samedi 15 novembre 2014

Nigeria : deux villes du nord-est tombent aux mains de Boko Haram

Le Monde.fr avec AFP |  • Mis à jour le 
Abonnez-vous
à partir de 1 €
 Réagir Classer
A Gombi, selon un habitant, Boko Haram patrouille dans les rues et tire à l'arme lourde. « Ils ont brûlé le poste de police, le siège de l'administration et le marché », a-t-il précisé.

Des centaines de combattants de Boko Haram ont pris le contrôle d'Hong et de Gombi, deux villes de l'Etat d'Adamawa, dans le nord-est du Nigeria, se rapprochant de Yola, la capitale de l'Etat, après avoir été chassés par des milices locales de Mubi, le carrefour commercial de cette région qu'ils avaient pris il y a deux semaines.

A Gombi, selon un habitant, Boko Haram patrouille dans les rues et tire à l'arme lourde. « Ils ont brûlé le poste de police, le siège de l'administration et le marché »,a-t-il précisé. Un autre témoin rapporte que les habitants se sont enfermés chez eux ou ont fui dans la brousse. A Hong, à 20 kilomètres de Gombi, selon plusieurs témoignages, le commissariat de police a aussi été détruit et les insurgés ont hissé leur drapeau noir sur la résidence d'un général à la retraite.
« CALIFAT ISLAMIQUE »
Boko Haram, qui s'est emparé de plus d'une vingtaine de villes et villages de l'Adamawa et des Etats voisins de Yobe et Borno, ces derniers mois, dit y avoircréé un « califat islamique ». A Mubi, qui avait été rebaptisée Madinatul Islam, « la ville de l'islam », le groupe avait commencé à administrer les châtiments prévus par la charia, la loi islamique, tranchant les mains des voleurs présumés notamment, selon des témoignages d'habitants. Des milliers d'habitants ayant fui Mubi et d'autres villes des alentours se trouvent désormais dans des camps pour déplacés en périphérie de Yola, la capitale, dont les islamistes se rapprochent.
Les Civilian Joint Task Force (JTF), ces milices de jeunes qui combattent aux côtés de l'armée, auraient d'abord repris Maiha, une ville proche de Mubi, mercredi, au terme d'une longue bataille qui aurait fait de très nombreux morts parmi les insurgés, mais cela n'a pas été confirmé par les autorités nigérianes pour le moment. Chibado Bobi, le directeur de cabinet du gouverneur de l'Adamawa, a cependant confirmé que Mubi avait été reprise des mains des islamistes par des milices privées et des chasseurs.

vendredi 14 novembre 2014

L'Algérie au bord du gouffre


La nouvelle hospitalisation du président Bouteflika intervient à un moment critique pour une Algérie frappée au coeur par l'effondrement du prix du pétrole. En effet, si la bombe sociale algérienne n'a pas encore explosé, c'est grâce à la manne pétrolière qui permet à l'Etat de subventionner pour 60 milliards de dollars par an la consommation des "classes défavorisées". A cette somme, il convient d'ajouter 20% du budget de l'Etat qui est consacré au clientélisme. Un exemple : avec 6% de toutes les dotations ministérielles, le budget du ministère des Anciens combattants est  supérieur à ceux de l'Agriculture (5%) et de la Justice (2%).
Avec un pétrole à 85 ou même à 80 dollars le baril, il va donc falloir tailler dans les subventions, ce qui va bousculer les équilibres sociaux et politiques.
Etat des lieux d'un pays qui risque d'exploser à tout moment.

La suite de cette analyse est réservée aux abonnés à l'Afrique Réelle. Pour la recevoir par courriel, vous devez être abonné.
http://bernardlugan.blogspot.be/2014/11/lalgerie-au-bord-du-gouffre.html

Libye: 356 morts en 30 jours à Benghazi

BBC
  • Il y a 1 heure
Des forces gouvernementales traquant les milices le 2 novembre 2014 à Benghazi
Des sources médicales indiquent qu’au moins 356 personnes sont tuées à Benghazi depuis le lancement il y a un mois d'une nouvelle offensive du général Haftar pour tenter de reprendre cette ville de l'Est libyen tombée en juillet aux mains de milices islamistes.
A la mi-octobre, les forces armées libyennes avaient apporté leur soutien au général à la retraite Khalifa Haftar face aux milices islamistes.
Parmi les victimes des violences, se trouvent des civils tués par balles ou dans des bombardements et d'autres ayant pris les armes aux côtés des forces du général Haftar.
Benghazi est l'une des zones les plus instables de la Libye, un pays plongé dans le chaos, dirigé par deux gouvernements et parlements rivaux, et livré aux milices depuis le renversement de Mouammar Kadhafi en 2011.
Deuxième ville du pays, Benghazi a été défigurée par les combats et fait face à une pénurie de médicaments, de carburants et de nourriture

lundi 10 novembre 2014

Azawad-Mali : fausse route pour la paix !!!

Abdoulahi ATTAYOUB,Président de Survie Touarègue-Temoust / Khalid ZERRARI,Président du Congrès Mondial Amazigh
Des négociations pour le retour à la paix entre le Mali et l’Azawad se déroulent à Alger depuis de longs mois sous les auspices du gouvernement algérien. Selon nos informations, un accord dit de paix serait sur le point d’être signé entre les mouvements politico-militaires de l’Azawad et le gouvernement malien.
Nous serions naturellement très heureux qu’un accord qui reconnaîtrait la nécessité des procédures et des moyens politiques, humains, techniques et financiers, destinés à être mis en œuvre pour lutter efficacement contre les causes profondes qui provoquent depuis plus d’un demi-siècle des révoltes populaires à répétition, soit signé le plus rapidement possible. Hélas, nous devons admettre que le document proposé à la signature des parties prenantes est le plus mauvais « accord de paix » qui ait été jamais proposé aux mouvements de résistance de l’Azawad. Ce document ne satisfait même pas aux exigences de forme et n’apporte aucune réponse sérieuse aux graves problèmes très explicitement développés par les représentants des populations de l’Azawad. Il est même en net recul par rapport aux accords précédents.
La médiation internationale, riche d’une expérience de plus de deux décennies sur cette question, devrait pourtant pouvoir proposer autre chose que des petits arrangements de circonstance qui risquent de raviver les tensions et d’entamer définitivement la confiance des populations locales.
Le nom même de l’Azawad, qui désigne pourtant les trois régions du Nord (Kidal, Tombouctou et Gao), n’est pas accepté par cet « accord », qui mentionne de manière méprisante dans son préambule « les régions du nord Mali appelées par certains (sic)Azawad ». Au nom de quel principe ou de quel droit peut-on refuser aux populations locales de dénommer le territoire de leurs ancêtres, le berceau de leur histoire et leur lieu de vie, comme elles l’entendent ? On observe également que la spécificité historique, géographique, humaine et culturelle de l’Azawad n’est pas mentionnée, donc forcément pas reconnue. Un comble si l’on se réfère à l‘incroyable crispation que l’évocation du nom Azawad génère dans la tête de ceux qui nient farouchement son existence, faisant disparaitre comme par magie une réalité humaine très ancienne et bien palpable. C’est une forme de négationnisme qui ne saurait être accepté.
Egalement dans le préambule, il est indiqué que « la situation dans les régions du nord, marquées par une violence cyclique (sic) qui a causé des souffrances, exacerbé l’incompréhension et engendré une très grande pauvreté … », laissant ainsi entendre que les graves conséquences de cette crise incombent aux populations locales, ce qui est naturellement une falsification des réalités locales et des faits historiques, en faisant croire que les populations sont responsables de leur propre malheur. En revanche, la lourde responsabilité de l’Etat malien dans la marginalisation des territoires du nord et même leur abandon aux terroristes et aux narco-trafiquants, n’est nulle part évoquée.
Nous demandons que la communauté internationale, qui facilite l’élaboration de l’accord, soit beaucoup plus attentive à ce qui constitue les raisons de vivre des populations du Nord, en particulier leur exigence de dignité. Il faut reconnaitre aux populations de ces territoires d’avoir construit une manière de vivre au cours des temps, en toute autonomie, sans intervention d’aucune sorte et que c’est à partir de la prise en main brutale du monde extérieur dans leurs affaires que leurs conditions d’existence et leur liberté ont commencé à se dégrader.
Il est également important d’affirmer avec conviction que la satisfaction des revendications des populations de l’Azawad ne porterait en aucun cas préjudice aux populations du sud. Au contraire, celles-ci seraient tout autant bénéficiaires des exigences de justice, de démocratie, de liberté et de répartition équitable des richesses du pays. Par conséquent il est nécessaire de dénoncer et de combattre les idées de certains « nationalistes » maliens qui proclament de manière irresponsable que les droits accordés à l’un, le Nord, le seraient au détriment de l’autre, le Sud, ce qui est porteur du germe de la discorde et du malheur du pays.
Par ailleurs, le texte ne fait aucune référence aux souffrances des populations touarègues, pas plus qu’il n’y a l’ombre d’une analyse même sommaire sur les raisons qui les poussent à se révolter régulièrement depuis l’indépendance du Mali. Rien n’est mentionné non plus sur les anciens accords signés entre l’Azawad et le Mali ni pour quelles raisons ces accords passés n’ont pas été respectés par les gouvernements maliens.
Dans la partie la plus importante de ce projet d’accord de paix, qui concerne « le cadre institutionnel et la réorganisation territoriale », il n’y a aucun changement significatif par rapport à l’organisation administrative et institutionnelle actuelle. On se demande pourquoi il n’est plus question du statut politique pour l’Azawad ? Les mouvements de résistance de l’Azawad, en particulier le MNLA, ont accepté de renoncer au projet d’indépendance au profit d’un système fédéral. Pourquoi n’est-il plus question de cela ? Pourquoi le statut de large autonomie pour l’Azawad, seule solution susceptible de mettre un terme au conflit politique qui oppose l’Azawad à l’Etat malien n’est pas retenu ? Ce statut politique pour l’Azawad ne devrait souffrir d’aucune ambiguïté, car il constitue l’épine dorsale de la solution au conflit. Focaliser l’attention uniquement sur des considérations sécuritaires ou de développement constitue une diversion coupable qui risque d’hypothéquer toute possibilité d’accord durable.
Nous mettons fermement en garde toutes les parties prenantes contre tout rafistolage négocié ou imposé entre le Mali et l’Azawad qui aurait pour conséquence de ruiner les espoirs de paix et de radicaliser une partie des communautés. Ce qui se profile à Alger est dangereux pour l’ensemble de la sous-région et contient les germes d’une instabilité encore plus importante que celle que nous avons connue ces dernières années. Les méthodes qui ont échoué depuis plus de vingt ans ne sauraient être remises d’actualité, sauf si la communauté internationale souhaite entretenir un foyer d’instabilité ad vitam aeternam au cœur de la bande sahélo-saharienne. Les expériences du passé doivent impérativement servir de leçons à la médiation internationale pour construire des solutions réalistes et durables de sortie de ce conflit. Le Mali et l’Azawad ont besoin d’être sérieusement accompagnés dans la conception et la mise en œuvre d’une feuille de route qui leur permettra de cohabiter pacifiquement dans des frontières intangibles et respectueuses des intérêts de chaque partie.
L’instabilité politique vient souvent de l’incapacité des Etats à imaginer des institutions capables de pratiquer une gouvernance adaptée aux réalités et aux aspirations de leurs populations. Une redéfinition des méthodes d’administration des Etats devient aujourd’hui un impératif vital pour les pays de la sous-région. Le respect des peuples et des équilibres de ces régions est une exigence stratégique afin de faire face aux nouveaux défis. Le glissement d’un sentiment national, qui a longtemps été le moteur de la résistance, vers une appartenance religieuse, qui transcende et domine les autres aspects identitaires, constitue un signe frappant de l’échec des systèmes politiques issus de la colonisation.
En tout état de cause, si cet accord devait demeurer en l’état, nous sommes convaincus, qu’il n’apporterait aucune évolution positive et serait largement rejeté par les populations de l’Azawad. Il discréditerait pour longtemps toutes les parties signataires et nous ramènerait directement à la case départ.
Nous appelons donc tout un chacun, y compris et en premier lieu l’Algérie, qui porte une lourde responsabilité morale en tant que facilitateur, de revoir ce document dans le sens d’une réelle prise en compte des aspirations des Azawadiens à prendre leur destin en main, tout en respectant les frontières internationales actuelles de l’Etat malien.

Paris, 9 novembre 2014
Abdoulahi ATTAYOUB, Président de Survie Touarègue-Temoust
Khalid ZERRARI, Président du Congrès Mondial Amazigh

  • Enigouran
    tout a fait d accord mon frère ce pre accord n engage que ceux qui le signeront. j ai peur que les dirigeants de ces movement azawadien ne soit pas deja penetre par les services secrets algeriens et francais car si il n y a ni autonomie ni federalisme ni meme reconnaissance de L AZAWAD qu es ce que ces gens negocient a Alger???????
    Ces chefs touareg sont trop presse de signer un accord, il a fallu des dizaines d anees pour reconnaitre les dud Soudan, l eryrhree, l isreael. De grace si c est les postes juteux qui vous interressent ne vendez pas mon peuple

Mali : La justice, un élément indispensable des pourparlers de paix

Human Right Watch
Le projet d’accord sur le conflit de 2012-2013 doit être renforcé
« Les pourparlers de paix du Mali doivent réussir là où les accords précédents ont échoué en traduisant en justice les responsables des atrocités. L’accord final devrait inclure des dispositions pour soutenir les poursuites pour crimes de guerre, renforcer la commission de recherche de la vérité et garantir la vérification minutieuse des antécédents du personnel des forces de sécurité. »
Corinne Dufka, chercheuse senior sur l’Afrique de l’Ouest
(Nairobi, le 10 novembre 2014) – Le projet d’accord de paix pour mettre fin à la crise militaire et politique dans le nord du Mali ne traite pas de manière adéquate la nécessité de justice pour les crimes internationaux graves commis pendant le conflit, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. La prochaine ronde de négociations entre le gouvernement malien et les groupes armés impliqués dans le conflit doit commencer le 20 novembre 2014 à Alger.
Toutes les parties au conflit armé de 2012-2013 dans le nord du Mali ont commis des violations graves du droit de la guerre, y compris de possibles crimes de guerre. Les accords qui ont mis fin aux précédents conflits armés au Mali de 1962 à 2008 ont omis de traiter les problèmes de l’impunité endémique et de la faiblesse de l’État de droit, et certains comportaient des dispositions conférant une immunité contre les poursuites judiciaires.
« Les pourparlers de paix du Mali doivent réussir là où les accords précédents ont échoué en traduisant en justice les responsables des atrocités », a déclaré Corinne Dufka, chercheuse senior sur l’Afrique de l’Ouest à Human Rights Watch. « L’accord final devrait inclure des dispositions pour soutenir les poursuites pour crimes de guerre, renforcer la commission de recherche de la vérité et garantir la vérification minutieuse des antécédents du personnel des forces de sécurité. »
La sécurité s’est détériorée dans le nord du Mali. Alors que le gouvernement malien a largement repris le contrôle du Nord en 2013 suite à une intervention menée par l’armée française, les groupes négociant avec le gouvernement et d’autres groupes liés à Al-Qaïda occupent le territoire et commettent des abus contre les civils et les soldats de maintien de la paix.
À l’issue de la troisième ronde des pourparlers de paix à la fin du mois d’octobre 2014, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a indiqué que l’équipe de médiation internationale avait rédigé un « avant-projet d’accord de paix globale », qui constituerait la base des discussions lorsque les pourparlers reprendraient.
Les recherches menées par Human Rights Watch au Mali et ailleurs suggèrent que le fait de ne pas traduire en justice les individus responsables d’abus graves en temps de guerre constitue une porte ouverte, voire une incitation, à de futurs abus. L’immunité accordée aux auteurs de crimes de guerre prive les victimes et leurs familles d’une mesure de justice pour les souffrances subies.
Human Rights Watch et d’autres organisations ont documenté des centaines de crimes de guerre présumés et d’autres abus graves commis pendant le conflit armé de 2012-2013. Ceux-ci incluent l’exécution sommaire de 153 soldats maliens à Aguelhok par des groupes d’opposition armés ; les cambriolages, les pillages et les violences sexuelles généralisés perpétrés par le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) de l’ethnie touareg ; ainsi que le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats, les amputations illégales et la destruction de sanctuaires par les groupes armés islamistes. Des soldats maliens ont aussi été impliqués dans des abus graves, y compris des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées et des actes de torture ou des mauvais traitements à l’encontre de rebelles suspectés.
Le gouvernement a fait peu de progrès dans la poursuite des auteurs de crimes de guerre et d’autres abus. La libération conditionnelle de plusieurs dizaines d’hommes arrêtés dans le cadre du conflit, dont plusieurs commandants de groupes armés du Nord vraisemblablement impliqués dans des abus, a soulevé des inquiétudes quant à une amnistie de facto pour ces crimes.
Le droit international encourage les pays à accorder une amnistie ou un pardon généralisé aux combattants capturés et aux autres individus arrêtés pour avoir participé à un conflit, à condition qu’ils n’aient pas commis de crimes de guerre et d’autres abus graves.
Cependant, les libérations qui ont commencé à la fin de l’année 2013 en vertu de l’accord de Ouagadougou du 18 juin 2013 et qui ont été qualifiées par le gouvernement de « mesures de confiance » avant les négociations ont été effectuées sans vérification suffisante pour déterminer si les individus libérés étaient impliqués dans des crimes internationaux graves. Les amnisties pour les auteurs de crimes internationaux graves ne sont pas reconnues en vertu du droit international.
« Il est temps de mettre fin au cycle de plusieurs décennies de conflit, d’abus et d’impunité. Tout accord qui ferme les yeux sur la nécessité de justice non seulement ignorera les droits des victimes et de leurs familles, mais encouragera également les abus futurs et sabotera l’instauration d’une paix vraiment durable » a expliqué Corinne Dufka. « L’intégration dans les négociations de mesures pour lutter contre l’impunité de longue date est d’autant plus urgente que la situation sécuritaire se détériore et que les groupes armés dans le Nord intensifient les attaques, les actes criminels et les actes de banditisme. »
Recommandations
Les prochaines négociations à Alger devraient remédier aux lacunes en matière de droits humains et de responsabilisation des accords précédents entre les factions belligérantes au Mali, notamment les accords de Tamanrasset de 1991, le pacte national de 1992, les accords de Bourem de 1995 et les accords d’Alger de 2006.
Tout accord final sur le Mali devrait inclure les recommandations suivantes, a déclaré Human Rights Watch.
Mesures pour garantir la responsabilisation en matière de droits humains
Le projet d’accord présenté aux parties à la fin du mois d’octobre 2014 et intitulé « Éléments pour un accord pour la paix et la réconciliation au Mali » soutient une « réforme profonde de la Justice » pour contribuer à mettre un terme à l’impunité, affirme le « caractère imprescriptible des crimes contre l’humanité » et appelle toutes les parties à coopérer avec une commission d’enquête internationale. Mais il ne fournit aucun détail sur le mandat de la commission ni de calendrier pour sa mise en place, et ne prévoit pas spécifiquement de rendre justice pour les crimes commis pendant le conflit. L’accord final devrait :
  • Stipuler clairement qu’aucune immunité ne sera octroyée à tout individu qui a commis ou commandité des crimes de guerre et d’autres crimes graves en violation du droit international ou qui avait une responsabilité de commandement dans ce contexte ;
  • Appeler le gouvernement malien à enquêter sur les violations présumées du droit humanitaire et des droits humains internationaux perpétrées par toutes les parties pendant et depuis le conflit armé de 2012-2013, et à traduire en justice les responsables devant des tribunaux équitables, impartiaux et indépendants ;
  • Encourager l’établissement d’une unité d’enquête spéciale implantée à Bamako composée de procureurs, de juges d’instruction et d’autres personnes afin d’enquêter sur les crimes allégués. La création d’une telle unité augmenterait la probabilité d’avoir des enquêtes dignes de foi pour les atrocités commises en temps de guerre et :
    • Centraliserait l’expertise sur des crimes généralement non traités par les tribunaux maliens ;
    • Contribuerait à faire face à l’absence d’avocats de la défense dans le Nord ;
    • Réduirait le risque d’attaque contre le personnel judiciaire, les témoins, les lieux de conservation des preuves et l’infrastructure judiciaire ; et
    • Faciliterait la création d’un système efficace de protection des témoins.
  • Apporter des précisions sur la mise en place, le mandat, le calendrier et les pouvoirs de la commission d’enquête internationale, et appeler à la diffusion publique du rapport final ; et
  • Soutenir l’établissement des cellules d’écoute mobile, un programme envisagé par le ministère malien de la Justice pour réunir des témoignages de victimes et de témoins du conflit de 2012-2013, à titre de référence ultérieure pour le système judiciaire, la commission de recherche de vérité ou d’autres organismes.
Mécanisme de justice, de recherche de la vérité et de réconciliation
Le projet d’accord signale « la nécessité de renforcer le mandat et l’organisation de la Commission vérité, justice et réconciliation (CVJR) » mise en place par le gouvernement en 2014, même s’il ne prévoit pas de recommandations spécifiques. Les commissions de recherche de vérité peuvent apporter des contributions importantes lorsqu’elles exposent des atrocités peu signalées commises pendant les conflits armés, qu’elles explorent les dynamiques qui ont sous-tendu les crises cycliques, y compris la mauvaise gouvernance et la corruption, et qu’elles préconisent des réformes pour empêcher la répétition des violations passées. Les parties aux négociations devraient encourager les changements suivants au sein de la commission actuelle :
  • Garantir que la commission soit indépendante des autres organes du gouvernement. Le rattachement actuel de la commission au ministère de la Réconciliation nationale et du Développement des régions du Nord la soumet à des interférences politiques et compromet le sentiment de neutralité ;
  • Créer un processus de consultation large et structuré sur le mandat de la commission et le choix des commissaires, en impliquant les groupes de défense des droits humains, les groupes de femmes, les groupes de jeunes, les partis politiques, les syndicats, les groupes de victimes, la diaspora, les différentes confessions religieuses, les forces de sécurité et les factions d’opposition, entre autres ; et
  • Mettre en œuvre des réglementations qui prévoient des pouvoirs d’enquête, notamment celui de convoquer des témoins, des audiences publiques et la diffusion d’un rapport public final formulant des recommandations pour la responsabilisation, incluant les réparations et les affaires devant faire l’objet d’enquêtes pénales.
Démobilisation et intégration des combattants dans les forces de sécurité 
Le projet d’accord appelle à la démobilisation et à l’intégration des combattants des factions belligérantes dans les forces de sécurité gouvernementales, mais ne prévoit pas de programme de « vetting » (vérification des antécédents). L’accord devrait proposer la mise en place d’une commission de vérification indépendante, mandatée pour superviser un mécanisme qui :
  • Passerait au crible tout nouveau membre proposé des forces de sécurité afin d’éviter de recruter des individus vraisemblablement impliqués dans des violations graves des droits humains ;
  • Recommanderait le retrait de membres des forces de sécurité actuellement en service vraisemblablement impliqués dans des violations graves des droits humains, contre lesquels une procédure disciplinaire juste et appropriée (allant jusqu’au renvoi) devrait être instaurée ; et
  • Pourrait se concentrer d’abord sur le contrôle des officiers avant de se pencher sur les rangs inférieurs, étant donné la taille des services de sécurité maliens.
Négociations de paix du Mali et récentes hostilités
Le gouvernement malien négocie actuellement avec plusieurs groupes armés : le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), le Haut-Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), la Coordination des mouvements et forces patriotiques de résistance (CMF-PR 2) et la Coordination du peuple pour l’Azawad (CPA).
L’équipe de médiation internationale facilitant les pourparlers est dirigée par l’Algérie et inclut des membres de l’Union africaine, de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), de l’Union européenne, des Nations Unies et de l’Organisation de la coopération islamique, ainsi que des membres des gouvernements du Burkina Faso, du Nigeria, du Tchad, du Niger et de la Mauritanie.
Depuis la fin du mois de septembre 2013, des groupes d’opposition armés ont organisé plusieurs embuscades et attentats-suicides et ont déployé des dispositifs explosifs improvisés et des mines. La plupart des attaques visaient les troupes maliennes et françaises, mais certaines ciblaient des civils et des soldats de maintien de la paix, en violation du droit de la guerre. Les mines sur les routes principales et les attaques à la roquette touchant les grandes villes ont tué et blessé des civils et généré un climat de peur. Plus de 30 Casques bleus de l’ONU sont morts dans des attaques.
Plusieurs groupes armés continuent de recruter et d’armer des enfants soldats et occupent quelque 20 écoles. Une visite du Premier ministre au bastion du MNLA à Kidal en mai 2014 a conduit à une brève reprise des hostilités dans la ville, au cours de laquelle huit civils, dont six fonctionnaires, auraient été sommairement exécutés par les groupes armés occupant la ville.
http://www.hrw.org/fr/news/2014/11/10/mali-la-justice-un-element-indispensable-des-pourparlers-de-paix

Nouvelle victime à Zoueira près de Tombouctou : Un présumé informateur des forces françaises éliminé

Maliactu.net
tombouctou-2753797-jpg_2388211
Depuis un certain temps, la localité de Zoueira, située à environ 120 km de Tombouctou, connait une vague d’éliminations ciblées menée par des terroristes contre des présumés informateurs des forces françaises. Lesquelles effectuent des patrouilles régulières pour traquer les terroristes qui tentent de réinvestir les positions qu’ils ont dû abandonner au nord du Mali suite au déclenchement de l’opération Serval.
Ainsi, le dernier cas en date remonte au week-end dernier où un dénommé Ahmed Hassane a été retrouvé mort après que sa disparition eut été signalée quelques heures plutôt à ses proches. Les auteurs de ce crime seraient des terroristes qui le soupçonnaient de collaborer avec les forces françaises de l’Opération Barkhane.Cette nouvelle victime avait été enlevée à Zoueira alors qu’elle était en compagnie d’autres personnes par des hommes lourdement armés. Ces derniers ont, par la suite, libéré les autres et n’ont gardé que le dénommé Ahmed Hassane avant que son corps sans vie ne soit retrouvé le week-end dernier. Bien qu’on ignore l’identité réelle des auteurs de cet acte, tout porte à croire qu’il pourrait s’agir des terroristes qui ont repris du service dans le nord du pays.
En effet, ceux-ci reprochaient à Ahmed Hassane de collaborer avec l’armée française en lui signalant les positions des terroristes. Une information qui a été confirmée par l’une des personnes enlevées puis relâchées, qui a parlé d’un « règlement de comptes« . Cet assassinat intervient alors que le nord du Mali connait une recrudescence des violences contre de simples civils et des casques bleus de la MINUSMA.
Signalons que c’est dans cette zone qu’à la fin du mois d’août dernier, le corps mutilé d’un dénommé Hama Ag Sid’Ahmed a été retrouvé en deux endroits distincts près de Tombouctou.
En effet, le reste de son corps sans la tête avait été suspendu par les pieds sur le château d’eau de la localité de Théya. Quelques jours plus tard, sa tête a été retrouvée en plein cœur du marché de Zoueira, située à 120 km de Tombouctou. Les auteurs de ce crime avaient laissé un message d’avertissement pour dissuader, selon leurs termes, » tous ceux qui s’opposeraient aux idéaux religieux ou poseraient des actions criminalisant ou interdisant les actes d’AQMI « . Ils ont ainsi menacé tous ceux qui seraient amenés, pour une raison ou pour une autre, à collaborer avec les forces françaises notamment pour signaler leurs positions. Comme Ahmed Hassane, Hama avait été enlevé en compagnie des membres de sa famille avant que ces derniers ne soient remis en liberté sauf lui qui a connu un sort tragique.
Visiblement, il est plus que jamais nécessaire de protéger les informateurs des forces alliées qui font l’objet de persécutions par les groupes terroristes.
Massiré Diop
L’indépendant
- See more at: http://maliactu.net/mali-nouvelle-victime-a-zoueira-pres-de-tombouctou-un-presume-informateur-des-forces-francaises-elimine/#sthash.h5Gfs68Q.dpuf

Abderrahmane Sissako remporte le Grand Prix Silver Hugo à Chicago

Le réalisateur Abderrahmane Sissako a remporté il y a quelques jours le grand prix Silver Hugo en tant que meilleur réalisateur pour son film Timbuktu, lors du 50ème Festival International du Film de Chicago.
Timbuktu retrace l’histoire d’un jeune couple vivant au Nord du Mali entouré par des Islamistes. Le film a déjà reçu de nombreuses acclamations depuis sa première sélection au dernier festival de Cannes et promet de devenir un succès aux États-Unis. Le groupe Cohen Media a déjà annoncé que sa sortie américaine était prévue le 28 janvier 2015.
Abderrahmane Sissako

http://cinetvindustry.com/2014/11/03/abderrahmane-sissako-remporte-le-grand-prix-silver-hugo-a-chicago/

L’armée algérienne arrête un chef terroriste à la frontière algéro-malienne

Icilome.com
Il s’agit, selon la même source, du chef terroriste Ag Ouhli Abdellah, connu des services de sécurité sous le nom de « Abou Alqama Al Nidjiri (le Nigérien) ».
L’opération a été rendue possible suite à une embuscade tendue par l’armée dans le désert de Bordj Badji Mokhtar, relevant de la province d’Adrar, à 2.240 km à l’extrême sud-ouest d’Alger.
Le groupe terroriste qui s’est, selon la même source, infiltré depuis le Mali voisin a été à bord d’un véhicule 4X4, équipé d’un fusil mitrailleur contre-aviation (DCA). L’armée a récupéré sur les terroristes des armes et des minutions.
Le climat d’insécurité qui règne au Nord Mali et en Libye n’est pas sans conséquences sur l’Algérie. Pour y faire face et se protéger, l’armée algérienne est déployée tout au long de ses frontières sud et est.
L’émir de la sériat El Mohadjirine (la section des exilés de Médine) appartenant à Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) a été arrêté et trois de ses acolytes (tous de nationalités étrangères) ont été tués dimanche matin par l’armée algérienne à la frontière avec le Mali, a indiqué à Xinhua une source sécuritaire algérienne.
http://news.icilome.com/?idnews=795925&t=L-armee-algerienne-arrete-un-chef-terroriste-a-la-frontiere-algero-malienne

Les armées africaines, entre prédation et rédemption

http://blog.mondediplo.net/2014-11-03-Les-armees-africaines-entre-predation-et
lundi 3 novembre 2014, par Philippe Leymarie
Dans la foulée de l’insurrection populaire de quelques jours qui a acculé le président Blaise Compaoré à la démission, l’armée a repris le pouvoir au Burkina Faso, l’ancienne Haute-Volta : c’est la septième fois dans l’histoire de ce pays enclavé en bordure du Sahel où – comme ailleurs en Afrique – les militaires balancent entre leurs rôles de prédateur et de rédempteurs…
Terminons-en d’abord avec le « beau Blaise » qui, au fil des temps, et contrairement à son ancien compagnon Thomas Sankara, était devenu un relais du système « françafricain » à l’ancienne, même si le Burkina – « pauvre mais digne », Mecque des ONG – posait moins de problèmes que d’autres pays ; et que Compaoré lui-même, devenu un passionné de diplomatie, rendait des services, se comportant ces dernières années en médiateur souvent utile dans les conflits sur le continent noir : nord du Mali, Togo, Mauritanie, Côte d’Ivoire, Guinée, Darfour…

L’icône SankaraRetour à la table des matières

Mais cela n’a pu faire oublier ses interventions plus anciennes et plutôt déstabilisantes au Liberia, en Sierra-Leone, en Angola, avec un fort parfum de trafic d’armes, dans les années 1990. Ni bien sûr son rôle central dans le putsch qui aboutit à l’assassinat de son compagnon, le capitaine Thomas Sankara – resté vingt-sept ans plus tard une icône romantique au pouvoir aussi fort en Afrique que l’est celle de Che Guevara en Amérique latine. Ni par la suite, son entêtement – après vingt-sept années de pouvoir – à imposer une modification de la Constitution pour s’offrir quinze années de plus à la tête du Burkina : l’ambition, le tripatouillage de trop…
Lire « Thomas Sankara ou la dignité de l’Afrique », Le Monde diplomatique,octobre 2007.Le réveil de la rue à Ouagadougou et dans les grandes villes burkinabés a d’ailleurs fait penser au « printemps tunisien » : Ben Ali et Compaoré étaient arrivés au pouvoir pratiquement ensemble. Et en seront sortis un peu dans les mêmes conditions, contraints à la fuite pour ne pas avoir compris assez tôt de quoi il retournait, et avoir concédé trop peu et trop tard.
Certains voient déjà, dans ces trois journées d’insurrection populaire au Burkina, les prémices d’un « printemps africain » qui pourrait concerner au premier chef – outre le Burkina – les pays de l’ouest et du centre, où les alternances paraissent impossibles, les constitutions toujours manipulées, les successions non préparées, les dynasties trop verrouillées : Cameroun, Gabon, Togo, Congo-Brazza, Congo-Rdc, Rwanda, Tchad, Djibouti.

Les « corps habillés »Retour à la table des matières

En Afrique, comme naguère en Amérique latine, le rôle des armées reste central. Non qu’elles soient particulièrement efficaces ou pléthoriques – à l’exception de l’armée sud-africaine, la plus moderne ; des armées éthiopienne et érythréenne, les plus nombreuses ; ou de l’armée nigériane, la plus active dans l’espace ouest-africain.
L’armée burkinabé, comme celle de la plupart des Etats sahéliens, ne compte en revanche que sept mille hommes, dotés d’un matériel limité, si l’on excepte le régiment de sécurité présidentielle (que commandait en second le nouvel « homme fort » du Burkina, le lieutenant-colonel Isaac Yacouba Zida).
Mais ces « corps habillés » [1], le plus souvent issus, dans la partie ouest ou centrale du continent africain, de la matrice des anciennes forces coloniales, restent – surtout en cas de troubles politiques majeurs – un recours habituel : dans des pays où l’Etat est souvent faible, ils font figure de point fort, de communauté disciplinée et soudée, qui n’hésite d’ailleurs pas à défendre les armes à la main son statut, ses salaires ou avantages.

Nababs militairesRetour à la table des matières

Dans une dialectique « gagnant-gagnant », associant le sommet de l’Etat à la haute-hiérarchie militaire, on a même vu naître dans certains pays – pour prix de la sécurité que les « corps habillés » procurent au pouvoir politique – une classe d’officiers enrichis, moitié militaires moitié businessmen, dont le sort était lié pour le meilleur ou pour le pire à celui des plus hauts gouvernants.
Dans quelques cas, on a affaire à des « militaires-rédempteurs », soucieux de l’intérêt national, de l’intégrité du territoire, de la nécessité de protéger la population : leur sens de l’organisation et de la discipline, leur technicité, leur frugalité, leur bon contact avec le monde villageois, ont pu contribuer à pacifier et réorganiser un pays, au service de la construction de l’Etat-nation. On pense, par exemple, aux débuts du général Kountché (Niger, 1976), ou du capitaine Sankara (Burkina, 1983).
Lire Anatole Ayissi, « Ordre militaire et désordre politique en AfriqueLe Monde diplomatique,janvier 2003.Dans des cas récents (Tunisie, Egypte, Madagascar), les militaires se sont interposés entre les forces de police (compromises avec les anciens régimes autoritaires) et la société civile, obtenant – comme en Egypte – d’y jouer à nouveau un rôle politique majeur. Dans des cas trop rares – comme l’Afrique du Sud ou le Mozambique – la refonte des forces de sécurité a été « entreprise en tant que composante essentielle d’un projet global de reconstruction de l’Etat et de transformation de la société », comme l’expliquait Anatole Ayissi, de l’Institut des Nations unies pour la recherche sur le désarmement (Unidir), dans Le Monde diplomatique en janvier 2003.

Messies en treillisRetour à la table des matières

Mais, le plus souvent, les Etats africains sont malades de leurs armées. Il n’a pas manqué, au cours de ces soixante années d’indépendance, de « messies en treillis » : le colonel Joseph Désiré Mobutu (Zaïre, 1965), le général Sani Abacha (Nigeria, 1991), le caporal Fodeh Sankoh (Sierra Leone, 1991), ou encore Idi Amine Dada (Ouganda), Jean Bedel Bokassa (RCA), Mengistu Hailé Mariam (Ethiopie), Samuel Doe (Liberia), etc. Plus de soixante dix coups d’Etat ont été menés entre 1960 et 2010, dans vingt-trois pays subsahariens (sur quarante-huit), a compté Georges Courade [2]. Parmi les champions du genre : le Nigeria (9 pronunciamentos), le Ghana, les Comores, la Guinée-Bissau, et donc le Burkina…
Ces armées sont souvent divisées (ainsi que l’a illustré à nouveau, à Ouagadougou, la difficile désignation d’un officier supérieur pour incarner la transition), et « à deux vitesses », avec des unités d’élite type « garde présidentielle », richement dotées, recrutées souvent sur critères politico-ethniques ; et une armée du tout venant, non spécialisée, mal équipée et mal commandée :
« S’il est vrai que la complicité entre le politique et le soldat a fait de certains individus et de certaines unités des privilégiés du “système”, l’état général des forces armées en Afrique est le plus souvent déplorable, précisait Anatole Ayissi [3].
Et, à côté des nantis, il existe une autre armée tout au fond de l’échelle sociale de la “hiérarchie” militaire. Elle est faite de tous ces marginalisés en uniforme, miséreux, clochardisés au cœur d’une galaxie où les privilégiés affichent scandaleusement leur puissance et leur richesse (…)
Face à la précarité matérielle, à la discrimination et à l’exclusion, nombre de ces soldats laissés pour compte basculent facilement de l’indigne statut d’honnêtes miséreux en uniforme à celui, moins honorable mais beaucoup plus profitable, de “soldat de fortune”. L’une des terribles “innovations” de l’atroce guerre civile de Sierra Leone fut le “sobel” – “soldier and rebel” –, une sorte de militaire hybride ayant la faculté d’être “soldat” le jour et “rebelle-gangster” la nuit.
Si la misère d’un citoyen civil peut demeurer un simple problème social, la misère d’un soldat en armes peut dégénérer en un défi politique propre à mettre en danger non seulement la survie du régime, mais également la paix et la stabilité de la société tout entière. Là réside l’extrême danger de la clochardisation des forces armées ».

Ennemi intérieurRetour à la table des matières

En brousse, dans les quartiers, les soldats sont donc souvent craints : il leur est reproché d’être surtout tournés vers « l’ennemi intérieur », et de profiter de la population (pillage, rapine, taxes sur les contrôles routiers), etc. Dans certains cas, des soldats massacrent, brûlent, violent, sans autre but que l’intérêt au jour le jour, l’obéissance à un chef ou à un clan. « Les forces armées ont aussi à assimiler qu’elles ont à défendre un territoire et une nation, avant de conforter des régimes autocratiques ou d’y asseoir un des leurs ! », plaide la CADE [4], pour qui il importe de « professionnaliser » au plus vite les cinq cent mille à un million d’hommes et de femmes des « corps habillés » qui constituent les effectifs des forces de sécurité au sud du Sahara.
Dans l’immédiat, outre – pour les populations – les interrogations nées de la récupération militaire de ce « printemps burkinabé », cet effacement du régime Compaoré complique un peu plus le grand jeu sécuritaire au Sahel, dans lequel s’illustrent notamment les Français. Une unité des forces spéciales françaises, avec les yeux tournés surtout vers le Mali et le Niger, stationnait au sud du Burkina : y restera-t-elle ? Sur le plan politique et diplomatique, Compaoré jouait les entremetteurs, passait les plats : qui le fera désormais ?
Lire « Le Burkina Faso, pilier de la “Françafrique” »,Le Monde diplomatique,janvier 2010.Comme l’expliquait Michel Galy sur BFM-TV (le 31 octobre 2014), il faudra surtout que Paris, confronté soudain à la perte de ce partenaire typiquement « françafricain » et à ce « vide sécuritaire » au Burkina, « revoie son logiciel politique » à l’égard de ce pays, et sans doute bientôt à l’égard de tous ceux où se posent de semblables et difficiles problèmes de succession.

Notes

[1] Les « corps habillés » (en uniforme) incluent en général l’armée, la gendarmerie, la police.
[2] Cf. Les Afriques au défi du XXIe siècle, Belin, 2014.
[3op. cit.
[4] Cf. le livret de l’exposition itinérante de la Coordination pour l’Afrique de demain (CADE), sous le titre « Les Afriques qui se font », CADE, 2012.

Vous aussi, soutenez « Le Diplo »

« Briser le cloisonnement des domaines de compétence, solliciter en même temps l’économiste et le poète, le sociologue et l’artiste ; chacun enrichit la compréhension des autres et ferme la porte à ce poison de la culture contemporaine : l’information-spectacle »Claude Julien, ancien directeur du « Diplo »Faire un don

7 commentaires sur « Les armées africaines, entre prédation et rédemption »

  • permalien fredsurmars :
    4 novembre @10h21   »
    Burkinabè mot invariable ! merci…
  • permalien Marquetalia :
    4 novembre @14h00   « »
    l armée au pouvoir va elle conduire à la fin des relations entre le Burkina Faso et Taiwan au profit de la Chine Populaire ?
  • permalien Marquetalia :
    4 novembre @14h04   « »
    il resterait en Afrique Sao Tome e Principe et le Swaziland à reconnaitre Taiwan comme seule représentant de la Chine à l o.n.u-toutefois,Pékin apporte son soutient à l opposition dans les petites iles citées pour qu elle s aligne sur la Chine Populaire.
  • permalien BAH :
    4 novembre @17h07   « »
    une analyse pertinente des armées africaines
  • permalien Jona :
    6 novembre @14h45   « »
    Le problème avec l’Afrique est l’anarchie due à la pauvreté.
    Jona,
    domestic cleaner chelmsford
  • permalien Yacine :
    7 novembre @15h30   « »
    Très pertinent cet article, il l’aurait été plus si mon pays l’Algérie avait été cité. Cordialement
  • permalien racim :
    9 novembre @07h36   «
    l’armée algérienne est loin d’être comparée à ces armées qui n’on pas d’ame