vendredi 8 juillet 2011

Conférences Paris/Bruxelles : La guerre en Libye ses conséquences et les touaregs


par A Aaman Iman, jeudi 7 juillet 2011, 04:28
Suite à la visite effectuée par une délégation conjointe du Congrès Mondial Amazigh (CMA) et de l’Association des Populations des Montagnes du Monde (APMM) dans le sud de la Tunisie du 5 au 9 mai 2011, une conférence de presse a été organisée le 31 mai dernier à l’Assemblée Nationale française, afin de rendre compte du constat établi par les deux organisations sur la situation des réfugiés libyens en Tunisie et des conséquences de la guerre infligée par le régime de Kadhafi aux populations (voir le rapport publié par les deux organisations, visible sur leurs sites internet)*. La conférence de presse fut animée par Belkacem Lounes, Président du CMA et Jean Bourliaud, Vice-président de l’APMM, en présence de Kamel Saidi membre du CF du CMA et de Gérard Logié, membre du bureau de l’APMM et de Claudine Stanislas, directrice générale de l’APMM. Ont également assisté à cette réunion, Moussa El-Kony, membre du CNT libyen et des représentants d’ONG et d’organisations de la société civile. Après avoir présenté succinctement les conditions d’accueil et de vie des réfugiés libyens en Tunisie, les deux intervenants ont relayé l’appel des libyens en faveur d’une plus grande solidarité de la communauté internationale et pour que tout soit mis en œuvre pour mettre fin au plus vite au régime de Kadhafi, afin que la guerre s’arrête et que tous les réfugiés puissent rentrer chez eux.
A l’initiative de François Alfonsi, député européen, président du friendship Euro-Amazigh, une autre conférence a été organisée le 1er juin 2011, au Parlement Européen à Bruxelles dans le but de sensibiliser les eurodéputé-e-s au drame que vivent les populations libyennes et en particulier les Touaregs et les Amazighs des régions de Zwara et de l’Adrar Nefussa à l’ouest de la Libye. Ont pris part à cette réunion outre M. Alfonsi, Belkacem Lounes, Président du CMA, Jean Bourliaud, Vice-président de l’APMM, Abdoulahi Attayoub, Président de l’Organisation de la Diaspora Touarègue en Europe/TANAT, Mussa El-Kony, membre du Conseil National de Transition (CNT) libyen, représentant les régions sud du pays, Fethi Benkhelifa, Conseiller politique du CNT, Fethi Bouzakhar, coordinateur des réfugiés libyens à Tataouine (Tunisie). Ont aussi assisté à cette conférence plusieurs eurodéputés dont Mme Ana Gomes, Rapporteure du Parlement Européen pour la Libye ainsi que des assistants parlementaires, des représentants d’ONG et de la presse.
François Alfonsi a introduit la conférence au nom du friendship Euro-Amazigh, en justifiant le choix du thème par le fait que la Libye et la question touarègue sont sous les feux de l’actualité et qu’il y a un besoin urgent de connaitre la complexité des réalités pour mieux contribuer à trouver des solutions pour protéger les populations et réfléchir à la sortie de crise et aux perspectives de paix dans cette région. Au nom du CMA, Belkacem Lounes a de son côté indiqué que les questions touarègue et libyenne sont indissociables car une grande partie de la population et du territoire de la Libye sont Touaregs. Il a remercié François Alfonsi d’avoir organisé cette conférence qui permettra d’éclairer les instances européennes et l’opinion publique sur la situation tragique des populations notamment au sud et à l’ouest de la Libye, régions peu couvertes par les médias.
Abdoulahi Attayoub a présenté la manière avec laquelle le peuple Touareg dont le territoire traditionnel est découpé par les frontières de 6 Etats (Algérie, Mali, Niger, Libye, Burkina-Faso, Mauritanie), a toujours été marginalisé sur tous les plans, par les pouvoirs coloniaux et post-coloniaux. Et lorsque les Touaregs osent revendiquer le moindre de leurs droits, ils sont réprimés dans le sang par les régimes militaires de la région. C’est la principale raison qui a poussé les Touaregs à se rebeller à maintes reprises notamment au cours des 20 dernières années. Mais à ce jour, aucun Etat n’a apporté la moindre réponse aux revendications politiques, socioéconomiques et culturelles du peuple Touareg. Seul le volet sécuritaire a intéressé les gouvernements jusqu’à présent. En conclusion, A. Attayoub s’est dit très préoccupé par la survie de ce peuple du désert, de plus en plus dépossédé de ses territoires traditionnels et de ses ressources naturelles.
Sur le même thème, Mussa El-Kony, a expliqué le piège qui s’est refermé sur les familles touarègues du sud-Libye qui ont tenté de fuir les affres de la guerre et de se réfugier au Niger, au Mali ou en Algérie. Il leur a fallu d’abord affronter les centaines de kilomètres de désert souvent avec des moyens de transport dérisoires, avant d’arriver dans des régions démunies (Agadez, Kidal…) où personne ne les attendait. En fermant ses frontières sud, l’Algérie les a empêchés de rejoindre leurs proches à Djanet et à Tamanrasset. A cet égard, l’attitude de l’Algérie est assimilable à de la non assistance à personnes en danger de mort et constitue une grave violation du droit international et humanitaire. Les Touaregs de Libye se sont alors trouvés devant le choix entre errer dans le désert ou rester en Libye et faire face aux angoisses et aux menaces de la guerre. Mussa El-Kony a également alerté l’assistance sur le cas des soldats Touaregs libyens qui servent dans l’armée de Kadhafi. Ils sont sciemment mis aux avants postes des différents fronts et s’ils reculent, ils risquent d’être immédiatement tués par leurs supérieurs. Il est nécessaire et urgent de les soustraire à cette tenaille meurtrière par tous les moyens, a t-il insisté.
Concernant les réfugiés libyens en Tunisie, Fethi Bouzakhar a affirmé qu’ils sont dans leur très grande majorité hébergés et aidés par leurs frères Tunisiens qu’il a tenu à remercier très vivement. La situation est beaucoup plus pénible (maque d’hygiène, de structures sanitaires, promiscuité, etc) pour ceux qui vivent dans les camps de réfugiés du HCR installés à Dehiba, Remada et à Tataouine. M. Bouzakhar a également signalé la situation tragique que vivent les populations qui sont restées chez elles en Libye, notamment dans le massif montagneux de Nefussa qui longe la frontière Tuniso-Libyenne (Yefren, El-Qalaa, Nalut, Jadu…). Ils essuient quotidiennement et depuis trois mois, les bombardements des forces de Kadhafi et ils sont privés de tout (eau, électricité, médicaments…). Pour lui, la seule solution est de faire partir Kadhafi coûte que coûte et le plus vite possible, ce qui aura pour effet de stopper immédiatement la guerre et ses souffrances. En attendant, il a proposé à l’Union Européenne d’imposer un corridor humanitaire afin de faire parvenir des médicaments aux populations et d’évacuer les blessés, les femmes, les enfants et les personnes âgées.
Pour Fethi Benkhelifa il est urgent de se débarrasser de Kadhafi car tant qu’il est là il essaiera de faire le maximum de dégâts, surtout qu’il sait que désormais sa cause est perdue et que la CPI l’attend pour le juger et le condamner. M. Benkhelifa a appelé les forces de l’Otan à intensifier leurs frappes et à les porter aussi contre les bases des forces de Kadhafi situés à l’ouest du pays. Il a également dénoncé l’attitude du gouvernement algérien qui a soutenu et qui continue de soutenir le régime de Kadhafi en lui envoyant des moyens humains et logistiques. Des avions algériens chargés d’hommes et de matériel militaire auraient atterri en Libye et des convois de véhicules tout terrain ont été vus par plusieurs témoins allant d’Algérie vers les zones sous contrôle des forces pro-Kadhafi en Libye. Les avoirs financiers libyens en Algérie semblent également avoir été transférés clandestinement au clan Kadhafi. En conséquence, à l’issue du conflit, les dirigeants algériens risquent de se retrouver aux côtés de Kadhafi, devant la cour pénale internationale pour complicité de crimes contre l’humanité.
Mme Ana Gomes qui revient d’un séjour à Benghazi, est également intervenue sur ce thème pour confirmer que des responsables libyens l’ont informée de l’aide apportée par le gouvernement algérien au régime de Kadhafi, ce qui constitue une violation claire de la résolution 1973 de l’ONU. Elle a également suggéré au représentant du CNT libyen de prendre des initiatives pour encourager les soldats libyens qui combattent pour Kadhafi, à rejoindre le camp des forces de la Libye libre. Après débat, plusieurs recommandations ont été formulées, parmi lesquelles :

- Intensifier les frappes ciblées contres les objectifs militaires et stratégiques des forces de Kadhafi
- Organiser une conférence internationale sur la question du peuple Touareg, peuple fragile et menacé dans ses territoires sahariens.
Rédaction CMA, 2 juin 2011.
www.congres-mondial-amazigh.orgcongres.mondial.amazigh@wanadoo.fr*CMA :  

*APMM: c.stanislas@apmm-wmpa.org  -  www.mountainpeople.org

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