lundi 9 avril 2012


HÉLÈNE CLAUDOT-HAWAD
Business, profits souterrains et stratégie de la terreur La recolonisation du Sahara

DIRECTEUR DE RECHERCHE - CNRS

samedi 7 avril 2012



Terroristes, islamistes, trafiquants, preneurs d’otages, voleurs, violeurs de fillette, égorgeurs, usurpateurs minoritaires, indépendantistes illégitimes, aventuriers sans programme politique, activistes obscurantistes et quasi-médiévaux et, pour couronner le tout, destructeurs potentiels de manuscrits trésors de l’humanité… Le bon vieux scénario colonial de terreur barbare et de diabolisation des rebelles touaregs au Mali s’étale à la une, alors que la création de la République de l’Azawad vient d’être déclarée le 6 avril 2012 par le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad). L’aspiration à l’indépendance d’une population malmenée depuis cinquante ans par un Etat dont le caractère « démocratique » relève de la langue de bois est malvenue dans la zone saharo-sahélienne. Dans le tableau caricatural présenté à l’opinion publique, l’innommable demeure la revendication politique des Touaregs, systématiquement tue par les experts assermentés. Le motif du jihad islamiste vient à point nommé pour étouffer tout élément d’intelligibilité de la situation et légitimer la répression à venir du mouvement et peut-être, comme par le passé, les dérives génocidaires. Qui se souvient des milices paramilitaires maliennes qui, juste après les accords de paix signés entre la rébellion et le gouvernement malien en 1991, ont été lancées contre les civils touaregs et maures à « peau rouge », torturés, tués, décimés ou contraints à l’exil 1 , dans un silence international fracassant et sous le gouvernement même d’ATT, président du Mali démocratique, aujourd’hui détrôné par une junte militaire non démocratique ?

Le canevas jihadiste n’a rien de nouveau, il a été régulièrement brandi et activé, d’abord au sujet de la guerre anticoloniale menée par les Touaregs jusqu’à l’écrasement complet de leur résistance en 1919, puis à chaque soubresaut contre les régimes autoritaires des Etats postcoloniaux, mis en place en fonction des intérêts de l’ancien empire colonial. L’amalgame entre insurgés touaregs, islamistes et terroristes, sans compter les autres registres diffamatoires, est un raccourci commode pour éradiquer, sous couvert de lutte anti-terroriste, toute contestation politique de la part des Touaregs, toute déclaration ou action qui pourrait contrarier les intérêts des grands acteurs politiques et économiques de la scène saharienne. Les opposants sont d’ailleurs immédiatement pris en main par les services spéciaux des Etats à l’aide des dispositifs habituels : intimidation, diffamation ou corruption. L’un des petits cadeaux classiques et anodins que les services français ont toujours offert spontanément à leurs « amis touaregs » est un téléphone portable, satellitaire si nécessaire, directement branché sur les centres d’écoute 2

. Mais l’enjeu essentiel de la question saharo-sahélienne ne se joue pas à l’échelle locale. Il concerne l’économie mondiale et le redécoupage des zones d’influence entre les puissances internationales avec l’entrée en scène de nouveaux acteurs (américains, chinois, canadiens, etc) qui bousculent l’ancien paysage colonial. L’accès convoité aux richesses minières (pétrole, gaz, uranium, or, phosphates...) dont regorgent le Niger, la Libye, l’Algérie, et le Mali d’après des prospections plus récentes, est au centre de la bataille invisible qui se déroule dans le désert. Les communautés locales n’ont jusqu’ici jamais comptées en tant que telles, mais seulement comme leviers de pression qu’ont systématiquement cherché à manipuler les Etats en concurrence. C’est ainsi que les revendications politiques touarègues ont longtemps été contenues dans les limites strictes d’une autonomie régionale, d’ailleurs jamais appliquée par les Etats ; et c’est pourquoi l’autre manette d’action que représentent les islamistes est devenu une réalité saharienne. Par contre, la question des liens étroits qu’entretient la création des groupes islamistes au Sahara avec, au premier rang, l’Etat algérien, n’est pratiquement jamais évoquée. De même qu’un silence de plomb règne sur les interventions constantes des services secrets français, algériens et libyens pour contrôler à leur profit la rébellion touarègue, la divisant en groupes rivaux destinés à se neutraliser les uns les autres.

Sous la pression des nouveaux contextes politiques nationaux et internationaux, les mouvements insurrectionnels touaregs ont, de leur côté, fortement modifié leurs revendications et leurs axes de mobilisation, dans la forme comme dans le contenu. Ils sont passés d’un projet d’indépendance politique de tout le « territoire des Touaregs et de ses marges » (Kawsen) au début du XXe siècle, lors de l’insurrection générale contre l’occupation coloniale, à des revendications plus restreintes : en 1963, les Touaregs de l’Adagh se soulèvent contre le découpage frontalier (entre le Mali et l’Algérie) qui les privent d’une partie de leur territoire et les séparent des Touaregs de l’Ahaggar ; la répression par l’armée malienne contre les civils sera féroce, laissant des cicatrices indélébiles jusqu’à aujourd’hui et cette terreur instaurée contre la population sans défense fournira le modèle privilégié utilisé pour réprimer chaque nouvelle insurrection touarègue dans les Etats de la zone saharosahélienne. Dans les années 1990, les mouvements rebelles du côté nigérien autant que malien expriment une revendication d’autonomie régionale infra étatique qui ne remet plus en cause les frontières postcoloniales. Les mouvements nés en 2007 s’insurgent contre la mal gouvernance mais, en dépit de leur inscription dans l’identité nationale étatique – « Notre identité est Niger » déclare le 23 avril 2008 Aghali Alambo, responsable touareg du Mouvement des Nigériens pour la Justice –, ils sont accusés d’ethnicisme et de communautarisme. En février 2012, le MNLA, fondé par des Touaregs du côté malien et armé d’une force de frappe inédite suite à l’effondrement de la Libye, revendique clairement « l’indépendance de l’Azawad » et une ligne politique républicaine, laïque et pluri-communautaire. Un nouveau mouvement, Ansar Dine, dirigé par Iyad ag Ghali, surgit en mars 2012, alors que l’action armée du MNLA est déjà engagée : l’objectif d’Ansar Dine est religieux et sa tendance salafiste, visant à instaurer la sharia dans tout le Mali et l’Afrique de l’ouest. Iyad Ag Ghali s’exprime bruyamment dans les média et donne l’occasion aux responsables politiques internationaux de brandir à nouveau la menace islamiste comme étendard de terreur et argument qui légitimerait une intervention militaire soutenue par la communauté internationale.

La carte du péril terroriste dans la zone saharo-sahélienne est jouée. Le projet était déjà dans les cartons des Etats bien avant les événements actuels. L’existence d’al Qaïda au Maghreb est en effet un schéma qui s’ébauche en 2001 quand le Département de Renseignement et de Sécurité algérien (DRS) annonce que l’armée a abattu un combattant yéménite présenté comme un émissaire de Ben Laden cherchant à assurer la liaison avec le Groupe Salafiste pour la Combat (GSPC). Dans le cadre de la lutte anti-terroriste, les Etats-Unis promettent à l’Algérie une aide en équipement militaire qui tarde à venir jusqu’à ce qu’un événement opportun survienne pour sceller la coopération américano-algérienne : l’enlèvement en mars 2003 de trente-deux touristes européens dans le sud algérien par des membres du GSPC. Ce groupe est dirigé par Amari Saïfi, alias Abderrezak El Para. Mais l’itinéraire de cet ancien militaire algérien révèle de nombreuses incohérences 3 qui montrent qu’il s’agit plutôt d’un « agent infiltré du DRS » (Malti, 2008). Sur le terrain, les observateurs touaregs constatent que les ravisseurs se ravitaillent dans les casernes du sud algérien et que certains d’entre eux, croisés sur les pistes sahariennes, n’ont visiblement pas passé la nuit à la belle étoile. La capture d’El Para en 2004 par un petit groupe de rebelles tchadiens qui propose sans succès à l’Algérie, aux USA et à la France de leur livrer l’islamiste le plus recherché d’Afrique, montre que cet épisode n’entrait pas dans le scénario organisé de la traque des « terroristes » à travers tout le Sahara. C’est finalement la Libye qui se chargera d’extrader El Para vers l’Algérie. Le rapt des otages dont un groupe sera libéré contre rançon au nord du Mali après une étrange mise en scène d’affrontement armé, donne l’occasion au président américain Bush d’agiter le spectre d’Al Qaïda au Sahara et d’affirmer la nécessité d’étendre la chasse aux extrémistes, de la corne de l’Afrique à l’Atlantique.

La Pan-Sahel Initiative (programme d’assistance militaire américaine au Mali, Niger, Tchad et Mauritanie), élaborée dès 2002, devient opérationnelle en 2003 avec l’envoi de troupes américaines sur le sol africain. Cette coopération militaire s’étend en 2005 à tous les pays adjacents (Tunisie, Algérie, Maroc, Sénégal, Nigéria) et devient l’Initiative du Contre-terrorisme trans-saharien. Le Rapport sur le terrorisme dans le monde publié en avril 2007 par le département d’État américain, produit une carte explicite qui désigne comme « Terrorist Area » pratiquement toute la zone saharo-sahélienne, et en particulier celle où évoluent les Touaregs et leurs anciens partenaires économiques et politiques. Les routes caravanières et les axes de circulation habituels des familles sont inclus dans ce périmètre terroriste. Pour l’Algérie, seuls les espaces frontaliers avec le Maroc, le Mali, le Niger et la Libye, font partie de l’aire incriminée, alors même que les attentats islamistes à cette période précise ont tous lieu au nord de ce pays, et notamment dans sa capitale. Le rapport américain allègue que ces zones désertiques servent de refuge aux organisations terroristes défaites au Moyen-Orient. Selon le Département d’Etat, le GSPC qui aurait fusionné en septembre 2006 avec Al Qaïda - prenant le nom d’Al-Qaïda in Islamic Maghreb (AQIM) - « a continué d’être actif au Sahel, franchissant les frontières difficiles à surveiller entre le Mali, la Mauritanie, le Niger, l’Algérie et le Tchad pour recruter des extrémistes aux fins d’entraînement et de lancement d’opérations dans le Trans-Sahara et peut-être à l’extérieur. Sa nouvelle alliance avec Al-Qaïda lui a peut-être donné accès à plus de ressources et à un entraînement accru. »

Le rapport manie sans cesse la dichotomie simpliste et bien connue entre un monde civilisé et régulé par l’autorité étatique dont l’Occident aurait le monopole et l’espace sans foi ni loi des « tribus », aboutissant à des injonctions d’intervention au nom de la sécurité du monde. Le glissement entre supposition et réalité est opéré en 2008 par la presse américaine qui abandonne les « peut-être » du Rapport du Département d’Etat américain. La traque de « Al-Qaeda in the Islamic Maghreb (AQIM) » par les forces armées américaines au Sahel devient une évidence indiscutable, de la même façon que s’instaure insidieusement l’idée que le groupe islamiste serait aidé par des : « tribus nomades connues sous le nom de Touareg, un groupe ethnique berbère qui est en lutte avec le gouvernement du Mali » et d’autre part que sa trésorerie serait assurée par le trafic de drogue (Daniel Williams, in Bloomberg.com, 23 avril 2008).

Le compactage commode opéré entre ‘islamistes / terroristes /Touaregs /nomades / trafiquants’ dessine ainsi une « zone de non droit » livrée aux « tribus », et donc à l’anarchie, au désordre, à la délinquance. On retrouve ici la sémantique et le schéma appliqués entre autres à l’Afghanistan par les autorités américaines, avec le succès que l’on connaît.

Entretemps, l’ancien GSPC devenu Aqmi se développe au nord du Mali. Le successeur d’El-Para à la tête d’Aqmi est un autre algérien du nord, Mokhtar Belmokhtar. Grâce à la rançon obtenue en échange des otages, il s’assure des complicités locales dans l’Azawad en milieu arabophone et aurait pris épouse chez les Maures de Tombouctou. Il s’insère notamment aux réseaux de contrebande de cocaïne que les Etats ou du moins des personnes haut placées dans l’appareil étatique laissent opérer entre Mali, Mauritanie, Sahara occidental, Algérie, Niger, Libye, tant les bénéfices perçus sont juteux. Plusieurs brigades d’Aqmi sont identifiées dans cet espace, nanties de véhicules lourdement armés qui se déplacent au grand jour sans se dissimuler. Ces groupes qui ont établi un lien direct avec Al-Qaïda échappent à présent au contrôle de l’Algérie. En 2007, les services algériens auraient même tenté de faire assassiner Belmokhtar par des éléments de la rébellion touarègue 4

Iyad ag Ghali, ancien chef de la rébellion touarègue des années 1990, travaillant ensuite au profit du gouvernement malien, a été en 2004 le médiateur principal dans l’affaire des otages enlevés par Aqmi. Il aurait alors été chargé d’ « infiltrer les groupes d’Abou Zeid et Belmokhtar via la Katiba Ansar Essuna selon un plan bien établi avec les services secrets maliens et algériens » (Ansar 2012). Assumant des fonctions diplomatiques en Arabie Saoudite pour le gouvernement malien, il se rapproche des courants salafistes et des soutiens financiers lourds qu’ils procurent. Le 18 mars 2012, après les premiers succès significatifs du MNLA dans l’Azawad, il apparaît à la tête de son nouveau mouvement appelé Ansar Dine, spécialement créé pour diviser le front indépendantiste et « le dégarnir en hommes » (Ansar 2012). On a à faire, en somme, au traitement habituel des dynamiques insurrectionnelles par les services secrets, travaillant toutes les lignes de fractures possibles. Sauf que le schéma tribal sur lequel s’appuient ces stratégies d’affaiblissement du MNLA ne fonctionne pas exactement comme l’imaginent ou comme ont systématiquement essayé de l’instaurer depuis 1990 les artisans de la division.

Les informations alarmistes qui circulent sur les islamistes qui auraient chassé le MNLA et seraient sur le point d’imposer la sharia jusqu’à Bamako font partie du schéma de terreur, manipulé par les Etats en vue d’obtenir le soutien de l’opinion publique internationale pour justifier une intervention militaire musclée destinée à éradiquer le « Danger » qui en fait, pour leurs intérêts, serait au nord plus indépendantiste qu’islamiste.

Derrière la poudrière saharienne et ses imbroglios inouïs dont je n’ai évoqué qu’un très petit aspect, se profile l’échec cuisant des Etats postcoloniaux dits indépendants et de leurs élites, modelés spécialement pour préserver les intérêts pharaoniques des puissances internationales anciennes et montantes, au détriment complet de leurs peuples, souffrants, réprimés, brisés, manipulés, interdits de voix, d’espoir, de futur et dont le désir de vie se transforme peu à peu en désir de mort, pour des soulèvements à venir de plus en plus désespérés.

Hélène Claudot-Hawad, 6 avril 2012

[1]

Notes

[1] 1 Voir CLAUDOT-HAWAD Hélène et HAWAD (eds.), Touaregs. Voix solitaires sous l’horizon confisqué, Ethnies, Survival International, Paris, 1996

2 Pour les interventions de la DGSE dans le dossier touareg, voir SILBERZAHN Claude et GUISNEL Jean, Au cœur du secret. 150 jours aux commandes de la DGSE, 1989-1993, Fayard, Paris, 1995.

3 Voir à ce sujet notamment MALTI Hocine , Les guerres de Bush pour le pétrole , Algeria-Watch, 21 mars 2008 ; BENDERRA Omar, GÈZE François, MELLAH Salima, , « L’« ennemi algérien » de la France : le GSPC ou les services secrets des généraux ? », Algeria-Watch, 23 juillet 2005 ; GÈZE François et MELLAH Salima, "Al-Qaida au Maghreb" et les attentats du 11 avril 2007 à Alger. Luttes de clans sur fond de conflits géopolitiques, Algeria-Watch, 21 avril 2007 ; KEENAN Jeremy, « The Collapse of the Second Front », Silver City, NM and Washington, DC : Foreign Policy In Focus, Sept. 26, 2006.

4 Voir ANSAR Issane, « Métastases du salafisme Algérien à l’épreuve des soubresauts sahariens et des rebellions Azawadiennes », blog Temoust, 2012.
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6 Messages de forum


Pour libérer les otages algériens : des négociations avec Belmokhtar sont en cours

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le 08.04.12 | 10h00 3 réactions
 
 Boualem Sias, consul d’Algérie, cinq de ses fonctionnaires et le représentant de la communauté algérienne à Gao sont toujours en captivité. 
  
zoom | © D. R.
Boualem Sias, consul d’Algérie, cinq de ses fonctionnaires...

Les sept otages de la mission consulaire algérienne sont sains et saufs. L’auteur de l’enlèvement n’est autre que Mokhtar Belmokhtar, celui qui fut l’émir de la zone du Sud pour le GSPC, puis d’AQMI. Des négociations autour de la libération des otages avancent. Elles seraient menées par Iyad Ag Ghaly, une connaissance de Belmokhtar.

De notre envoyée spéciale
à Achebrache (nord du Mali)
Alors que des rumeurs font état du départ, vendredi, de nombreux éléments du groupe Ançar Eddine, de Kidal vers Mopti et Bamako pour «protéger les familles des musulmans et instaurer la chariâ», des sources sûres parlent de négociations avec Mokhtar Belmokhtar pour la libération des sept otages algériens, parmi lesquels le consul, le vice-consul, les chargés des transmissions, de l’état civil, de la sécurité, ainsi que le représentant de la communauté algérienne à Gao. Selon nos interlocuteurs, c’est Iyad Ag Ghaly, en personne, qui s’est chargé de servir de «négociateur», étant donné les relations qu’il entretient avec l’émir de la phalange Al Mulathamine (Les enturbannés), Mokhtar Belmokhtar, en dissidence avec Abou Zeid, l’émir de l’AQMI dans la région du Sahel.
Selon nos sources, il s’agirait d’un véritable test pour Iyad qui, acculé par le MNLA, doit résoudre «cette dérive» sans «aucune» effusion de sang. «Il a pris contact avec Belmokhtar et les négociations se poursuivent. Nous avons de bonnes raisons de croire que les otages seront relâchés le plus rapidement possible», déclare le commandant Aïssa Ag Akli, chargé de la sécurité de la zone d’Achebrache, non loin de Tin Zaouatine (au nord du Mali). Cette sortie de Iyad pourrait être expliquée par ces déclarations de témoins présents lors de l’enlèvement des diplomates, qui impliquent directement des éléments de Ançar Eddine dans le rapt.
«Très gêné et surtout acculé par les dirigeants du MNLA, Iyad s’est senti obligé d’intervenir, en allant lui-même à la recherche des otages. Il est entré en contact avec Mokhtar Belmokhtar, le chef du groupe et auteur de l’enlèvement  pour négocier la libération de tous les otages. Selon notre interlocuteur, le commando qui a assiégé le consulat était dirigé par Belmokhtar en personne. Il était composé d’une vingtaine de personnes au moins, en majorité des Algériens, mais soutenu et appuyé par des membres de Ançar Eddine. Ces derniers leur ont ouvert la route en protégeant leur retraite. L’opération a eu lieu en plein jour, aux environs de 11h, et en plein centre-ville.
Personne ne peut dire que ça s’est passé dans la discrétion. Ils ont eu le temps d’entrer dans les locaux et de fouiller les bureaux à la recherche de tous les occupants. Ils ont emmené tous ceux qu’ils ont trouvés à bord d’une dizaine de Toyota Station, qui les attendaient dehors et à bord desquels il y avait des hommes puissamment armés. Avant de partir, Belmokhtar a baissé le drapeau algérien qu’il a brûlé devant tout le monde. Il a par la suite hissé une étoffe noire sur laquelle on pouvait lire : ‘’La Ilah ila Lah, Mohamed rassoul Allah, Allah Akbar’’ (il n’y a de Dieu qu’Allah, et Mohamed est son prophète, Allah est grand). Il l’a laissé flotter une bonne dizaine de minutes pour filmer la scène et quitter les lieux», raconte, un Targui de Gao. Cette opération est en quelque sorte un «affront» pour les dirigeants du MNLA, qui étaient beaucoup plus occupés par l’organisation des rangs que par la sécurisation des villes. Des casernes entières ont été vidées et les quantités importantes d’armement sont toujours dans la nature.
Le rapt des diplomates algériens a suscité de lourdes craintes, mais également des divergences au sein du mouvement. «Au MNLA, nous sommes conscients de la dérive de Ançar Eddine et de Iyad, mais certains de nos dirigeants ne veulent pas ouvrir un front intérieur. AQMI est une organisation bien structurée et puissante. Elle a de l’influence sur certaines tribus. Il sera très difficile de la chasser du territoire avec les moyens que nous avons mais aussi durant la conjoncture actuelle. Des Etats avec leurs puissantes capacités n’ont pu la neutraliser. Toute la direction du mouvement est maintenant braquée sur la libération des sept otages que détient AQMI. Nous misons fortement sur leur retour, sains et saufs», explique un commandant du MNLA.
Ses déclarations se confirment sur le terrain, où des divergences commencent à apparaître entre les cadres du mouvement qui veulent à tout prix régler le compte à Iyad et «éloigner toute suspicion d’appartenance ou de lien avec Al Qaîda» et ceux qui ne voient pas les groupes islamistes armés comme un danger mais plutôt comme des partis islamistes qui doivent avoir le droit d’exister. «Cette dernière tendance n’est pas majoritaire, mais elle reste influente du fait de son appartenance à des tribus dites nobles. Néanmoins, au sein de la base, la majorité des combattants sont contre la sortie de Iyad. Il n’est pas exclu que des mesures soient prises contre lui, d’autant que la plus haute direction du MNLA a déjà pris la décision de désarmer tous les groupes. Aucune arme ne circulera en dehors de celles détenues par les combattants du MNLA», explique le commandant Moussa Ag Ahmed.
Pour lui,  l’enlèvement des membres de la mission consulaire algérienne est «une grave dérive qui nous a donné à réfléchir. Nous ne pouvons accepter que d’autres forces que le MNLA puissent agir sur notre territoire. Nous sommes en train de nous organiser. La situation d’insécurité qui a suivi l’occupation des villes était prévisible. Notre Etat vient de naître, il lui faut du temps pour maîtriser la situation», note Aïssa Ag Akli.
En tout état de cause, le rapt des membres de la mission consulaire algérienne à Gao a suscité de lourdes inquiétudes chez la population, qui, faut-il le préciser, l’a unanimement dénoncé. Pour beaucoup, cette opération «devra pousser le MNLA à se mobiliser contre les salafistes armés qui pour la majorité sont des étrangers, des Algériens, Tunisiens, Marocains, Pakistanais, Nigérians, Ethiopiens et Somaliens». En bref, avec la présence des groupes d’AQMI, tout le monde craint une «talibanisation» du nord du Mali. Une réaction légitime, quand on sait qu’AQMI utilise les mêmes pratiques, les mêmes moyens et le même système d’endoctrinement que ceux des talibans en Afghanistan…
Salima Tlemçani

Nasser Abouzakhar, Fathi Baja & Mohammad Ahdash Interview 30 - BBC Arabi...

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la traversée de désert, le grand voyage de libye vers l'azawad.

Tuareg groups disagree on objectives

Bey , lettré musulman des Kel Essuk de l'Adghagh ("Adrar n'Ifoghas") : " Ce pays est à nos ancetres les Imazighen .


  • Alessandra Giuffrida a partagé une photo de Mouelhi Chaker.
    Bey , lettré musulman des Kel Essuk de l'Adghagh ("Adrar n'Ifoghas") : " Ce pays est à nos ancetres les Imazighen . Avant l'arrivée de l'Islam , c'était un pays uni , de l'Ouest de l'Egypte jusqu'à la mer de la Mauritanie actuelle , de la mer blanche du centre jusqu'au fleuve de Gao . Tout ce pays appartenait aux Imushagh ... Les gens de ce pays vivaient de l'élevage , ou de la chasse , des caravanes , de l'agriculture oasienne . C'est ainsi , chez nous , les Kel Tamashaq , que nos livres de science le rapportent . Si tu veux connaitre la vérité ou le mensonge sur l'histoire d'un pays , va voir ses vestiges . Dans ce pays , il n'y a d'autres traces que celles des Imushagh ... Nous qui habitons et connaissons ce pays , nous n'avons jamais vu les traces d'une vie passée qui ne soit pas celle des Imushagh : ( il y a ) des Tifinagh , des cavaliers , des chameliers , différentes scènes d combat avec des guerriers tenant la lance , l'épée et le bouclier [ il s'agit de gravures rupestres ] . Nous n'avons jamais vu aucune représentation avec l'arc qui est une arme du Sud , ni aucun vestige qui rappelle les scènes de vie des Noirs ... Pas plus les Arabes que les Français , aucun d'eux ne figure dans ces vestiges . Ils n'ont laissé aucune trace ancienne comme les notres en ont laissé . Meme les quelques rares écritures arabes que tu trouveras aux alentours d'Essuk ou les villes anciennes sont tardives , datant de l'arrivée de l'Islam , l'époque de Koseilata . Mais dès que tu t'éloignes de ces cités islamisées , il n'y a plus aucune trace d'Arabe ni d'Islam . Sur chaque rocher de ce désert tu verras seulement les Tfinagh qui posent les jalons de l'histoire des Kel Tamashaq . " ( 1985 ) .

dimanche 8 avril 2012


Interview

Afrique | 7 avril 2012 | Mise à jour le 8 avril 2012

Rufin : "Les Touaregs peuvent devenir un allié précieux"


INTERVIEW - Jean-Christophe Rufin, ancien vice-président de Médecins sans frontières (MSF), a été ambassadeur de France au Sénégal de 2007 à 2010. Un poste d’observation idéal pour écrire Katiba (réédité récemment chez Folio/Gallimard), un roman dans lequel il raconte les jeux troubles des groupes nomades et islamistes du désert sahélien sur fond de complot terroriste.



Comment expliquez-vous cette victoire si rapide des Touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et de leurs alliés islamistes d’Aqmi et d’Ansar Dine?
Le président malien Amadou Toumani Touré était seul et réticent à mener une lutte totale contre les rebelles. En Mauritanie, son homologue avait fait le choix d’une répression très dure et d’un contrôle sévère aux frontières. Au Niger, le nouveau président Issoufou a décidé d’intégrer les Touaregs à tous les niveaux de responsabilité nationale et locale. Quant à l’Algérie, en réussissant à repousser les dirigeants d’Aqmi en dehors de son territoire, elle a estimé que sa lutte antiterroriste avait atteint son but et elle ne souhaitait pas que la France s’implique et s’implante dans la région. Sa responsabilité dans la paralysie des autorités maliennes est importante.

Le MNLA annonce maintenant qu’il va se retourner contre Aqmi? Est-ce possible?
Les deux mouvements avaient une stratégie commune à court terme pour pousser leurs pions en même temps sur le terrain avec l’avantage militaire qu’ils avaient puisé en termes d’armement massif acquis en Libye après la chute de Kadhafi. Aujourd’hui leurs intérêts sont contradictoires. Le MNLA veut s’imposer sur ses terres de l’Azawad libéré. Aqmi veut disposer d’un sanctuaire au cœur d’un État désordonné pour son djihad global dont les cibles sont parfois lointaines (la France par exemple) tandis qu’Ansar Dine, branche islamiste locale, veut instaurer un islam pur et dur dans les localités où elle est présente. Si on estime que les revendications touareg sont les plus légitimes, le MNLA pourrait être un allié très précieux pour se débarrasser d’Aqmi.

Un déploiement de forces étrangères est-il souhaitable?
Compte tenu de la petite taille des Katibas d’Aqmi, une offensive armée classique ferait fuir les islamistes de Gao ou de Tombouctou dans les deux heures sur n’importe quel terrain. Mais comme il est exclu que la France envoie des parachutistes et que les forces africaines de la Cedeao seront compliquées à manœuvrer, cela prendra des mois. Sauf si le MNLA se joint à l’effort commun. Il faudrait pour cela payer un prix politique fort. Personne n’acceptera de leur donner l’indépendance, mais il faut parler avec les Touaregs de forte autonomie ou de fédéralisme. Et vite, car d’ici là les dégâts humains que causeront les islamistes seront nombreux et la situation humanitaire peut devenir tragique.


François Clemenceau - Le Journal du Dimanche

samedi 07 avril 2012


Une Française échappe à Aqmi grâce aux Touaregs

Le Figaro.fr
Mots clés : 
Par Mélanie MataresePublié  Réactions (3)
Une famille de Maliens installée à Gao arrive à Bamako, vendredi, après le putsh <br/>des rebelles Touaregs dans le nord du pays.
Une famille de Maliens installée à Gao arrive à Bamako, vendredi, après le putsh
des rebelles Touaregs dans le nord du pays.
 Crédits photo : ISSOUF SANOGO/AFP

La seule Française de Gao, au nord-est du Mali, a été rapatriée dimanche saine et sauve à Paris après avoir été évacuée vers l'Algérie par les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA).

«Ils sont arrivés dans des 4 × 4 beiges, brandissant leurs kalachnikovs, habillés en tenue militaire, coiffés d'un chèche touareg. Ils ont tiré en l'air. L'assaut a duré au moins deux heures. Dès que je les ai vus, j'ai su que c'était des islamistes…»
La seule Française de Gao, au nord-est du Mali, a été rapatriée dimanche saine et sauve à Paris après avoir été évacuée vers l'Algérie par les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). Mais elle n'est pas près d'oublier ce jeudi 5 avril. Ce matin-là, l'humanitaire, qui travaille pour l'Unicef sur un programme de malnutrition et pour l'Association d'aide à Gao sur un projet d'orphelinat, assiste en direct à l'attaque du consulat d'Algérie et à l'enlèvement de sept diplomates, dont le consul Boualem Sias. Ils auraient été libérés dimanche par leurs ravisseurs, selon l'édition en ligne du quotidien El Watan .
L'enlèvement avait été revendiqué dans la matinée par le Mouvement pour l'unicité du djihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), qui n'en est pas à sa première attaque contre l'Algérie. Ce groupe récent sur la scène sahélienne se dit également à l'origine du rapt de trois humanitaires dans la région de Tindouf (Sahara occidental) en octobre 2011 et d'un attentat à Tamanrasset (Sud algérien) en mars dernier. L'opération de Gao semble toutefois avoir été menée avec l'appui d'autres islamistes: Mokhtar Belmokhtar, «émir» d'al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), et le groupe Ansar Dine. «J'ai reconnu leur drapeau, qu'ils ont hissé après avoir brûlé le drapeau algérien», assure l'humanitaire française, qui tient à l'anonymat pour protéger sa famille.

Divisions internes

Depuis le coup d'État militaire du capitaine Amadou Sanogo à Bamako, le MNLA, profitant d'une décomposition de l'armée, s'est progressivement emparé des villes du Nord, rejoint dans son combat contre l'armée malienne par Aqmi, Ansar Dine (nouveau groupuscule se réclamant d'al-Qaida, mené par Iyad Ag Ghaly, une ancienne figure de la rébellion touareg) et Mujao (autre groupe djihadiste se réclamant d'al-Qaida). «Le 29, Kidal est tombée aux mains du MNLA. À quelque 400 km de là, nous savions que nous serions les prochains sur la liste, avec Tombouctou, raconte l'humanitaire. D'ailleurs, dès le 30, tous les militaires ont abandonné le camp (Gao est la base militaire la plus importante du Mali, NDLR) pour rejoindre Bamako. En quelques jours, la ville a été détruite, les boutiques pillées, les stations d'essence vidées…»
Alors que les islamistes entourent la résidence du consul où elle a trouvé refuge, la Française parvient à fuir dans une maison toute proche où son «exfiltration» est organisée vers l'Algérie. Ses relations privilégiées avec les Touaregs (elle vit à Gao depuis 1995) lui ont «peut-être» permis d'échapper aux islamistes. «J'ai la conviction qu'ils savaient où j'habitais et qu'ils pouvaient venir me chercher quand bon leur semblait…» Après avoir traversé la ville «tous feux éteints», le groupe a filé vers le nord, direction Bord Badji Mokhtar, ville à la frontière sud algérienne. «Il faut normalement un jour et une nuit pour parcourir cette distance, mais nous l'avons traversée en une nuit, via les pistes de la contrebande. Avec une heure de pause et une halte pour faire le plein de carburant. Seul le MNLA peut faire ça…»
La semaine dernière, les rebelles touaregs avaient organisé l'évacuation de deux Britanniques et d'un Français de Tombouctou, leur permettant d'échapper à Aqmi. Le MNLA, occupé sur le front extérieur - il a proclamé vendredi l'indépendance de l'Azawad, rejetée par la communauté internationale -, se retrouve désormais confronté à un double rapport de forces sur le front intérieur. D'abord avec les islamistes, qui brouillent les revendications purement indépendantistes du MNLA et le mettent en position délicate vis-à-vis d'Alger. Au sein même du mouvement ensuite, où des divisions apparaissent entre les cadres exaspérés par les dérives des islamistes - et déterminés à les chasser du nord Mali - et ceux plutôt partisans d'un partage du territoire. «Personne ne comprend le brusque retournement d'Iyad Ag Ghaly (le leader d'Ansar Dine, NDLR), jusqu'à maintenant très respecté par les Touaregs, explique l'humanitaire française. Sa conversion à l'islamisme se serait faite pendant qu'il était en poste à Djedda, en Arabie saoudite, comme conseiller consulaire. Là, il se serait mis à fréquenter assidûment les mosquées…»
Présenté comme «le» négociateur pour la libération des diplomates algériens, il se positionne aujourd'hui comme l'homme fort de la région, capable de dialoguer aussi bien avec les islamistes qu'avec les rebelles touaregs.
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Par Mélanie Matarese

Nouveau Front armé au Niger.

Ténéré FLash/Nous venons d'apprendre par SMS ce dimanche 08/04/2012 vers 18h00 GMT la création d'un Front de libération de l'AÏR et de l'AZAWAD par des combattants issus de la résistance Touaregs et Toubous au Niger:"en réponse à l’ingérence du Niger dans la crise malienne et aux propos injurieux tenus par le ministre des affaires étrangères de ce pays.Le SG souligne aussi la participation du Niger à la CEDEAO pour combattre le mouvement légitime des populations de l'AZAWAD.Le mouvement se dit prêt à une intervention à n'importe quel moment aux côtés du MNLA pour protéger son territoire historique face aux colons et prédateurs islamiques.Le FLAA dit compter environ 2000 ex combattants avec tout l’équipement nécessaire pour faire face à la CEDEAO et au Niger".

Mali: nouveau groupe armé créé dans le Nord

Par Europe1.fr avec AFP
Publié le 8 avril 2012 à 21h05Mis à jour le 8 avril 2012 à 21h05
     
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Un nouveau groupe armé dénommé "Front de libération nationale de l'Azawad" (FLNA), qui revendique 500 éléments, a annoncé dimanche sa création dans le nord-est du Mali, désormais contrôlé par des rebelles touareg et divers groupes armés, notamment islamistes.
"Nous vous annonçons la création du Front de libération nationale de l'Azawad. C'est un groupé armé, nous ne sommes ni pour le groupe (islamiste) Ansar Dine, ni pour le Mouvement national de libération de l'Azawad" (MNLA, rébellion touareg), a déclaré le secrétaire général du FLNA, Mohamed Lamine Ould Sidatt, un élu de la région de Tombouctou (nord).
Le FLNA est dirigé par le secrétariat général et un état-major militaire, commandé par un lieutenant-colonel de l'armée malienne ayant fait défection, Housseine Khoulam. "Nous avons à notre disposition 500 hommes armés, avec le matériel qu'il faut pour se battre", a déclaré à l'AFP cet officier.
Selon des recoupements de l'AFP, le nouveau groupe est composé quasi exclusivement d'Arabes de la région de Tombouctou.