samedi 16 janvier 2016

Par Jean-Dominique Merchet
Secret Défense
Rien de ce qui est kaki, bleu marine ou bleu ciel ne nous sera étranger

Ouagadougou : l’opération française Barkhane à nouveau contournée

Une attaque terroriste a fait « au moins 23 morts » dans un hotel de la capitale du Burkina.
        
Des militaires français et américains avant l'assaut de l'hôtel Splendid à Ouagadougou, dans la nuit de vendredi à samedi
© Reuters
Après Bamako le 20 novembre, Ouagadougou le 15 janvier : Barkhane, l’opération militaire française au Sahel, a une nouvelle fois été contournée par son principal ennemi, le groupe Mourabitoune de Mokhtar Belmokhatar, proche d’AQMI (Al Qaïda au Maghreb Islamique). Au moins une vingtaine de personnes ont trouvé la mort la nuit dernière au cours d’une attaque terroriste dans la capitale du Burkina. Les forces spéciales françaises sont intervenues. 
Alors que l’armée française traque les groupes armés terroristes (GAT) dans les zones désertiques du nord du Mali et du Niger - à grand renfort de moyens - c’est au sud et en ville que ceux-ci frappent là où cela fait mal, dans les hôtels des capitales qui servent de QG aux « Blancs ». Quand la « neutralisation » d’un GAT par l’armée française fait l’objet d’une brève dans les journaux, une attaque terroriste dans un hôtel reste à la Une des télévisions pendant des heures... Les djihadistes marquent des points médiatiques et c’est exactement cela qu’ils recherchent, sachant que le terrorisme est d’abord une arme de communication massive.
Pour se rassurer, les milieux militaires français expliquent que c’est parce que les terroristes ne peuvent plus agir dans le nord où leur liberté de manœuvre est contestée par l’armée française qu’ils opèrent dans le sud sous la forme d’attentats. Ce n’est pas faux, mais l’explication est au fond sans conséquence : l’ennemi évolue, s’adapte et conserve l’initiative. Il parvient à contourner les 4 000 hommes de l’opération Barkhane et leur quarantaine d’aéronefs divers. Il vient frapper au cœur de la capitale burkinabé, à quelques encablures du PC de l’opération Sabre - c’est-à-dire des forces spéciales françaises (près de 400 hommes) engagées au Sahel. 
À Paris, comme nous le rapportions récemment, on commence à s’interroger sur les « rendements décroissants » de Barkhane, qui coûte 700 millions par an... et dont on ne voit pas le terme. En 2015, selon nos calculs, il n’y a eu que neuf TIC (Troops in contact), le terme convenu pour affrontements armés avec les GAT et ils ont abouti à la « neutralisation » d’une quarantaine de combattants ennemis. 
Comme Sentinelle sur le territoire national, Barkhane est victime du syndrome de la ligne Maginot. Ces opérations empêchent l’ennemi de passer là où l’on a décidé qu’il ne passerait pas, mais il n’en a cure et prend un autre chemin. Ce fut Sedan en 1940, le Bataclan le 13 novembre - comme le chef d’état-major de l’armée de terre l’a lui-même reconnu.  C’est, après Bamako, Ouagadougou aujourd’hui. 
Les discours d’autosatisfaction, tel que celui prononcé par François Hollande jeudi à l’occasion de ses vœux aux armées, ne sont plus à la hauteur de la situation militaire à laquelle nos armées font face. Trois ans après la guerre victorieuse au Mali, l’ennemi s’est adapté : toute la question est désormais de savoir comment nous allons nous adapter à son adaptation. 
Hôtel Splendid de Ouagadougou : Aqmi revendique l'attaque
 
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Hôtel Splendid de Ouagadougou : Aqmi revendique l'attaque
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