NIGER Ousseini Issa BILMA, Niger, 1 mai (IPS) - Le site de production du sel de Bilma, dans l’extrême-nord du Niger, est menacé d’engloutissement par des dunes de sable du désert du Ténéré, alors que le produit est confronté à une mévente faute d’infrastructures routières dans cette zone enclavée. Scrutant longuement les grandes dunes de sable ceinturant les salines de 'Kalala' (nom donné à un site de Bilma), le capitaine Abdoulaye Soumana, directeur départemental de l’environnement à Bilma, déclare, inquiet, à IPS: «Si rien n’est fait pour protéger le site, cette activité d’extraction de sel disparaîtra un jour car le sable finira par tout engloutir». «Quelques bassins d’extraction du sel sont déjà submergées, mais les autorités locales n’ont pas encore pleinement conscience de la menace, ce qui les intéresse, c’est l’argent généré par l’activité à la commune» de Bilma, déplore Soumana. Selon le maire de Bilma, Abba Marouma Elhadj Laouel, «la commune de Bilma compte environ 6.000 habitants et le travail du sel est exercé par quasiment tous les ménages autochtones». Dans le vaste désert du Ténéré, les salines de Kalala, exploitées depuis des siècles par la population de Bilma, s’étendent sur un sol argileux entouré par endroits par des galets sur près d’une centaine d’hectares, selon Soumana, le technicien de l’environnement. «L’extraction du sel est une activité séculaire ici à Bilma, j’ai trouvé mes grands-parents en train de l’exercer, mes parents ont pris la relève avant de me passer le flambeau; c’est notre principale source de revenu monétaire», raconte Fadji Boulama, une saunière de 35 ans, mère de cinq enfants, interrogée par IPS sur le site. «En l’absence de mon mari, parti en exode en Libye, je me fais aider par trois de mes enfants âgés respectivement de neuf, 12 et 14 ans lorsqu’ils ne vont pas à l’école. C’est avec l’argent de la vente du sel que je subviens aux besoins quotidien du foyer», ajoute Boulama. Yagana Arifa, une voisine de Boulama sur le site, explique à IPS: «Nous trouvons, certes, à manger et à faire certaines dépenses dans ce travail, mais ce qui nous handicape, c’est le manque de route qui fait que nous n’arrivons pas à écouler notre production de sel facilement et à un prix plus intéressant». «Les caravaniers, qui sont nos principaux clients, achètent actuellement la galette de deux kilogrammes de sel à 100 francs CFA (environ 0,2 dollar US) avec nous pour aller la revendre à 500 francs (un dollar) à d’Agadez (la principale ville de la région, au nord), et à plus de 600 francs (1,2 dollar) dans les régions du sud du pays», souligne Arifa. Selon Boulama Laouel, président de la coopérative des sauniers de Kalala, «le principal gagne-pain des habitants de Bilma, c’est le sel. Malgré les difficultés d’écoulement du produit, il n’y a pas une seule famille locale qui n’ait pas son propre bassin d’extraction», a-t-il dit à IPS. Les producteurs des localités d’Argui, Fachi et de Siguidine sont aussi confrontés à ce problème d’écoulement et de mévente du sel, affirme Salifou Laouel, maire de la commune rurale de Fachi. «Nous vendons très mal notre sel à cause de l’enclavement; les camions de transport ordinaires ne peuvent pas faire le désert pour venir acheminer notre production en direction des marchés du sud où la vente est plus bénéfique», a déploré Laouel. Deux variétés de sel sont extraites dans la région: le sel de cuisine appelé «gemme» et celui destiné à l’alimentation des animaux, a constaté IPS. «C’est le sel pour bétail qui est surtout demandé; à Fachi, nous en produisons quelque 450 tonnes par an, qui nous rapportent 69 millions de FCFA (environ 138.000 dollars», indique-t-il à IPS. A Bilma, la production annuelle de ce sel est chiffrée à 20.700 tonnes contre seulement 12.000 tonnes pour le sel de cuisine, selon le maire de Bilma. «Avant que nous ne prenions un acte pour fixer officiellement le prix de la galette de deux kilos de sel à 100 francs (environ 0,2 dollar), elle s’achetait sur le marché noir à 10 FCFA (0,02 dollar) par des commerçants véreux», a déploré Elhadj Laouel à IPS. Malgré ces difficultés, une étude réalisée en 2011 par le capitaine Soumana montre que le sel rapporte annuellement près de 400.000 FCFA (environ 800 dollars) à un saunier de Bilma et quelque 921.000 FCFA (1.842 dollars) à son homologue de Siguidine. «Le sel à lécher (pour bétail) de Bilma comporte des éléments nutritifs indispensables à la bonne croissance des animaux et améliore en même temps la qualité de leur viande», affirme à IPS, Oumarou Issaka, un agent vétérinaire basé à Niamey, la capitale nigérienne. Pour soutenir les sauniers, le bureau du Programme alimentaire mondial (PAM) à Niamey envisage, selon Denise Brown, sa représentante résidente, d’intégrer le sel de cuisine qu’ils produisent dans son programme des cantines scolaires qu’il finance dans ce pays sahélien d’Afrique de l’ouest. «Nous sommes en train d’étudier comment acheter une certaine quantité de la production pour booster sa commercialisation, si elle répond évidemment aux normes sanitaires en matière d’iodation du sel recommandées par l’OMS (l’Organisation mondiale de la santé)», indique Brown à IPS. (FIN/2013) http://ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=7558 |
TESHUMAR.BE est dedié à la CULTURE du peuple touareg? de ses voisins, et du monde. Ce blog, donne un aperçu de l actualité Sahelo-Saharienne. Photo : Avec Jeremie Reichenbach lors du Tournage du film documentaire : « Les guitares de la résistance Touaregue », à la mythique montée de SALUT-HAW-HAW, dans le Tassili n’Ajjer-Djanet- Algérie. 2004. Photo de Céline Pagny-Ghemari. – à Welcome To Tassili N'ajjer.
vendredi 3 mai 2013
Le sel de Bilma est menacé par le sable et la mévente
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