mardi 14 mai 2013

Le syndrome de Kidal- petit à petit l’oiseau fait son bonnet



09 mai 2013- kakadoundiaye

Petit à petit l’oiseau fait son bonnet et l’étau se resserre sur les questions évitées, les problèmes mis sous le tapis des prières ou des conférences. Il prend aujourd’hui une forme singulière, un nom qui restera dans l’histoire : Kidal. Le syndrome de Kidal.
Rappelons, pour mémoire, que tout débuta il y a 15 mois :
Ce qui était encore une « guerre oubliée » sur laquelle j’attirais l’attention et que personne ne voulait voir. Un groupe de touaregs revendiquait sous le nom de MNLA, l’indépendance du Nord Mali, choisissait une capitale, Kidal, et infligeait à l’armée malienne, à Aguelhok, une défaite cuisante.
Cette guerre éclair eut deux conséquences, d’abord  de s’allier aux  groupes salafistes qui profitant de complicités au sein de l’armée malienne déployaient dans la région leurs commerces ( narcotrafic, prises  d’otages, ) et de s’emparer de villes nouvelles allant jusqu’à prendre le pouvoir sur le bon tiers du territoire, ensuite de provoquer une onde de choc à la Capitale : un capitaine, Sanogo, prend le pouvoir alors que des élections étaient annoncées.
L’alliance MNLA-djihadistes allait voler vite en éclat ; Le MNLA, vaincu militairement doit évacuer les villes prises. Il fait alors profil bas et on ne parle plus que des groupes salafistes Ansar dine , Mujuoa et Aqmi .
Le coup d ‘État se révèle être un coup d ‘épée dans l’eau et son chef, Sanogo, un âne bâté incapable de prendre des décisions, de réarmer ne serait ce que moralement l’armée et de trouver les formes d’un nouveau pouvoir légitime . Il se laisse imposer, après de multiples rodomontades, par la CEDEAO qui se mobilise, un Président par intérim, un premier Ministre et un échéancier de retour à la démocratie. Il se contentera d’un titre de Général et d’émoluments et privilèges conséquents comme tout rastaquouère qu’il est.
Mais alors que les djihadistes multiplient les déclaration pacifistes -Alger et Ouagadougou où le Président Campaoré, grand pourvoyeur de la guerre ivoirienne et assassin de Sankara entend plus que jamais s’habiller des oripeaux de grand négociateur pacificateur, d’un coté et que de l’autre, du coté des forces occidentales et africaines, on n’en finit pas de se réunir, de nommer des Présidents de commission, bref qu’ autour de la ruche malienne on assiste à un perpétuel bourdonnement, que l’on parle d ‘action armée pour septembre 2013 etc..il devient soudain évident que les djihadistes et surtout Ag  Ghaly, d ‘Ansar Dine s’apprête à descendre sur Bamako !!;;;
La décision est prise fort rapidement. L’armée française intervient.
Chacun connaît la suite : la route victorieuse jusqu’à Kidal, tout au Nord  où le MNLA, faisant amende honorable, se met à la disposition des français pour rendre aux djihadistes la monnaie de leur pièce.
La  France qui entend également en finir vite et récupérer ses otages accepte que les guerriers touaregs soient ses alliés et soutiens. Le MNLA pose une condition : que l’armée malienne ne mette pas les pieds à Kidal.
Condition acceptée.
Condition qui militairement est acceptable, souhaitable et compréhensible mais qui politiquement passe mal.
Car c ‘est reconnaître dans les faits que entre les touaregs et Bamako, entre le Nord et le Sud il y a de fait une opposition, un irrédentisme que justement l’armée française voulait réduire.
Si le MNLA n’accepte pas l’armée malienne à Kidal c’est qu’il a encore en mémoire les exactions commises par cette même armée contre les populations touaregs et que chaque jour depuis six mois lui parvient des informations selon lesquelles cette armée se livre à Gao à Tombouctou et partout où elle passe à des viols, tueries, massacres de populations «  blanches « . Par ailleurs la presse à Bamako tire à boulets rouges sur la France
L’indignation est à son comble, fulmine L’indicateur Renouveau, quand nos “autorités”de la transition acceptent, sans réfléchir, de se plier à une telle exigence, fut-elle d’un pays ayant soutenu le Mali dans la guerre contre les jihadistes. Le dernier pas vient donc d’être franchi par la France, qui ne cache plus sa complicité avec les mouvements indépendantistes touaregs. »  En effet, précise le journal malien, « la France, par son jeu trouble, tente mordicus de mettre les groupes armés du MNLA au du MIA au centre du jeu. Et visiblement, l’ex-colonisateur se moque de cet appel solennel du peuple malien, qui refuse tout dialogue avec ceux qui ont égorgé nos militaires, violé les femmes, pillé les biens des populations, saccagé les bâtiments publics au Nord. »
Dans ce contexte tendu le MNLA vient de publier ce jour une déclaration solennelle signée de son Secrétaire Général Bilal Ag Achérif, adressée aux organisations internationales ( ONU, UE,UA, CEDEA) et aux Présidents de la France et des USA dans laquelle:
-elle rappelle qu’elle a toujours « tendu la main aux négociations politiques » et qu’elle  est prête, immédiatement, à les rouvrir,
-qu’elle ne relancera pas les hostilités
-qu’elle reconnaît l’intégrité territoriale du Mali
-Elle demande en contre partie que des aides d’urgence interviennent en faveur des réfugiés
-que des observateurs ONU soient déployés sur le territoire de l’Azawad et que dans le cadre des négociations politiques il soit fait une large place à l’idée « d’une entité fédérale »
Cette déclaration ne répond pas à la question que pose Bamako et qu’exige la France – par la voix du Ministre de la Défense-qui déclare que dans un seul pays il ne peut y avoir deux armées-à savoir le dépôt des armes. Mais sans l’exiger vraiment tout en l’exigeant.
Le danger djihadistes remis à sa vraie place- secondaire- nous sommes ainsi au Mali – après une guerre- face aux vraies questions non encore résolues celles du développement économique -que rappelle Aminata Traoré- voir mon billet de blog d’hier-sinon nous courons le risque que, les mêmes causes produisant les mêmes effets, la pauvreté endémique ne déverse encore vers les djihadistes, soutenus par les États du Golfe, tout son lot de jeunes inactifs rejetés, celles aussi des rapports entre le Nord et le Sud du Mali non pour des raisons ethniques et culturelles comme cela a souvent été avancé mais pour des raisons touchant directement le pouvoir, la redistribution et la démocratie.
La France doit ainsi prendre position clairement pour le développement ( un développement qui ne soit pas centralisé et laisse une large place aux initiatives locales) et une démocratie qui ne soit pas que l’ alliance des plus forts pour se partager le gâteau.
http://blogs.mediapart.fr/blog/kakadoundiaye/090513/le-syndrome-de-kidal-petit-petit-loiseau-fait-son-bonnet-0

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