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J’ai l’immense honneur de partager avec tous mes frères Tamasheq la première partie des propos de Mohamed Ali Ag Ataher Insar recueillis en Tamasheq par les très grands Hélène Claudot-Hawad et Hawad à Témara (Maroc) en mai 1992. Cette interview peut être retrouvée dans le très éducatif live rassemblé par Hélène Claudot-Hawad avec pour titre TOUAREGS : Voix Solitaires Sous l’Horizon Confisqué.
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Dès les années 1922, pendant l'ère coloniale, deux ans après la défaite du dernier grand épisode de la résistance armée touarègue dans l'Aïr, Mohamed Ali ag Ataher Insar, qui deviendra chef des Kel Intesar à la mort de son père en 1926, s'investit dans la scolarisation en français des enfants touaregs, estimant qu'il faut savoir affronter l'adversaire avec ses propres armes.
Il va se heurter à la réticence des familles touarègues par rapport à l'école coloniale, aussi bien qu'à l'opposition de l'administration française qui l'empêche de mener à bien son projet de former les enfants touaregs à une éducation moderne de haut niveau. Sa détermination le conduira à obtenir des Etats arabes l'inscription de ses recrues dans les universités moyen-orientales. Par contre, c'est en vain qu'il cherchera auprès de l'Egypte, de l'Arabie Saoudite et de la Libye un soutien politique pour sa lutte indépendantiste. Il se rendra ensuite au Maroc, juste avant la création des Etats du Mali et du Niger en 1962.
Soupçonné de diriger la révolte touarègue qui en 1963 éclate dans l'Adrar sous une forme violente, il est extradé par les autorités marocaines et remis au gouvernement malien. Sa détention à Bamako durera de 1963 à 1977. A sa sortie de prison, refusant tout compromis avec l'Etat malien, il retourne à son exil marocain. Mohamed Ali s'est éteint à Témara en juillet 1994.
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Une nation piétinée et pillée
Au début, les Touaregs formaient une nation (tumast) qui avait sa structure et ses visions par lesquelles elle perpétuait son monde. Alors, la France est arrivée avec son ingénierie. Elle a tenté de les dominer et, eux, lui ont résisté jusqu'à ce qu'elle les brise et les asservisse. C'est dans cette situation que sont arrivées les années des indépendances africaines dont la nature n'a pas de nom , une face de la colonisation qui surpasse la première pour les Touaregs car cette époque - commencée aux environs de 1962 jusqu'à présent - a réduit l'Afrique à l'état de dépouille et en particulier le monde touareg, privé de tout l'héritage que la colonisation avait accaparé et qu'elle aurait dû restituer à chaque peuple ou nation colonisés.
Bien qu'il s'agisse d'une phase de la colonisation, celle de la comédie, qui consistait à "libérer", la France n'a rien donné ni rien remboursé aux Touaregs pour l'invasion et le piétinement de leur nation, comme on l'a donné à d'autres peuples, mais au contraire les Touaregs après la comédie des indépendances, se sont retrouvés de nouveau colonisés et même encore plus qu'avant.
La révolte de ces dernières deux années n'est qu'un petit aspect de l'éclosion d'un peuple assassiné , épuisé et étouffé sous une dalle. Mais ce soulèvement jusque-là n'a été l'affaire que de l'un des bras des Touaregs (imashaghen), tandis que l'autre partie, celle qui forme la majorité du corps touareg, même si elle continue à résister dans le silence, ne s'est pas encore dressée.
Ce soulèvement par lequel avancent en rampant les Touaregs épuisés, va les amener à la conquête des droits (turagen) de leur nation. Il est difficile aux Touaregs aujourd'hui de reculer. Les nations du monde doivent savoir elles aussi que par leur renfort aux Etats qui nous colonisent, eux qui ont mangé tous nos droits, elles ont transformé notre carcan et même notre famine et notre soif en une fortune fructifiante pour ces Etats nés sur notre dos.
Moi, quand j'étais en prison à Bamako, chaque nuit j'écoutais la radio et je l'entendais souvent annoncer les aides venues de divers pays pour Tombouctou. Dans toutes ces années passés, j'ai compté jusqu'à onze milliards, mais moi qu'on torturait dans la prison de Bamako, chaque fois que je tombais malade et que je demandais au gouvernement de Bamako un médicament, il me chassait comme si j'étais un chien. Evidemment, ne parlons pas des pauvres de Tombouctou et surtout de ceux qui sont dans le désert : rien ne leur est parvenu de ces dons. Au contraire, cette aide a renforcé le pillage de l'Etat malien auquel ils ont à faire face chaque jour et pour lequel ils sont devenus l'appât à rabattre la charité mondiale qui engraisse les armées et le bon peuple qui nous broient socialement et physiquement. Jusqu'à présent, la situation en est à ce stade. Aucun Touareg n'a rien pu posséder ni entreprendre. L'Etat est devenu un outil de massacre des Touaregs.
--- Pour Une Jeunesse Tamasheq Eveillée, Une et Indivisible.---
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Dès les années 1922, pendant l'ère coloniale, deux ans après la défaite du dernier grand épisode de la résistance armée touarègue dans l'Aïr, Mohamed Ali ag Ataher Insar, qui deviendra chef des Kel Intesar à la mort de son père en 1926, s'investit dans la scolarisation en français des enfants touaregs, estimant qu'il faut savoir affronter l'adversaire avec ses propres armes.
Il va se heurter à la réticence des familles touarègues par rapport à l'école coloniale, aussi bien qu'à l'opposition de l'administration française qui l'empêche de mener à bien son projet de former les enfants touaregs à une éducation moderne de haut niveau. Sa détermination le conduira à obtenir des Etats arabes l'inscription de ses recrues dans les universités moyen-orientales. Par contre, c'est en vain qu'il cherchera auprès de l'Egypte, de l'Arabie Saoudite et de la Libye un soutien politique pour sa lutte indépendantiste. Il se rendra ensuite au Maroc, juste avant la création des Etats du Mali et du Niger en 1962.
Soupçonné de diriger la révolte touarègue qui en 1963 éclate dans l'Adrar sous une forme violente, il est extradé par les autorités marocaines et remis au gouvernement malien. Sa détention à Bamako durera de 1963 à 1977. A sa sortie de prison, refusant tout compromis avec l'Etat malien, il retourne à son exil marocain. Mohamed Ali s'est éteint à Témara en juillet 1994.
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Une nation piétinée et pillée
Au début, les Touaregs formaient une nation (tumast) qui avait sa structure et ses visions par lesquelles elle perpétuait son monde. Alors, la France est arrivée avec son ingénierie. Elle a tenté de les dominer et, eux, lui ont résisté jusqu'à ce qu'elle les brise et les asservisse. C'est dans cette situation que sont arrivées les années des indépendances africaines dont la nature n'a pas de nom , une face de la colonisation qui surpasse la première pour les Touaregs car cette époque - commencée aux environs de 1962 jusqu'à présent - a réduit l'Afrique à l'état de dépouille et en particulier le monde touareg, privé de tout l'héritage que la colonisation avait accaparé et qu'elle aurait dû restituer à chaque peuple ou nation colonisés.
Bien qu'il s'agisse d'une phase de la colonisation, celle de la comédie, qui consistait à "libérer", la France n'a rien donné ni rien remboursé aux Touaregs pour l'invasion et le piétinement de leur nation, comme on l'a donné à d'autres peuples, mais au contraire les Touaregs après la comédie des indépendances, se sont retrouvés de nouveau colonisés et même encore plus qu'avant.
La révolte de ces dernières deux années n'est qu'un petit aspect de l'éclosion d'un peuple assassiné , épuisé et étouffé sous une dalle. Mais ce soulèvement jusque-là n'a été l'affaire que de l'un des bras des Touaregs (imashaghen), tandis que l'autre partie, celle qui forme la majorité du corps touareg, même si elle continue à résister dans le silence, ne s'est pas encore dressée.
Ce soulèvement par lequel avancent en rampant les Touaregs épuisés, va les amener à la conquête des droits (turagen) de leur nation. Il est difficile aux Touaregs aujourd'hui de reculer. Les nations du monde doivent savoir elles aussi que par leur renfort aux Etats qui nous colonisent, eux qui ont mangé tous nos droits, elles ont transformé notre carcan et même notre famine et notre soif en une fortune fructifiante pour ces Etats nés sur notre dos.
Moi, quand j'étais en prison à Bamako, chaque nuit j'écoutais la radio et je l'entendais souvent annoncer les aides venues de divers pays pour Tombouctou. Dans toutes ces années passés, j'ai compté jusqu'à onze milliards, mais moi qu'on torturait dans la prison de Bamako, chaque fois que je tombais malade et que je demandais au gouvernement de Bamako un médicament, il me chassait comme si j'étais un chien. Evidemment, ne parlons pas des pauvres de Tombouctou et surtout de ceux qui sont dans le désert : rien ne leur est parvenu de ces dons. Au contraire, cette aide a renforcé le pillage de l'Etat malien auquel ils ont à faire face chaque jour et pour lequel ils sont devenus l'appât à rabattre la charité mondiale qui engraisse les armées et le bon peuple qui nous broient socialement et physiquement. Jusqu'à présent, la situation en est à ce stade. Aucun Touareg n'a rien pu posséder ni entreprendre. L'Etat est devenu un outil de massacre des Touaregs.
--- Pour Une Jeunesse Tamasheq Eveillée, Une et Indivisible.---