Henri de Raincourt : La France considère qu’il n’y aura pas de solution militaire, en tout cas immédiate, et que par conséquent ce qui est important c’est que les hostilités cessent le plus rapidement possible.
RFI : Voulez-vous dire que le rapport de force est trop inégal, en faveur des rebelles et que Bamako a intérêt à signer ce cessez-le-feu ?
H.D.R. : Je pense que le rapport de force aujourd’hui, n’est pas totalement établi, puisque la stratégie des rebelles est telle qu’on peut l’analyser et celle des autorités militaires maliennes est plutôt une stratégie d’évitement. Donc, il n’y a pas eu de choc de bataille rangée, puisque lorsque les rebelles arrivent dans un camp militaire, l’armée régulière l’a quitté quelques heures ou une demi-journée avant.
RFI : Alors on sait qu’il y a eu des morts aux combats. Mais est-ce qu’il y a eu aussi des exécutions sommaires ?
H.D.R. : Il y a eu effectivement des violences absolument atroces et inadmissibles à Aguelhoc. Il y a eu effectivement des exécutions sommaires ; des soldats, des personnes. On parle d’une centaine, qui ont été capturées et qui ont été froidement exécutées, ce qui est absolument inqualifiable.
RFI : Par qui ont-elles été exécutées ?
H.D.R. : Certains prétendent que la méthode utilisée pour l’exécution s’apparente à celle utilisée par al-Qaïda.
RFI : Elles auraient été égorgées ?
H.D.R. : Peut-être égorgées pour certaines. D’autres, une balle dans la tête. En tout cas des méthodes barbares et expéditives.
RFI : L’une des causes de cette guerre c’est l’arrivée au Sahel de missiles et de d’orgues de Staline en provenance des arsenaux de Kadhafi. Est-ce qu’en bombardant la Libye, la France n’a pas semé la pagaille au Sahel ?
H.D.R. : Les autorités que nous avons pu rencontrer sont bien déterminées justement, à ce que, à l’occasion du cessez-le-feu, la remise des armes soit une condition qui soit posée.
RFI : Mais en bombardant la Libye, est-ce que la France n’a pas joué aux apprentis sorciers ?
H.D.R. : La France a œuvré en Libye, pour éviter le massacre programmé de la population de Benghazi, par Kadhafi.
RFI : Vous appelez au dialogue. Mais pour les rebelles du MNLA, ce dialogue doit aboutir à l’indépendance de l’Azawad. Est-ce que c’est une solution envisageable ?
H.D.R. : La France a une position qui est très claire. L’unité et l’intégrité territoriale du Mali doivent être préservées. L’indépendance, ce n’est évidement pas une solution, parce que le MNLA ne représente pas, la totalité de la population de la partie nord du Mali. Il y a d’autres organisations touaregs, il y a des Arabes, il y a encore d’autres ethnies. D’ailleurs, toutes les personnes avec qui nous avons parlé, nous ont dit que si une consultation de la population était organisée, nous le savons pertinemment que l’immense majorité ne s’engagerait pas sur la voie de la séparation.
RFI : Vous dites que des pays de bonne volonté pourraient aider à ce dialogue. Vous pensez à la France ou à des pays de la sous-région ?
H.D.R. : Nous considérons que c’est d’abord aux pays de la sous-région de se mobiliser. Que ce soit le Mali, évidemment, le Niger, la Mauritanie, le Burkina Faso, mais aussi l’Algérie qui a fait preuve de ses bons offices ces derniers jours, en réunissant un certain nombre d’acteurs à Alger. Mais la France, elle, est à la disposition – et seulement si cela lui est demandé – des pays, pour apporter sa contribution. Mais la France n’a aucune ambition d’organiser à elle seule, le dialogue entre les différents acteurs. Ce n’est pas à nous de la faire. C’est d’abord aux acteurs locaux.
RFI : Dans une interview au Monde, le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz fustige les Etats qui n’arrivent pas à venir à bout d’un groupe armé de 300 hommes, sous-entendu le Mali. Est-ce que vous êtes d’accord avec lui ?
H.D.R. : Effectivement, la façon d’appréhender la présence d’Aqmi sur le terrain, est notoirement différente par les chefs d’Etat des pays concernés. Il faut en prendre acte. Je crois qu’il y a aussi le fait qu’il y a des otages sur le terrain, et que par conséquent c’est assez difficile d’engager directement des opérations qui seraient susceptibles de mettre en danger la vie de nos otages, parce que la vie de nos compatriotes est à préserver d’abord et avant tout.
RFI : Avez-vous des nouvelles récentes des six otages français ?
H.D.R. : Toutes les personnes à qui nous posons cette même question, certaines d’entre elles nous disent avoir des contacts plus ou moins directs avec des petites organisations locales sur le terrain et que la situation de nos otages, pour précaire et détestable qu’elle soit, mais qu’avec beaucoup de courage, ils survivent.
RFI : Si les exécutions sommaires d’Aguelhoc portent la signature d’al-Qaïda, est-ce qu’il faut y voir une alliance éventuelle entre le MNLA et al-Qaïda, Aqmi ?
H.D.R. : En tout cas, elle n’est pas confirmée, et le MNLA a pris soin de déclarer qu’elle n’existait pas.
RFI : A la fin de l’année dernière, des proches du MNLA ont été reçus au Quai d’Orsay à Paris, à l’ordre du jour justement, la lutte contre Aqmi. Est-ce que le MNLA peut être un partenaire fiable ?
H.D.R. : C’est à lui de le prouver. Je rappelle que si la France, effectivement, a rencontré des représentants du MNLA l’année dernière, elle ne l’a pas fait depuis que ce dernier s’est engagé dans des actions militaires. Et si le MNLA veut être considéré comme un acteur fiable, eh bien c’est à lui de faire les avances et les démarches nécessaires. Je sais pertinemment que le MNLA a des représentants dans un certain nombre de pays de la sous-région, et donc n’a certainement aucune difficulté pour faire connaître sa bonne volonté.
RFI : Vous pensez à la Mauritanie ?
H.D.R. : Je pense en particulier, effectivement, à la Mauritanie.
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