Jeremy Keenan, professeur d’Anthropologie à l’Université de Bristol
mercredi 1er octobre 2008, par temoust
« L’articla analyse les causes et conséquences des actuelles rébellions au Niger et au Mali. On attribue généralement la rébellion plus importante et plus étendue du Niger, aux demandes des Touaregs nigériens pour une part plus importante et plus équitable des revenus de l’uranium, mais l’article révèle que les deux rébellions sont beaucoup plus complexes, centrées autour des griefs associés à la marginalisation, aux problèmes du foncier indigène et à l’exploitation des ressources minières. L’autre élément clé est l’impact sur la région de la guerre globale contre la terreur ; les impérialismes et subimpérialismes concurrents ; les intérêts connexes des compagnies minières internationales, les menaces sur l’environnement et les intérêts des trafiquants internationaux de drogues. L’article détaille également les sévices infligés aux populations civiles au Niger et au Mali par les militaires récemment entraînés par les Américains. »
Cet article est le résumé en français de l’intégralité d’un article en anglais de Jeremy Keenan, professeur d’Anthropologie à l’Université de Bristol, paru dans la revue "Review of African Political Economy, No. 117:449-466".
Abstract
Introduction
Rappel des événements Tin Zawatène en Février 2008. Les américains sont prévenus de ne pas voyager dans la région du Nord Mali couverte de mines et aux mains d’Al Qaida – afin d’éviter qu’il y ait des témoins au fait que l’armée US participe « au sac et au pillage » de la ville.
« … environ un mois après le ratissage US-Mali de Tin Zawatène, une force rebelle de touaregs maliens menés par Ibrahim Bahanga lacça une attaque meurtrière sur un convoi militaire à 15km au sud de Tin Zawatène » … « Les représentants des rebelles ont confirmé qu’il s’agissait de venger l’attaque US-Mali su Tin Zawatène.
« Le 25 mars, de sources militaires occidentales, les rebelles de Bahanga auraient transféré leurs 33 otages au Niger ou ils seraient gardés par des membres du MNJ. Ce que tout le monde redoutait est arrivé : la liaison est faite entre les diverses rébellions touarègues. Comme je l’avais prédit depuis 4 ans, la conflagration de l’ensemble de la région sahélienne est devenue réalité. Les océans Atlantique et Idien sont désormais reliés par une zone de conflits, de la Mauritanie à l’Ouest à la Somalie, en passant par le Mali, Niger, Tchad, Soudan et Ethiopie. LA conflagration dont le Mali et le Niger sont aujourd’hui le centre a des ramifications politiques et peut-être militaires pour l’Algérie, la Libye, le Tchad, la Mauritanie et le Nigeria, sans compter mes intérêts hégémoniques de la France, de la Chine et des USA. »
« Les rébellions touarègues au Niger et au Mali ont connu une escalade depuis le printemps et l’été 2007. Elles ont pris l’aspect d’une rébellion pan-touarègue. Mais si les griefs des deux rébellions sont souvent communs, l’analyse est compliquée du fait que toutes deux sont liées au niveau local à des problèmes politiques et sociaux non seulement complexes mais aussi assez différents ».
Les actions de Bahanga sont plus médiatisées parce que sur le terrain les accrochages sont plus nombreux, mais au Niger on assiste à un génocide de l’armée qui se venge de son impuissance sur les populations en détruisant les villages et disséminant des mines avant de se retirer.
« Les causes de la (des) rébellion(s) »
Au Niger, elle est « surdéterminée » et à « multicouches » 3 causes essentielles :
1/ « Colère contre la fabrication par les Américains d’un front Sahara-Sahel de la « guerre globale contre la terreur » Les Amériacinas ont réussi à faire croire que la région était un nid d’Al Qaida (à preuve l’aventure d’El Para qui était au service de l’armée algérienne et agissait de connivance avec les services amétricains. « La fabrication de l’incident El Para avec pour conséquence le fait que la région soit étiquetée « zone de terreur » par les Américains n’a pas seulement détruit l’industrie locale du tourisme et activités liées, mais elle a soulevé la colère des populations touarègues du Sud de l’Algérie, Nord Mali et Nord Niger qui refusent de voir leur espace qualifié de zone de terreur et de se voir manipuler afin de rentrer dans le tableau global du terrorisme peint par les Américains. Mais leur colère s’est portée autant sur les Américains que sur leur propre gouvernement qui utilisent la « guerre contre la terreur » comme source de rente et leur permet de qualifier leur opposition légitime, leurs minorités et autres éléments récalcitrants de « terroristes » ou, pur employer le terme de Washington, de terroristes « putatifs ».
En conséquence, en 2004 Tandja « provoque les Touaregs à l’action en arrêtant Rhissa ag Boula … sur des accusations forgées de toutes pièces »… et les rebelles se réfugient à Tamgak.
2/ « Les pratiques des sociétés minières d’uranium et pétrolières d’exploitation des populations » Critique d’AREVA et des nouveaux arrivants Chinois.
3/ « La faillite du gouvernement à adhérer aux accords de paix de 1995 »
Au Niger
« Le rôle des intérêts nationaux et externes dans les causes et escalade de la rébellion »
Les rébellions de 2004 au Niger et de 2006 au Mali ont été « dans une certaine mesure orchestrées par des forces externes. » à savoir la France et AREVA, l’Algérie, les USA, la Libye, les sociétés minières et pétrolières internationales, les islamistes, les trafiquants de drogue et les élites des gouvernements nigérien et malien.
France et Areva-Niger
Algérie
Impliquée dans la rébellion et notamment avec Aboubacar Alambo qui est un « psychopathe » qui est toujours chargé du « sale boulot ».
« La DRS joua un rôle dans la brève rébellion de Kidal du 23 mai 2006. Cette opération clandestine fut soutenue par 100 soldats des Forces spéciales américaines venues de Stuttgart qui atterrirent à Tamanrasset (Algérie) les 15-16 février 2006 et gagnèrent le Nord Mali par la route. »
L’Algérie a « fabriqué » nombre d’incidents terroristes dans la région et pratiqué la désinformation ; a provoqué des troubles et exagéré (ou fabriqué) les accrochages entre les touaregs (soutenus par la DRS algérienne) et les éléments du GSPC au Nord Mali entre septembre et novembre 2006.
« L’orchestration par l’Algérie de la révolte de Kidal le 23 mai 2006 était destinée à discréditer la présence de la Libye dans la région. » l’idée étant de créer un rébellion touarègue pour pouvoir en accuser les libyens. C’est du moins ce qu’on pensait au début mais c’est devenu moins probable car les Algériens s’inquiètent d’une possible extension aux Touaregs algériens.
Le gouvernement nigérien-Rappel des événements menant à Tamgak
Les USA
Besoin de développer l’AFRICOM
Les rébellions « sont le produit de l’intervention américaine dans la région à la suite du 9 septembre 2001 mais n’ont rien à voir avec la menace islamiste ». Les militaires entraînés par les américains harcèlent les populations locales au Mali et se livrent au génocide au Niger.
LA Chine
Les chinois croient avoir acheté les terres touarègues et refusent l’accès aux puits.
La Libye
Concurrence l’Algérie dans sa volonté hégémonique
Mali
“Si les Touaregs du mali ne souffrent pas encore des mêmes conditions d’exploitation invasive de leurs terres par les sociétés minières comme au Niger, la rébellion malienne partage certaines caractéristiques essentielles avec celle du Niger. C’est la faillite (ou perçue comme telle) du gouvernement malien à appliquer les accords de la fin de la rébellion des années 1990 et le harcèlement de la population civile par l’armée malienne. Le premier acte de rébellion de Bahanga, l’attaque d’un poste de police près de Tin Zawatène et la mort de 2 policiers en mai 2007 avait été provoqué par le viol de femmes touarègues par des soldats maliens. EN même temps, il semblait que le gouvernement malien comme celui du Niger travaillait à ressusciter le Ganda Koi, milice songhaï responsable de nombreuses attaques sur les civils touaregs pendant la rébellion des années 1990. Bien qu’ils l’aient nié, les rebelles malines et le MNJ se sont rencontrés les 20-22 juillet pous discuter d’une stratégie commune et ont formé l’ATNM. Aprs une série d’attaques contre l’armée malienne à la fin Août et en Septembre, et la pose de mines sur nombre de pistes autour de Tin Zawatène, une paix ténue a été maintenue pendant le mois du Ramadan. Elle fut brisée en Mars à la suite d’atrocités commises par les forces maliennes et américaines à Tin Zawatène. En d’autres termes, aussi bien l’acte initial de rébellion et son escalade subséquente, comme au Niger, furent la réponse aux atrocités commises par les forces de sécurité sur les populations civiles touarègues. »
Trafiquants de drogue
Les Touaregs ne sont que les passeurs, les chauffeurs. Le trafic est organisé par les « fils de généraux ».
CONCLUSIONS
Plusieurs éléments :
Extraction Uranium
Eclatement MNJ
US/AFRICOM
Extension de la conflagration : le conflit ‘est considérablement étendu cette année. Le gouvernement malien est décidé à aboutir à une solution pacifique tandis qu’au Niger c’est la solution militaire qui est choisie.
LA remise en question de la légitimité des états et des frontières : les jeunes refusent le legs de la colonisation : retour à l’idée de création d’un Etat touareg. L’Algérie a passé un pacte avec les rebelles : elle les aide à condition qu’ils s’assurent que la rébellion ne s’étende pas au-delà des frontières Niger et Mali. Elle compte ainsi augmenter son influence dans la région.
Jeremy Keenan,professeur d’Anthropologie à l’Université de Bristol
Traduction française : Anne Saint Girons
Uranium Goes Critical in Niger : Tuareg Rebellions Threaten Sahelian Conflagration Jeremy Keenan,
in Review of African Political Economy, No. 117:449-466 © ROAPE Publications Ltd., 2008
TESHUMAR.BE est dedié à la CULTURE du peuple touareg? de ses voisins, et du monde. Ce blog, donne un aperçu de l actualité Sahelo-Saharienne. Photo : Avec Jeremie Reichenbach lors du Tournage du film documentaire : « Les guitares de la résistance Touaregue », à la mythique montée de SALUT-HAW-HAW, dans le Tassili n’Ajjer-Djanet- Algérie. 2004. Photo de Céline Pagny-Ghemari. – à Welcome To Tassili N'ajjer.
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