mercredi 6 mars 2013

Mali: «Ceux qui ont pris les armes contre l’Etat seront combattus»


MALI  - 
Article publié le : mercredi 06 mars 2013 - Dernière modification le : mercredi 06 mars 2013

Mali: «Ceux qui ont pris les armes contre l’Etat seront combattus»

Le colonel Gamou, le 12 juillet 2012.
Le colonel Gamou, le 12 juillet 2012.
RFI/Moussa Kaka

Par David Baché
La ville de Gao, la plus importante du nord du Mali, a été libérée le 26 janvier dernier. Elle est aujourd'hui contrôlée par les armées malienne et française. Des bataillons nigériens sont aussi présents, ainsi que « les hommes d'Ag Gamou », le colonel touareg resté fidèle à l'Etat malien. Farouche opposant des indépendantistes touaregs, le colonel Ag Gamou est devenu un homme clé dans le nord du Mali. Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), exactions de l'armée malienne, ambitions politiques pour l'après-guerre, le colonel El Hadj Ag Gamou s’explique.

RFI : Vous êtes entré à Gao avec vos hommes après la libération de la ville. Aujourd’hui combien de soldats comptez-vous dans la ville de Gao ?
Colonel El Hadj Ag Gamou : J’ai plus de 500 hommes dans la ville de Gao aujourd’hui.
Est-ce que vous en avez aussi ailleurs, à Kidal, à Ménaka, dans l’Adrar des Ifoghas où concentrent aujourd’hui les combats ?
J’ai une section renforcée à Ménaka et à Sango. J’ai d’autres éléments aussi qui sont avec les unités françaises dans l’Adrar.
Ils sont nombreux là-bas ?
Ce sont juste des éléments qui connaissent le terrain, une vingtaine.
Est-ce qu’ils participent aux combats de ces derniers jours ?
Bien sûr, parce que ce sont eux qui guident les unités. Ce sont des gens des lieux qui connaissent parfaitement le terrain.
Le 9 février dernier, vos hommes ont arrêté quatre combattants du MNLA dont un cadre, Abdoul Karim ag Matafa, près de Ménaka. Aujourd’hui, où ces hommes se trouvent-ils ?
Dans l’armée, la tradition est très claire : les militaires arrêtent et se mettent à disposition de la gendarmerie. C’est elle qui est spécialisée pour les enquêtes. On les a mis à disposition de la gendarmerie, à partir de Gao.
Ca veut dire qu’ils sont à la gendarmerie de Gao actuellement ? Ou ils ont été transférés à Bamako ?
Je ne sais pas. Je les ai mis à la disposition de la gendarmerie, depuis Ménaka d’ailleurs. Une mission de la gendarmerie est venue là-bas et les a mis à leur disposition.
Le président de transition, Dioncounda Traoré, dit qu’il est possible de discuter avec un groupe comme le MNLA ? Qu’en pensez-vous ?
C’est trop politique. Je n’ai aucune réponse par rapport à cela.
C’est trop politique mais vous avez peut-être quand même une opinion ? Est-ce que vous ne pensez pas que discuter avec un groupe comme le MNLA, que vous combattez, est malgré tout inévitable pour une sortie de crise ?
Selon moi aujourd’hui, on mène une opération. Tous ceux qui sont sur le terrain en armes, on va les combattre. On ne fait pas de différence entre tel ou tel groupe. Pour moi, ce sont les mêmes. Ils ont pris les armes contre nous, contre l’Etat et c’est cela que je vois.
De nombreuses associations de défense des droits de l’homme pointent la responsabilité de l’armée malienne dans des exactions commises contre des populations du Nord, en particulier contre des populations touaregs. En tant que soldat malien et en tant que touareg, vous en pensez quoi ?
Il y a beaucoup de choses qui se disent et qui ne sont pas vraies. J’ai participé aux opérations de Gao, du Niger jusqu’à Gao. Je n’ai en tout cas jamais vu un soldat qui a montré ce comportement. Donc les gens parlent, mais je n’ai pas vu. Je pense que c’est une campagne et qu’il faut vraiment faire attention parce que les gens en parlent trop pour encore nous créer des problèmes. Ce n’est pas la peine que les gens continuent à dire que les Touaregs, les Arabes, sont ceci, que l’armée a fait cela. Non. En tout cas, ce qui est sûr, tous les soldats qui vont commettre ces erreurs-là, on va les mettre à disposition de la justice.
Après les attaques qui ont visé le MNLA à In-Khalil, est-ce que vous craignez des tensions intercommunautaires entre Arabes et entre Touaregs dans le pays ?
Là aussi il faut faire attention. Il ne faut pas créer un problème là où il n’y en a pas. Moi par exemple, je suis Touareg. Je n’ai aucun problème avec les Arabes. Ce sont mes frères, ce sont des Maliens. Ceux qui sont de vrais citoyens maliens, il faut les protéger. C’est la même chose que pour les Touaregs. Les Touaregs qui sont bons, il faut les protéger. Les Touaregs qui sont mauvais, il faut les traiter. Ceux qui doivent être mis en prison, doivent être mis en prison, qu’ils soient Touaregs, Bambara, Songhai et Arabes. Ca c’est les méchants, ceux qui sont complices avec les vrais ennemis. Maintenant, ceux qui sont bons, il faut les protéger.
Ces attaques d’In-Khalil ont été revendiquées par le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA). Est-ce que vous pensez que derrière ce mouvement, il se cache vraiment un mouvement de revendication arabe ou est-ce que vous pensez qu’il s’agit d’un prête-nom pour des combattants du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest, le Mujao ?
Je ne connais pas grand-chose sur ce mouvement. Ce que je sais, les Arabes ne sont pas tous des terroristes. Les gens qui ont fait tous ces différents attentats sont tous noirs. A In-Khalil, c’est une fraction Idnan et une famille touarègue qui a ont des petits problèmes avec les commerçants arabes sur place. Mais ça ne veut pas dire que ce sont les Touaregs. Cette famille ne représente pas les Touaregs. Les Arabes qui ont été aussi impliqués, ils ne représentent pas les Arabes. Il faut faire la part des choses.
Est-ce que vous avez des ambitions politiques pour l’après-guerre ?
Non, pas du tout. Je n’ai aucune ambition politique. Je suis soldat, les soldats sont hors politique. Je suis là pour la défense de l’intégrité du territoire du Mali parce que je suis militaire, je suis formé pour cela. Et c’est ça ma mission. Normal.
On vous prête des ambitions dans la ville d’Aguelhok où vous avez de la famille.
J’avais mes parents partout : Aguelhok, Tessalit, Kidal, Tinzawaten, Ménaka, Gao, Tombouctou.
Donc pas de politique. Ca ne vous intéresse pas.
Non, la politique ne m’intéresse pas. Pas du tout.
On parle de la mort de deux grands chefs d’al-Qaïda, Abou Zeid et Mokhtar Belmokhtar, est-ce que vous avez des informations à ce sujet ?
Je n’ai aucun détail sauf ce que j’ai entendu à la radio comme tout le monde.
TAGS: AL-QAÏDA - DIONCOUNDA TRAORÉ - MALI - MNLA

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mes commentaires :
Le colonel Gamou est un vaillant officier mais il manque de cohérence parce que :
- Il refuse de reconnaitre expressément les atroces exactions perpétrées contre les arabo-touaregs alors que ses compagnons d’armes en opérations avec lui les ont admises publiquement (Colonels Didier Dakou et Maiga),
- Il oublie qu’il est officier d’active et que l’Armée qu’on appelle aussi « Grande Muette » dispose d’un service de presse logé à l’Etat Major qui est le seul habilité à communiquer surtout en temps de guerre. De ce point de vue, sa sortie intempestive est professionnellement une grosse bourde,
- Il parle comme s’il était à la tête d’une Armée différente de celle du Mali : « j’ai tant d’éléments… ; j’ai envoyé une vingtaine dans l’Adrar… ; d’autres à Menaka et Ansongo ». La frange touarègue de son contingent chassé en 2012 de l’Adrar n’a jamais voulu, en effet, réintégrer les rangs contrairement à Ould Meydou par exemple,
- Il ne révèle pas aussi que le gros de ses troupes est constitué de miliciens qui n’ont pas plus de légitimité à intégrer « Serval » ou la « MISMA » que Gandakoy ou Gandaiso ;
- Il dit offrir sa protection à toutes les populations mais franchement les éleveurs et commerçants imghad, kel essouk, Chamanamas, lamhar osent-ils vraiment venir faire leurs courses au marché de Gaw-gaw (gao en tamacheik), dont ils raffolent tant, sans y laisser leur peau ?
- Il ne dit pas aussi pourquoi il a laissé filer Baba Ould Cheikh et Ould Lahawaynat (tous deux sous mandat d’arrêt national et international) pour ensuite piéger et livrer Matafa et ses compagnons qui eux, à ce stade en tout cas, ne sont même pas recherchés par la Justice malienne ;
- Il n’aurait pas dû aussi diaboliser un clan familial en l’indexant nommément. Il s’agit en l’occurrence des idnan qui sont les oncles maternels de sa propre fille et sur lesquels il est injuste de jeter l’anathème de la sorte. En effet, chacune de nos communautés « a son élite et sa lie ! ».
- Il devait enfin avoir le courage de relever que même si la coalition hétéroclite en lutte actuellement contre le narco-terrorisme au Mali arrive à réduire significativement la menace, aucune paix durable n’est possible sans une solution négociée comportant notamment la réintégration de plus de 3000 militaires encore dans la nature ; c’est pas parce qu’ils sont touareg ou arabes qu’ils n'ont pas droit au pardon de la Nation (si Nation il y a !) au même titre que les putschistes et les bérets rouges.
Le reste de l’interview, bien que mal à propos, est acceptable.