lundi 19 mars 2012


Les Touaregs: ces oubliés de l’Histoire
Ajouté le 29 Fevrier 2012 à 16:05





Mohamed Boudari


  Tenus entre deux feux, les Touaregs au nord du Mali continuent leur exode massif vers les pays  limitrophes. Ainsi Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont fui les régions des combats pour aller notamment en Mauritanie, Burkina Faso, Niger et Algérie.


  Les enfants les femmes et les vieux sont les premiers à pâtirent de ce conflit dont l’ampleur va crescendo, dans une guerre où s’affrontent d’une part les rebelles du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad, ndlr), et les milices des forces armées du président malien Amadou Toumani Touré.


  Tous ont fui les combats entre les rebelles touaregs et l’armée, qui agitent le nord du Mali depuis le 17 janvier dernier. Plus de 63 000 civils ont franchi les frontières du Niger, du Burkina Faso, de la Mauritanie ou de l’Algérie, Selon un rapport du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés émis le 22 Février 2012.


  Les refugiés son éparpillés entre les villes limitrophes avec 4200 personnes à Kidal,  26.000 de ceux qui fuient la province de Menaka se trouvent entre la ville et la frontière avec le Niger, 12000 autres dans le désert de Tessalit près de la frontière algérienne, et 11.000 personnes ont fui Tombouctou vers des zones proches des frontière sud de l’Azawad tandis que plus de 50 mille personnes déplacées se sont installées dans le désert qui s'étend entre Gao et Kidal.


  Leurs conditions de vie sont dramatiques, plusieurs d’entre eux se sont réfugiés sous des arbres, des bâches, des abris de fortune. Parmi eux, il y a beaucoup d’enfants en bas âge, de femmes enceintes, de personnes âgées. La plupart manquent d’eau, de nourriture de couverture et de médicaments.


  Les grandes puissances sont appelées à intervenir pour éviter une catastrophe humanitaire qui risquerait de déstabiliser la région et de faire des milliers de victimes. Il est donc urgent de secourir le peuple touareg qui souffre en silence et qui a subit les atrocités d'une guerre qui trouve son origine au morcellement des pays de la région par les colons, suite auquel les Touaregs se sont trouvés éparpillés entre les frontières de plus de quatre pays..


  Les événements qui secouent la région ne datent pas d’aujourd’hui, et ce n’est pas la première fois que les Touaregs prennent les armes. Mais à la différence des précédentes révoltes de 1990, 2006 et 2009, les rebelles affirment haut et fort leur désir d’autodétermination et revendiquent l’indépendance au nom des populations du Nord.


  Fort de leur nombre qui varie entre 2000 et 3000 éléments et dont la majorité est revenue de Libye avec armes et bagages après la chute du régime du dictateur Mouammar Kadhafi l'automne dernier, les rebelles ont réussi à  prendre le contrôle de nombreuses villes du Nord et  chasser les troupes gouvernementales qui désertent la région vers les contrées du sud.


  Selon des observateurs, les États sahéliens ont besoin de matériels, de formations et d’expertise technique, Mais dans le même temps, cette assistance doit s’accompagner d’un vrai suivi sur son usage. Il ne doit pas s’agir d’un blanc-seing.


  Blanc-seing qui a permis aux régimes corrompus et dictatoriaux de la région d’opprimer et  marginaliser les autochtones avec les moyen d’aides fournis par les grandes puissances et les ONG internationales.

  La situation risque d’empirer en raison de la présence d’AQMI (branche d’Al Qaida au Maghreb islamique), et l’expansion croissante du trafic de  drogues, d’armes et la traite des êtres humains.



Quelques repères historiques (d’après Issalan n temoust)

  En 1963, une première insurrection touarègue contre le pouvoir central de Bamako, a été sévèrement réprimée par Modibo Keita, avec l’aide de Ben Bella, qui lui livra les responsables Touaregs réfugiés en Algérie. Cette répression avait déjà fait des milliers de morts dans l’indifférence générale, y compris de la France qui venait pourtant juste de “partir” de la région.


  Les trente ans d’indépendance du Mali, jusqu’en 1990, ont été marqués par une absence de la communauté touarègue de la vie institutionnelle du pays. A tel point que les Touaregs étaient perçus par les autres Maliens comme des étrangers qui n’avaient qu’à retourner chez eux en... Algérie ou en Libye.


Juin 1990 : déclenchement de la résistance armée à Ménaka

  En juin 1990, suite à la multiplication des exactions de l'armée contre des familles rentrées d'Algérie et parquées dans les environs de Kidal, des jeunes Touaregs, craignant des massacres massifs comme au Niger voisin, prennent les armes et entrent en résistance contre le pouvoir central malien. Par cet acte ils voulaient faire valoir leur droit à la citoyenneté et à la dignité.


  Mais la répression s'est généralisée et intensifiée comme le montre l'esprit du  célèbre télégramme n° Cl 0/Cem/GA du 13-7-90 envoyé à Gao : “Rappeler protection populations civiles innocentes ne veut pas dire admettre leur complicité-par conséquent vous ordonne abattre sans pitié tout élément soupçonné de complicité et qui refuse de donner des informations-prendre dispositions pour encercler le camp de rapatriés et procéder à un contrôle rigoureux à l’intérieur du dit camp”.
  Fin Août 1990, le bilan était déjà de plus de 600 civils tués.


Janvier 1991 : les accords de Tamanghasset

  Après plusieurs mois de guerre et de massacres, l’Algérie arrive à obtenir des deux parties la signature d’un accord de paix à Tamanghasset en janvier 1991. Mais cet accord n’aura aucune suite à cause de la précipitation dans laquelle il a été signé et surtout de la mauvaise volonté des autorités maliennes qui préféraient une solution militaire du conflit. La guerre continua et les massacres de civils Touaregs redoublèrent d’intensité.


Le 20 mai 1991 : le massacre de Léré

  Le massacre qui a le plus marqué la communauté touarègue est celui de Léré  (Tombouctou). Dans la matinée du 20 mai, sur ordre du Capitaine commandant la compagnie militaire stationnée à Léré, tous les notables (Chefs traditionnels, Imams, conseillers, etc...) furent convoqués et exécutés publiquement sans aucun jugement ni même vérification de leur identité. Par la suite, l’armée a monté la garde devant tous les points d’eau, tirant systématiquement sur tout ce qui s’y présentait, hommes et animaux.


  Les familles des victimes furent retenues en otages par l’armée pendant un an.



Le 11 avril 1992 : Le Pacte National

  Le 11 avril 1992, les mouvements touaregs et le gouvernement malien signent, toujours sous la médiation algérienne, un nouvel accord : le Pacte National.


  Ce pacte prévoyait “un statut particulier” pour les trois régions du nord du Mali (Gao, Tombouctou et Kidal). Ainsi, les populations concernées, maures, touarègues, songhaïs, peules..., devaient bénéficier d'une certaine autonomie qui leur permettrait d'adapter leur développement à leurs spécificités économiques et culturelles.


  Un effort budgétaire exceptionnel de l'État devait donner au Nord les moyens  de rattraper le retard pris depuis la création du Mali en matière d'infrastructures.


  La signature de cet accord ne mettra pourtant pas fin aux exactions contre les communautés touarègue et maure.


Gossi, Foïta

  C’est ainsi que d’autres exécutions sommaires eurent lieu, notamment à Gossi  le 14 mai 1992, où 12 Touaregs travaillant pour une O.N.G. (l’Aide de l’Église Norvégienne) ont été assassinés par des militaires. Le 17 mai 1992, à Foïta (frontière mauritanienne), 48 éleveurs ont été tués près d’un puits avec leurs animaux. Ces massacres ont eu comme autres conséquences la fuite vers la Mauritanie et l’Algérie de plusieurs dizaines de milliers de personnes qui ont dû abandonner maisons, biens et troupeaux... Toutes les grandes villes du Nord ont été vidées de leurs populations touarègues et maures.


  Les réfugiés revenus au Mali, à la suite de la signature du “Pacte National”, n’ont pas tardé à repartir, effrayés par les confiscations arbitraires de leurs biens et troupeaux.


  Le 12 juillet 1992, alors que les MFUA (Mouvements et Fronts Unifiés de l’Azawad) devaient rencontrer le nouveau président Alpha Oumar Konaré, des Touaregs victimes d’agressions et de pillages ont été obligés de se réfugier dans l’ambassade d’Algérie à Bamako.


  Des brigades mixtes composées d’éléments de l’armée et de combattants des MFUA ont été créées pour maintenir l’ordre et ramener la confiance. Ces brigades ont, en fait, été utilisées beaucoup plus contre les groupes touaregs hostiles à certains aspects du Pacte que contre les militaires qui continuaient à terroriser les populations civiles.


  A ce jour aucun responsable politique ou militaire n’a été poursuivi pour son rôle dans ce génocide.


Le processus "démocratique"

  Le processus dit “démocratique”, avec les consultations électorales et l’avènement d’un nouveau régime, a ignoré la communauté touarègue. En effet, plus de cent mille personnes avaient déjà fui vers les pays voisins, les autres étaient quotidiennement terrorisées par l'armée.


  Ainsi, ce changement institutionnel ne pouvait pas avoir d'effet dans le sens de l’apaisement et de la paix.


  Les exactions n’ont jamais cessé et la réticence des autorités maliennes à appliquer le Pacte a fini par diviser la résistance touarègue, dont la grande majorité ne croit plus à la volonté politique du pouvoir central à régler ce conflit par la négociation.


Mai 1994, reprise des affrontements

  Les combats ont repris à la suite du massacre d’une trentaine de Touaregs dans la région de Ménaka le 21 avril 1994. Depuis, plus d'un millier de civils touaregs et maures ont perdu la vie dans les différentes tueries organisées par l’armée malienne et ses milices parallèles. Les perspectives d’une paix juste et durable s’éloignent de plus en plus.


  Aujourd'hui, le Mali cherche à créer une situation de confusion générale pour remettre en cause l'esprit du Pacte National en diluant les revendications touarègues dans des considérations ethniques. C'est dans cette perspective qu'on peut comprendre la création de milices comme le Ganda Koye, censé représenter les Songhaïs qui s'estimeraient lésés par le Pacte National.


  Cette milice animée par des officiers de l'armée gouvernementale et soutenue par une large partie de la classe politique n'hésite pas à appeler au nettoyage ethnique et à l'extermination pure et simple des Touaregs comme seule solution au problème du Nord.


  Les autorités gouvernementales ne cachent d'ailleurs plus leur volonté de "relire" le Pacte, c'est-à-dire de revenir sur les engagements pris, devant la communauté internationale, vis à vis de l'Azawad.


  Pour atteindre cet objectif, le Mali crée et entretient des divisions au sein de la résistance touarègue, en mettant les moyens de l'État à la disposition d'un groupe qui lui est inféodé pour détruire les autres.


La situation des réfugiés

  Ce conflit a poussé plusieurs centaines de milliers de Touaregs et Maures à fuir les massacres et se réfugier dans les pays voisins. C'est ainsi qu'on a dénombré jusqu'à 100 000 réfugiés en Mauritanie, plus de 100 000 en Algérie et environ 50 000 au Burkina-Faso. A ces chiffres, il faut ajouter des dizaines de milliers d'autres qui n'ont jamais pu se faire enregistrer parce que ne répondant par aux critères restrictifs du HCR (Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés).


  Ces réfugiés se heurtent dans certains pays d'accueil au refus des autorités à leur reconnaître le statut de réfugiés, ce qui leur donnerait une protection juridique et un certain nombre de droits liés à cette reconnaissance. Ces populations sont donc pudiquement appelées "populations déplacées" expression utilisée généralement pour désigner des populations déplacées dans leur propres pays.


  Le rôle joué par l'Algérie et la France, est d'autant plus important que leur statut de médiateurs masque difficilement leur volonté d'imposer leurs propres solutions. Tout en étant le principal soutien militaire et diplomatique du Mali, la France a laissé l'Algérie occuper le premier plan dans l'organisation et la gestion des négociations qui avaient abouti à la signature du Pacte. Cette répartition des rôles permet à ces deux pays de s'entendre sur les modalités d'une solution où les deux parties prenantes officielles ont trop souvent été réduites à un rôle de figuration.


  Le silence de la communauté internationale s'explique, là aussi, par la volonté de la France et de l'Algérie à étouffer les revendications du Mouvement touareg et éviter l'internationalisation de ce conflit. C'est également cette logique qui empêche la création d'une commission d'enquête internationale pour faire la lumière sur les exactions commises contre les populations civiles.

Près de 300 notables réunis à Tamanrasset

EL WATAN
lundi 19 mars 2012
C’est dans la discrétion la plus totale que l’amenokal de Tamanrasset, Ahmed Edabir, a réuni samedi dernier près de 300 notables représentant les différentes tribus touareg de la région.
L’objet de cette rencontre, la deuxième du genre (la première a eu lieu le 7 mars), est de débattre de la situation « inquiétante » que vit la capitale de l’Ahaggar, notamment depuis l’attentat kamikaze qui a ciblé le siège du groupement de Gendarmerie nationale, en plein centre-ville, faisant plus d’une vingtaine de blessés.
Selon des sources locales, les débats ont été houleux et ont permis aux différents protagonistes de poser les problèmes auxquels est confrontée la communauté targuie en général et la région de Tamanrasset en particulier, liés essentiellement aux personnes étrangères ayant réussi à se faire délivrer des papiers algériens grâce à de l’argent sale provenant de la contrebande, de la drogue et, depuis peu, du terrorisme. Les notables de Tamanrasset se sont plaints à leur amenokal de la présence « de plus en plus importante et suspecte d’étrangers » qui, selon eux, « se fraient des chemins en plein désert grâce à l’argent sale ». Une situation qui, selon nos sources, a de tout temps été dénoncée aux plus hautes autorités du pays, mais en vain.
Depuis l’attentat kamikaze, les Touareg ont décidé de revenir à leur structure sociale ancestrale pour mieux appréhender ce qu’ils perçoivent comme étant un danger. Dans leur déclaration finale (dont une copie est en notre possession), les notables ont relevé « la nécessité de renforcer l’unité nationale à travers l’unification des rangs autour de l’amenokal pour contrecarrer tout ce qui peut porter atteinte à la souveraineté nationale et à la dignité du citoyen, ainsi que toute dérive étrangère à la société qui menace le pays ». Il est par ailleurs indiqué dans cette déclaration que « les notables ont débattu d’autres volets liés à la nécessité de réussir toutes les initiatives qui vont dans l’intérêt du citoyen, de la stabilité et de la sérénité ». En clair, les Touareg se sont entendus pour revenir à « l’autorité » de l’amenokal, longtemps marginalisé par les autorités locales.
« Maintenant que le danger de l’insécurité guette tous les foyers de Tamanrasset, il n’est plus question d’attendre encore. Tout le monde sait que cette ville vit du tourisme qui a mis des années pour renaître petit à petit de ses cendres. Frapper le seul gagne-pain de la population, c’est déstabiliser toute la région. Tout le monde est conscient de ce danger. C’est pour cette raison que les notables ont décidé de se réapproprier un espace qu’ils avaient perdu depuis des années. Le message adressé aux autorités est très clair. Il faut que des mesures concrètes soient prises pour revenir aux méthodes ancestrales de gestion de la cité. Il n’est plus question de laisser nos frontières entre les mains de personnes malveillantes. Nous ne voulons pas vivre les évènements des débuts 1990 et 2000 avec les rébellions au nord du Mali », explique un notable de l’Ahaggar.
Il n’est pas exclu que l’amenokal ait décidé de ne pas se présenter aux élections législatives uniquement pour se consacrer aux « vrais problèmes » de sa communauté qui, faut-il le préciser, est traversée par tous les courants politiques. Ce même amenokal, dans une déclaration à El Watan, regrettait que la nationalité algérienne soit délivrée à des étrangers sans l’avis des notables, comme cela se faisait auparavant. Depuis, la situation n’a fait que se dégrader au point où la ville, censée être la plus protégée, a été le théâtre d’un attentat kamikaze qui, de surcroît, a ciblé le siège de la Gendarmerie nationale. Pour des sources au fait du dossier, les explosifs utilisés avaient été acheminés du nord du Mali dans des convois de réfugiés ayant rejoint le territoire algérien. Une réalité qui fait craindre le pire, d’autant plus que la situation au nord du Mali ne fait que s’enliser.
Salima Tlemçani

dimanche 18 mars 2012



A.BOUDANE


Ishaq
Posté le 18/03/2012 à 21H07
Les Touareg...sont des Européens!
N°2, printemps 2001
MIROIRS IDENTITAIRES

LES TOUAREGS ET NOUS :
UNE RELATION TRIANGULAIRE ?

Paul Pandolfi
 
 
“Oh ! Mes Touaregs ! Quel mystère vous conduit sous vos voiles étranges? A l'image de votre âme, votre parler berbère est marqué de mots chrétiens, le nom latin immense de péché, celui gracieux des anges, et, à travers les règles musulmanes de votre art, vous faites triompher sur vos objets familiers la croix chrétienne ” (C.Kilian 1934 : 155).
 
 
        Sous ce titre quelque peu énigmatique, nous nous proposons d’entamer ici le décryptage de la représentation que nous nous sommes faite de ce peuple connu sous le nom de Touaregs. Cette représentation n’a rien d’éternel, elle est le résultat d’un processus, d’une construction historique. En ce sens, parler de décryptage c’est d’abord - à grands traits - repérer/baliser ce processus mais aussi, dans le même mouvement, se poser la question du pourquoi. La représentation passée et présente des Touaregs n’est pas gratuite, elle ne correspond pas simplement à un surplus d’exotisme pour Occidentaux désenchantés, elle n’est pas le simple fruit d’un hasard ethnologique. Cette représentation a une efficacité pratique et elle ne peut réellement s’analyser qu’à condition de cerner ses enjeux et ses usages. Qu’à condition, en somme, de se poser cette question en apparence triviale : à quoi sert cette représentation ? Faute de pousser l'analyse jusqu'à ce point, on s'en tiendrait à une simple description de l'image des Touaregs et on passerait sûrement à côté de l'essentiel, on n'analyserait rien.
 




Le stéréotype touareg

        Les Touaregs bénéficient d’une représentation largement positive, d’un stéréotype fortement valorisé et par là sont distingués des populations “autres” qui leur sont voisines. Soit principalement les populations dites arabes situées au nord du pays touareg et, au sud, les populations “noires” d’Afrique sahélienne, auxquelles s’appliquent généralement des représentations beaucoup plus négatives. Cette valorisation de l’image des Touaregs peut facilement se repérer dans le présent (voir les reportages télévisés comme “Ushuaïa” ou le magazine Géo). Nous n’en prendrons ici qu’un exemple : le catalogue du magasin “Nature et Découvertes” (printemps 1999) qui présente aux consommateurs occidentaux des bijoux dits “ethniques”. L’orfèvrerie touarègue y est bien évidemment présente. Un texte, intitulé “Splendeurs nomades”, accompagne la reproduction photographique des bijoux :

 “Au bout de la patience, il y a le ciel, disent les Touaregs, nomades épris d’espace et de liberté, sages seigneurs du désert enveloppés d’épais voiles indigo qui les protègent du soleil et du vent. Les bijoux qu’ils cisèlent dans l’argent, métal du prophète, symbole de la pureté, ont l’élégance et la simplicité de ce peuple.”  

        On est là en présence d’un stéréotype massif et hors du temps où figurent les principaux thèmes de l’imagerie touarègue : le mystère (voile), le nomadisme assimilé à l’errance et à la liberté, la noblesse, la sagesse et la simplicité attribuées à un peuple censé vivre en osmose avec un milieu naturel difficile. Nous ne nous attarderons pas davantage sur cette image qui à quelques variantes près est présente dans nombre de textes consacrés aux Touaregs. On notera par contre deux de ses conséquences majeures :

        - Du fait même de cette valorisation, les Touaregs ont en quelque sorte monopolisé l’image du nomade saharien. Pour la plupart des Occidentaux une série d’équivalences est ainsi instaurée : Sahara = nomades = Touaregs. Les autres populations sahariennes (nomades et/ou sédentaires) se trouvent ainsi quasiment exclus de notre imaginaire saharien. On notera d’ailleurs qu’au sein même du monde touareg ceux de l’Ahaggar (ou Hoggar) sont particulièrement privilégiés. Un texte de E. F. Gautier, géographe longtemps présenté comme un des meilleurs spécialistes du Sahara, est sur ce point éloquent : “Le sédentaire, au Sahara, est quelque chose comme un corps étranger enkysté ; un coolie noir, fixé à la glèbe […] Le véritable Saharien, l’autochtone enraciné, c’est le nomade, dans l’espèce le Touareg […] ceux qui nous intéressent, les Sahariens du Hoggar, sont peut-être bien les représentants les plus glorieux et les plus caractéristiques du nom ” (1935 : 176).

        - Cette première équation en installe une seconde sur le mode de l’évidence. Si le type même du nomade saharien est un Touareg, il est implicitement entendu qu’un Touareg est un nomade, mieux il ne peut être qu’un nomade. Un Touareg sédentaire - comme il en existait déjà dans la société dite traditionnelle - sera toujours plus ou moins présenté comme un “faux” Touareg, comme un Touareg “inauthentique” et pensé dans une thématique de la déchéance, de la perte d’une “pureté originelle”.
 

Une vieille histoire

        Or, cette représentation largement valorisée des Touaregs est en quelque sorte présente dès “l’origine”, entendons par là le moment de la rencontre entre l’Occident (et notamment la France) et le monde touareg au XIXème siècle1. Avec la conquête de l’Algérie, les Touaregs deviennent peu à peu une réalité concrète pour les Européens. Très schématiquement, deux grandes périodes peuvent être distinguées : de 1850 à 1900, l’ère des explorations et des contacts indirects puis, à partir de 1900-1905, la phase de l’installation coloniale en pays touareg. Mais, point important, les contacts de plus en plus étroits tout comme l’accumulation des connaissances ne provoquent pas un effet de désenchantement. Ce qui domine malgré tout, y compris dans la littérature coloniale, est bien la face positive et valorisée. Certes, un autre discours existe aussi. Comme c'est souvent le cas dans les représentations des populations nomades, se conjuguent en effet (et souvent dans le même texte) attirance et rejet, valorisation et stigmatisation. Et l'on pourrait citer ici maints passages où les Touaregs sont présentés comme d'éternels pillards, comme des hommes sans loi qui ne reconnaissent que la force. Mais, hors quelques cas relativement isolés2, chez la plupart des auteurs la représentation des Touaregs est largement valorisée surtout si on la compare à celles des peuples qui leur sont voisins.

        Ainsi, sept ans après le massacre de la mission Flatters, soit dans une période particulièrement défavorable à une présentation positive des Touaregs, ceux-ci demeurent malgré tout un peuple “exceptionnel” pour Bissuel, un peuple “fascinant” pour Maupassant3. Quelques décennies plus tard, M. Delafosse commence ainsi la préface qu'il écrit pour le livre du Docteur A. Richer consacré aux Touaregs Oulliminden : “Parmi les cent peuples divers qui, à l'heure actuelle, dans toutes les parties du monde, vivent à l'ombre de notre drapeau et suivent la voie de leurs destinées à la faveur de la paix française, celui des Touaregs a toujours éveillé parmi nous, une curiosité particulière, qui, peu à peu, s'est doublée d'une sympathie spéciale” (1924 : 3). Et de fait, dans bien des cas, les nomades voilés du Sahara ont incarné la figure même de l’étrangeté, le Touareg a été l’Autre par excellence et ce, sur un double registre puisque il était pensé comme à la fois un autre proche et un autre lointain.
 
 
Lointains … et atypiques

        Outre l’aura de mystère qui les a longtemps entourés, les Touaregs apparaissent lointains parce que fort différents des autres peuples d’Afrique du Nord. Depuis 1830, les populations d’Afrique du Nord et du Sahara ont toujours été pensées et appréhendées à travers de rigides oppositions binaires. De plus, ces dernières sont alors présentées comme surdéterminées par des différenciations “raciales” immuables. Si le couple Berbères/Arabes constitue ici l'exemple à la fois le plus représentatif et le plus connu, il existe bien d’autres manières de cliver le social. Ainsi, les oppositions nomades/sédentaires, Blancs/Noirs, conquérants/conquis ou encore dominants/dominés, seront également particulièrement opérantes. Or, dans la mise en place de ce jeu d’oppositions, les Touaregs occupent une place originale et privilégiée qui les distingue de tous les autres groupes. Nous sommes là, en effet, en présence d’une population cumulant tous les traits jugés positifs de ce dispositif puisque les Touaregs sont présentés comme des Berbères blancs, nomades et dominants.
            Mais surtout, l'appréhension des Touaregs ne s'effectue jamais dans une simple relation à deux termes, dans une relation de face à face entre Nous (= Européens) et les Autres (= Touaregs). Il y a toujours présent, de manière implicite ou explicite, un troisième terme, un second “autre” qui permet d'instaurer une relation non pas duelle mais triangulaire. Entre Nous et cet Autre par excellence que peuvent être les Touaregs vient en quelque sorte s’immiscer ce second “autre” que seront les populations arabes dans la plupart des cas ou, plus rarement, les populations noires du Sahel. D’Europe au cœur du Sahara, le chemin n’est jamais direct, jamais sans intermédiaire ; on n’arrive au pays des “hommes bleus” qu’après avoir traversé au préalable soit le Maghreb soit l’Afrique sahélienne.

        Ainsi, quand il s’agit de repérer des traits jugés distinctifs des Touaregs, deux notations sont récurrentes dans la littérature : le rôle privilégié des femmes et la tiédeur religieuse. Or, dans les deux cas, ces affirmations ne peuvent réellement se comprendre que par rapport à ce second “autre” précédemment évoqué. C’est bien, avant tout, par comparaison avec les populations arabes d’Afrique du Nord censées opprimer leurs femmes et sombrer dans le pire fanatisme que les Touaregs sont ainsi qualifiés : “Quand, en deçà de la région des dunes de l’Erg, on voit la femme arabe telle que l’islamisme l’a faite, et, au delà de cette simple barrière de sables, la femme touareg telle qu’elle a voulu rester, on reconnaît dans cette dernière la femme du christianisme” (Duveyrier 1863 : 124).

        Cette opposition pensée comme substantielle entre Touaregs et Arabes est particulièrement présente dans le  Journal de route de Duveyrier4. Que ce soit à propos du sens de l’orientation, de la politesse ou de la qualité des bijoux, ce schème apparaît comme une évidence dans le propos de l’auteur :

        - “Othman a le sens géographique très développé et il possède, ce que je n’ai remarqué chez aucun Arabe, la connaissance du rapport des différents accidents du sol et de leur entraînement” (1905 : 154).

        - “Tout ceci est bien poli et n’aurait jamais lieu en pays arabe” (ibid : 159)
.
        - “ […] le tout est de bon goût et serait bien vu en Europe. Ainsi ce ne sont plus les ornements grossiers de Arabes” (ibid : 167).

        Ce type de présentation où sans cesse le portrait des Touaregs se construit en opposition avec des traits présentés comme propres aux populations arabes est une constante dans la plupart des textes consacrés au Sahara. Là aussi, un texte de E. F. Gautier est on ne peut plus parlant. Après avoir établi toute une série de comparaisons entre Arabes et Touaregs, comparaisons toujours à l’avantage des seconds, cet auteur n’hésite pas à “naturaliser” cette différence ; selon lui en effet, “On pourrait pousser bien plus loin cette antithèse ; on la retrouverait jusque chez les animaux ; le chien arabe est une brute sauvage, hargneuse et craintive, un demi-chacal, les crocs toujours au vent. Le chien targui est câlin comme le nôtre ” (1906 : 12).
 
 

Des Touaregs proches … des semblables ?

        La dernière proposition du texte ci-dessus l’indique. Le même mouvement qui sépare les Touaregs des populations qui leur sont voisines (population arabo-musulmane du Nord et populations “noires” du Sahel) les rapproche de nous, fait d’eux sinon d'autres nous-mêmes, du moins des autres proches. Citons à nouveau Gautier (1906 : 11) : “…il semble bien, toute sentimentalité à part, qu’il y ait entre eux et nous bien des affinités et des points de contact, bien plus qu’avec les Arabes […]En somme, une certaine analogie de mœurs est incontestable, et elle est sentie de part et d'autre.”

        Dès la seconde moitié du XIXème siècle, la volonté taxinomique, le besoin de classer les populations afin de les différencier mais aussi, dans le même mouvement, d’établir l’origine de chacun des groupes obtenus furent une des obsessions majeures des recherches anthropologiques ayant pour objet l’Afrique du Nord et le Sahara. Les Touaregs n’ont pas échappé à ce type de démarche. Ainsi, un grand nombre d’études tentèrent de prouver qu’ils étaient les descendants de tel ou tel groupe (Gétules, Numides, Libyens … etc) ou de démontrer qu’ils se rattachaient à telle ou telle “race” (aryenne, caucasienne …). Notre propos n’est pas de reprendre ici cette abondante littérature5. Mais, relevons un fait central : au delà de leurs divergences, la quasi-totalité de ces travaux partagent un point commun, une même volonté : démontrer que les Touaregs font partie intégrante de la race blanche. E. F. Gautier (1935 : 180) clôt un long et élogieux portrait de la “race” touareg par cette phrase sans appel : “Cette belle race est blanche, en somme.” Si après une telle affirmation, il restait encore des sceptiques, l’auteur en appelle à deux traits “culturels” : les Touaregs ne se lavent jamais et le tissu avec lequel ils se voilent déteint abondamment sur leur visage : “Sur une peau touareg il est donc malaisé de déchiffrer la part respective de la crasse, de l’indigo et du pigment. Mais je ne les crois pas beaucoup plus brunes que celles des populations méditerranéennes. Une foule de traits frappants sont nettement de chez nous […] On rencontre souvent dans les pâturages touaregs des visages familiers, qu’on imaginerait sans effort sur les épaules d’un Français méridional au-dessus d’un faux-col et d’une cravate.”6

        Mais ce rapprochement, cette ressemblance ne peuvent se fonder sur ce seul critère racial. D’autres traits d’ordre culturel doivent ici logiquement intervenir car, dans ce type de raisonnement, “les ressemblances morales et intellectuelles vont de pair avec les physiques” (ibid).

 
Les Touaregs : un “archaïsme ethnographique” ?

        En 1890, dans un article consacré aux Touaregs, E. Masqueray écrit que les sociétés touarègues sont “des cristallisations sociales, et comme des échantillons d’un monde que nous avons oublié” . Si les Touaregs sont bien des  barbares, ce sont des “barbares de notre race avec tous les instincts, toutes les passions, et toute l’intelligence de nos arrière-grands-pères. Leurs mœurs nomades sont celles des Gaulois qui ont pris Rome […] Aussi rien n’est plus intéressant que de les questionner tant sur nous que sur eux-mêmes ”. 

        Cette vision des Touaregs comme un peuple-témoin de notre propre histoire se retrouve dans nombre d’études même si le référent passé peut varier. D’ailleurs, dans le même texte, Masqueray lui-même évoque également la “Germanie de Tacite” ou encore la “Grèce homérique”7. Mais, très vite, c’est bien l’Europe féodale qui sera la référence principale. Les sociétés touarègues, et notamment celle des Touaregs Kel-Ahaggar qui en fut longtemps l’exemple-type, se caractérisaient par une forte hiérarchisation. Sous l’autorité d’un chef unique (amenukal) trois strates sociales étaient réunies : les nobles (ihaggaren), les tributaires (Kel-ulli) et au bas de l’échelle, les esclaves (voir Pandolfi 1998 : chapitre 2). Une lecture rapide et superficielle amena très vite à parler de “féodalisme nomade”8 et à établir un parallèle entre la société des “seigneurs du désert” et celles de l’Europe médiévale. A ce titre, l'hypothèse avancée par quelques auteurs (mais au moins signalée par bien d'autres) qui consiste à voir dans les nobles touaregs les descendants de croisés égarés dans le désert ne fait que pousser à son extrême le présupposé suivant : non seulement les Touaregs appartiennent à la “race blanche”, mais de par leur substrat culturel (en l'occurrence ici un christianisme originel censé se manifester encore dans l'usage du motif de la croix) ils partageraient avec nous, par delà un “vernis d'islamisme superficiel et écaillé” (Gautier 1935 : 182), la même culture.

        Déjà présent chez Duveyrier9, ce thème où s'entremêlent raisonnement analogique et comparatisme diachronique, se retrouve chez la plupart des auteurs :

        -  “En pays touareg on a souvent le travers de vouloir, d’un trait de plume, rompre le cadre traditionnel de la société, qui avec ses suzerains, ses vassaux et ses serfs, ne peut être comparée qu’à notre ancienne féodalité” (Bonamy 1924 : 43).
        -“ […] au Hoggar revit, ou à peu près, notre ancienne féodalité française, avec ses mœurs, ses institutions, son code de l’honneur” (Stefanini 1926 : 45).
        - “Les nobles du Ahaggar représentent les seigneurs de notre Moyen-Age” (Vermale 1926 : 34).
        - “L’organisation sociale des Hoggars est essentiellement aristocratique et féodale” (Demoulin 1928 : 145).

        Au delà de ce parallélisme fondé sur quelques analogies superficielles, on relèvera que les écrits des premiers Européens qui ont analysé les sociétés touarègues ont particulièrement insisté sur la catégorie des “nobles suzerains”, au point que l’image stéréotypée du Touareg s’est construite à partir des traits de cette strate sociale particulière. Cette vision “aristocratique” n’est sans doute pas étrangère au fait que la plupart de ces travaux sont dus à des militaires souvent en communion idéologique (sur le mode de la nostalgie) avec l’aristocratie française10. D’où ce sentiment de familiarité, d’empathie que, de Duveyrier aux militaires de la première partie du XXème, l’on retrouve dans le discours de la plupart des auteurs “sahariens”.

        Si la création et l’organisation des célèbres compagnies sahariennes répond avant tout à des nécessités politico-militaires, on ne peut cependant gommer un des ses présupposés : pour être capable d’affronter le désert, l’Européen doit se mettre à l’école (à l’épreuve ?) de ces nomades qui mieux que quiconque en possèdent la connaissance et l’intelligence. En cela, il est nécessaire de passer par l’autre, d’être au moins son égal en ce domaine. J. Peyré sera un des chantres de cette mue :

        - “Le Français allait se faire homme du vent, prendre place parmi les campements, au point de se confondre avec eux”(1957 : 99)
.
        - “En prenant le fils d’Abidine pour guide, alors qu’il est chargé de le mener aux fers, Charlet n’agit certes pas comme un homme d’Europe. Il s’est véritablement fait nomade et il se comporte comme un nomade”(ibid : 124).
 
 
Conclusion

        De nos jours, le stéréotype touareg est encore largement opérant. Qu'on se souvienne de quelle manière un véritable lobby des “amis de la cause touarègue” (cf. Casajus 1995) a soutenu sans aucune distance critique la rébellion touarègue au Mali et au Niger. En juin 1992, les murs de Paris furent ainsi recouverts d'une affiche où sur un visage d'homme voilé s'inscrivait cette interrogation pour le moins problématique “Touaregs. Un peuple doit-il disparaître pour exister ? ” alors que, dans le même temps, sous le patronage de l'association France-Libertés, se déroulait dans le hall du musée de l'Homme une exposition de photographies figeant les Touaregs dans cette représentation stéréotypée qui répond si bien aux désirs et aux intérêts des Occidentaux.

        Cette image est également répétée à satiété dans les récits de voyages, livres de photos et autres brochures touristiques. Parfaitement connue par la plupart des individus auxquels elle s'applique, elle est très souvent reprise et réutilisée par ces derniers dans le cadre de stratégies diverses. L'exemple touristique est ici le plus parlant : combien de Sahariens ne doivent-ils pas littéralement se déguiser et jouer au Touareg afin de correspondre au plus près à l'image que veulent retrouver les Occidentaux à la recherche des “hommes bleus”. Dans le contexte fortement inégal du tourisme Nord/Sud s'exprime une violence évidente : pour exister, l'Autre doit encore et toujours se conformer à l'image que nous avons construite de lui.

        Or, d'un point de vue historique, ce qui nous paraît central ici est bien la relation triangulaire précédemment évoquée : en aucun cas il n'y a appréhension de l’Autre touareg sans l’intervention de ce second autre représenté pour l’essentiel par les populations arabes d’Afrique du Nord. Le modèle ainsi établi voit deux groupes se distinguer, s’opposer voire se combattre au sein d’un même espace. Dans ce cadre, comme l'a justement relevé M. Kilani (1997), c'est une relation spectrale avec l'autre qui se met en place. Le processus qui amène l’Occidental soit à rapporter l’Autre touareg à lui-même soit, dans le même mouvement, à se projeter dans cet Autre, a pour conséquence principale de séparer cet Autre privilégié, cet Autre “semblable et proche”, de l’Autre stigmatisé et rejeté.

        Aussi, il paraît évident qu'une telle stratégie répond in fine, dans le contexte colonial, à un objectif principal : diviser pour mieux régner. En ce sens, nul ne l'a mieux défini que Gallieni dans sa fameuse circulaire du 22-05-1898 : “S'il y a des mœurs et des coutumes à respecter, il y a aussi des haines et des rivalités qu'il faut savoir démêler et utiliser à notre profit en les opposant les unes aux autres, en nous appuyant sur les unes pour mieux vaincre les autres.”
Références bibliographiques

ANDERSON B., 1996, L'imaginaire national. Réflexions sur l'origine et l'essor du nationalisme, Paris, La Découverte.

BERNUS E., 1981, Touaregs nigériens. Unité culturelle et diversité régionale d'un peuple pasteur, Paris, Mémoire O.R.S.T.O.M. 94.

BISSUEL H., 1888,Les Touareg de l'Ouest, Alger, A. Jourdan.

BOETSCH G. et FERRIE J. N., 1992, “Du Berbère aux yeux clairs à la race eurafricaine : la Méditerranée des anthropologues physiques”, in K. Basfao et J.-R. Henry (eds), Le Maghreb, l'Europe et la France, Paris, C.N.R.S. : 191-207

BONAMY A., 1924, Les deux rives du Sahara, Paris, Émile Larose.

BORNECQUE J.-H., 1986, Pierre Benoît, le magicien, Paris, Albin Michel.

BRIANT P., 1982, État et pasteurs au Moyen-Orient ancien, Cambridge et Paris, C.U.P. et M.S.H.

CASAJUS D., 1995, “Les amis français de la cause touarègue", Cahiers d'Études africaines, 137, XXXV-1 : 237-250.

DEMOULIN F., 1928, “La vie des Touareg du Hoggar”, Annales de Géographie, XXXVII (206) : 137-162.

DUVEYRIER H., 1863, “Note sur les Touareg et leur pays”, Bulletin de la Société de Géographie, V : 102-125.

DUVEYRIER H., 1864, Les Touareg du Nord, Paris, Challamel aîné.

DUVEYRIER H., 1905, Journal de route (publié et annoté par Ch. Maunoir et H. Schirmer), Paris, Challamel.

EYDOUX H. P., 1943, L'Homme et le Sahara, Paris, Gallimard.

GAUTIER E. F., 1906, “ Du Touat au Niger”, La Géographie, XIII : 5-18.

GAUTIER, E. F., 1935, La conquête du Sahara, Paris, Armand Colin.

HARTOG F., 1980, Le miroir d'Hérodote, Paris, Gallimard.

HARTOG F., 1982, “Entre les anciens et les modernes, les sauvages ou de Claude Lévi-Strauss à Claude Lévi-Strauss”, Gradhiva, 11 : 23-30.

KILIAN C., 1934, “L'Art des Touaregs”, La Renaissance, XVII (7-8-9) : 147-170.

HENRY J. R., 1996, “ Les Touaregs des Français”, Cahiers de l'IREMAM, 7/8 : 223-238.

KILANI M., 1997, “La théorie des ‘deux races’ : quand la science répète le mythe”, in J. Hainard et R. Kaehr (eds), Dire les autres. Réflexions et pratiques ethnologiques, Lausanne, Payot : 31-45.

MASQUERAY E., 1896, Observations grammaticales sur la grammaire touareg et Textes de la tamahaq des Taïtoq, Paris, E. Leroux.

MAUPASSANT G. de, 1997, Lettres d'Afrique, Paris, La Boîte à Documents.

MOUSSA S., 1994, “Une peur vaincue : L'émergence du mythe bédouin chez les voyageurs français du XVIIIème siècle”, in J. Berchtold et M. Porret (eds), La peur au XVIIIème siècle. Discours, représentations, pratiques, Genève, Droz : 193-212.

MOUSSA S., 1996,“Le Bédouin, le voyageur et le philosophe”, Dix-Huitième Siècle, 28 : 141-158.

PANDOLFI P., 1998, Les Touaregs de l'Ahaggar, Paris, Karthala.

PANDOLFI P., 2001, “La construction d'un stéréotype : Jules Verne chez les Touaregs”, in S. Caratini (éd.), Configurations de l'altérité nomade, Paris, Karthala (sous presse).

PEYRE J., 1957, De sable et d'or, Paris, Flammarion.

RICHER A., 1924, Les Touareg du Niger (Région de Tombouctou-Gao), Les Oulliminden, Paris, Emile Larose.

STEFANINI J., 1926, Au pays d'Antinea, Paris, Plon.

VERMALE P., 1926,Au Sahara pendant la guerre européenne, Alger.
VERNE J., 1978 [1905], L'invasion de la mer, Paris, UGE 10/18.

Tarhanin Teglla ( my love gone )

Tenere . Desert . Sahara



// Terakaft 








Terakaft à la Mix Box


Le 27 septembre 2011, la Mix Box ouvrait sa scène aux quatre vents pour accueillir le groupe touareg Terakaft. Plus d'une heure de live enregistrée par notre équipe vidéo et diffusée en direct sur la plateforme Arte Live Web. A découvrir sans plus attendre...



Share to Facebook Share to Twitter Stumble It Email This More... 
Amazigh Kateb : « Les révolutions ont joué dans la reformation de Gnawa Diffusion » 

ACTUALITE

gnawa diffusion amazigh khateg alegerie revolution arabe 

Amazigh Kateb : « Les révolutions ont joué dans la reformation de Gnawa Diffusion »

18/03/2012 

Le 18 mars 1962, après près d’une décennie de combats d’une violence dont on commence à peine à prendre la mesure, la France et l’Algérie signaient des accords de paix à Evian. Cinquante ans plus tard, le temps est au souvenir. Pièces de théâtre, concerts, expositions, … Les créateurs se préparent à interroger et à célébrer le lien indéfectible qui, malgré les incompréhensions et les fâcheries, unit les deux pays.

Pour nous préparer à ce déferlement, nous sommes allés rencontrer Gnawa Diffusion, dans le studio grenoblois où il enregistre son nouvel album. Mais Amazigh Kateb, l’âme du groupe, n’est pas le genre d’homme qui se complait dans le passé. Interrogé sur un poème de son père, le poète, romancier et dramaturge Kateb Yacine, il nous a vite entraîné à sa suite dans le Maghreb d’aujourd’hui. Rencontre d’un homme de son temps …





 
 


Nous avons appris que, pour le nouvel album de Gnawa Diffusion, tu travaillerais sur un texte de ton père intitulé  « Rue des vandales » …

Amazigh Kateb : Oui je travaille bien dessus mais je ne sais pas s’il sera sur l’album. C’est très chargé, c’est lié à l’histoire de l’Algérie, à l’histoire de mon père, à mon histoire personnelle. C’est quelque chose sur lequel je travaille depuis un moment, j’ouvre d’ailleurs mon spectacle avec un extrait. C’est un texte très important, très fondateur. Il parle du massacre du 8 mai 45, c’est une rue jonchée de cadavres mais la rue est vivante. Même jonchée de morts la rue est encore debout : « Je ne suis plus un corps, je suis une rue et nulle fusée n’atteindra plus jamais mon foyer… ». Ca rejoint aussi ce qui s’est passé dernièrement dans les pays arabes. A savoir qu’il y a eu des révoltes et des révolutions qui ont été kidnappées, la plupart du temps détournées de leur objectif premier. Au final, même si ces révolutions n’ont pas donné ce qu’elles elles auraient dû, les rues sont aujourd’hui éveillées, vivantes et n’ont plus peur. La peur a changé de camp.





Ces événements ont-ils joué dans votre reformation ?

Amazigh Kateb :
 C’est évident. A travers mon écriture et l’univers que j’amène dans Gnawa, les personnes qui ont fait partie de cette histoire ont été confrontées de manière permanente, pendant quinze à vingt ans à la problématique du Maghreb, notamment la problématique algérienne. Je suis resté pendant dix ans sans rentrer chez moi à cause de l’armée. Quand tu passes quinze ans à côtoyer cet univers et que tu vois que cet univers résonne tout d’un coup, tu as envie de t’exprimer. Ca nous donne envie de revenir dans cette histoire. Pendant le « printemps arabe », on a enfermé la révolution dans le printemps mais on a aussi enfermé ces révolutions dans le monde arabe, alors que la véritable révolution est internationaliste de fait. Elle est basée sur la solidarité des peuples, elle ne doit pas être à la télévision ou enfermée dans une saison. Je suis persuadé que si les Français connaissaient les dessous de ce qui a pu se passer à Tripoli ou à Ben Gazi ils n’applaudiraient pas comme ils applaudissent l’intervention de l’OTAN, de Sarko ou BHL.




 
 Gwana Diffusion aux Nuits Atypiques de Langon 2003





Vous avez justement mené une action à Alger en février dernier ?

Amazigh Kateb :
 On a monté un groupement informel qu’on a appelé « Citoyens libres et solidaires» parce que tout un tas d’organisations officielles et très souvent proches de l’Etat ou de l’opposition fantoche en Algérie avaient appelé à une marche en leur nom. On n’est pas contre ces gens là mais on avait besoin de marcher sans ces étiquettes. Je suis descendu et j’ai fait un petit papier expliquant que ceux qui voulaient marcher mais qui avaient peur d’être récupérés par les appareils politiques et syndicaux n’avaient qu’à faire une banderole « citoyens libres et solidaires », comme ça, on vous verra. J’avais besoin d’y aller pour marcher et j’avais besoin de savoir pourquoi les gens marchaient. Il y en a : c’est pour l’intérêt, c’est de la magouille. D’autres ont besoin de manifester car ils n’ont plus le choix. Mais il y a aussi des gens qui ne marchent pas en Algérie, qui sont dans la misère totale mais qui ont refusé de marcher. Ils étaient autour de la manif’ et nous regardaient marcher. Ce sont eux qui avaient des choses intéressantes à nous dire.


Ils nous disent qu’on est en train de parler de la liberté d’expression mais que eux la pratiquent tous les jours. C’est réel : l’Algérien n’a pas réellement de problème de liberté d’expression. En réalité, c’est les partis politiques qui ne peuvent pas s’exprimer, tout ce qui est institutionnel est bloqué. En dessous, la société ne demande qu’à se libérer mais avec des chefs de file qui soient crédibles, qui ne soient pas des composantes de l’appareil d’Etat. Un parti, le RCD, a fait beaucoup de bruit pendant cette marche, il a onze sièges à l’assemblée. Quand tu as onze sièges, que tes députés sont payés pas loin de 4 000€ par mois, cela me parait difficile de cracher dans la soupe. Sinon, tu fais un véritable mouvement dans l’assemblée et tes onze députés ont le courage de dire qu’ils n’ont aucun poids parce que leurs sièges sont fantoches et ne servent à rien, qu’ils décident de se retirer. Il y aura onze sièges d’abstention plutôt que onze sièges de fantômes. La véritable confrontation n’existe pas. Les Algériens n’ont pas besoin d’un parti, ils ont besoin de reprendre confiance dans un projet de société.




Vu de la France, des pays comme l’Algérie ou le Maroc semblent être en marge du Printemps Arabe.

Amazigh Kateb :
 Oui, c’est vrai. Le Maroc, c’est différent, c’est un cas particulier. Il y a eu un référendum de dernière minute, des lois sont passées. Il y a eu une tentative d’ouverture, même si beaucoup considère qu’elle est artificielle. Des compromis politiques ont été faits. La preuve, c’est que les Frères musulmans viennent de gagner les élections et que c’était prémédité. Au Maroc, il y a un véritable mouvement social qui n’est pas aussi radical que ce qui a pu se passer en Tunisie par exemple. C’était une véritable insurrection. Je pense que les pays arabes et occidentaux ont eu le temps de se retourner et, par la suite, tous les scénarios qui ont eu lieu étaient plus ou moins contrôlés et prémédités, y compris le scénario égyptien. Ce qui s’y est passé n’est pas complètement naturel. Il y a eu un soulèvement populaire indéniable mais la manière dont cela a été traité, comme celle d’on est en train de traiter Moubarak… Ca sent la mascarade à plein nez.


L’Algérie a vécu une situation similaire en 1988 quand il y a eu le multipartisme et l’ouverture du champ politique et médiatique. Cette phase d’ouverture n’a pas duré très longtemps, jusqu’en 92. Quand les Islamistes ont gagné les élections, elles ont été annulées par le FLN. Du coup, ils ont pris les armes. L’Etat d’urgence et le couvre feu ont été décrétés et c’est parti pour une décennie sanglante. Les Algériens sont maintenant moins romantiques. Pendant toute l’année 2010, il y a eu presque 12 000 interventions de maintien de l’ordre dans tout le pays, soit 12 000 émeutes, 30 émeutes par jour. Sauf qu’on n’en fait pas la publicité car ce sont de vraies insurrections. Ce ne sont pas des révolutions télévisuelles qu’on peut manipuler car elles n’émanent pas de milieux manipulables mais d’une misère tellement profonde qu’elle est devenue incontrôlable. 






"BomBa Malika", de Amazigh Kateb





Propos recueillis par Antoine Girard

18/03/2012
gnawa diffusion amazigh khateg alegerie revolution arabe 

Départ de deux aéronefs algériens chargés d’aide humanitaire : L’Algérie au secours des réfugiés maliens

Des aides humanitaires algériennes de plus de 70 tonnes ont commencé à être acheminées, dans la journée d’hier, à bord de deux aéronefs vers le sud algérien, à Bordj Badji Mokhtar en premier lieu. Ceci, pour atteindre par la suite les pays voisins, notamment la Mauritanie, le Burkina Faso et le Niger où plus de 10.000 civiles maliens s’y sont réfugiés durant les trois dernières semaines.


Départ de deux aéronefs algériens chargés d’aide humanitaire : L’Algérie au secours des réfugiés maliens
Les colis alimentaires sont composés de produits de base dont le riz, les pâtes, l'huile, la tomate concentrée, le thé et le sucre. Des bâches et des médicaments feront également partie du lot, selon les précisions du Croissant-Rouge algérien. Par ailleurs, des dizaines de Touaregs du Mali sont entrés en Algérie fuyant les batailles qui s’y déroulent près des frontières algéro-maliennes, plus précisément dans la ville de Tinzaouatine. 

Selon les statistiques annoncées par les cadres du C-RA, plus de 130 familles ont été prises en charge par les autorités locales de la wilaya d’Adrar, aidées de volontaires du Croissant-Rouge algérien, ainsi que de plusieurs familles Touaregs algériennes dont la plupart ont un lien de parenté avec les réfugiés maliens. 
En fait, cette opération intervient après l'ouverture, la semaine dernière, d'un premier camp de réfugiés touareg situé à cinquante km de Bordj Badji Mokhtar, dans la région d’Al Khechim afin d’abriter les dizaines de familles maliennes qui traversent quotidiennement les frontières vers le territoire algérien. 

Le président du Croissant-Rouge algérien, M. Ben Zeghir, a affirmé que «toutes les précautions nécessaires ont été prises en prévision d’un large mouvement d’exode de familles maliennes vers l’Algérie», et n’a pas manqué de rappeler que les autorités algériennes envoient régulièrement près de 20 tonnes d’aide humanitaire au Nord malien. 

Dans le cadre de la prise en charge sanitaire, des équipes médicales et des psychologues ont été dépêchés sur les lieux. Les quelques 600 réfugiés recensés jusque-là, sur la bande frontalière de l’extrême-sud algérien, ont bénéficié d’examens médicaux. Une campagne de vaccination a été également lancée au profit des ressortissants maliens. 

«L’Algérie compte acheminer deux avions vers le Mali pour porter assistance à tous les Touaregs qui sont restés dans leur pays», a annoncé le président du C-RA, qui a rappelé que 150 tonnes de produits alimentaires de base seront stockés à Bordj Badji Mokhtar, en prévision d’un éventuel exode massif des Touaregs fuyant les combats au nord du mali. 
Hannane Essaissi

TAMAZAGHA.fr

Azawad : les militaires maliens s'attaquent aux populations civiles de Kidal
samedi 17 mars 2012
par Masin
Chassés d’Amachach, incapables de faire face aux combattants du MNLA sur le front, les militaires maliens s’attaquent aux civils touaregs. Ils en profitent pour former un bouclier humain à utiliser contre l’offensive du MNLA attendue à Kidal.
Au moment où le président malien, ATT, dénonce des crimes de guerre qui auraient été commis, selon lui par le MNLA, et essaye de convaincre la communauté internationale de lui venir en aide pour mater le combattants pour la libération de l’Azawad, son armée d’occupation se livre à des exactions notamment à Kidal. Les crimes de guerre dont ATT accuse le MNLA n’existent que dans sa tête. Le MNLA a fait preuve de grande responsabilité et il a même mis la vie de ses combattants en danger pour mettre des civils en sécurité. En revanche, l’armée malienne a eu même à bombarder des campements touaregs faisant plusieurs victimes ; même Amnesty International et Médecins sans frontières ont dénoncé ces exactions.

L’on se souvient également des attaques racistes ayant ciblés des Touaregs à Bamako et que la police malienne a laissé faire. Et ATT qui est à la tête d’une organisation maffieuse et corrompue (l’Etat malien) a le culot de reprocher au MNLA des crimes de guerre. Mais la violence des autorités malienne à l’égard des Touaregs continuent, ces autorités qui usent de tous les moyens afin de semer la peur au sein des populations. Les autorités maliennes continuent à former des milices qu’elles payent pour s’attaquer à des civils. Depuis la prise du camp d’Amachach par le MNLA, les militaires maliens, incapables de faire face aux combattants du MNLA, ont investi la ville touarègue de Kidal. En effet, Kidal est certainement le prochain objectif du MNLA qui a déjà, de l’autre côté, atteint Goundam et Tombouctou.

Ainsi, depuis le 13 mars des militaires maliens ont investi la ville de Kidal et se sont attaqué à des civiles. Ils se sont donné à des actes de pillage dans la ville. Des maisons ont été détruites et d’autres ont été occupées par ces militaires. Au-delà de la terreur que l’armée malienne veut semer au sein des populations touarègues, elle entend faire de cette population un bouclier humain pour faire face à l’offensive du MNLA qui s’approche de Kidal dernier objectif pour la libération de la partie est de l’Azawad.

Ces actes de l’armée malienne ne nous étonnent guerre, bien au contraire. Cela a été leur méthode depuis 1963.

La communauté internationale devra se pencher sérieusement sur la situation dans l’Azawad et dénoncer le comportement barbare de l’Etat malien au lieu de chercher à le soutenir aveuglement. Cela concerne notamment les Etas Unis d’Amérique qui au lieu de se préoccuper des populations civiles, de la situation des droits de l’Homme et d’essayer de comprendre la démarche du MNLA, ils envoient du renfort militaire à l’Etat malien.


Masin Ferkal.