vendredi 18 juillet 2008

Alger impose sa paix

La Situation politique et sécuritaire au Nord. Nouvelle donne dans la situation à Kidal : Alger impose sa paix

A travers la mise en place prochaine de patrouilles militaires mixtes algéro-maliennes et l’échange d’informations et de renseignements entre leurs deux armées, l’Algérie et le Mali manifestent leur volonté commune d’en finir avec le terrorisme et le banditisme armé qui sévissent dans leur espace frontalier. Ce revirement stratégique, s’il se confirme, se traduirait par une pax algeriana (paix algérienne) au bénéfice des deux états voisins et de leurs populations.

La «pax algeriana» (la paix à l’Algérienne) est en train de se mettre lentement mais sûrement en place dans l’espace frontalier entre le Mali et l’Algérie et, par voie de conséquence, dans la région de Kidal.

En effet, la toute première réunion entre officiers supérieurs algériens et maliens autour de la mise en place de patrouilles militaires mixtes et d’échanges d’informations et de renseignements pour une meilleure sécurisation de cette zone limitrophe, qui a commencé lundi 14 juillet, a pris fin, comme prévu, le mercredi 16 juillet suivant.

La délégation algérienne, dirigée par le Général Amrani Ammar, a quitté Bamako dans la nuit du même mercredi à bord du vol d’Air Algérie, emprunté également par le Général Kafougouna Koné et sa délégation, partis à Alger dans le cadre de l’évaluation de l’Accord d’Alger du 4 juillet 2006.

S’il se matérialise dans les semaines ou les mois à venir, ce projet de mise en place de patrouilles militaires mixtes algéro-maliennes sonnerait le glas du banditisme armé dans la région de Kidal. Il marquerait ainsi un tournant aussi inattendu que déterminant dans l’attitude de l’Algérie face à ce dossier.

En effet, copiant sa démarche sur celle de Bamako, l’Algérie avait, jusque-là, privilégié le dialogue dans la recherche de la paix dans la région de Kidal. C’est dans cet esprit que, sollicité en son temps à la fois par le gouvernement malien et les bandits armés alors groupés au sein de «l’Alliance du 23 mai pour le Changement», elle avait réuni les conditions pour la signature de l’Accord d’Alger du 4 juillet 2006. Un Accord qui n’a jamais fonctionné, malgré tout le contraire qu’en dit le président ATT. Et, c’est précisément l’inapplicabilité de l’Accord sur l’essentiel qui a conduit aux dernières dérives sanglantes et destructrices. Avec pour conséquence un total revirement de Bamako qui, s’il continue à psalmodier que «l’Accord d’Alger reste l’unique référence pour le retour à la paix», n’en privilégie pas moins la politique de la canonnière. Parole d’ATT dans l’émission Baro à la faveur du premier anniversaire de sa réélection à la magistrature suprême, le 8 juin dernier: «Quiconque tire un seul coup de fusil contre la République sera châtié avec une extrême rigueur».

Cette radicalisation chez les dirigeants maliens n’est pas pour déplaire à leurs homologues algériens qui, eux aussi, ont besoin d’un engagement franc et déterminé de leurs voisins du sud pour circonscrire, pourquoi pas annihiler Al Qaïda au Maghreb, pour lequel le désert malien est devenu un refuge sûr pour échapper aux forces de sécurité algériennes.

Pour sécuriser sa frontière méridionale contre les terroristes islamistes, Alger est disposée à sacrifier les bandits armés maliens qu’elle est souvent accusée, à tort ou à raison, de soutenir de diverses manières contre le gouvernement malien. Avec la création de patrouilles militaires mixtes pour traquer et éliminer à la fois le terrorisme et le banditisme armé, l’Algérie et le Mali font un pari gagnant gagnant.

Et l’Accord d’Alger dans tout cela ? Le choix des deux pays de sécuriser leur espace frontalier par des moyens militaires annonce t-il sa mise à mort prochaine ? On peut le penser dans la mesure où les bandits armés, au profit desquels il a été confectionné, ne représenteraient plus un danger réel pour le pouvoir central de Bamako. Toutefois, ce document, que nous avons critiqué et réjeté dans ses aspects qui, à nos yeux, portent atteinte à la souveraineté nationale, à l’unité et à la cohésion de nos concitoyens, survivra sûrement dans ses dispositions relatives au développement économique de la région de Kidal. Et c’est ce qui importe.

Mais il faut se garder d’aller trop vite en besogne. Le Général Kafougouna Koné se trouve depuis hier à Alger avec, dans son porte-document, les trois préalables du gouvernement portant sur la libération des otages, le démantèlement de toutes les bases terroristes dans la région de Kidal, la restitution de toutes les armes, munitions et véhicules volés. Vaste programme, comme l’on peut le constater. Attendons de voir pour apprécier.

Saouti Labass HAIDARA

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