vendredi 24 février 2012


Mossa AG Atter. Chargé de la communication au bureau politique du MNLA

Les Accords d’Alger n’ont jamais été respectés et ne servent que les intérêts de l’Etat malien

EL Watan/Algerie
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le 24.02.12 | 01h00 2 réactions

Depuis le 17 janvier, exit les Accords d’Alger. Les combats ont repris au Nord-Mali entre rebelles touareg et militaires maliens. El Watan Week-end a donné la parole aux deux camps.

-Aujourd’hui, que demande le Mouvement de la libération de l’Azawad?
D’abord, le MNLA n’est pas une rébellion, ni un groupe armé. C’est un mouvement révolutionnaire qui œuvre pour la libération des régions nord du Mali, que nous appelons Azawad. Le mouvement revendique le droit d’autogestion, le droit politique et le droit aux populations autochtones vivant sur ce territoire de décider pour elles-mêmes et par elles-mêmes. Aujourd’hui, suite à toutes les frustrations et toutes les déceptions nées des relations malsaines avec le Mali depuis des années, il est impératif de devenir indépendants et de s’octroyer le droit de s’autogérer. Je précise que les Touareg des Etats voisins ne sont pas concernés et que nous ne revendiquons aucun centimètre d’un autre pays.
-Le MNLA dispose de sa propre organisation militaire…
Le MNLA, de par son côté révolutionnaire, a deux organes essentiels : le bureau politique et l’état-major militaire. Le premier décide des combats actuels et oriente la lutte, discute avec les différents partenaires et établit les règles. Le second exécute les actions sur le terrain et la lutte de libération. La composante militaire au sein du MNLA se justifie par le fait que nous avons usé de tous les moyens pacifiques. Nous avons tendu la main à l’Etat malien, nous avons également demandé la reconnaissance du MNLA afin de poursuivre le dialogue et trouver des solutions plausibles à ce problème politique. L’Etat malien, lui, a répondu par la voix des armes, et a mobilisé son arsenal militaire composé de blindés et de ses hommes pour envahir l’Azawad.
-Le MNLA est-il devenu radical ?
Le mouvement n’est pas du tout radical, mais les luttes évoluent en fonction de l’évolution du monde et des situations. Le concept même de l’Azawad a évolué depuis les années 1990, les revendications du peuple également. C’est pourquoi, notre stratégie a plus ou moins changé. L’émergence d’une génération instruite a contribué à porter la parole du mouvement. Nous avons également renforcé notre défense en nous armant mieux pour faire face à un armement malien moderne. Il faut savoir que le Mali a longtemps préparé cette guerre, pendant que ses partenaires et les puissances internationales lui fournissaient des armes pour combattre. Mais le Mali n’a jamais utilisé ses armes pour la lutte contre le terrorisme : il les a emmagasinées dans les casernes militaires au nord, pour préparer la guerre contre les populations de l’Azawad.
-Les Accords d’Alger sont-ils dépassés ?
Le MNLA ne reconnaît aucun accord. La revendication est claire et aucun de ces accords ne prend en considération la libération de l’Azawad. De ce fait, nous ne prendrons pas part à ces accords caducs qui ne servent que les intérêts de l’Etat malien. De toute façon, ils n’ont jamais été respectés et, dans ces circonstances, ils ne représentent que l’ombre d’eux-mêmes.

-L’Algérie a joué un rôle important dans ce conflit…
Nous partageons une histoire commune avec l’Algérie. De 1963 à aujourd’hui, le peuple de l’Azawad s’est toujours retrouvé en exil suite aux politiques ségrégationnistes et marginalistes de l’Etat malien. Votre pays a depuis toujours accueilli ces populations. Personne n’ignore que l’Algérie est une puissance qui doit assumer son rôle dans cette région, et nous pensons qu’elle peut faire beaucoup dans la résolution de ce conflit qui n’a que trop duré. Nous espérons que l’Algérie use de toute son influence pour faire entendre raison au Mali à travers une discussion politique franche.
-L’amalgame est souvent fait entre MNLA et AQMI, non ?
Si cette confusion existe, c’est parce qu’elle a été encouragée par le Mali et les médias occidentaux, qui ne sont pas forcément au courant de la réalité du terrain. Ceci étant, il est impensable de nous comparer à AQMI. Le MNLA ne partage aucune logique ni politique avec cette organisation terroriste. La vérité ? Tant que le Mali occupe notre territoire, AQMI fait de même.
-Pensez-vous qu’AQMI est un instrument d’Etat ?
AQMI a été expressément installée par le Mali pour entretenir l’amalgame et la confusion. Avant les attaques du 17 janvier, des camps d’AQMI se trouvaient à moins de deux kilomètres des régions nord. Des militaires au sein de l’armée malienne ont reçu des ordres de ne pas déranger AQMI. Il y a quelques jours, le MNLA, à travers son état-major, a intercepté des trafiquants de drogue. On ne peut pas accepter que notre territoire soit utilisé pour les sales besognes. Le Mali a encouragé la présence d’AQMI, car des personnalités haut placées sont impliquées dans le trafic de drogue et les prises d’otages. Il y a complicité, sinon comment un avion chargé de drogue pourrait-il atterrir près de la tour de contrôle de Gao sans être intercepté ?

-Jusqu’où est prêt à aller le MNLA ?
Nous ne privilégions certainement pas la guerre. Nous sommes ouverts à toutes les propositions. Si demain l’Etat malien accepte de regarder les choses en face, accepte que le combat actuel est légitime, et admet que le besoin d’un choix politique différent est un droit, nous sommes prêts à arrêter cette guerre. Tant que le Mali s’obstine à nous combattre militairement, nous continuerons à nous défendre militairement aussi. Notre objectif est clair, nous voulons la libération de l’Azawad. Et pour cela, nous mènerons le combat sur tous les fronts.

Plus de 25 000 Maliens se sont réfugiés au Niger voisin pour fuir les combats, a annoncé hier le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), dans son bulletin humanitaire publié   à Niamey. Lundi, le Burkina Faso, autre voisin du Mali, avait annoncé officiellement abriter quelque 12 000 Maliens sur son territoire, déplorant «leurs conditions de vie précaires».  Selon la Croix-Rouge internationale, au moins 60 000 personnes sont déplacées à l’intérieur du Mali à cause des combats dans le nord du pays.                                                              
Faten Hayed

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