samedi 15 octobre 2011


Le retour des combattants touaregs provoque des tensions dans le nord du Mali

2011-10-10
Le retour des combattants de Libye alimente les craintes d'une reprise des conflits entre les rebelles touaregs et le gouvernement malien.
Par Jemal Oumar pour Magharebia à Nouakchott – 10/10/11
[Reuters/Luc Gnago] Certains combattants touaregs du Mali tentent de reprendre les activités de l'ancien leader rebelle décédé Ibrahim Ag Bahanga, expliquent les spécialistes de la sécurité.
[Reuters/Luc Gnago] Certains combattants touaregs du Mali tentent de reprendre les activités de l'ancien leader rebelle décédé Ibrahim Ag Bahanga, expliquent les spécialistes de la sécurité.
Un groupe de combattants touaregs a attaqué la semaine dernière des installations du gouvernement dans la province malienne de Kidal, réputée paisible, alimentant des craintes d'un retour de la rébellion. Ces combattants ont incendié des véhicules et détruit de grandes quantités de ciment, a précisé l'agence ANI.
"Il s'agit de la première attaque militaire lancée par des Touaregs depuis la mort de leur leaderIbrahim Ag Bahanga", a expliqué Sayed Ahmed Ould Abdul Qadir, spécialiste de la région d'Azaouad, qui s'étend sur le nord du Mali, le sud de l'Algérie et le Niger.
Dans la province septentrionale de Gao, trois responsables touaregs ont annoncé leur défection de l'armée. Ils étaient jusqu'à présent membres du Front populaire pour la libération d'Azaouad, un mouvement rebelle qui avait signé un accord de paix avec le gouvernement en 1992 et avait été intégré dans l'armée.
"Les habitants de Gao vivent désormais dans la crainte du retour des années de plomb et des conflits armés. Certains ont expliqué avoir été harcelés par l'armée et la gendarmerie maliennes après l'arrestation d'un leader tribal", a expliqué Hassan Tiffi, un habitant de Tombouctou, à Magharebia. "Les autorités en charge de la sécurité ont soumis toutes les personnes quittant ou entrant dans la ville à des fouilles intensives."
Selon Abdel Hamid al-Ansari, un professionnel des médias, ces défections sont intervenues après l'échec des négociations entre les dignitaires de la région et le Président malien Amadou Toumani Touré.
"Le Président malien a rejeté leurs demandes, ce qui a poussé ces officiers de l'armée à faire immédiatement défection", a-t-il ajouté. Ces officiers sont stationnés à quelque 300 kilomètres à l'est de Gao, à proximité de la frontière nigérienne, a précisé al-Ansari.
"Ces défections ont quelque chose à voir avec la demande des Touaregs en faveur de l'autonomie de la région", a expliqué à Magharebia le politologue al-Moukhtar al-Salem. "C'est à la fois une revendication ancienne et récente, qui s'intensifie ou s'affaiblit au gré des circonstances internationales et des alliances régionales."
Ces tensions ont éclaté il y a deux mois, après que le gouvernement eut annoncé un projet de développement pour les provinces du nord, dans le cadre de son initiative visant à faciliter l'intégration des populations marginalisées et à calmer les Touaregs qui étaient entrés en rébellion contre le Mali à la fin des années 1990.
Selon al-Salem, ce programme "ne portera aucun fruit tant que les relations entre les Touaregs et le gouvernement malien seront fondées sur la défiance". Ce conflit qui couve depuis longtemps a refait surface après la chute de Moammar Kadhafi, qui était considéré comme un "allié stratégique" des Touaregs, a ajouté cet expert.
"Le monde a pris conscience du fait qu'il s'agit d'un conflit régional qui remonte aux années 1960, et qu'il ne pourra être résolu à moins que l'Algérie ne prenne une part sérieuse à sa résolution", a-t-il poursuivi. "Et il n'est pas moins dangereux que la présence d'al-Qaida dans la région."
"La défection de ces officiers, avec leurs divisions et leurs unités, intervient à un moment où la région de Kidal, dans l'extrême nord du Mali, est le théâtre de mouvements inhabituels des combattants touaregs pro-Bahanga qui reviennent de Libye", a ajouté Ould Abdul.
Ag Bahanga était connu comme l'un des rebelles touaregs les plus radicaux, qui n'avait jamais accepté de signer l'accord d'Alger de 2006 entre le gouvernement malien et les combattants touaregs. Il est mort début septembre dans des circonstances qui n'ont jamais été élucidées. Selon Ould Abdul Qadir, ses partisans tentent maintenant de rallumer la rébellion.
Pour sa part, le site web mauritanien Aray Almostenir a indiqué qu'un nombre croissant de Mauritaniens armés et de Touaregs maliens qui avaient combattu dans les brigades de Kadhafi franchissent maintenant les frontières du Mali et constituent des groupes armés dans la région.
Leurs opérations militaires restent encore cantonnées dans le nord du Mali, selon ce site. "Certains combattants de retour de Libye ont rejoint le reste des forces d'Ag Bahanga", a indiqué Aray Almonestir. "Par ailleurs, un autre groupe s'est rendu sur la frontière mauritano-malienne pour tenter de former une force indépendante. Mais certains de ces Mauritaniens cachent leurs armes ou les vendent dans le nord du Mali, et s'infiltrent en Mauritanie déguisés en civils, créant de nouveaux problèmes pour la sécurité."

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