dimanche 12 mai 2013

Les compagnies minières privent l’Afrique de 38 milliards de dollars


AFRIQUE / MINES - 
Article publié le : vendredi 10 mai 2013 à 17:25 - Dernière modification le : vendredi 10 mai 2013 à 17:31


Mine d’or de Chudja en République démocratique du Congo.
Mine d’or de Chudja en République démocratique du Congo.
AFP/Lionel Healing

Par Jean-Pierre Boris
A l’occasion du World Economic Forum qui s’est tenu au Cap, le Groupe de travail sur l’Afrique en progrès dénonce les méfaits des compagnies minières internationales. Celles-ci spolient le continent africain en privant les gouvernements de 38 milliards de dollars par an.

Après avoir consacré en 2012 leur rapport annuel aux inégalités croissantes en Afrique, les personnalités du Groupe de travail sur l’Afrique en progrès frappent un grand coup dans leur édition 2013. Elles reprennent en effet à leur compte des dénonciations traditionnellement portées par les militants des ONG. Kofi Annan, l’ancien secrétaire général des Nations unies, Olegun Obasanjo, ancien président du Nigeria, Michel Camdesssus, ancien patron du FMI et d’autres dénoncent l’opacité qui entoure la gestion des compagnies minières opérant en Afrique.
« Elles utilisent soit des paradis fiscaux, soit des coquilles vides »affirme ainsi Michel Camdessus. Les sociétés établies dans les paradis fiscaux facilitent la corruption, écrivent ces Sages, chiffrant à plusieurs centaines le nombre d’entreprises offshore liées aux investissements dans le négoce des concessions minières en Afrique. Un phénomène qui « sape le processus de réforme jusqu’en Afrique même », écrivent-ils, et auquel l’Afrique seule ne pourra remédier. D’où l’appel lancé aux pays membres du G8 pour qu’ils s’emparent de ce dossier.
Une fraude fiscale continentale
Mais plus encore, le problème majeur dans le collimateur de ces éminents personnages n’est autre qu’une fraude fiscale à l’échelle continentale. « Il faut avoir ce chiffre en tête, poursuit Michel Camdessus, la fraude fiscale organisée par beaucoup de compagnies minières coûte globalement 38 milliards de dollars aux Etats africains. Une somme supérieure à l’aide au développement ». Ce que les institutions multilatérales comme le FMI, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et les grandes puissances comme les Etats-Unis ou l’Union européenne donnent à l’Afrique rapporte une trentaine de milliards de dollars par an.
La RDC privée de 1,3 milliard de dollars
En guise d’exemple, les Sages du groupe de travail sur l’Afrique en progrès consacrent de longs développements à la situation en République démocratique du Congo. « Entre 2010 et 2012,écrivent-ils, la RDC a perdu au moins 1,36 milliard de dollars de recettes provenant de la sous-évaluation d’actifs miniers vendus aux société offshore ». Mais ce chiffre est probablement sous-évalué, reconnaissent d’emblée les auteurs du rapport : « Ce n’est sans doute qu’une faible proportion de la totalité des pertes causées par la sous-évaluation. Nous n’avons couvert qu’une petite partie des accords pour la période 2010-2012 ». La complexité des montages financiers mis sur pied par les compagnies minières explique les limitations de ce travail.
Résoudre l’équation du développement
La volonté des auteurs est d’aider l’Afrique à résoudre l’équation à laquelle elle est actuellement confrontée : comment transformer la croissance économique tirée de l’exploitation des ressources naturelles pour hisser le niveau de vie des populations africaines à des niveaux décents ? Pour ce faire, il faut sortir l’économie minière et pétrolière de « l’enclave » à faible valeur ajoutée dans laquelle elle est enfermée et suivre le chemin emprunté jadis par le Canada, le Chili ou la Malaisie. Il faut donc accroître le contenu local et les revenus tirés des ressources naturelles pour soutenir des politiques de développement industriel.
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