Les tribulations du député Poisson en Libye
RÉCIT
Jean-Frédéric Poisson (LR) s'est rendu à Tripoli le week-end dernier, à l'invitation du gouvernement non-reconnu par la communauté internationale.
Premier ministre, président du Congrès national, ministres clés de l’Intérieur et du Pétrole, représentants de la compagnie publique pétrolière et de la Banque centrale : les autorités de Tripoli, non reconnues par l’ONU, ont sorti le grand jeu au député des Yvelines, Jean-Frédéric Poisson (Les Républicains et président du Parti chrétien-démocrate), qui a visité la capitale libyenne de samedi à lundi.
Le gouvernement de Fajr Libya (Aube libyenne), soutenu par les conservateurs islamistes non jihadistes, tente de gagner une légitimité internationale en invitant des élus de pays qui comptent. Jean-Frédéric Poisson est le premier élu d’un pays ouest-européen qu’ils ont réussi à ferrer. Tous les frais ont été pris à la charge de l’exécutif de Tripoli dans une visite qualifiée de «voyage privé officiel» par l’élu francilien.
EMBALLÉ
La visite comportait deux volets cruciaux : la lutte contre le terrorisme et la question des migrants. Deux points sur lesquels Tripoli a davantage d’arguments à faire valoir que son homologue-adversaire de Tobrouk, siège du parlement rival reconnu par les instances internationales. Les brigades de Misrata, principal bras armé d’Aube libyenne, sont les fers de lance dans le combat contre l’Etat islamique et ce sont des plages de la côte ouest, contrôlées par Fajr Libya, que s’embarquent les migrants pour l’Europe.
«Ici, les dirigeants sont les seuls à posséder certaines clés pour débloquer la situation et le trousseau n’en comporte pas beaucoup», estime Jean-Frédéric Poisson. N’ayant jusqu’ici jamais montré un attachement particulier pour le pays, le vice-président du groupe d’études sur les chrétiens d’Orient est revenu emballé par ses hôtes. «Ce que l’on dit en Europe de l’ouest à propos du gouvernement de Tripoli ne correspond pas à la réalité que j’ai découverte. J’ai trouvé face à moi des responsables prêts à travailler avec nous contre le terrorisme et l’immigration clandestine. Et je ne crois pas avoir été victime de "village Potemkine".»
UN ÉLU ENFUMÉ ?
Jean-Frédéric Poisson a notamment visité deux centres de détention pour migrants à Tripoli et Garabouli : «Les conditions sont difficiles mais je ne suis pas sûr que les clandestins soient dans de bien meilleures conditions à Roissy [dans la zone d’attente de l’aéroport où sont maintenus les présumés clandestins].» Pourtant, Libération a pu se rendre compte de la difficile vie des clandestins et de l’insalubrité des centres où ils sont parqués.
Début juin, une délégation libyenne comprenant le ministre du Pétrole et de l’Intérieur s’était rendue à Paris et avait rencontré le sénateur Christophe-André Frassa et le député Alain Marsaud, tous deux membres de LR et représentants les Français établis hors de France. Une entrevue qu’avait peu goûtée la Chambre haute à l’époque. Jean-Frédéric Poisson est lui allé plus loin et se rendant sur place.
S’attend-il à un retour de bâton ? «Je m’en contrefous, assume-t-il. Je rencontre qui je veux dans le cadre de mes prérogatives de député.» Il espère même mettre sur pied une délégation parlementaire pour une visite à la rentrée. Mieux vaudrait éviter alors le pantalon rose à la descente d’avion sous peine de subir les quolibets des Libyens.
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