dialogue direct entre Bamako et groupes touareg en vue d’un compromis sur Kidal – et peut-être pousser ainsi le mouvement touareg à la faute, en le forçant à contre-attaquer. Piège dans lequel les combattants ne sont pas tombés hier à Anéfis puisqu'ils ont reculé.
Par ailleurs, le week-end dernier, les autorités maliennes ont multiplié les déclarations guerrières, suite aux événements de Kidal où le MNLA a multiplié les arrestations d'hommes et de femmes au teint noir. Le mouvement azawadien affirmait être à la recherche d'espions de l'armée malienne. La médiation burkinabé a « déploré » ces événements et de son côté, le gouvernement malien a parlé « d'épuration raciale » et ajouté que « la présence de l'armée à Kidal pour les élections n'était pas négociable ».
C'est dans ce climat tendu que doivent donc s'ouvrir les premières discussions de demain à Ouagadougou entre Bamako et des groupes du nord du Mali qui se sont en quelque sorte associés pour être plus efficaces.
En effet, la commission de négociation de l'Azawad regroupe, désormais, des éléments du MNLA et Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA), un mouvement tout récent dirigé par les Intallas, la famille régnante de Kidal.
En revanche, le mouvement arabe de l'azawad (MAA), n'est pas encore représenté car le MNLA estime que ce groupe est trop proche du MUJAO.
Un accord-cadre ambitieux
Demain donc, encadrée par la médiation, cette commission du nord doit rencontrer le négociateur de l’Etat malien, Tiébilé Dramé. Les discussions doivent officiellement durer 4 jours et permettre la signature d'un accord-cadre, lundi.
Cet accord serait appliqué en deux temps. Dans un premier temps, imposer, aux mouvements du nord, un cessez le feu et cantonner les combattants pour permettre un déploiement efficace de la force onusienne et de l'administration malienne afin d'organiser le scrutin présidentiel à Kidal, prévu le 28 juillet. Bien évidemment, le MNLA refuse toute présence de l'armée malienne dans son fief.
Et dans un deuxième temps - seconde phase de l'accord - Bamako s'engagerait, une fois le nouveau président malien élu, à négocier sur les problèmes de fond, notamment sur le statut de l'Azawad et sur les projets de décentralisation et de développement pour le nord Mali.
Si les derniers événements d'Anéfis ont envenimé les relations, les deux camps restent cependant et apparemment ouverts au dialogue.
 
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Les militaires maliens abusent de la menace Al Qaida pour convaincre "les pigeons européens de leur éviter le naufrage"





Publié le 26 mars 2012
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Le coup d’Etat militaire qui a renversé le général Amadou Toumani est bien la conséquence de la défaite de son armée face aux insurgés Touaregs.
Le coup d’Etat militaire qui a renversé le général Amadou Toumani est bien la conséquence de la défaite de son armée face aux insurgés Touaregs. Crédit Reuters
Si le coup d’Etat militaire qui a renversé le général Amadou Toumani est bien la conséquence de la défaite de son armée face aux insurgés Touaregs[1], l’origine du conflit est, elle, clairement inscrite dans la nuit des temps.
Durant des millénaires les sédentaires sudistes noirs et agriculteurs ont en effet vécu dans la terreur des raids lancés contre leurs villages par les Berbères touaregs surgis des immensités sahariennes. La colonisation a libéré les premiers de cette menace puis elle a inversé le rapport des forces en leur faveur. Avec les indépendances, l’espace sahélo saharien fut ensuite cloisonné par des frontières artificielles. Pris au piège de l’utopie de l’Etat-nation, Touaregs et Noirs furent alors forcés de vivre ensemble. La démocratie a aggravé le problème car les seconds étant plus nombreux que les premiers, l’ethno mathématique électorale leur a assuré le pouvoir et ils n’ont pas boudé leur revanche historique. Voilà qui explique les évènements actuels ; mais alors que jusque là les Touaregs se battaient pour obtenir plus de justice, ils exigent aujourd’hui la partition du Mali. Les données du problème ont donc totalement changé.
Face à cette situation que peut faire une Europe condamnée, qu’elle le veuille ou non, à veiller sur son « arrière-cour » saharo sahélienne ? Peut-elle en effet laisser prospérer un irrédentisme touareg venant s’ajouter à des foyers régionaux de déstabilisation situés dans le nord du Nigeria avec la secte Boko Haram, dans la région du Sahara nord occidental avec Aqmi et dans la zone des confins algéro-maroco-mauritaniens où le Polisario qui a perdu sa guerre contre le Maroc s’est largement reconverti dans des activités mafieuses, une partie de la production mondiale de cocaïne transitant désormais par le Sahara ?
Deux options sont possibles :
1-soit l’intervention urgente et massive aux côtés des armées du Mali et du Niger à la fois pour écraser les rebelles touaregs, maintenir la fiction de ces deux Etats, tenter de contenir Aqmi et sauvegarder nos approvisionnements en uranium.
Cette solution, la plus facile, mais sans perspective, éteindra peut-être provisoirement l’incendie, mais elle ne réglera pas le problème en profondeur. En effet, la solution de la question touareg ne passe ni par un engagement militaire, ni par des élections et encore moins par le déversement d’une nouvelle aide aussi inutile que les précédentes, mais par la prise en compte de la forte personnalité de ce peuple.
2-soit tout au contraire, nous reprenons le problème à sa racine et nous revenons au réel en reconnaissant le fait touareg. Puis, nous « sous-traitons » à ce peuple, contre garanties solides, à la fois la lutte contre Aqmi et contre les structures mafieuses qui gangrènent la région. Pourquoi ne pas profiter de la situation pour corriger nos erreurs passées et mettre en pratique la célèbre maxime de Kipling qui est que « le loup afghan se chasse avec le lévrier d’Afghanistan » ?
Certes, mais l’on nous assure que les Touaregs ont partie liée avec Aqmi. Or, à y regarder de plus près, cette affirmation repose sur une profonde méconnaissance de la géographie ethnique de la région, les observateurs confondant en effet trop souvent les Touaregs qui sont des Berbères avec notamment trois autres populations sahariennes qui, elles, sont Arabes ou arabisées :
-les Chaamba  qui ont pour coeur territorial l’oasis de Timimoun en Algérie ;
-les Reguibat qui nomadisent entre la Mauritanie et le Sahara occidental ;
-les  Maures qui sont installés en Mauritanie.
Ce que n’ont pas vu les observateurs est qu’Aqmi prospère essentiellement chez certains de ces Arabes sahariens, pas chez les Touaregs, à quelques exceptions près liées à des clivages opportunistes internes à certains sous clans. Pour le moment, les Touaregs non acculturés sont en effet, et par nature, imperméables au fondamentalisme musulman : leurs femmes ne portent pas le voile, elles sont libres économiquement et sexuellement et ils sont farouchement opposés à la charia.
Le problème est que la rébellion touareg ayant perdu son protecteur libyen, elle est à la recherche de soutiens et Aqmi lui tend une main intéressée pour sortir de son propre isolement. Mais comment cette nébuleuse terroriste et mafieuse dont les forces sont à la fois très peu nombreuses et dispersées et qui, de plus, ne dispose ni de base arrière, ni d’arsenal,  pourrait-elle soutenir matériellement la guerre « classique » que mènent les Touaregs, aujourd’hui contre le Mali et peut-être demain contre le Niger? Tant qu’elle ne sera pas appuyée sur un Etat, Aqmi ne sera pas en mesure de fournir véhicules, carburant, pièces de rechange et armement adapté aux combattants touaregs. En dehors de réseaux dont l’importance réelle reste à démontrer, Aqmi ne peut rien offrir de « solide » ; tout au contraire, l’appui qu’il pourrait donner aux Touaregs condamnerait immédiatement ces derniers aux yeux des Occidentaux.
La réalité est qu’Aqmi est un appeau utilisé par l’Etat malien pour attirer les pigeons européens qui, seuls, peuvent lui éviter le naufrage.
Cependant encore, et là est le vrai danger, si l’option du soutien au Mali et au Niger était choisie par les Européens, les Touaregs seraient poussés dans les bras d’Aqmi. Comme ils sont présents dans la totalité des immensités désertiques du Sahara central et au contact de tous les autres foyers de déstabilisation de la sous région, les conséquences d’une telle association seraient alors incalculables, tant pour tout l’arc sahélo saharien que pour nos intérêts.
Nos responsables politiques doivent donc faire un choix, et vite. Or, comme ils sont formatés à travers le double prisme de la démocratie individualiste, celle du « un homme, une voix » et sur celui de l’Etat-nation unitaire, il est à craindre qu’ils ne soient pas en mesure d’appréhender la réalité régionale qui repose tout au contraire sur les groupes et sur les peuples. Dans ces conditions, il va être difficile de leur faire comprendre que le règlement de la crise passe par une profonde redéfinition de ces deux façons d’Etats que sont le Mali et le Niger…

[1]Voir à ce sujet le dossier publié dans l’Afrique réelle du mois de février 2012

En savoir plus sur http://www.atlantico.fr/decryptage/aqmi-est-appeau-utilise-etat-malien-pour-attirer-pigeons-europeens-bernard-lugan-317563.html#duzULlIH4pGJFI6E.99 

Sauvegarder la paix au Mali: la dernière mission de la France?

Matthieu Pellerin

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Sauvegarder la paix au Mali: la dernière mission de la France?

Publication: 06/06/2013 06h00
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Début mai, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius fixait l'objectif qu'il reste à atteindre : "il faut maintenant gagner la paix au Mali". Ce mercredi, l'armée malienne, en prenant le contrôle d'Anefis, a fait voler en éclat le fragile équilibre sécuritaire qui prévalait jusqu'ici avec le MNLA et le HCUA... Les regards sont désormais braqués sur Kidal, même si la remontée de l'armée malienne dans le fief du MNLA et du HCUA reste incertaine.
Il est incontestable que le recours à la force est parfaitement légitime pour une armée malienne souveraine sur son territoire, tout comme l'est également la restauration de l'intégrité territoriale. Pour autant, l'intervention armée comme moyen de restaurer cette intégrité territoriale n'est ici ni pertinente, ni opportune pour différentes raisons.
  • Militairement, l'armée malienne a davantage brillé par son appétit de vengeance que par son efficience opérationnelle sur un théâtre dont elle n'a jamais été maîtresse, le Sahara. A Kidal, la guerre pourrait non seulement ouvrir la voie à de nombreuses exactions voire atrocités, mais elle pourrait de nouveau voir l'armée malienne rentrer bredouille, sauf si cette armée venait à bénéficier d'appuis extérieurs. La France est bien évidemment sollicitée par Bamako comme par le MNLA et ce serait là une grave erreur que de répondre favorablement à l'une ou l'autre des sollicitations. Nous y reviendrons. L'armée pourrait également bénéficier d'appuis fort stratégiques, et qui ne diront pas leur nom, du MAA et d'éléments proches du MUJAO. Des mariages d'intérêts pour le moins suspects et qui, s'ils sont avérés, questionnent les enjeux cachés de cette remontée à Kidal.
  • Politiquement, un affrontement armé scellera le divorce entre les Touareg et le sud du pays, renvoyant la paix à un horizon aussi lointain qu'incertain. Disons le tout de go. Si le MNLA souffre aujourd'hui au nord d'un déficit de légitimité en tant qu'organisation à la gouvernance douteuse et aux choix obscurs (à commencer par sa proclamation d'indépendance alors que le groupe était aux abois face à Ansar Dine), le MNLA reste extrêmement populaire par l'idéal et le projet qu'il incarne au nord. L'intervention de l'armée malienne à Kidal rangera à n'en pas douter l'immense majorité de la population azawadienne dans le camp d'un MNLA qu'elle critique pourtant à l'envi. Tout le monde y perdra, le Mali en premier car l'intégrité ne sera rétablie que provisoirement et par la force. Considérer que la paix reviendra une fois le cas du MNLA soldé est une vue de l'esprit. Plutôt que de déposer les armes et d'intégrer l'armée malienne, la jeunesse qui constitue le cœur combattant du MNLA (et l'immense majorité de la population touarègue) ne transigera pas et préférera fuir en Libye, en Algérie, en Mauritanie ou au Niger d'où naîtra dans quelques mois ou années une nouvelle rébellion...
Ce regain de tension est d'autant plus regrettable qu'il intervient alors même que les négociations entre les groupes armés et l'Etat malien étaient en bonne voie : le MNLA et le HCUA ont trouvé matière à s'entendre à minima, le MNLA a renoncé à l'indépendance, a reconnu l'intégrité territoriale du Mali, et a accepté de laisser entrer la MINUSMA à Kidal pour que le scrutin présidentiel puisse se tenir. Autant d'avancées majeures qui ont buté sur le refus de désarmer et de laisser l'armée malienne remonter à Kidal. Pourtant, ces blocages ne sont absolument pas de nature à remettre en cause la tenue du scrutin à Kidal, mais ils sont inacceptables pour la rue bamakoise animée d'une intarissable soif de vengeance contre le MNLA. Dans un contexte préélectoral où l'heure pour les candidats en quête de popularité n'est pas à la pondération mais à la surenchère anti Touareg, la raison n'a plus sa place... En expulsant sans discernement plusieurs dizaines de "noirs" de Kidal dimanche dernier, le MNLA n'a pas fait preuve de finesse et a fourni un argument de nature à justifier l'urgence d'une remontée de l'armée.
Lire aussi:
» La Guerre au Mali va-t-elle déstabiliser tout le Sahel?
» Les mouvements islamistes en Afrique
Politiquement toujours, il convient de lire derrière la restauration d'une souveraineté perdue de sombres desseins communautaires ou personnels. Je me garderai bien ici de citer de noms ou des groupes, mais l'armée malienne est loin d'être homogène et certaines de ses composantes ont manifestement pour souci premier de torpiller des négociations qui, en cas d'accord, auraient pour effet de les isoler. Les lecteurs avertis comprendront, il suffit d'observer qui est à la manœuvre au sein des forces maliennes à Anefis. Ce sont là des arguments qui ne devraient pas avoir leur place au Mali.
- Géopolitiquement, cette situation serait catastrophique et heurterait frontalement les objectifs stratégiques de la France. Récemment encore, lors d'une réunion à Paris, des cadres Touareg ont mis en garde sur les conséquences d'une guerre contre le MNLA. Les menaces sont loin d'être fantaisistes... Rappelons en quelques mots que les Touareg aujourd'hui établis à Kidal jouissent de relations familiales et tribales dans l'ensemble de la région, au sud de l'Algérie, au sud de la Libye et au nord du Niger. Cela constitue autant de bases arrière potentielles à partir desquelles, non seulement de nouveaux foyers de rébellions pourraient se préparer mais également de nouvelles alliances pourraient se constituer, en premier lieu avec les groupes jihadistes. Iyad Ag Ghaly, aujourd'hui dévoyé, pourrait rapidement retrouver un certain crédit auprès de jeunes Ifoghas qui l'admirent mais contestent sa radicalité. En outre, les Touareg nigériens ne resteraient sans doute pas insensibles au sort de leurs frères maliens. Cela pourrait se traduire au Niger voisin par des troubles sociopolitiques et un accroissement de la menace contre les intérêts français, au premier rang desquels figure Areva, qui vient déjà d'être frappée par le désordre régional. La sécurité dans le Sahara ne peut être assurée sans la participation des Touareg, dans un cadre national, à la lutte contre le terrorisme. Il faudra s'y résoudre même si cela dérange. L'appui fourni par le MNLA lors de l'opération Serval doit servir de piqure de rappel. Alors que les Touareg restent pour l'heure encore minoritaires au sein des groupes jihadistes, il serait malvenu de les jeter dans leurs bras.
La situation est singulièrement précaire et les regards se tournent alors instinctivement vers la France. Il est de sa responsabilité d'assumer un rôle d'interposition qui est inhérent à sa position de force actuelle, a fortiori parce que la situation à Kidal résulte en très grande partie de l'opération Serval. Par son engagement militaire, la France a non seulement libéré le territoire des jihadistes et ouvert la voie à une restauration de l'intégrité territoriale en accompagnant l'armée malienne à Gao et Tombouctou, mais elle a dans le même temps bien involontairement permis au MNLA de reprendre pied à Kidal. Depuis, la France est prise en étau, coincée entre son attachement indéfectible à l'intégrité territoriale du Mali, et sa volonté de préserver des relations cordiales (et partenariales dans le cadre de Serval) avec les populations touarègues.
L'opération Serval, parmi ses nombreux mérites, a celui d'avoir assumé un interventionnisme que l'on aurait qualifié encore récemment de néocolonialisme. Flirtant avec ce glissement sémantique, le Président français s'est même permis d'affirmer que la France se montrerai "intraitable" sur le maintien du calendrier électoral initialement prévu. Si l'objectif premier de la France est effectivement "de gagner la paix", pourquoi pareille fermeté ne prévaudrait-elle pas pour calmer les ardeurs de l'armée malienne ? Jusque-là, la France a toujours su dégonfler la pression lorsque l'armée malienne annonçait sa volonté de reprendre Kidal, assumant parfaitement le rôle d'arbitre qu'elle s'est elle-même octroyé en lançant l'opération Serval. Il faudrait qu'il en soit ainsi cette fois-ci encore. En contenant l'armée malienne à la frontière de Kidal jusqu'au déploiement de la MINUSMA le 1er juillet, et en prévenant tout conflit jusqu'au scrutin du 28 juillet, la France ne ferait pas preuve d'ingérence mais elle assumerait ses responsabilités jusqu'au bout, celles d'un acteur international qui a lutté contre le terrorisme et aujourd'hui sauvegarde la paix. Le Président élu aura alors ensuite loisir d'engager des négociations avec le MNLA dans un climat plus serein et plus sécurisant que celui précédemment décrit. Pareille position placerait la France dans une position encore plus inconfortable vis-à-vis de Bamako au moment où des manifestations anti-françaises y sont programmées, mais si d'aventure une guerre à Kidal s'avérait sanglante, qui peut croire que la France en sortirait indemne ? La promotion du dialogue a été au centre de la diplomatie française depuis les premiers jours ayant suivi Serval, il serait dommage que les efforts consentis et traduits par des négociations entamées à Ouagadougou soient ainsi balayés au profit d'une guerre qui ne fera qu'aggraver les choses pour tout le monde.

mercredi 5 juin 2013

NDLR:Trahison française contre les alliés Touareg suite/Le Mali déterminé à reprendre Kidal aux rebelles touaregs

 La carte du Mali décryptée en 5 minutes



Carte animée : la situation au Mali décryptée... par lemondefr

Le Monde.fr avec AFP | 05.06.2013 à 16h42 • Mis à jour le 05.06.2013 à 18h23









Alors que la rébellion touareg s'oppose toujours au déploiement de l'administration et de l'armée maliennes dans son fief de Kidal, François Hollande a réaffirmé, mercredi 5 juin, que l'élection présidentielle du 28 juillet aurait lieu "à la date prévue dans tout le Mali, et donc à Kidal".

"Le processus en cours doit permettre d'accompagner l'administration civile malienne à Kidal comme dans tout le nord du Mali", a-t-il dit, soulignant qu'"aucun groupe armé ne peut rester armé au Mali". M. Hollande a également reçu le prix de l'Unesco pour la paix, neuf chefs d'Etat et de gouvernement africains, au premier rang desquels le Malien Dioncounda Traoré, lui faisant part de leur "gratitude pour sa contribution considérable à la paix et à la stabilité en Afrique".

L'armée malienne est en effet bien décidé à reprendre cette ville aux mains des séparatistes touaregs. Plus tôt dans la journée, deux soldats maliens ont été blessés et dix hommes ont été tués parmi les touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), selon l'armée malienne. Le gouvernement a accusé les Touareg du d'arrestations arbitraires et de violences à l'égard de Maliens non touaregs à Kidal.

Lire aussi : Au Mali, le pouvoir veut récupérer Kidal des mains des Touareg

LA REPRISE DE KIDAL, OBJECTIF PRINCIPAL

Ce mouvement de troupes en direction de Kidal intervient après un attentat-suicide commis contre un chef militaire du MLNA et aussi après l'expulsion ce week-endvers Gao de dizaines de membres des communautés noires de la ville par le mouvement séparatiste.

Le ministre des affaires étrangères, Tiéman Coulibaly, avait déclaré à ce propos :"Nous ne pouvons pas accepter que des Maliens soient pris en otage par des criminels." Selon le MNLA, plusieurs dizaines de personnes, dont un officiermalien, ont été arrêtées par ses hommes à Kidal.