vendredi 15 octobre 2010

Revue de presse Afrique /cote d'Ivoire,Niger,Mali

Revue de presse Afrique

vendredi 15 octobre 2010
A la Une: le top départ de la présidentielle en Côte d'Ivoire
Par Gilles Moreau
RFI
Photo:Junte nigerienne

« C’est ce vendredi 15 octobre que s’ouvre officiellement la campagne pour l’élection présidentielle du 31 octobre. Avec ce top départ pour la conquête du pouvoir d’Etat (ou sa reconquête), les 14 candidats retenus par le Conseil constitutionnel se lancent dans une campagne de séduction des électeurs à travers le territoire national », expose Soir Info.
Dans la presse quotidienne ivoirienne, chaque journal défend la cause de son champion. Pour sa part, le site Abidjian.net préfère s'intéresser aux gros problèmes matériels qui se posent à deux semaines du jour J : pourquoi une partie de l'électorat ne pourra pas exercer son droit de vote (une partie des 5 millions 725 000 inscrits).
Cela tient à la production et à la distribution des cartes nationales d’identité et d’électeur. Des Ivoiriens ont reçu ces documents avec d’énormes anomalies, comme des erreurs sur les noms, prénoms, lieu et date de naissance.
Mais les plus fréquentes parmi ces anomalies, explique Abidjian.net, concernent les photographies : parfois erronées, parfois illisibles. Nombreux sont les Ivoiriens qui ont reçu leurs documents officiels sur lesquels se trouvent des photos autres que les leurs…

Autant de cas qui, déplore le site d'information, causeront « d'énormes préjudices » aux électeurs le jour du scrutin, même si les agents électoraux fermeront les yeux sur certains.
A tout cela s'ajoute la lenteur constatée dans la distribution des différents documents. Dans le District d’Abidjan, il n’est pas sûr que tous les bénéficiaires les récupèrent à temps, du fait des engorgements et des questions de sécurité. Et à l’intérieur du pays, l’opération n’a pas encore débuté dans toutes les villes et villages.

La transition nigérienne est entrée dans une zone de turbulences


C'est en tout cas le constat fait par Jeune Afrique : « Alors que le Conseil suprême de restauration de la démocratie dirigé par Salou Djibo entame la phase finale de cette période de transition, plusieurs limogeages au sein de la junte et des rumeurs d’arrestations suscitent l'inquiétude à Niamey ».
Parmi ces limogeages, rappelle Jeune Afrique, celui du colonel Abdoulaye Badié, considéré jusqu'alors comme le numéro deux du régime et l’un des plus proches collaborateurs de Salou Djibo.
Jeudi les rumeurs allaient bon train sur son sort : arrêté ou bien toujours retenu à l'état- major de l'armée ? Dans la capitale nigérienne, c'est l'expectative générale.
Autant d'événements qui surviennent dans « un contexte électoral sensible », écrit Jeune Afrique dans son édition en ligne, rappelant que le pays doit poursuivre, avec un référendum constitutionnel prévu le 31 octobre, un processus de transition censé aboutir l'an prochain à une élection présidentielle et au rétablissement d'un régime civil.


Au Mali, y aura-t-il un médiateur chargé de négocier la libération des otages retenus par al-Qaïda au Maghreb islamique?

La question reste posée, car le chef de l'Etat hésite encore, rapporte le quotidien Le Matin, pour qui ce dossier continue de faire des vagues au sommet de l’Etat malien.
Amadou Toumani Touré, en effet, n’arrive pas à faire un choix entre un Arabe et un Touareg pour conduire la médiation. Cela étant, selon le journal, « il semblerait qu'il ait jeté son dévolu sur certains notables touaregs qui ont des bons rapports avec AQMI , nébuleuse qui a ses ramifications dans la bande sahélo-sahélienne ».
Et parmi ces notables, l’ancien chef rebelle touareg Iyad Ag Ali. Or cette perspective est loin de rassurer Le Matin, qui redoute une dégradation de la situation et « le réveil de veilles querelles entre deux communautés qui n’ont pas fini de panser leurs plaies ».
Je vous renvoie aussi à la lecture de l'excellente enquête d'Isabelle Mandraud dans Le Monde, sur le thème des relations entretenues dans le désert entre islamistes et touaregs. Al-Qaïda représente une tentation pour une partie des jeunes touaregs. Des jeunes nomades dont le recrutement est facilité par les conditions de vie difficiles et l'attrait de l'argent.

Enfin, cette crise des otages a donné lieu à une réunion hier à Bamako. Les pays du Sahel ont été invités à une réunion d'experts de la lutte anti-terroriste du G8, l'objectif étant de montrer que leur coopération dans le combat contre al-Qaïda au Maghreb est sur la bonne voie.

Cette coopération n'est pas du goût de l'Algérie, comme le prouve cet passage d'un article de La Tribune : « Les craintes de l’Algérie se confirment et ce qui était proposé par euphémisme et en des termes voilés prend forme au grand jour : l’internationalisation de la sécurité de la région sahélo-saharienne est désormais un fait accompli avec la bénédiction de certains pays sahélo-sahariens qui cautionnent l’ingérence étrangère dans la région. Quant aux objectifs d’al-Qaïda qui s’avèrent un épouvantail au service des intérêts des puissances occidentales, ils sont atteints grâce à la complicité et à la naïveté de pays de la région. »

jeudi 14 octobre 2010

Quand l'injustice est spatiale. Le nomadisme pastoral face à l'impératif territorial dans le Sahara nigérien.

Quand l'injustice est spatiale. Le nomadisme pastoral face à l'impératif territorial dans le Sahara nigérien.



Laurent Gagnol, Université de Pau et des pays de l'Adour, SET UMR 5603 CNRS.


Abdoulkader Afane, PACTE-Territoires - UMR 519, Université de Grenoble, et Université A. Moumouni de Niamey (Niger).
Photo : Aïr nord Niger/Issikta

Résumé : Cet article vise à montrer l'incompatibilité entre d'un côté la gestion nomade des ressources naturelles (notamment pastorales et hydrauliques), au sein d'un espace fondamentalement ouvert, et de l'autre, les politiques environnementales spatialisées, marquées par l'injonction internationale faite aux populations de s'adapter à la désertification ; injonction qui passe notamment par la « sécurisation » de l'exploitation des ressources naturelles. Cette étude, qui traite du Niger, est replacée dans le contexte géopolitique actuel marqué par la pression des sociétés minières, les revendications des rébellions touarègues et la mise en place de politiques foncières dans le cadre de la récente décentralisation et des actions des ONG. Tout le contexte précédemment évoqué tend aujourd'hui à réduire la mobilité et la fluidité locales et régionales qui étaient au fondement de la gestion collective des ressources naturelles. L'exemple de la mise en place d'espaces extraterritoriaux pour l'exploitation des richesses minières (Imouraren notamment) nous permet de comprendre que nous assistons non seulement au refoulement et à la fixation des nomades, mais aussi à une véritable révolution territorialisatrice conduisant inévitablement à la disparition des conditions d'existence même du nomadisme pastoral. Du point de vue du nomadisme, tout processus de territorialisation ne peut qu'être considéré comme relevant d'une injustice spatiale.
Le Sahara est redevenu central sur la scène géopolitique internationale en raison notamment de l'instabilité due aux révoltes armées, aux prises d'otages de réseaux islamistes considérés comme terroristes (AQMI)[1], au banditisme, à la contrebande et, ajoute-t-on souvent, aux migrations internationales transsahariennes devenues clandestines. Le contrôle des flux et le renforcement de l'encadrement territorial apparaissent aujourd'hui comme une priorité pour les Etats saharo-sahéliens, mais aussi pour la communauté internationale, notamment les Etats-Unis, la Chine, l'Union européenne, etc. Les questions de sécurité internationale se doublent d'intérêts géostratégiques majeurs liés à la prospection et à l'exploitation des richesses minières sahariennes (uranium, pétrole, gaz, charbon, or, étain, phosphate, etc.). Ainsi, d'aucuns évoquent aujourd'hui une ruée (scramble[2]) sur les ressources naturelles sahariennes. En outre, les sécheresses et le processus de désertification, les crises alimentaires et les tensions politiques ont renforcé la compétition entre acteurs individuels et collectifs pour l'appropriation foncière. La pression pour la clôture des espaces sahariens s'opère donc à toutes les échelles.
Cette étude a pour objectif principal de mettre en lumière les enjeux et les conflits, aussi bien à l'échelle globale que locale, qui se jouent autour de l'accès ou de l'appropriation des ressources naturelles. Il s'agit aussi d'en appréhender les effets sur les conditions d'existence et les transformations actuelles du nomadisme pastoral. Le terrain retenu est celui du Sahara nigérien et plus particulièrement l'Aïr, vaste région désertique peuplée majoritairement par des Touaregs pasteurs, agro-pasteurs ou citadins, au Nord-Niger[3]. En outre, il comporte une dimension stratégique emblématique. Il s'agit d'une région riche en minerai d'uranium. S'ajoutant aux sites d'Arlit et Akokan (exploités depuis 1968 et 1974), Imouraren deviendra à partir de 2013-2014 la deuxième plus grande mine d'uranium au monde, exploitée par une filiale d'Areva ; une société chinoise débute non loin de là l'exploitation du site uranifère d'Azélik.
Après avoir examiné la spatialité propre au pastoralisme nomade touareg et ses transformations actuelles, nous traiterons des tensions locales, liées à la concurrence pour l'accès aux pâturages ou à l'eau, qui conduisent bien souvent à des formes de privatisation des ressources et de sédentarisation partielle ou totale. Nous examinerons ensuite cette dynamique actuelle à la lumière des enjeux nationaux (les politiques de sécurisation du pastoralisme et le processus de décentralisation en cours). Nous replacerons enfin l'ensemble dans le cadre des pressions internationales autour de la question de l'exploitation des richesses naturelles souterraines (hydrocarbures, minerais et aquifères).
Ce sont en définitive les effets de l'inscription de logiques territorialisatrices dans l'espace nomade que questionne cet article. Car, au regard des conditions d'existence du pastoralisme nomade, tout processus de territorialisation relève d'enjeux de pouvoir produisant de l'injustice spatiale ; qui plus est lorsque ces enjeux de pouvoir ne sont pas considérés comme tels mais agissent de façon souterraine dans des conflits dont l'enjeu semble autre. Sous couvert d'adaptation à la désertification, de stabilisation et de sécurisation foncières, les conditions d'une ouverture de l'espace sont rendues impossibles.

1- Les effets sur le nomadisme des nouvelles formes de gouvernance territorialisée
L'exploitation pastorale des ressources naturelles par les Touaregs nomades et semi-nomades.

Les pasteurs nomades ou transhumants constituent toujours une part importante de la population touarègue nigérienne. Le mode d'élevage basé sur la mobilité du troupeau permet de valoriser les maigres ressources fourragères. Il consiste en un ensemble de déplacements pastoraux flexibles, répondant au caractère aléatoire des ressources en eau et en pâturages. Dans ces régions désertiques, l'activité pastorale nécessite une grande mobilité du cheptel sur de vastes espaces, qui seule permet de s'adapter, par des mouvements réguliers et saisonniers, à la variabilité dans l'espace et dans le temps des ressources fourragères. Pour les années « normales », ces migrations se font de manière ordonnée, selon un calendrier et des itinéraires stables. Les migrations pastorales obéissent ainsi à un cycle annuel. Il est généralement distingué deux types de mouvements, au cours de la courte saison des pluies et au cours de la longue saison sèche. Si lors de la saison des pluies, la gestion pastorale obéit aux principes d'une utilisation/occupation éphémère des lieux, la saison sèche contraint progressivement les campements à observer une relative stabilité autour des rares points d'eau qui subsistent. Chaque unité domestique de nomadisation[4] s'approprie par l'usage un certain nombre de vallées (ou de portion(s) de vallée(s)) au sein desquelles elle se stabilise pour passer la période la plus difficile de l'année, la saison sèche chaude (awélan). Ce n'est qu'en cas de conflits ou de sécheresse que les nomades quittent leurs itinéraires ou changent de pâturages et de points d'eau.
Le point d'eau constitue l'élément fondamental pour l'exercice des activités pastorales. Il est d'usage public, mais il existe des droits d'accès prioritaires favorisant celui qui a fourni la main d'œuvre pour le forage et qui l'exploite régulièrement, notamment en saison sèche. Pour les groupes de passage, l'abreuvement est autorisé, mais il est de plus en plus soumis à une redevance en nature ou en espèces. En outre apparaissent aussi des puits que l'on appelle généralement dans l'Eghazer « puits-boutique ». L'objectif est d'accaparer ou de construire un puits dans un espace pastoral que l'on s'approprie par ce geste. Le propriétaire fait construire une petite « maison » en banco (adobe) à côté du puits, qui est transformée en boutique (kanti) vendant des produits alimentaires (mil, riz, semoule de blé, sucre, thé, etc.) ou manufacturés (tissus, piles, sandales, etc.). On parle alors du puits d'un tel (anu n mandam). D'autres pasteurs s'installeront sur les lieux : ce processus aboutit à la fixation du campement autour du puits et à sa transformation en « village », qui cherchera à se faire reconnaître comme tel par l'administration grâce à l'appui d'une personnalité politique. En retour, les villageois seront considérés comme clients et protégés de cette dernière, et les votes lui seront acquis.

Cette privatisation des points d'eau, allant ainsi de pair avec une fixation partielle des pasteurs, comporte un autre aspect nouveau, inversant les rapports de primauté entre l'accès à l'eau et aux pâturages. B. Thébaud (1990) a énoncé trois principes de base nécessaires à l'équilibre de l'économie pastorale : l'existence d'un lien indissociable entre l'eau et les pâturages, la relation directe entre la capacité d'abreuvement d'un point d'eau et le rythme de consommation du pâturage environnant et le troisième principe fait intervenir l'homme et son travail. Aujourd'hui, ces trois principes ont pu être contournés par les grands éleveurs. L'emploi de citernes pour abreuver les bêtes permet ainsi d'exploiter les pâturages sans points d'eau toute l'année. Mais les grands éleveurs, commerçants et citadins investissant dans le bétail, sont aussi très souvent à l'origine du fonçage de nouveaux puits. Cela leur permet d'obtenir de facto des droits d'usage prioritaire sur les pâturages alentour, qu'ils n'auraient pu obtenir autrement. Tout fonçage implique un droit officieux sur les pâturages alentour puisque l'administration interdit la création de tout autre puits dans un rayon de 10-15 km d'un puits existant et exige de 20 à 30 km entre les forages. Or ce maillage est de moins en moins respecté. Les pasteurs voient d'un mauvais œil la fondation d'un nouveau point d'eau qui déstabilise la gestion sociale des pâturages. Mais le nombre de puits et de forages s'est accru grâce à l'appui financier et technique des projets de développement et aux autorisations accordées complaisamment par l'administration. Bref, la relation entre l'eau disponible et la capacité de charge des pâturages est mise à mal. Avec la multiplication des forages et des puits, l'accès à l'eau ne pose plus les mêmes difficultés. Ce qui prévaut, ce n'est donc plus directement le point d'eau qui permettait l'exploitation de pâturages alentour, mais l'appropriation voire la privatisation des pâturages. Creuser un puits empêche le fonçage d'un autre par un individu ou un groupe concurrent et permet de réserver l'accès prioritaire ou exclusif aux pâturages. Le contrôle des puits et la sédentarisation sont donc devenus essentiellement un outil d'appropriation des pâturages, inversant les rapports de primauté entre l'eau et les pâturages.

Certains grands éleveurs sont allés jusqu'à clôturer leurs pâturages dans l'Azawagh et dans l'Eghazer, faisant apparaître les barbelés dans le paysage saharien. Le droit d'accès dans cet espace clôturé reste exclusivement réservé au propriétaire. Les grands éleveurs ouvrent leurs ranchs à leurs troupeaux une fois seulement que les pâturages naturels accessibles à tous sont dégradés. Les opérateurs en question, au motif de créer des ranchs, ont occupé des superficies importantes qu'ils tentent aujourd'hui de légitimer en faisant établir des concessions rurales individuelles ou communautaires à travers les structures associatives pastorales et les commissions foncières. Cette dynamique locale et interne est largement redevable de pressions externes, liées aux effets de nouvelles formes de gouvernance territorialisée.

Quand sécuriser le pastoralisme, c'est faire disparaître le nomadisme

L'espace saharien est progressivement clôturé, morcelé, privatisé et/ou sanctuarisé. On assiste ainsi à la remontée vers le nord des cultures sous pluies dans l'Azawagh et le Damergou[5] ; au développement du jardinage irrigué prés des kori (oueds) de l'Aïr ; à la constitution de périmètres irrigués pour l'exploitation des aquifères fossiles de l'Eghazer[6] ; à la multiplication des ranchs, des réserves de chasse privées mais aussi des aires protégées[7] ; enfin à la distribution à tout-va de permis de prospection et à l'octroi de zones d'extraction minière (pétrole, charbon, phosphate, métaux précieux, sel et surtout uranium), au cours des mandats présidentiels du président déchu, Mamadou Tandja, renversé par un coup d'Etat le 18 février 2010 (E. Grégoire, 2010). Face aux pressions sur les ressources naturelles, l'Etat, les institutions internationales et les ONG ont mis en place une politique visant à sécuriser le pastoralisme.
On n'en est plus aujourd'hui à la législation héritée de l'époque coloniale qui considérait l'espace pastoral comme constitué de « terres vacantes et sans maîtres », appartenant à l'Etat, et donc déclarées d'accès libre (R. Hammel, 2001). La reconnaissance de la gestion spécifique des pasteurs sur leurs terrains de parcours (et des droits qui vont avec) semble de plus en plus envisageable au Niger. Mais l'inscription de la logique des droits d'usage nomade est autant un casse-tête juridique qu'un enjeu politique et économique. Un code rural a été adopté en 1993 pour faire face à la pression croissante sur les ressources naturelles et à la compétition (entre pasteurs d'une part et entre agriculteurs et pasteurs d'autre part) qui ont favorisé la multiplication de conflits fonciers, parfois violents, notamment au Sud-Niger. Le code rural a permis aux agriculteurs d'obtenir un titre foncier, tout en garantissant aux éleveurs l'accès aux ressources en eau (les puits et les mares) et à des aires de pâturage (les enclaves pastorales comme les forêts classées, les champs après récolte). Les parcours entre les zones pastorales ont été facilités par des couloirs de transhumance, parfois balisés par les projets, avec des aires de transit et de repos.
Mais, de fait, les pasteurs ont été défavorisés. N'ayant eux-mêmes aucun droit exclusif sur leurs terrains de parcours, ils n'ont donc aucun recours face à l'accaparement de terrains autrefois ouverts mais réservés de fait au pastoralisme. La reconnaissance de « terroirs d'attache » aux pasteurs, par décret en 1997, a permis de remédier en partie à ces iniquités même si l'adoption d'un code pastoral a été plusieurs fois reportée. Le terroir d'attache est défini comme une « unité territoriale » propre aux pasteurs sur laquelle ils ont « un pouvoir d'occupation, de jouissance et de gestion ». Même si cette notion est une avancée dans la reconnaissance de droits des nomades, ce pouvoir ainsi défini reste virtuel et n'empêche nullement d'autres usages que l'élevage. Les droits d'usage prioritaire des pasteurs n'ont ainsi pas été déterminés précisément et l'activité pastorale n'a pas été reconnue comme une « mise en valeur ». En pratique, les nomades sont toujours démunis face à l'appropriation privative de leurs terrains de parcours.
Permettant l'accaparement des ressources pastorales par d'autres activités, les textes ne garantissent aucunement l'appropriation collective des ressources pastorales contre elles. Mais alors le problème semble insoluble : comment en effet sécuriser les pratiques pastorales face aux pressions foncières externes tout en évitant des appropriations territoriales exclusives, qui figent le pastoralisme et vont à l'encontre du nomadisme ? La contradiction est manifeste. Certes, l'objectif majeur affiché par les bailleurs de fonds internationaux (la Banque mondiale notamment), l'Etat nigérien et les programmes de développement est la sécurisation foncière des pasteurs, non pas le maintien des conditions du pastoralisme mobile et fluide traditionnel. De fait, les politiques foncières ont provoqué des effets contre-productifs par rapport à leurs objectifs d'accroissement de la production pastorale[8]. Ainsi, en zone pastorale et surtout agro-pastorale, d'autres études que la nôtre ont montré que cette dynamique d'appropriation privative des puits et des pâturages contribue à une sédentarisation ou du moins à une fixation accrue des pasteurs (R. Hammel, 2001 ; H. Beidou et S. Yacouba, 2005, T. Hilhorst, 2008). Cela tend aussi à figer les capacités des nomades à surmonter les périodes de sécheresse, en rendant difficile leur seule stratégie de survie, celle de l'extrême mobilité. Face aux pressions externes, les pasteurs n'ont ainsi d'autres choix que de se fixer, non plus saisonnièrement mais à l'année pour au moins une partie du groupe. Ils se transforment en agro-pasteurs transhumants ou en bergers salariés pour des propriétaires citadins (P. Colin de Verdière, 1995). On s'aperçoit qu'il s'agit d'un repli quasi inéluctable du pastoralisme nomade. Car pour garantir leur prise sur leur milieu de vie, tout se passe comme si les pasteurs n'avaient pas d'autres choix que d'adopter la logique territoriale, qui paraît pourtant la compromettre.

Décentralisation et/ou nomadisme ?

L'impératif territorial (D. Retaillé, 1996) se généralise aussi et surtout à travers la politique de décentralisation en cours au Niger[9]. Il a été opéré une communalisation intégrale du territoire nigérien. Mais comment administrer dans les limites du niveau communal des nomades, des transhumants et des agro-pasteurs caravaniers, qui vivent la majeure partie de l'année en dehors des limites de cette même commune ? Outre les perspectives de conflits locaux, la fixation de limites communales, d'ailleurs remise à plus tard, peut aller à l'encontre de la mobilité des hommes et de la fluidité des activités économiques (pas uniquement pastorales). Par exemple, les ressources financières des communes étant insuffisantes, certains maires de l'Aïr ont décidé de taxer la circulation, avant de faire machine arrière à cause des mécontentements, les camions des coopératives et les véhicules privés ont dû s'acquitter d'une taxe d'entrée et sortie de la commune. Les caravanes ont été logées à la même enseigne. Plus au sud, ce sont les transhumances qui ont été fiscalisées. Avec la décentralisation (et la monétarisation de l'accès à l'eau des puits), plus on est mobile, plus on risque d'être pénalisé financièrement. L'imposition de limites en contexte environnemental fragile se fait toujours en défaveur du plus mobile.

Face à ces entraves à la mobilité et à la fluidité, pourtant au fondement du système pastoral surtout en période de sécheresse, les experts avertis (par exemple A. Marty et A. Mohamadou, 2005) préconisent de faire jouer le consensus, de ne pas imposer de force et trop rapidement une limite communale. De plus, la souplesse de limites multiples, infra ou supra-communales, est préférable à la rigidité d'une seule limite et d'un seul niveau de gestion. A l'échelle la plus grande, les autorités centrales recommandent aux commissions foncières la constitution de documents d'urbanisme et de planification pour la gestion des ressources naturelles et l'extension du bâti. Elles ont aussi pour objectif la délimitation plus précise des limites communales[10]. D'autre part, l'intercommunalité, qui est rendue possible sans être précisément définie par les textes, pourrait permettre d'encadrer les mobilités, sans les limiter, et de renouveler l'approche des complémentarités entre les zones pastorales et les zones agricoles au Sud Niger. Enfin, l'Etat et les bailleurs de fonds prônent un découpage interne à la commune. Ainsi, selon le guide d'élaboration des Plans de Développement Communaux[11], ce sous-zonage constituerait « la base de réussite (...) indispensable pour assurer l'opérationnalité de l'approche ». Elles seraient « bien adaptées au contexte socio-institutionnel de la zone et permettent la différentiation spatiale des activités planifiées en fonction des potentialités et contraintes rencontrées »[12]. Ce découpage sert de cadre territorial à un inventaire des ressources naturelles et à un état des lieux détaillé des infrastructures et des services de la commune. Il sert aussi à élaborer une planification communale : dans le village-centre de chaque sous-zone est établi un « Programme d'Investissement Pluriannuel », à partir d'un « diagnostic participatif communautaire ». Tout en opérant le transfert vers le Niger de normes de gestion et d'action liées au modèle français (décentralisation, cadastre, planification, etc.), on pense déjà aux effets pervers potentiels, tels qu'ils ont été envisagés encore une fois en France. La solution retenue est identique : la complexité territoriale, c'est-à-dire la multiplicité des échelles de concertation, de décision et d'action territorialisées.
Mais n'est-ce pas l'insertion même de logiques territorialisées dans un espace fluide et ouvert qui crée des effets néfastes ? Autrement dit, la multiplication des échelles ne crée-t-elle pas elle-même les problèmes en y apportant des solutions qui ne peuvent être que partielles ? Si le diagnostic de fragilité et de marginalisation du pastoralisme est juste, le remède adopté (la sécurisation foncière, l'impératif territorial) ne fait qu'aggraver les symptômes. La décentralisation consiste alors, en prenant au sérieux ces dispositifs auto-justificateurs, à amplifier ou à créer des problèmes et simultanément les moyens de leur règlement. Créer de nouveaux problèmes permet de justifier la pertinence des solutions adoptées.

Ainsi, nous assistons au Niger à la reconfiguration des pouvoirs locaux et de la captation de la rente du développement par l'imposition de ces nouveaux principes de gouvernance territorialisée à différentes échelles. Même la reconnaissance partielle des droits d'usage des pasteurs sur les terroirs qu'ils exploitent une bonne partie de l'année, rendue nécessaire par les pressions sur les ressources naturelles, participe de la rigidification de la fluidité nomade. Sécuriser le pastoralisme, c'est aller souvent à l'encontre de ses capacités de mobilité et de flexibilité, c'est contribuer à le détruire.
Longtemps tenu sous cloche par le pouvoir colonial, puis l'Etat nigérien qui a hérité du principe d'une séparation franche entre nomades et sédentaires (A. Marty, 1999), le Nord-Niger est donc très mal préparé à entrer dans les logiques territoriales sédentaires. La logique de gestion de l'espace fondée sur le modèle du terroir villageois (« un terroir, un village »), est aujourd'hui étendue à celle de l'espace pastoral : après avoir créé le statut de terroir d'attache pour les pasteurs, les autorités encouragent désormais le « principe : un village, une aire de pâturage »[13]. La logique de la décentralisation et de la politique foncière perpétue le mythe de la superposition d'une unité villageoise et territoriale africaine close sur elle-même.

2- Rébellion touarègue, extraterritorialité minière et dépossession des terrains de parcours nomades

Si nous avons évoqué jusqu'alors ces transformations comme relevant d'une injustice spatiale, c'est dans la stricte mesure où les logiques nomades, pour se reproduire, doivent assurer les conditions d'un espace pastoral relativement ouvert et fluide. Il s'agit de garantir la primauté des activités pastorales et caravanières sur l'appropriation des ressources localisées. La période de domination nomade est depuis longtemps révolue, mais l'héritage colonial de l'administration indirecte par la chefferie traditionnelle, tout en fragilisant économiquement et en marginalisant politiquement le Nord-Niger, a permis de perpétuer une certaine ouverture et autonomie de l'espace pastoral. C'est le découpage de l'espace opéré par la décentralisation et soutenue par les revendications territoriales des rébellions touarègues, qui a remis en cause cet état de fait.

La décentralisation : l'impératif territorial issu des revendications des rébellions touarègues

Même si la situation reste fragile, la paix est revenue depuis quelques mois au Nord-Niger après quasiment deux ans de conflits depuis l'attaque d'Iférouane en février 2007. Les trois mouvements rebelles de cette seconde rébellion (MNJ, FPN et FFR) ont déposé les armes grâce à la médiation de la Libye. Constatons au préalable que les forces sociales touarègues qui se sont opposées à l'Etat nigérien ne considèrent pas l'impératif territorial comme un problème mais comme une ressource politique et économique. Les rébellions du début des années 90 et de la fin des années 2000 ont œuvré dans le sens d'un renforcement de l'encadrement territorial. Après les cinq années de conflits de la première rébellion, les accords de paix du 24 avril 1995, qualifiés de « Pacte national », ont été plus qu'un simple armistice. Ils ont conduit notamment à l'adoption de la loi de décentralisation, remplaçant les velléités de sécession ou de fédéralisme.

La prise d'armes de 2007-2009 était motivée par ce qui est vécu comme une marginalisation du Nord-Niger et une confiscation par le pouvoir central de ses ressources naturelles. Le régime de Tandja, jugé corrompu et ethniciste, aurait volontairement délaissé cette région qui produit pourtant la principale source de richesse du Niger, l'uranium. Seul ce principe territorial permettrait donc à la population touarègue de pouvoir gérer et contrôler son territoire de façon beaucoup plus autonome vis-à-vis de Niamey. Sans évoquer les rapports équivoques entre les sociétés minières et les mouvements rebelles[14], il est clair que les rébellions ne se sont pas opposées à l'exploitation minière, mais ont cherché à imposer des retombées financières locales et régionales. Il n'est pas surprenant de constater que le premier point du programme de revendications a porté sur le « découpage administratif et l'aménagement du territoire ». Tout en soutenant la mise en fonction des collectivités territoriales (communes, arrondissements, départements et régions), le MNJ a proposé un redécoupage de l'espace national en quatre régions, qui tiendrait mieux compte de la configuration socio-économique et culturelle du pays. La région du Nord-Niger s'en trouverait étendue, intégrant alors la majeure partie de la population touarègue nigérienne, mais aussi d'autres populations[15].

Alors qu'une partie de la population vit de la mobilité, voire de la transgression des frontières nationales, tout se passe comme si les leaders de la rébellion eux-mêmes ne pouvaient aujourd'hui penser la reconfiguration du pouvoir en dehors d'un maillage territorial. Pour les têtes pensantes du MNJ comme pour les élites touarègues légitimistes, la sédentarisation est actuellement un objectif car elle est un mode d'accès aux ressources politiques et économiques. Elle permet d'accéder au « développement », c'est-à-dire aux équipements et aux services de la modernité (éducation, santé, confort), tandis que le nomadisme l'en détournerait. Le nomadisme pastoral est aujourd'hui synonyme de pauvreté et, à tort ou à raison, la sédentarisation est généralement perçue par les leaders locaux comme une condition préalable au développement ; la décentralisation contribuant de fait à l'arrivée au pouvoir d'une nouvelle élite politico-économique (« courtiers » en développement, leaders des coopératives agricoles, patrons d'agences touristiques, grands commerçants).
Toutefois la décentralisation a permis l'émergence de nouvelles formes de revendications et d'équité spatiale. Jusqu'à récemment, l'extraction de l'uranium au Niger, pour l'Etat comme pour Areva, n'a pas été présent une question d'aménagement mais, en quelque sorte, de prédation sur le local. C'est la montée récente de la question des conséquences, notamment par les enjeux environnementaux (O. Soubeyran, à paraître), qui a changé la donne. La décentralisation a ouvert une brèche politique contre la mainmise du pouvoir central sur les retombées financières et contre l'anesthésie des conséquences sur le local et des possibles contreparties face aux impacts sanitaires et environnementaux de l'extraction minière. Sous la pression, à la fois des bailleurs de fonds et de la société civile, le gouvernement a donc fait voter, après maintes tergiversations, une loi en 2006 attribuant aux collectivités territoriales 15% des revenus de l'Etat issus de la redevance minière.

Exploitation minière et pastoralisme nomade : l'exemple d'Imouraren

Officiellement, ce ne sont pas moins de 125 conventions minières (permis de recherche ou d'exploitation) qui ont été octroyées entre 2000 et 2008 par le gouvernement nigérien à 36 compagnies étrangères de 12 nationalités (122 pour la prospection ou l'exploitation d'uranium et 3 permis pétroliers). 75 autres permis pour l'uranium et 7 pour le pétrole n'ont pas encore été officiellement attribués. Après un long bras de fer avec le président Mamadou Tandja, Areva maintient pour l'instant en grande partie sa mainmise sur la production d'uranium grâce à ses filiales exploitant les mines d'Arlit-Akokan et le futur site de production d'Imouraren. En raison notamment de l'accroissement spectaculaire des cours mondiaux entre 2004 et 2007, Areva a dû néanmoins revoir à la hausse ses accords de longue durée. La concurrence chinoise y a également contribué. Les filiales chinoises monopolisent les autres concessions prometteuses et rapidement exploitables. Les compagnies canadiennes, australiennes, sud-africaines, indiennes, britanniques, russes, états-uniennes et des Iles Vierges britanniques se sont partagé le reste des 90 000 km2 alloués à la prospection minière, et qui sont aussi les pâturages des pasteurs de l'ouest de l'Aïr.
Prenons l'exemple d'Imouraren. Quelle place sera accordée à la préservation de l'environnement et du nomadisme pastoral face à ce qui sera à Imouraren, la deuxième plus grande mine d'uranium au monde, à ciel ouvert[16] ? Le site industriel représentera 200 km2et le gisement seul couvrira une surface de 8 km de long sur 2,5 de large (voir carte 2). Que deviendront les villages de Tshin Taghat, Anu Zaggaren et Téshilé qui se situent à quelques kilomètres du futur « trou » de la mine ? Sans compter les problèmes liés à l'urbanisation (création d'un « base-vie », d'un aéroport, de sites industriels et d'une ville champignon[17]), comment pourra se poursuivre l'exploitation pastorale près d'une zone bientôt dévégétalisée et contaminée par les résidus de l'extraction minière ? La poussière dégagée par la mine, le transport du minerai sur d'immenses camions[18], et le dépôt de stériles[19] radioactifs à ciel ouvert, aura évidemment des conséquences environnementales. Quel sera l'impact sur le niveau de la nappe phréatique fossile dite des grès d'Agadez de la consommation d'eau liée à l'exploitation de l'uranium à Imouraren[20] ?
Qu'en est-il plus précisément de la « juste et préalable indemnisation » à la privation des droits d'usage pastoraux prévue par l'article 9 du décret portant création des terroirs d'attache ? Comment se fera l'expulsion et/ou l'interdiction faite à une partie des groupes de pasteurs nomades et semi-nomades Touaregs Kel Tédélé, Kel Gharous et Ikazkazan d'accéder à des itinéraires de transhumance et à des pâturages exploités selon des droits d'usage traditionnels ? Ces groupes disposent d'au moins un terroir d'attache reconnu avec un puits à l'intérieur même du permis d'exploitation octroyé à Areva. Situé sur le site de la dynamitière, le puits sera nécessairement comblé.

Le problème foncier est déjà réglé pour Areva. Selon le porte-parole d'Areva, les nomades de la zone n'auraient pas de biens fonciers, mais se partageraient, ou plutôt « défendent », de simples zones de pâturages se limitant uniquement aux rives des koris ; donc aucune expropriation, ni aucune « gêne », ni même « risque » de gêne pour les nomades : « le droit foncier n'étant pas abouti au Niger - même si l'Etat est en train de mener une réflexion de fond sur le sujet -, peu de personnes possèdent un terrain dans les deux tiers nord du pays. Si les populations locales, majoritairement nomades, n'ont quasiment pas de biens fonciers, elles défendent en revanche des zones de pâturages, qui se situent au niveau des oueds [...]. Un sujet sur lequel nous avons beaucoup travaillé. Nous avons organisé plusieurs journées d'audience publique et nous avons réussi à délimiter une surface d'exploitation qui ne risque pas de gêner les éleveurs »[21]. En accord avec l'Etat nigérien et moyennant une redevance annuelle pour les collectivités locales, Areva s'est donc adjugé une zone réservée et délimitée en excluant de facto les nomades par une lecture restrictive et partiale du décret sur les terroirs d'attache (ce qui leur permet en outre de nier le fait de relever de l'objet de l'article 9 dudit décret). Sous prétexte qu'il n'y a pas de terroir d'attache dans la zone d'Imouraren (en omettant consciemment celui d'Alkhuriya), la question de l'expropriation ni même celle de l'impact ne sont envisagées. Il est évidemment totalement inexact d'affirmer que le pastoralisme nomade ne se limiterait qu'aux oueds. Ces derniers comportent des pâturages et des points d'eau de repli en saison sèche, reconnus aujourd'hui dans la législation foncière comme un terroir d'attache vital pour les pasteurs nomades. Mais ceux-ci ne pourraient survivre dans un espace aussi exigu, les excluant de fait des pâturages saisonniers des plaines d'Imouraren. Ce n'est qu'en dernier lieu que les nomades se résignent en saison sèche à se replier sur les puits permanents et corrélativement à exploiter les ressources arborées des oueds. Constatons que la sécurisation du foncier pastoral avec la notion de terroir d'attache a inversé le rapport des nomades aux oueds et aux puits de saison sèche. Il en a fait le fondement de l'aire de nomadisation alors qu'il n'est que l'ultime recours, lorsque la rareté des ressources est à son paroxysme. La base ultime de repli vital devient alors le strict cadre territorial des droits pastoraux.
L'esprit du décret portant création des terroirs d'attache n'est d'ailleurs pas d'assigner territorialement le nomadisme. Mais tout se passe dans les faits comme si la reconnaissance, très limitée dans l'espace et très partielle dans la législation foncière, de droits territoriaux aux nomades d'un côté, permettait de l'autre de justifier leur exclusion totale des terrains situés hors des terroirs d'attache et de légitimer ainsi l'accaparement de vastes espaces riches en ressources naturelles. Concéder à très peu de frais d'une main permet d'empoigner ailleurs à pleines mains. C'est l'avis du maire de la commune de Dannet, sur le territoire de laquelle est situé Imouraren : « Areva ne voulant rien donner, se serait abrité derrière certaines lois nigériennes (...) incomplètes pour dire que la terre n'appartient à personne, mais à l'Etat nigérien et par conséquent ces problèmes sont minimes, car n'ayant pas trouvé de populations sur l'espace attribué »[22]. C'est aussi celui d'Almoustapha Alhacen, président de l'ONG Aghir in'man : « Areva a tout dit mais n'a pas dit l'essentiel c'est-à-dire ce que vont devenir les nomades d'Imouraren. En plus, Areva a fui Dannet pour venir à Agadez faire cette audience[23] parce qu'ici les gens ignorent la situation des populations de Dannet (...) Areva ne tient même pas compte des populations à Imouraren, on dit d'ailleurs qu'il n'en existe pratiquement pas sur le périmètre ! C'est faux ! Archi-faux ! Nous allons défendre ces pauvres populations ! Pour lui répondre, M. Moussa Souley du groupe Areva[24] soutient mordicus que les chiffres rapportés n'émanent pas du promoteur mais d'une étude de terrain menée par un groupe d'indépendants à qui on peut bien faire confiance ». En effet, dans le cadre de l'étude d'impact environnemental, Areva a financé des recherches de terrain d'universitaires nigériens sur le nomadisme dans la zone d'Imouraren. Mais Areva en arrive ni plus ni moins à inverser les résultats de l'enquête pour affirmer qu'il n'y a pas de nomades sur le permis d'exploitation[25]. Comme l'a confirmé notre propre travail de terrain, il existe plusieurs campements exploitant les pâturages dans la zone du permis et cela même pendant la saison sèche.
L'injustice spatiale nous paraît ici double : cette notion de terroir d'attache censée « sécuriser » les nomades en les stabilisant, permet de justifier leur refoulement et leur cantonnement. Et parce que le pastoralisme n'est pas considéré comme une forme de mise en valeur et d'appropriation territoriale, ils n'ont pas droit aux indemnisations prévues par la loi, au même titre que les agriculteurs[26]. La sécurisation de l'exploitation des ressources naturelles stratégiques passe ainsi par la création d'espaces extraterritoriaux interdisant toute maîtrise locale dans la gestion des ressources naturelles. Le site d'Imouraren est de fait sanctuarisé, c'est-à-dire clôturé, interdit d'accès pour la population locale et surveillé militairement par des dizaines d'hommes armés : Areva finance et équipe des unités militaires nigériennes (FAN et FNIS) et emploie des nomades comme gardiens.

Cette extraterritorialité est encore plus manifeste dans l'exploitation des sites miniers chinois. Celle-ci se fait dans des conditions d'exception encore plus explicites, au mépris des pratiques locales mais aussi des lois nationales nigériennes. L'ONG Aghir in'man voit dans les compagnies chinoises « le même mode opératoire », fait « d'opacité » et de « piétinement des lois nigériennes », au détriment d'une industrie minière « qui s'intègre convenablement dans les territoires où elle s'implante »[27]. Le rapport de l'étude d'impact environnemental du projet de raffinerie de pétrole au bloc d'Agadem (par la compagnie chinoise CNPC) a été réalisé à la hâte par des experts chinois d'après les normes environnementales et la législation chinoises. En outre, certains ingénieurs nigériens, formés en Chine, ont refusé de signer le contrat de travail pour la SOMINA, filiale d'une société chinoise exploitant les mines d'uranium d'Azélik : ils sont en effet sous-payés par rapport à leurs collègues travaillant pour les filiales d'Areva et doivent se plier aux horaires et aux conditions de travail et de rémunération imposées en Chine et externalisées au Niger[28]. Tout se passe avec les sites d'exploitation chinois comme si ces espaces extraterritoriaux jouissaient d'une grande autonomie par rapport à la souveraineté nationale et d'une pleine autonomie par rapport au milieu local.
Dans les faits, la pression sur les ressources naturelles (eau, terres arables, etc.) et les richesses minérales (uranium, pétrole, etc.) concourt à un retour en force du vieux principe colonial du cantonnement des tribus (I. Merle, 1999 et L. Gagnol, 2009). Il s'agit de transformer un droit d'usage non limité spatialement en droit de propriété collective. A Imouraren, c'est bien grâce à la reconnaissance d'un accès prioritaire sur un petit espace (terroir d'attache) qu'Areva en accord avec l'État nigérien justifie l'idée de l'inexistence des nomades et l'accaparement des terres situées en dehors de ces espaces restreints. Mais contrairement à ce qui s'est passé en Algérie à l'époque coloniale, la notion de terroir d'attache cantonne les nomades dans les vallées d'oueds sans qu'il n'y ait pour autant de reconnaissance d'un droit de propriété collective, ni même d'indemnisation à ce cantonnement. Tout se passe comme si les nomades d'Imouraren se faisaient refouler sans autre forme de procès qu'un droit de conquête, c'est-à-dire un droit du plus fort puisque la terre, propriété de l'Etat, a été concédée sans prendre en compte leur existence.


Conclusion

Depuis l'époque coloniale, s'était maintenue au Niger une administration certes centralisée, mais en grande partie non-territorialisée et indirecte par le biais de chefs de tribus et de groupements nomades. C'est précisément ce que remet en cause aujourd'hui la décentralisation, sorte de révolution politique territorialisante, qui s'applique uniformément à tout le territoire nigérien. Il s'agit de la fin de ce que l'on pourrait appeler l'exception administrative nomade. La communalisation est vécue en zone nomade comme le démembrement du pays, l'imposition d'un nouveau pouvoir par le partage de l'espace. La décentralisation a pour principal effet, complètement éludé nous semble-t-il, la destruction des conditions du maintien du nomadisme (L. Gagnol, 2009).
Conforté par un travail de terrain, notre propos sur l'injustice spatiale en milieu nomade est simple : tout ce qui est territorialisé relève de l'injustice spatiale d'un point de vue nomade. La justice spatiale en milieu nomade ne pourrait être que la négation même de l'impératif territorial : il s'agit de garantir la mobilité et la fluidité au sein d'un espace fondamentalement ouvert ou « lisse » selon l'expression de G. Deleuze et F. Guattari (1980).



Au-delà, c'est la question de la maîtrise du local sur les ressources naturelles qui est en jeu face à la multiplication des espaces extraterritoriaux. Nous avons travaillé sur les mines mais nous aurions tout aussi bien pu travailler sur l'achat ou la location de terres arables par des institutions étrangères. Ces enclaves de la mondialisation, symboles de l'économie extravertie, se greffent sur le milieu local en finissant progressivement par créer leur propre milieu associé. Elles participent à la transformation de la société locale qui n'a d'autres choix que de s'adapter, c'est-à-dire se sédentariser, ou disparaître.



________________________________________

[1] Cet article a été soumis peu après le coup d'état contre le président nigérien en février 2010 et donc avant les événements récents de prises d'otage à Arlit de sept travailleurs des mines d'uranium d'Areva (dont cinq ressortissants français) dans la nuit du 15 ou 16 septembre. D'après le témoignage des gardiens qui sont sortis dans la presse, il s'agirait d'une opération menée par une trentaine d'individus parlant l'arabe et peut-être le tamashaq (Touaregs maliens). On sait depuis qu'il s'agit d'une action menée par la « brigade » d'Abou Zeid d'Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI). Les Touaregs, notamment nigériens, n'adhèrent pas, dans leur immense majorité, à l'idéologie islamiste. Quoi qu'il en soit, le kidnapping d'occidentaux tend à devenir un business comme un autre dans le Sahara (et ailleurs dans le monde).



[2] Voir le n° 101 (vol. 31, 2004) et 117 (vol. 35, 2008) de la Review of African Political Economy et en particulier un article de M. Klare et D. Volman (2006) de cette même revue.

[3] Début 2010, la région administrative d'Agadez possède une population estimée à 400 000 habitants.

[4] Regroupement de campements fondé sur une relation de parenté ou, aujourd'hui, sur une simple entente de bon voisinage, et formant une unité de production pastorale.

[5] Face à la diminution des terres disponibles et à l'augmentation de la population, les agriculteurs à la recherche de nouvelles terres s'installent de plus en plus au nord, qui est pourtant réservé juridiquement au pastoralisme. Depuis l'époque coloniale, il existe une ligne fictive (le long de l'isohyète de 350 mm de précipitations par an) en deçà de laquelle les cultures sous pluie sont théoriquement interdites.

[6] Il s'agit pour l'instant de petits périmètres privés, mais la Libye s'est dite prête à investir 19 milliards de FCFA pour un programme de développement de l'agriculture irriguée. Treize forages ont été réalisés mais les 50 000 hectares qui devaient être mis en valeur n'ont finalement pas été alloués par le gouvernement nigérien. Le « projet Irhazer » a été repris par Areva qui a annoncé en 2006 l'aménagement de périmètres irrigués sur 5 000 hectares pour un montant de 11 milliards de FCFA sur 5 ans. Une « société privée de mise en valeur de la vallée de l'Irhazer » devrait voir le jour en 2010.

[7] La Réserve naturelle nationale de l'Aïr-Ténéré notamment, classée patrimoine mondial de l'UNESCO, comprend un « sanctuaire » de protection des addax d'où les nomades sont juridiquement exclus.

[8] Dans les conditions environnementales saharo-sahéliennes, le pastoralisme extensif est le plus productif. Des études ont montré que le coût énergétique et écologique du ranching ne le rendait pas plus productif et efficace économiquement. Cela sans compter le coût humain de la disparition de dizaines de familles de pasteurs pour la création d'un ranch à la superficie suffisante pour être rentable.

[9] Ce processus est contemporain à de nombreux pays sahéliens. Pour une comparaison avec le Mali, voir entre autres les travaux de Stéphanie Lima (2005) et de Claude Fay (2006). L'Observatoire de la décentralisation au Niger du LASDEL a produit d'intéressantes études de cas.

[10] L'Atelier régional de réflexion sur le foncier et la décentralisation, organisé par le Haut commissariat à la modernisation de l'Etat, qui s'est tenu à Agadez en mai 2007, a fait, entre autres, ces deux recommandations. Les commissions foncières ont en charge l'immatriculation des propriétés foncières au « dossier rural », sorte de nouveau cadastre rural. La chefferie traditionnelle, autrefois seul juge en matière de reconnaissance des droits d'usage, n'a maintenant plus qu'une voix consultative.

[11] Institués par la Banque mondiale (par le biais du Programme d'Actions Communautaires), ces plans de développement ont été réalisés sur le même modèle et grâce à l'appui des coopérations bilatérales, notamment du programme LUCOP (Lutte Contre la Pauvreté) de la coopération allemande.

[12] Bulletin d'information du LUCOP n° 6 (avril 2006, p. 4).

[13] 3ème recommandation de la commission 3 sur les niveaux de gestion de la décentralisation, 2005, Rapport Général de l'Atelier National sur la Problématique de la Décentralisation et Communautés Nomades au Niger, Haut commissariat à la réforme administrative et à la décentralisation, 8 p.

[14] Tandis qu'Areva est accusé en France de spolier le Nord-Niger de ses richesses, ce qui aurait conduit les Touaregs à prendre les armes, au Niger, Areva a été dénoncé par la presse et le gouvernement nigériens, sinon comme étant le commanditaire de la rébellion, du moins de l'avoir financée et de profiter de la déstabilisation de la région pour préserver ses intérêts contre la Chine et en vue des renégociations de contrats d'exploitation de ses mines. Pour Niamey et une bonne partie de la société civile nigérienne, le MNJ n'est qu'un instrument de déstabilisation orchestré de l'extérieur, notamment par Areva et/ou la Libye. Ainsi, malgré l'attaque d'Imouraren en avril 2007, et après celle des installations de prospections chinoises (avec l'enlèvement d'un ingénieur chinois), Areva a été soupçonné par Niamey d'armer et de soutenir financièrement la rébellion, en échange de la sécurité de ses activités. La stratégie d'Areva qui vise à employer des anciens rebelles touaregs pour la protection de ses sites et de sa main d'œuvre fait aujourd'hui polémique avec la prise d'otages des ressortissants français à Arlit en septembre.

[15] Par crainte de l'autonomie partielle des régions, la communalisation intégrale a précédé les régions et les départements, pourtant plus aisément mis en place et plus viables financièrement. Même si cette région Nord n'est pas nettement délimitée, ressurgit en outre le fantôme de l'éphémère Organisation Commune des Régions Sahariennes de la fin de l'époque coloniale, qui avait déjà fait polémique lors de la présentation des revendications territoriales par la précédente rébellion (voir A. Bourgeot, 2000).

[16] L'objectif de production est de 5000 tonnes par an pendant 35 ans (grâce à 1,2 milliards d'euros d'investissement initial). Le Niger passera du quatrième au deuxième rang mondial pour la production d'uranium.

[17] Si la croissance d'Imouraren est similaire à celle d'Arlit, la population dépassera 60 000 habitants dans une trentaine d'années. Arlit est actuellement une ville de 80 000 habitants, vivant sur les 1900 emplois directs des deux mines (faisant vivre 21 000 personnes selon Areva). Pour Imouraren, 1350 emplois directs (Areva et sous-traitants) et 3375 emplois indirects sont prévus. Même si le projet de construction d'une cité ouvrière sur le site a été abandonné (elle serait implantée à Arlit à 90 km de là), il faut s'attendre à l'afflux de personnes étrangères à la région et à l'apparition d'une ville nouvelle spontanée.

[18] Les camions transportent jusqu'à Cotonou les fûts hautement radioactifs de yellow cake. Les accidents qui surviennent sur ce trajet de 1600 km engendrent des catastrophes écologiques.

[19] Les stériles sont les roches qui contiennent trop peu d'uranium pour être exploitées de façon rentable. Ils sont déposés sans aucune protection. Le vent chargé de poussières diffuse dans l'air des radons et des particules radioactives tandis que le ruissellement et l'infiltration des eaux de pluie contaminent les nappes phréatiques. Sur les pollutions, la situation sanitaire des travailleurs et des habitants d'Arlit, voir les prises de parole de l'ONG nigérienne Aghir in'man et les rapports de la CRIIRAD (2010).

[20] Voir les prédictions alarmantes de l'hydrogéologue A. Joseph, 2008, « Quand l'uranium menace le pastoralisme nomade », Aïr-Info, n° 72. A partir de 2013, l'exploitation de l'uranium demandera 56 000 m3 d'eau par jour, puisés dans les aquifères fossiles (aux ressources non renouvelables).

[21] Yves Dufour, directeur de la communication des activités minières d'Areva, interviewé par le Journal du dimanche, le 26 mars 2009.

[22] Cité dans M. Diallo, 2008, Bulletin d'information du ROTAB, n°8, p. 2.

[23] Il s'agit de l'audience publique qui s'est tenu en mai 2008 à Agadez pour valider le « rapport d'étude d'impact environnemental » réalisé par Areva pour obtenir le « certificat de conformité environnemental » exigé par le ministère de l'environnement. Ce rapport, trop technique pour être compris de la plupart des participants, n'a même pas été remis au « comité ad-hoc » chargé pourtant par le ministère de conduire les audiences publiques. Aucune contre-expertise indépendante n'a permis de contrebalancer ces résultats. Voir Ousseini Issa, « Impact environnemental du projet Imouraren : les inquiétudes des populations d'Agadez », Le Républicain du 15-05-08. L'atelier de validation a par ailleurs émis les observations et recommandations suivantes : nécessité de sensibiliser et d'indemniser les nomades (ce que refuse Areva), élaboration de plans de surveillance environnemental et sanitaire, plans de gestion des risques et de traitement des résidus d'extraction, etc.

[24] Directeur en charge de la communication, du développement durable, de l'environnement et de la santé des populations pour Areva-Niger. Extrait d'Aïr-Info (n° 76, 2008).

[25] Ce texte est inaccessible en France mais il est consultable dans certaines mairies de l'Aïr. Il est impossible d'utiliser les informations qui y sont contenues sans autorisation écrite préalable d'Areva.

[26] Des procédures d'expropriation et d'indemnisation sont en cours en ce qui concerne la construction de la raffinerie de pétrole par une société chinoise prés de Zinder. Les populations visées sont des agriculteurs, qui eux-seuls ont pu enregistrer leurs titres fonciers au dossier rural.

[27] « La SOMINA interpellée », Le Républicain du 24 avril 2009.

[28] Voir le Bulletin d'information du réseau des organisations de la société civile pour le transparence dans les industries extractives et l'analyse budgétaire, n° 9, mars 2009.

Niger : malaise au sein de la junte au pouvoir ,Salou Djibo, le chef de la junte au Niger aurait procédé à l’arrestation du colonel Abdoulaye Badié.

Niger
Sia Kambou/AFPPar RFI

Depuis trois jours, la capitale du Niger vit sous tension. Le colonel Abdoulaye Badié, numéro deux de la junte, aurait été arrêté. Le poste de secrétaire permanent qu’il occupait a été supprimé. Des officiers auraient également été entendus. Des soupçons de tentative de déstabilisation de la junte seraient à l'origine de ces actes.
Que se passe t-il au sommet de l’Etat nigérien ? A Niamey, on évoque un malaise profond, et les dernières soixante-douze heures ont été marquées par une très forte tension. Au matin du 13 octobre, la deuxième personnalité du régime, le secrétaire permanent de la junte militaire, le colonel Abdoulaye Badié, a été mis aux arrêts. D’autres officiers seraient entendus.

Mutisme des autorités

De bonne source, on reprocherait au colonel Badié et à ces quelques officiers d’avoir tenté de déstabiliser la transition militaire. Mercredi 13 octobre 2010 au soir, le mutisme était total du côté des autorités en place.
Cependant, il faut rappeler que le général Salou Djibo, le patron de la junte, a, par décret il y a trois jours, limogé le chef de la garde nationale, supprimé le poste de secrétaire permanent qu’occupait donc le colonel Abdoulaye Badié et réactivé la Cour de justice militaire.
Alors, y a-t-il eu complot contre Salou Djibo pour l’évincer de la transition ? C’est le 6 avril 2011 que le pouvoir doit être remis au civil.

mercredi 13 octobre 2010

13/10/10


RDV le 22 octobre !

Soirée de soutien au Festival d'Agadez !

Parce que, + que jamais, il est hors de question de baisser les bras !

Plein de choses, plein de mode !

Mamane (humoriste agadézien que vous écoutez sur RFI)

TAKRIST N'AKAL

Hamawassa

De Poil (LE groupe de Saint Brieuc !)

Jean-Marc Durou dédicacera son dernier ouvrage !

et d'autres surprises !
Vous pourrez acheter vos billets sur place

RDV dès 18h

Venez nombreux

témoigner votre soutien, votre respect et votre amour

à Agadez, sa région et plus que tout ses habitants !

Le Niger élu au conseil des gouverneurs de l’AIEA

Niger

Le Niger élu au conseil des gouverneurs de l’AIEA
Publié le 13 octobre 2010 à 11h47
photo: presidente d'Areva et l'e x ministre nigerien des mines et de l'energie

(PANA) - Le Niger a été élu au Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), à l’issue de la 54ème session ordinaire de la conférence générale de l’organisation à Vienne, en Autriche, a indiqué ce mardi le ministre nigérien des Mines et de l’Energie, Me Souleymane Abba.
Selon M. Abba, occuper un siège au conseil des gouverneurs de l’AlEA offre au Niger, grand producteur d’urani um, une place de choix pour ?uvrer activement à la promotion de l’utilisation pacifique des techniques nucléaires et au renforcement du cadre légal interna tional y afférant.
« Avec la mise en exploitation du gisement d’Imouraren à l’horizon 2013 qui portera la production nationale à 11 000 tonnes d’uranium, le Niger deviendra un partenaire priv ilégié dans la filière uranifère », a-t-il affirmé.
Producteur d’urani um depuis 40 ans, le Niger a mis en place une politique ambitieuse visant d’une part à diversifier ses partenaires et d’autre part à lancer un programme électronucléaire pour répondre à ses besoins énergétiques et à ceux de la sous-région, rappelle-t-on.
Au cours de son mandat, le Niger entend défendre dans son intérêt et celui des autres pays africains l’accès aux sciences et techniques nucléaires, notamment dans les domaines concernant la santé (cancer thérapie), l’énergie, l’agriculture et la protection de l’environnement, a souligné le ministre nigérien des Mines et de l’Energie.
L’Agence internationale de l’énergie atomique, qui est une institution spécial­isée des Nations unies dans les ques tions nucléaires, comprend 152 Etats membres. Le Conseil des gouverneurs (35 Etats membres) est l’organe d’orientation et de décision de l’AIEA.

Réunion d'experts anti-terroristes au Mali où Aqmi détient sept otages

Réunion d'experts anti-terroristes au Mali où Aqmi détient sept otages

De Stéphane BARBIER (AFP)
photo :Droukdel Emir d'Aqmi

BAMAKO — Des experts de la lutte anti-terroriste des pays du G8 ont entamé symboliquement mercredi une réunion à Bamako, capitale d'un pays dont la partie nord est un des théâtres d'opération d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) qui y détient sept otages, dont cinq Français.
Que ces experts se réunissent au Mali à ce moment précis pour étudier les moyens de renforcer la lutte anti-terroriste, "est une marque d'estime et de confiance", a déclaré Moctar Ouane, ministre malien des Affaires étrangères, à l'ouverture des travaux d'experts du Groupe d'action contre le terrorisme du G8 (GACT).
Une réunion de deux jours élargie à plusieurs pays de la bande sahélo-saharienne et d'Afrique de l'Ouest, ainsi qu'à l'ONU, l'Union africaine (UA), l'Union européenne (UE) et la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao).
L'Algérie, pays le plus puissant de la bande sahélo-saharienne, a boycotté la rencontre à laquelle participe son plus grand rival régional, le Maroc.
Alger, qui a régulièrement critiqué Bamako par le passé pour son laxisme à l'égard d'Aqmi, considère en outre que la lutte contre cette organisation est l'affaire des seuls pays du Sahel et ne souhaite pas l'implication de pays qui y sont étrangers.
"Je suis attristée par les circonstances qui nous réunissent aujourd'hui, la menace constante et inquiétante du terrorisme", a déclaré Virginie Saint-Louis, ambassadrice du Canada à Bamako, présidente de la rencontre.
La diplomate canadienne a rappelé l'attentat commis le 1er octobre à Abuja lors de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance du Nigeria (12 morts) et l'enlèvement mi-septembre, dans le nord du Niger, de sept étrangers (cinq Français, un Malgache et un Togolais), transférés dans le nord-est du Mali où ils sont retenus en otage par Aqmi.
"Aqmi ne respecte pas plus les frontières qu'elle ne respecte les règles internationales, la souveraineté nationale ou, bien sûr, la vie de gens innocents", a noté l'Australien Mike Smith, directeur exécutif du comité contre le terrorisme de l'ONU.
"Au contraire, Aqmi exploite l'existence des frontières" en implantant "des abris et des camps d'entraînement dans les coins reculés de la région, d'où elle lance des attaques dans les territoires d'autres pays," a-t-il souligné.
Selon lui, "le seul moyen pour les Etats du Sahel d'être capables de contrer cette menace de manière efficace sur le long terme", c'est d'agir "collectivement" par une "coopération opérationnelle dans des domaines comme le renseignement" et "le contrôle des frontières".
Il a également encouragé ces Etats à travailler avec des puissances "en dehors de la région" et à construire "une confiance mutuelle par le biais d'exercices et d'entraînements communs".
Le manque de coopération régionale dans la lutte anti-Aqmi et les réticences à l'égard de l'implication de pays comme la France ou les Etats-Unis, favorise les activités d'Aqmi qui commet attentats et enlèvements dans le Sahel, mais est également soupçonnée d'entretenir des liens avec d'autres groupes radicaux islamistes en Afrique de l'Ouest.
La multiplication des activités d'Aqmi semble avoir cependant entraîné une prise de conscience dans ces pays sur la nécessité de s'entendre face au groupe.
Fin septembre, en l'espace de quatre jours, les états-majors des armées du Mali, du Niger, de l'Algérie et de la Mauritanie se sont réunis à Tamanrasset (sud de l'Algérie) où a été établi un commandement militaire conjoint, et ont créé à Alger un centre conjoint du renseignement.



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lundi 11 octobre 2010

Aqmi exigerait de la France l'abrogation de la loi sur la burqa

Aqmi exigerait de la France l'abrogation de la loi sur la burqa
Le Point.fr
photo:Aqmi


DUBAI (Reuters) - Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) réclame l'abrogation de la loi sur l'interdiction du voile islamique intégral en France, la libération d'activistes et sept millions d'euros en échange de la libération des sept otages français et africains enlevés au Niger, rapporte lundi la chaîne de télévision Al Arabia.
"Les ravisseurs ont des exigences irréalistes que le Mali et la France ne peuvent pas accepter (...), dont le retrait de l'interdiction du voile intégral en France et la libération de certains éléments du groupe détenus en France, en Mauritanie et dans d'autres pays", rapporte Al Arabia, qui dit s'appuyer sur des sources informées anonymes.
Les premiers contacts entre Aqmi et des chefs locaux au Mali ne sont "pas encourageants", en raison de la nature de ces exigences, ajoutent ces sources citées par la chaîne d'information arabophone.

À Paris, le ministère français des Affaires étrangères n'a pas souhaité commenter ces informations
"Comme vous le savez, la discrétion est une condition indispensable à l'efficacité de notre action", a-t-il dit lors d'un point de presse électronique. "Nous ne commentons pas les nombreuses rumeurs qui surgissent depuis l'enlèvement et dont la plupart sont absurdes ou infondées", ajoute-t-il.
Selon Al Arabia, Aqmi réclame également un million d'euros par otage. Cinq Français dont une femme, ainsi qu'un Togolais et un Malgache, employés du groupe nucléaire français Areva et d'un sous-traitant du groupe de travaux publics Vinci, ont été enlevés le 16 septembre dans le nord du Niger avant d'être conduits au Mali voisin.

INQUIÉTUDE POUR LA FEMME RETENUE EN OTAGE

Les exigences formulées selon Al Arabia par Aqmi interviennent au moment où le sort de la seule femme otage, Françoise Larribe, suscite l'inquiétude. Elle souffrirait d'un cancer et aurait besoin de soins réguliers.
"Françoise Larribe a effectivement subi une chimiothérapie en France", a déclaré un responsable d'Areva au Niger, qui a demandé à ne pas être identifié.
"D'après ce que j'ai retenu des échanges avec son époux, avant le rapt, elle avait développé une sorte de foyer infectieux et les médecins travaillaient à lui éviter la métastase", a-t-il ajouté. "Son mari disait qu'elle allait retourner en France pour le contrôle et le suivi.

Aqmi dit avoir exécuté en juillet dernier le travailleur humanitaire français Michel Germaneau, âgé de 78 ans, en déclarant agir en représailles d'un coup de main de militaires français et mauritaniens contre un de ses camps au Mali.
Fin septembre, la France s'était déclarée prête à discuter avec les ravisseurs des sept otages du Niger tout en précisant n'avoir reçu aucune demande de leur part.

Jeudi dernier, le Conseil constitutionnel a levé le dernier obstacle à l'interdiction dans tout l'espace public français du voile islamique intégral - niqab ou burqa.



Firouz Sedarat, Jean-Stéphane Brosse pour le service français, avec Patrick Vignal, édité par Gilles Trequesser

Idebir Ahmed. Amenokal des Touareg : « Le Sahara algérien est très convoité... »

El Watan (Algérie) 11 octobre 2010

Idebir Ahmed. Amenokal des Touareg : « Le Sahara algérien est très convoité... »
lundi 11 octobre 2010
photo:Tamanrasset



La situation sécuritaire au sud du pays inquiète, l’amenokal des Touareg, Idebir Ahmed, dans l’entretien qu’il nous a accordé chez lui à Tamanrasset, revient sur les « manipulations » de certains pays voisins et affirme que la question du Sahara algérien a été tranchée avant l’indépendance du pays.



L’amenokal dément catégoriquement la présence militaire américaine dans la région et nie toute relation avec le président libyen, El Gueddafi. Selon lui, de nombreuses personnes étrangères ont été inscrites au fichier de la région, dans le but de rendre la situation impossible à maîtriser. L’amenokal alerte sur les « conséquences graves » de la marginalisation de la population locale et reconnaît, dans la foulée, « la difficulté » de contrôler les jeune Targuis, « plus exigeants et moins réceptifs » que leurs aînés. Il décrit une situation inquiétante à cause de l’activité des terroristes et surtout ses conséquences sur le tourisme saharien qui fait vivre un large pan de la société.



Entretien :



Le Sud algérien est classé par les Français comme une zone dangereuse tout autant que le nord du Mali, du Niger et de la Mauritanie. Pensez-vous que c’est le cas ?



Les problèmes liés à la sécurité ne touchent pas le Sud algérien. Ils sont au-delà de la frontière. Vous avez remarqué que depuis l’enlèvement des 32 touristes allemands et autrichiens en 2003, Dieu merci, il n’y a plus jamais eu d’autres prises d’otages grâce aux services de sécurité et à la population locale. Nous faisons tout notre possible pour que la région reste paisible. Entre l’Algérie et le nord du Mali, il y a une grande différence. Là-bas les gens sont des laissés-pour-compte. Ils n’ont absolument rien. La misère pèse lourdement sur leur quotidien. Ce qui n’est pas le cas dans notre pays.



Pourtant les activités terroristes sont aux portes de l’Algérie. Ne craignez-vous pas que la situation déborde sur le territoire algérien et que des attaques, comme celle qui a visé les 11 gardes-frontières à Tinzaouatine, puissent être rééditées ?



Je ne le pense pas. Tous nos efforts sont concentrés sur la situation sécuritaire. Mais croyez-moi, cela devient de plus en plus difficile. Pour l’instant, nous pensons maîtriser la situation sur le terrain, mais ce n’est pas évident de se faire entendre comme avant. Les jeunes d’aujourd’hui sont plus exigeants et moins réceptifs. Cependant, nous avons réussi quand même à faire réfléchir les jeunes de Djanet, qui ont, il y a quelque temps, pris les armes, et convaincus de la nécessité de se rendre et d’utiliser des moyens pacifiques de revendications sociales. Il y en a qui ont pu décrocher des postes de travail et d’autres qui attendent. Nous espérons que toutes les promesses faites à l’époque seront respectées. Nous ne voulions pas que la situation nous échappe de la sorte. Mais comme je l’ai expliqué plus haut, les jeunes de maintenant sont moins réceptifs qu’avant…



Pourquoi, selon vous, les jeunes ne vous écoutent plus comme avant ? Est-ce parce que vous n’êtes plus à l’écoute de leurs préoccupations ou parce qu’ils ne se reconnaissent plus du modèle de vie que vous incarnez ?



Avant la parole était unifiée et se répandait comme un éclair. Quand un mot est dit, il est tout de suite entendu partout au sein de la communauté qui était, faut-il le rappeler, homogène. Mais, aujourd’hui, celle-ci n’est plus comme avant. Nous avons les 48 wilayas et une quarantaine de pays africains qui vivent dans la région. Comment voulez-vous que nos jeunes ne soient pas influencés par cette nouvelle donne. Avant, les parents étaient responsables des agissements de leurs enfants et lorsqu’ils étaient interpellés, la réaction était immédiate.
Aujourd’hui, il est difficile de surveiller les enfants ou de les obliger à respecter un ordre établi par la communauté. En tant que notables, nous concentrons tous nos efforts à ce volet, afin d’éviter les dérapages. Il faut reconnaître que, dans le passé, le territoire était partagé entre les tribus et rien ne se faisait sans l’avis des chefs. Durant cette période, les Touareg étaient les gardiens des lieux, de la faune et de la flore. Il était impensable pour un Nigérien ou un Malien de venir arracher l’armoise ici chez nous. Aujourd’hui, cette herbe médicinale est exploitée à grande échelle et nous n’avons pas le droit d’arrêter les auteurs, de peur d’avoir des problèmes avec les services de sécurité. Pourtant, il s’agit bel et bien d’une plante qui a une importance capitale chez la communauté et elle est en voie de disparition dans certains endroits.



Certains accusent les Touareg de pratiquer la contrebande et surtout de servir de guides aux terroristes ou de mercenaires dans les prises d’otages. Qu’en pensez-vous ?



De quels Touareg parlez-vous ? Algériens, nigériens, mauritaniens, maliens ou libyens ? Dites-nous où sont ces contrebandiers ou ces terroristes targuis et nous vous donnerons la réponse. Toutes ces nationalités vivent ici à Tamanrasset. Pouvez-vous les différencier ? Il n’y a que ceux qui les connaissent qui en sont capables. Mais pour les autres, ce sont tous des Touareg algériens et donc, qu’ils soient des autres régions du Sahara, cela ne change en rien leur position. Des enlèvements ont eu lieu à Arlit, en territoire nigérien, pourtant, lorsque vous entendez les médias, on parle beaucoup plus de Tamanrasset. Il est vrai que des membres de notre communauté se trouvent entre le nord du Mali et celui du Niger.
Ils y sont pour le commerce, pas parce qu’ils souffrent de la misère. Ils s’y rendent soit pour le pâturage soit pour vendre. Ils n’y vont pas pour voler ou trafiquer. Mieux, beaucoup font travailler les gens là-bas. J’ai été récemment au Niger et j’y ai rencontré bon nombre d’entre eux. Leur seule préoccupation est de pouvoir s’inscrire sans problème auprès de notre consulat. En dépit des problèmes que vit la région, au même titre d’ailleurs que les autres wilayas du pays, les Touareg n’ont jamais rêvé d’une université à Tamanrasset ou d’une station qui ramène de l’eau de 700 km, pour alimenter toute la communauté. C’est un acquis considérable et nous en sommes vraiment reconnaissants.



Pourtant il y a bien eu des Targuis impliqués dans le terrorisme et dans la contrebande ?



Ils sont rares et ne peuvent représenter la communauté. Les autres ont fini par apprendre notre langue et nos habitudes. Qui leur a permis d’être parmi nous ? Un vrai Targui n’accepterait jamais que son fils soit un contrebandier ou un terroriste. Cherchez bien la vraie identité des trafiquants et des fraudeurs et vous allez vous rendre compte que l’écrasante majorité vient d’ailleurs…



Ne pensez-vous pas que l’oisiveté peut aussi pousser les jeunes Targuis à rejoindre les rangs des contrebandiers ou des terroristes ?



C’est ce que disent ceux qui ne connaissent pas la région. Ce n’est pas à cause du manque de travail que nous détruisons notre pays. Le terrorisme et la contrebande sont des activités dangereuses qui compromettent l’avenir de la communauté.



De nombreux ressortissants installés à Tamanrasset réclament leurs papiers d’identité. Ils vivaient en nomades dans la région du Sahel avant de se fixer. Sont-ils réellement des Touareg algériens ?



Je ne nie pas l’existence d’Algériens oubliés, mais pas comme que les médias présentent les faits. Qu’ils nous donnent la liste des noms qui veulent la nationalité et nous allons nous charger de les défendre. Chez nous, chaque tribu touareg reconnaît les siens. Il n’y a jamais eu d’intrus parce que dans chaque commune, il y avait une commission chargée de la naturalisation, constituée des représentants de toutes les tribus touareg. Aucun papier ne pouvait être délivré sans l’avis de cette commission. Mais depuis sa disparition, il y a des années, les inscriptions se font au niveau des tribunaux, sans se référer aux représentants des tribus. De nombreuses personnes étrangères ont été portées sur le fichier national algérien.



Pensez-vous que cette politique a été délibérée dans le but de casser cette cohésion communautaire ?



Je reste convaincu que cela a été fait exprès dans le but de rendre la situation impossible à maîtriser. Nous connaissons tous ceux qui demandent la nationalité algérienne. Nous avons la liste de tous ceux qui sont venus durant les années 1981-82-83, à la suite de la grande sécheresse qui a sévi dans la région du Sahel. Avant, lorsqu’une seule personne s’introduisait du côté de l’Askrem, quelques heures plus tard, les gendarmes étaient informés et se déplaçaient sur les lieux pour s’enquérir de cette présence. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, parce qu’il y a plus d’étrangers dans la région que de Touareg. La cohabitation entre eux est plus formelle que réelle…



Pensez-vous que cet état de fait a aidé les terroristes et les contrebandiers à avoir des complices dans la région ?



Lorsque qu’on propose à un chauffeur salarié la somme d’un milliard de centimes en contrepartie d’un convoyage de marchandise d’une ville à une autre, n’espérez pas avoir un refus. L’offre est vite acceptée. Elle attire même tous les jeunes. Nous faisons tout pour les sensibiliser et les maintenir loin de la portée des trafiquants…



Le président libyen, Mouammar El Gueddafi, a affirmé avoir rencontré l’ensemble des chefs des tribus touareg, algériens, maliens, mauritaniens, nigériens et libyens, pour les fédérer en un royaume du Grand Sahara. Qu’en pensez-vous ?



Le seul que nous reconnaissons en tant que président, c’est Abdelaziz Bouteflika, celui de tous les Algériens. Si Gueddafi veut nous inviter ou nous parler, il doit passer par son homologue et interlocuteur algérien, qui est Bouteflika. En 2005, après le décès de Akhamok, il voulait venir présenter les condoléances, il est passé par la présidence, et ce sont les services du ministère algérien des Affaires étrangères, qui nous ont informés. Il est donc important de rappeler que la région du Sahara algérien a un seul président, c’est Abdelaziz Bouteflika. Les Touareg algériens, qui constituent le cœur même de la communauté, n’ont rien à voir avec ces réunions que Gueddafi a tenues avec d’autres Touareg des pays voisins. Nous gérons nos problèmes avec les pouvoirs publics algériens, nos seuls vis-à-vis que nous connaissons.



Le même président a accusé l’Algérie d’avoir été à l’origine de la situation actuelle qui prévaut dans la région du Sahel. Quel est votre avis sur ces propos ?



C’est au président de la République de lui répondre et non à moi. Mais je peux vous dire que ceux qui ont aidé à une telle situation sont forts. Ils ont réussi à engendrer un climat d’insécurité qui compromet tout effort de développement dans la région. Nous avons vraiment peur des conséquences…



Comment voyez-vous la prise en charge de cette situation ?



J’ai toujours dit que s’il n’y a pas de coordination entre l’Exécutif et les élus, il y aura de graves problèmes dans la région. Il est de notoriété que le wali doit être au courant de ce que fait l’Etat et dont la population n’est pas au courant. Son rôle est de servir d’intermédiaire entre les structures de l’Etat et les citoyens, lesquels doivent être impliqués dans tout ce qui concerne la gestion de la collectivité.



Justement, le décret régissant les agences de voyages et de tourisme et promulgué au mois de juillet dernier a suscité la colère des professionnels du tourisme saharien, qui voient leur activité, dont dépend tout un pan de la population locale, menacée. Qu’allez-vous faire en tant que chef des tribus touareg et député de la région de Tamanrasset ?



J’ai été interpellé non seulement par les agences de la région, mais également par de nombreux guides et chameliers qui vivent du tourisme. Aujourd’hui même, deux chameliers de Tazrouk et Idles sont venus se plaindre également des sites touristiques qui ont été fermés et qui leur permettaient de faire vivre leurs familles. Le tourisme a été pour eux une aubaine, après la sécheresse qui a sévi pendant plus de six ans. Ils ont repris l’élevage du chameau pour l’utiliser dans les circuits de méhari. La fermeture de certains sites nous a un peu surpris, dans la mesure où le problème de sécurité se pose beaucoup plus au-delà des frontières.
Depuis 2003, après le rapt des 32 touristes, Dieu merci, il n’y a plu eu de touristes enlevés en territoire algérien. Nous sommes les gardiens de la région et nous restons très vigilants, car la sécurité est également notre problème. Les gens qui vivent du tourisme n’ont rien d’autre comme activité. Fort heureusement, cette année il y a eu une excellente pluviométrie qui va permettre à ceux qui ont perdu leur travail dans le secteur du tourisme de reprendre l’agriculture et l’élevage camelin. Nous savons tous que le tourisme est la seule activité qui nourrit toute la région. Nos potentialités sont énormes, il suffit de bien les exploiter pour que des pans entiers de la jeunesse ne basculent pas vers l’inconnu. Les préoccupations des habitants seront soumises aux autorités du pays et il y aura certainement une solution dans un avenir proche.



Pouvons-nous connaître votre avis sur cette information rapportée par la presse française, ces derniers jours, relative à l’existence d’une base de 400 militaires américains dans la région de Tamanrasset ?



Les seuls militaires qui se trouvent à Tamanrasset appartiennent à l’Armée nationale populaire (ANP). Nous n’avons jamais remarqué la présence de soldats autres que les nôtres. Une caserne de 400 hommes comme cela a été rapporté ne peut passer inaperçue. Nous sommes devant une manœuvre de propagande tendancieuse. Tamanrasset est à chaque fois associée par la presse étrangère à tout ce qui est mal vu.



Y a-t-il une explication à cette propagande ?



La seule explication est à chercher peut-être chez ceux qui n’ont jamais accepté l’algérianité du Sahara. Vous savez que les positions du Mali et du Niger diffèrent totalement de celle de l’Algérie, en ce qui concerne l’ancien colonisateur. Le Sahara algérien est très convoité et ses Touareg dérangent, parce qu’ils se reconnaissent de l’Etat algérien et n’obéissent qu’à l’Etat algérien. Il est important de rappeler que la question du Sahara algérien a été tranchée par nos aînés bien avant l’indépendance de l’Algérie. Ce n’est pas aujourd’hui que nous allons la remettre en cause.



Salima Tlemçani

L'otage française de l'Aqmi aurait besoin de soins

L'épouse du cadre d'Areva enlevée le mois dernier au Niger souffre d'un cancer, selon un intermédiaire, qui affirme qu'elle ne «peut plus rester longtemps sans soins».
Le Figaro.fr

Le sort de Françoise Larribe suscite de nombreuses inquiétudes. L'otage de l'Aqmi, enlevée au Niger le mois dernier avec son mari, un cadre d'Areva, et trois autres Français, souffre en effet d'un cancer et a besoin de traitements médicaux réguliers. «L'otage française est malade et ne peut plus rester longtemps sans soins», a ainsi déclaré dimanche un intermédiaire nigérien après avoir rencontré les ravisseurs dans le désert malien.
Les otages sont détenus dans la région de Timérine, dans le nord-est du Mali, près de la frontière algérienne. Ils ont été enlevés il y a bientôt un mois (dans la nuit du 15 au 16 septembre). Peu de temps avant d'être kidnappée, François Larribe aurait subi une chimiothérapie, a précisé l'entourage d'un médiateur malien, avant d'ajouter qu'elle méritait «un suivi». Les proches du couple Larribe avaient déjà fait part de leur inquiétude concernant Françoise qui venait de se faire soigner d'un cancer au moment de son enlèvement.
Après s'être entretenu avec les ravisseurs, l'intermédiaire nigérien a par ailleurs assuré que ces derniers étaient «ouverts à toute négociation», et qu'ils feraient «bientôt connaître leurs revendications». Le sort des otages reste toutefois «entre les mains de ‘toutes les tendances' d'Aqmi», ont-ils averti. Ils ont promis à l'intermédiaire nigérien qu'ils étaient «en vie et bien traités». Mais l'absence de prise en charge médicale de Françoise Larribe est problématique.

Michel Germmaneau n'avait pas pu être soigné

Le précédent otage français d'Aqmi enlevé au Niger, Michel Germaneau, avait lui aussi des problèmes de santé. L'humanitaire âgé de 78 ans avait déclaré dans un enregistrement audio adressé au président de la République Nicolas Sarkozy être cardiaque et ne plus avoir de médicaments pour son cœur. Les autorités françaises avaient annoncé après la mort de l'otage que toutes les tentatives de médiation médicale avec cette branche dure de l'Aqmi avaient échoué. Le corps de Michel Germaneau n'ayant pas été retrouvé, les causes précises de sa mort restent inconnues. Ses ravisseurs avaient affirmé avoir procédé à son exécution le 25 juillet en représailles à une opération militaire menée conjointement contre l'Aqmi par les forces militaires françaises et mauritaniennes en territoire malien.

Les cinq otages français seraient aux mains de la même branche de l'Aqmi, dirigée par Abou Zeid. Sur une photo diffusée le 30 septembre par les ravisseurs, l'homme, un des chefs les plus radicaux du groupe, apparaissait à visage découvert assis à côté des otages. C'est Pierre Camatte, un Français détenu pendant trois mois dans le désert malien, qui l'avait formellement identifié.

dimanche 10 octobre 2010

D'ex-rebelles touareg attendent de combattre Aqmi au Mali

D'ex-rebelles touareg attendent de combattre Aqmi au Mali



De Serge DANIEL (AFP) – Il y a 2 heures

KIDAL — Des membres de l'ex-rébellion touareg qui a déstabilisé le Mali dans les années 1990 et au début des années 2000, se disent désormais prêts à participer à la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) dont des unités sont implantées dans le nord de ce pays.
"Nous n'attendons que le feu vert du gouvernement malien pour aller chasser Al-Qaïda de notre désert", affirme un ex-rebelle touareg qui, comme de nombreux autres, est dans l'attente de la formation "d'unités spéciales" chargées d?assurer la sécurité dans le nord du territoire malien.
La mise en place de ces "unités" est prévue par les accords de paix d'Alger, signés en juillet 2006 sous les auspices de l'Algérie par le gouvernement malien et l'Alliance pour la démocratie et le changement (ADC) qui rassemble différents groupes d'ex-rebelles touareg du Mali.
Il est prévu que ces "unités spéciales" soient composées d'anciens rebelles touareg, sous commandement de l'armée régulière malienne, et dont la formation a été assurée par le gouvernement algérien conformément aux accords d'Alger.
"Nous sommes prêts, nous attendons. En quelques semaines, nous allons régler le problème", affirme Ahmed Ag Achérid, qui fait partie de la centaine d'anciens combattants de la cause touareg impatients de rejoindre ces unités d'élite et d'en découdre avec les unités d'Al-Qaïda.
Les éléments d'Aqmi "viennent souvent s'abriter sur notre terrain que nous connaissons bien. Si nous sommes armés, nous pouvons rapidement leur régler leur compte", affirme Ahmada Ag Bibi, porte parole des ex-rebelles, député à l'Assemblée nationale du Mali.
"Aqmi veut salir l'image de notre région. Nous n'allons pas l'accepter", ajoute t-il, suivi en cela par ses anciens compagnons qui qualifient les membres de la branche maghrébine d'Al-Qaïda de "voyous" dont ils veulent se débarasser.
En référence à l'enlèvement mi-septembre dans le nord du Niger de sept otages (cinq Français dont une femme, un Togolais et un Malgache), transférés dans le nord-est du Mali, l'un d'eux s'emporte: "prendre une femme en otage, prendre un civil en otage, pourquoi ? l'islam n'a jamais dit ça. Non!".

Du côté de l'administration de la région de Kidal (nord-est), on affirme que la mise en place des unités spéciales "ne saurait tarder".
"Il y a une commission de suivi des accords d'Alger qui travaille sur le dossier, et dans quelques semaines, tout devrait fonctionner", affirme un responsable du gouvernorat de Kidal, sous couvert de l'anonymat.
"Il faut accélérer la création des unités spéciales. Ces ex-rebelles touareg n'ont pas de travail", exhorte Ursule Tékiane, qui dirige une organisation non-gouvernementale d'aide à l'enfance dans le nord du Mali.
"Outre le fait qu'ils défendent aussi leur pays, c'est également une manière de les occuper, pour qu'ils n'aillent pas grossir les rangs des bandes armées qui sont nombreuses dans le désert", dit-elle. Certains touareg, minoritaires, sont en relation avec Aqmi.

Les Touareg, communauté nomade d'environ 1,5 million de personnes, sont répartis entre le Niger, le Mali, l'Algérie, la Libye et le Burkina Faso.

Selon le comité de suivi des accords d'Alger, les ex-rebelles peuvent être un "remède efficace" contre Aqmi dans le Sahara, car "ils connaissent bien la zone". "Ils sont chez eux. Ce sont des hommes aguerris qui peuvent compter sur la population locale pour les informer", note un des membres de ce comité.



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samedi 9 octobre 2010

La guerre des sables

La guerre des sables

7 octobre 2010 par Odile Tobner
L’enlèvement, revendiqué par un groupe d’Aqmi (Al Qaeda au Maghreb islamique), de sept otages, dont cinq Français, à Arlit au Niger, sur le site d’exploitation minière de la société française Areva, est un pas important franchi dans les hostilités qui ont pour théâtre la partie désertique de l’Afrique subsaharienne...
Il y a une longue liste d’enlèvements (lire page 5) d’Européens en Mauritanie, au Mali, au Niger depuis quelques années. Quatre membres d’une famille française, les Tollet, le Britannique Edwin Dyer et le Français Michel Germaneau ont été tués. Viser des touristes dans le désert ou des Européens isolés dans des localités de brousse est un objectif facile, à la portée du premier bandit venu. Le coup de main sur le site d’Areva est d’une toute autre dimension et sa signification est redoutable.
Il faut rappeler que depuis la fin de la deuxième guerre mondiale le tiers monde paie au prix fort les enjeux impérialistes dans le monde. Les deux grandes puissances, Occident et Union soviétique, ne se sont respectées dans l’équilibre de la terreur que pour mieux se combattre dans les guerres de décolonisation. Le ravage du Viet Nam, avec ses millions de morts et les conséquences durablement mortelles des armes chimiques, a tragiquement illustré cet affrontement. Depuis la chute de l’Empire soviétique l’Occident continue avec les pays du Sud la guerre pour les ressources et pour le contrôle économique. Cette guerre peut être directe : les deux guerres d’Irak sont liées à l’exploitation du pétrole. Elle peut aussi se faire indirectement : de terribles conflits locaux, particulièrement en Afrique, au Soudan et dans l’Est de la République Démocratique du Congo (lire page 6), sont nourris par la compétition pour l’exploitation des richesses.
La Françafrique n’est qu’un compartiment de cette guerre de domination qui se perpétue dans ses métamorphoses. Le système françafricain a fonctionné imperturbablement, peut-on dire, dans l’ex-empire colonial. L’élimination de toute contestation est encore assurée assez facilement par les dictateurs locaux, au profit de la continuité de l’exploitation. Avec l’assaut sur un site d’Aréva, la puissance française se trouve mise en cause directement. C’est la conséquence tout à fait prévisible du néocolonialisme. Si la décolonisation avait eu lieu, Areva Niger, ci-devant Cogema, serait une compagnie nigérienne, dirigée et encadrée par des Nigériens. Elle aurait développé sur place la technologie de transformation du minerai en uranium. Le Niger exporterait dans le monde entier en son nom propre, son économie serait florissante, ses habitants jouiraient d’un niveau de vie suffisant. On est loin du compte.
Comment, dans le ramassis de miséreux qui forme la majeure partie des habitants du Niger, ne recruterait-on pas des combattants, à défaut d’avoir produit des ingénieurs ? La domination occidentale pourrait bien s’enliser dans les sables. Qui peut contrôler le Sahara sinon ses habitants ?
Faudra-t-il les exterminer tous – selon le programme préconisé par le Kurtz de Joseph Conrad – pour pouvoir continuer à exploiter en paix ? L’hypothèse est loin d’être impensable. Elle a toujours été dans la logique coloniale de la force et rien d’autre.
En attendant il n’y a plus de tourisme au Sahara. Finis les parcours de méditation dans l’immensité des sables qui étaient aussi, blague à part, une ouverture vers des relations enfin humaines. Ce n’est pas bien grave. Quant à l’exploitation, à laquelle il n’est pas question de renoncer, elle devra se faire sous contrôle militaire, ce qui suffit amplement à dire sa nature.
Qu’avons-nous à faire des discours parasites, tout ce caquetage qui noie la réalité !

http://survie.org/billets-d-afrique/2010/195-octobre-2010/