samedi 7 mai 2011

L'impact des crises en Libye et en Côte d'Ivoire sur le Niger : situation humanitaire préoccupante


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Politique
Vendredi 06 Mai 2011 11:06
Les crises en Libye et en Côte d'Ivoire risquent d'avoir des conséquences négatives importantes sur notre pays si des mesures sérieuses ne sont pas prises très tôt. Les agences et organismes humanitaires sont unanimes à ce sujet et les informations qu'ils publient tendent à le prouver.

Ainsi, selon les informations recoupées publiées par l'OCHA, l'OIM, le CICR et le gouvernement nigérien, on enregistre à la date du 27 avril dernier, 80.537 personnes rentrées au Niger, dont 16.002 en provenance de  Côte d'Ivoire et 64.535 en provenance de Libye. Parmi ces 64535 en provenance de Libye, il  y a 2927 non Nigériens.

La majorité de ces rapatriés sont arrivés par voie terrestre, dans des conditions très  difficiles. Le principal lieu de débarquement reste la localité de Dirkou qui abrite depuis 2009 un centre de transit de l'OIM. Seulement un peu plus de 4000 ont regagné le pays par voie aérienne en provenance d'Egypte, de Benghazi et de Tunisie. 2000 autres sont attendus d'ici le 06 mai à Niamey, selon un communiqué publié par l'OIM.

D'autres Nigériens continuent à être évacués des zones de combat. Ainsi, entre le 18 et le 26 avril derniers, le CICR a évacué 1300 Nigériens par bateaux, note un communiqué de cette agence.  Mais, ici au pays, les capacités du centre de transit de Dirkou sont largement dépassées. Un cadre de concertation avec les partenaires techniques et financiers a été créé depuis mars 2011 et un comité ad' hoc national en charge de la coordination et du suivi de la situation des migrants transitant par Dirkou a été mis en place.

Les rapatriés sont ainsi acheminés sur Agadez où deux autres centres d'accueil ont été installés. Les plus démunis sont logés, nourris et soignés en attendant de les acheminer dans leurs localités d'origine. Déjà, 15.000 seraient arrivés à Tanout, 10.000 à Gouré et quelque 6.756 à Tchintabraden et Abalak.

Insuffisance des moyens, difficultés d'approvisionnement et risques sanitaires

Le gouvernement a lancé, depuis plus d'une semaine, un appel à l'aide internationale en vue de gérer le flux des réfugiés. Un appel inter-institution des Nations Unies estimait à 160 millions de dollars US, les fonds nécessaires pour prendre en charge les besoins des migrants qui ont fui la Libye. Mais, il faut dire que sur le terrain, les moyens restent insuffisants. Le PAM avait acheminé plus d'une cinquantaine de tonnes de vivres pour couvrir les besoins de 2.500 migrants pendant un mois.

Or, l'approvisionnement alimentaire de Dirkou se faisait principalement à partir de la Libye. Mais, avec cette crise, les liens commerciaux sont coupés. L'approvisionnement provient désormais d'Agadez et de Niamey la capitale, située à plus de 1600 km. En outre, les organisations humanitaires craignent des risques sanitaires du fait notamment de la promiscuité, de l'accès limité à l'eau potable et de l'insuffisance des installations sanitaires au centre de transit de l'OIM de Dirkou. D'ores et déjà, des cas de rougeole ont été enregistrés note le dernier rapport de l'OCHA, en date du 3 mai.

Difficultés de réinsertion et impacts économiques

L'arrivée massive des migrants pose d'autres problèmes au niveau des localités. Ces populations de migrants ont des difficultés à se réinsérer dans le tissu économique. En effet, ces couches avaient justement quitté le pays à la recherche d'emplois et de lendemains meilleurs. Avec ce retour non préparé, les migrants se retrouveront de nouveau confrontés aux problèmes d'emplois.  En outre, les transferts d'argent opérés par les migrants se retrouvent aussi coupés.

Or ces transferts représentent un apport important à l'économie locale dans certaines localités de notre pays. Beaucoup de familles en effet, vivent de ces transferts opérés par les bras valides partis en exode. Avec cette crise, les migrants seront obligés de partager les ressources des familles d'accueil. Et ces ressources ne tarderont pas à s'épuiser. A côté de ces conséquences économiques, beaucoup craignent des conséquences sécuritaires.

On sait que la région d'Agadez n'a pas encore fini de se remettre de la dernière rébellion de 2007. Et, avec les armes qui circulent de l'autre côté de la frontière libyenne, les inquiétudes des uns et des autres sont fondées.

Des mesures urgentes s'imposent

Face à cette situation, les organisations humanitaires demandent la mise en place urgente des programmes de réinsertion des migrants, la mise à disposition de contributions financières pour mieux assister les plus démunis. Les différents acteurs doivent par ailleurs continuer à explorer les possibilités de mise en place des vols réguliers vers Dirkou, la mise en route des programmes de suivi et des activités de réinsertion des migrants dans toutes les régions, le renforcement des campagnes de vaccination, notamment contre la rougeole.

Des actions de sensibilisation et de prévention contre le VIH/Sida s'imposent. De même, le système de surveillance épidémiologique doit être renforcé dans la région d'Agadez et l'assistance aux enfants malnutris des migrants doit se poursuivre. D'ores et déjà, des pourparlers sont en cours avec certaines organisations. C'est le cas entre Plan Niger et l'OIM pour contribuer au transport de migrants, ou encore entre l'OMS et la direction régionale de la santé publique (DRSP) d'Agadez pour la mise en œuvre de la vaccination contre la méningite avec l'OMS.

Dans le même ordre d'idées, la CADEV Niger, en collaboration avec CRS et CAFOD, conduira un projet d'assistance en biens non alimentaires et en transport vers les régions d'origine de 5000 migrants grâce à un financement du réseau CARITAS International. Mais, selon les échos qui nous parviennent, beaucoup de Nigériens déjà rapatriés ou ceux encore en territoire libyen vivent des situations traumatisantes. Combien de temps vont-ils encore attendre ? Une intervention d'envergure s'impose pour les tirer d'affaire.

Siradji Sanda

06 mai 2011
publié le 06 mai 2011
Source : Sahel Dimanch

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